Étourneau de Mozart

L'étourneau de Mozart est un étourneau sansonnet que Wolfgang Amadeus Mozart a possédé comme animal de compagnie pendant trois ans[1]. Il est connu par la mention d'une anecdote musicale concernant son achat, par le cérémonial qui a entouré son enterrement, et comme spécimen de l'affection particulière que le compositeur portait aux oiseaux[2].

Étourneau de Mozart
Informations
Espèce
Date de décès
Propriétaire
Étourneau sansonnet, Sturnus vulgaris.

Apparition de l'oiseau dans la vie de Mozart

La première mention de l'étourneau apparaît dans une note que Mozart a écrite dans son livre de comptes[3] lorsqu'il l'a acheté le [4] :

Étourneau. 34 kreutzer.

C'est magnifique ![5]

La musique que Mozart a notée en dessous du prix de l'oiseau est proche du thème initial du troisième mouvement de son Concerto pour piano no 17 en sol majeur, K. 453, terminé quelques semaines avant (le ). Il est possible que Mozart ait appris à l'oiseau à chanter cette mélodie dans la boutique où il l'a acheté[6].

Suivant la transcription de Mozart, l'étourneau a introduit un point d'orgue sur le dernier temps de la première mesure et a chanté un sol dièse au lieu d'un sol naturel dans la mesure suivante[7].

Introduction du troisième mouvement, Allegretto :

Mozart ne s'est probablement pas trompé quand il a fait la transcription car les étourneaux ont des facilités pour imiter une voix ou une mélodie[8],[9].

Disparition de l'oiseau

L'étourneau a vécu dans la maison du compositeur comme animal de compagnie pendant trois ans et est mort le [10]. Mozart a enterré l'oiseau dans le jardin avec tout un cérémonial (comme les biographes contemporains l'ont noté). Les notes prises par Georg Nikolaus von Nissen (le second mari de la femme de Mozart, Constance) pour écrire sa biographie du compositeur, décrivent la cérémonie ainsi[11] :

« Quand l'oiseau est mort, il a organisé un cortège funèbre, dans lequel tous ceux qui pouvaient chanter devaient se joindre à lui, en étant voilés - il a fait une sorte de requiem et une épitaphe en vers. »

Le même événement est décrit par Franz Xaver Niemetschek (en), qui avait également interviewé Constance :

« Il a souvent écrit des vers, la plupart du temps, seulement d'un genre humoristique. Ce fut le cas, entre autres, à la mort d'un étourneau très aimé, pour lequel il avait installé une pierre tombale dans son jardin, et sur laquelle il avait écrit une inscription. Il aimait beaucoup les animaux et, en particulier les oiseaux[12]. »

Vers de Mozart[7] :

Hier ruht ein lieber Narr,
Ein Vogel Staar.
Noch in den besten Jahren
musst er erfahren
Des Todes bittern Schmerz.
Mir blut't das Herz
Wenn ich daran gedenken.
O Leserǃ schenke
Auch du ein Thränchen ihm.
Er war nicht schlimm;
Nur war er etwas munter,
Doch auch mitunter
Ein lieber loser Schalk,
Und drum kein Dalk.
Ich wett', er ist schon oben,
Um mich zu loben
Für diesen Freundschaftsdienst
Ohne Gewinnst.
Dann wie er unvermuthet
Sich hat verblutet,
Dacht er nicht an den Mann,
Der so schön reimen kann.

Ici repose un cher innocent,
un oiseau étourneau.
Encore dans ses tendres années
Il a dû affronter
L'amère douleur de la mort.
Mon cœur saigne
Lorsque je pense à lui,
Oh lecteur! Verse
Aussi une petite larme pour lui.
Il n'était pas méchant,
Parfois un peu trop allègre
Et, parfois aussi de temps en temps,
Un cher et agaçant espiègle,
Mais pourtant pas un chenapan.
Je parie qu'il est déjà là haut
pour me remercier,
De ce service d'ami
Sans but lucratif.
Car comme à l'improviste
il a pris son envol,
Il n'a pas pensé à l'homme
Qui peut rimer si joliment.
4 juin 1787.

Aux oreilles des chercheurs Meredith J. West et Andrew P. King, la pièce humoristique Une plaisanterie musicale, composée par Mozart en cette période, porte un autographe vocal d'étourneau[7], thèse également reprise par l'autrice Lyanda Lynn Haupt dans son ouvrage Mozart's Starling (L'étourneau de Mozart)[13], paru en 2017[14].

Autres oiseaux

L'étourneau de Mozart acquis en 1784 n'était pas le seul oiseau dont il aimait la compagnie.

À l'âge de quatorze ans, Mozart a écrit de Naples à sa sœur Nannerl à Salzbourg (), alors qu'il était en voyage avec son père Léopold:

« Écris-moi, comment va M. Canari ? Est-ce qu'il chante encore ? Est-ce qu'il joue encore ? Savez-vous pourquoi je pense au canari ? Parce qu'il y en a un dans notre antichambre qui fait les mêmes petits sons que le nôtre[15]. »

Plus tard, une lettre, écrite par Nannerl à sa mère à Salzbourg alors qu'elle visitait Munich en 1775 avec Wolfgang et Leopold, indique d'autres oiseaux dans la maison d'enfance de Mozart:

« Dieu merci, nous allons très bien. J'espère que maman aussi va très bien. À propos, est-ce que les canaris, les mésanges, et le rouge-gorge familier sont toujours vivants, ou avez-vous laissé les oiseaux mourir de faim[16] ? »

Le biographe de Mozart, Hermann Abert, rapporte un triste récit datant de 1791 au sujet d'un autre canari qui aurait succédé à l'étourneau, étant dans la famille de Mozart quand le compositeur était allongé sur son lit de mort.

« Ce fut avec beaucoup de réticences qu'il accepta de faire transporter son canari domestique, d'abord dans la pièce voisine, puis encore plus loin, parce qu'il ne pouvait plus supporter le son de son chant[17]. »

Notes et références

  1. Amandine Meunier, « L’oiseau de Mozart », sur Books, (consulté le )
  2. Pierre Gingras, Secrets d'oiseaux, Éditeur Le Jour, 1995, 179 p., extrait cité sur ecrimagine.
  3. Le livre de comptes fait partie d'une nouvelle organisation personnelle que Mozart a mise en place en février 1784. Au même moment, il a commencé un catalogue de chacune des œuvres qu'il avait terminées. Le livre de comptes a été tenu à jour pendant seulement un an, alors que le catalogue des œuvres a été poursuivi jusqu'à sa mort en 1791 et est très utile aujourd'hui aux musicologues. Pour plus de détails : Abert (2004), p. 727–728.
  4. (en) Elena Passarello, Animals Strike Curious Poses, Sarabande Books, , 200 p. (ISBN 978-1-941411-40-7, lire en ligne)
  5. Le texte allemand originel : « Vogel Stahrl 34 Kr. ... Das war schön! ».
  6. Pour d'autres théories expliquant pourquoi l'oiseau chante le concerto de Mozart, voir le chapitre 6 de Haupt (2017).
  7. Meredith J. West et Andrew P. King, « Mozart's Starling », American Scientist, vol. 78, no 2, , p. 106–114 (ISSN 0003-0996, lire en ligne, consulté le )
  8. Voir West et King (1990).
  9. @NatGeoFrance, « L’incroyable intelligence des oiseaux », sur National Geographic, (consulté le )
  10. Deutsch (1965) p. 225.
  11. Georg Nikolaus von Nissen, Biographie W. A. Mozarts. Nach Originalbriefen, Sammlungen alles über ihn Geschriebenen, mit vielen neuen Beylagen, Steindrücken, Musikblättern und einem Facsimile (Quatrième édition de l'édition de Leipzig 1828 (ISBN 3-487-04548-6); nouvelle édition : Hildesheim, 1986)
  12. Niemetschek, Franz (1956 ; original écrit en 1798) Life of Mozart, traduction de Helen Mautner. Londres, Leonard Hyman, p. 67.
  13. « Music and Mozart's Starling - RISM », sur www.rism.info (consulté le )
  14. (en) Mozart's Starling, (lire en ligne)
  15. Cité par Friedrich Kerst et Henry Krehbiel (2016) Mozart: The Man and the Artist Revealed in His Own Words. Reprint de Dover Publications.
  16. Traduction en anglais de Emily Anderson (2016) The Letters of Mozart and his Family, new edition updated by Stanley Sadie and Fiona Smart. Springer, p. 263.
  17. Abert, Hermann (2016), p. 1307.

Bibliographie

  • Jean Massin et Brigitte Massin, Mozart, Paris, Fayard, coll. « Les indispensables de la musique », (1re éd. 1959), 1270 p. (ISBN 2-213-00309-2), p. 467.
  • (en) Hermann Abert et Cliff Eisen (notes bas de pages) (trad. Stewart Spencer), W. A. Mozart, New Haven, Yale University Press, .
  • Otto Erich Deutsch, Mozart : A Documentary Biography, Stanford, CA, Stanford University Press, 1965.
  • Daniel Heartz, Haydn, Mozart, and Early Beethoven, New York, Norton, 2009.
  • Robert Spaethling, Mozart's Letters ; Mozart's Life, New York, Norton, 2000.
  • Meredith J. West et Andrew P. King, « Mozart's Starling », American Scientist, vol. 78, no 2, 1990, pp. 106–114 (lire en ligne).
  • Lyanda Lynn Haupt, Mozart's Starling, Little, Brown and Company, 2017.
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