Superpuissance émergente
Une superpuissance émergente est un État ou une entité supranationale montrant le potentiel de devenir une superpuissance dans un avenir plus ou moins lointain.
Les États-Unis sont actuellement considérés comme la seule superpuissance - un terme employé par Zbigniew Brzezinski pour décrire un État avec une très forte influence sur le reste du monde, notamment dans les domaines d'influence que sont l'économie, le militaire, la technologie et le culturel[1]. Les États-Unis ont même été qualifiés d'hyperpuissance, par l’ancien ministre des Affaires étrangères (1997-2002) Hubert Védrine, en 1999[2].
Cependant, le déclin américain est sans cesse annoncé depuis la crise du dollar en 1971, l'échec du Viêt Nam (1975), la crise iranienne (1979) ou encore avec l'apparition de l'ouvrage de Paul Kennedy, Naissance et déclin des grandes puissances, en 1987 laissant entrevoir la disparition d'un monde unipolaire pour laisser place à celui d'une multipolarité[3] avec des puissances régionales, qui ont vocation ou non à devenir des puissances mondiales, comme de l'Union européenne ou encore du Japon, le retour de la Russie, l'émergence des trois géants que sont le Brésil, l’Inde et la Chine, cette dernière étant considérée comme étant plus proche d'avoir le statut de superpuissance que les autres[4].
Les superpuissances émergentes
Plusieurs analystes prédisent l'émergence de pays ou organisations qui peuvent devenir des superpuissances dans les prochaines années. Tous ces pays ou organisations ont actuellement un impact important à l'échelle d'un continent, voire dans certains cas à l'échelle de la planète. On peut citer notamment :
Chine
La République populaire de Chine dispose aujourd'hui de l'une des plus fortes croissances économiques au monde. Elle a également la plus importante population au monde (plus de 1,3 milliard d'habitants en 2009), la plus grande armée (en nombre d'hommes) et dispose également de l'arme nucléaire depuis 1964. La Chine est membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies : ce qui lui confère une influence diplomatique très importante à l'échelle de la planète. Il s'agit actuellement de la deuxième puissance économique du monde, ayant dépassé le Japon au deuxième trimestre de l'année 2010[9]. Elle est une des trois puissances à avoir envoyé par ses propres moyens des hommes dans l'espace.
De plus en plus d'observateurs américains considèrent la Chine comme étant déjà une superpuissance ou à un niveau très proche d'une superpuissance[10],[11],[12]. La Chine est sur la période 1996-2013 le second producteur au monde de publications scientifiques (après les États-Unis), cependant le volume de citations scientifiques ne suit pas à la même vitesse[13].
Japon
Troisième économie mondiale à partir de 2010, le Japon avait connu après la 2e Guerre Mondiale, une période de boom économique qu'on a appelé le miracle économique japonais. Devenu 2e puissance mondiale dans les années 1980, on le voyait déjà devenir première puissance mondiale (comme la Chine aujourd'hui). Mais c'était sans compter l'explosion de la bulle spéculative dans les années 1990, qui avait fait entrer le Japon dans pratiquement deux décennies de stagnation économique. Cependant, les industriels japonais qui ont misé et le font toujours sur la recherche et développement maitrisent le marché des technologies de demain (comme la robotique, les véhicules hybrides...). De même, pratiquement tous les produits haute technologie ou électroménagers nécessitent des composants exclusivement produits par les Japonais (ainsi les technologies Apple sont à 1/3 japonais)[réf. nécessaire]. Le Japon est également de loin le pays qui produit le plus de brevets chaque année[réf. nécessaire]. Sur le plan militaire, depuis la période du premier ministre japonais Jun'ichirō Koizumi et la révision de l'article 9 de la Constitution qui interdisait au Japon d'avoir une armée, le Japon a pu officiellement se doter d'une armée d'auto défense (la Jieitai), très professionnalisée et moderne. Une armée qui est d'ailleurs en pleine expansion afin de contrer l'ascension militaire de la Chine aux côtés des États-Unis. La force maritime d'autodéfense est d'ailleurs une marine militaire de second plan, qui depuis 10 ans monte très rapidement en puissance. Sur le plan culturel, le récent phénomène du Cool Japan répandu aujourd'hui à travers le monde et le plus grand intérêt pour les drama (surtout en Amérique Latine et en Asie et à une certaine échelle en Occident) et la J-pop sont des preuves de l'ascension fulgurante du Japon. Ascension que l'on retrouve également en peinture (émergence de jeunes peintres japonais, issus de la période du marasme économique, innovateurs), en couture (émergence de marques de mode japonaise de qualité), en architecture, en littérature (les romans de Haruki Murakami et bien d'autres) ou encore au cinéma (Takeshi Kitano, Hayao Miyazaki, Kinji Fukasaku, Hideo Nakata).
Inde
Tout comme la Chine, l'Inde est considérée par certains comme ayant le potentiel de devenir à plus ou moins long terme la prochaine superpuissance. L'Inde a la seconde population du monde, dispose de l'arme nucléaire et a une économie très active.
Cependant, l'Inde doit surmonter un certain nombre de difficultés afin de pouvoir prétendre au statut de superpuissance [14],[15],[16],[17],[18]:
- Instabilité religieuse (système de castes, terrorisme…)
- Instabilité sociale (rébellion naxalite, insurrection au Jammu-et-Cachemire…)
- Surpopulation (ressources insuffisantes…)
- Pauvreté
- Corruption
- Problèmes d’infrastructures
- Écart croissant entre les riches et les pauvres
- Dégradation environnementale
- Fragmentation politique
- Disputes territoriales
- Pays voisins instables
Russie
La Russie est le plus grand pays au monde. Elle est membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Elle possède également d'immenses ressources naturelles (gaz, pétrole). Elle possède le plus vaste arsenal nucléaire au monde avec plus de 16 000 têtes nucléaires dont 3 500 sont opérationnelles. Au cours de son histoire, l’URSS aura produit quelque 50 000 têtes nucléaires. Son économie est classée en douzième position, en 2016, selon les statistiques du FMI[19].
Union européenne
Se contentant d’additionner les qualités et les capacités de chaque État membre de l'Union européenne, universitaires et politiciens considèrent cette union comme une superpuissance potentielle. Ainsi, alors que certains analystes, tel que Jolyon Howorth (en), qualifieront l'Union européenne d'« acteur international »[20], d'autres, comme Asle Toje (en), considèreront qu'elle a les attributs d'une petite puissance[21].
Du point de vue démographique, certains des pays membres de l'Union européenne (en particulier l'Allemagne et l'Italie) accusent une baisse et un vieillissement de leur population, tandis que certains autres, comme la France ou l'Irlande, conservent une démographie dynamique, parvenant à renouveler leur population avec un solde naturel positif[22]. Pris dans son ensemble, le taux de croissance de la population est l'un des plus faibles du monde mais c'est aussi dans l'UE que les habitants vivent le plus longtemps (mis à part dans quelques régions d'Asie : Japon, Singapour et Hong Kong).
Notes et références
- Zbigniew Brzezinski, The Grand Chessboard : American Primacy and Its Geostrategic Imperatives (Trad. Le Grand Échiquier : l'Amérique et le reste du monde publié, chez Bayard), Basic Books, , « Aucune puissance ne peut prétendre rivaliser [avec les États-Unis] dans les quatre domaines clés — militaire, économique, technologique et culturel — qui font une puissance globale ».
- Hubert Védrine, L'hyperpuissance américaine, Fondation Jean Jaurès, 2000. Ainsi que Olivier Fraysse, Les États-Unis, hyperpuissance, La Documentation française, coll. Problèmes politiques et sociaux, 2000 ; Gérard Dorel, Atlas de l’empire américain. États-Unis : géostratégie de l’hyperpuissance, Autrement, 2006 ; Josef Josse, Überpower : The Imperial Temptation of America, W. W. Norton, 2006.
- Voir par exemple, Bertrand Badie, L'impuissance de la puissance. Essai sur les nouvelles relations internationales, Fayard, 2004.
- Sebastian Santander (sous la dir.), L’émergence de nouvelles puissances : vers un système multipolaire ? Afrique du Sud, Brésil, Chine, Inde, Mexique, Russie, France, Ellipses, , 249 p. (ISBN 978-2-7298-5022-7).
- (en) « Asian Superpower », Cable News Network, (consulté le )
- (en) Anand Giridharadas, « India welcomed as new sort of superpower », The New York Times, (consulté le )
- (en) Simon Hooper, « Russia: A superpower rises again », Cable News Network, (consulté le )
- John McCormick, The European Superpower
- La Chine, deuxième puissance économique mondiale
- With Eye On Domestic Politics, Superpowers Meet
- The Stalemate Summit
- Yes, China Has Fully Arrived As A Superpower
- (en) « Is China really becoming a science and technology superpower? », sur http://namesorts.com/, (consulté le )
- (en) 10 reasons why India will not become a superpower
- L'Inde, une superpuissance… en apparence
- Inde, ce géant encore fragile (1)
- Inde, ce géant encore fragile (2)
- "L'Inde ne devrait pas aspirer à devenir une superpuissance"
- « World Economic Outlook Database » sur le site www.imf.org
- Howorth 2011, p. 455
- Toje 2010, p. 43
- [PDF] Perspectives démographiques mondiales - La Révision de 2004, données de l'ONU.
Bibliographie
- Pays émergents, quelles leçons pour l'Europe ?, Politique, revue de débats, Bruxelles, n°58, .
- (en) Asle Toje, « The European Union as a Small Power », Journal of Common Market Studies, vol. 49, no 1, , p. 43-60.
- (en) Jolyon Howorth, « The EU as a Global Actor: Grand Strategy for a Global Grand Bargain? », Journal of Common Market Studies, vol. 49, no 3, , p. 455-474.
Articles connexes
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