Abbaye de Saint-Sever-de-Rustan

L’Abbaye de Saint-Sever-de-Rustan est un monastère bénédictin situé à Saint-Sever-de-Rustan (Hautes-Pyrénées) en France.

Pour les articles homonymes, voir Saint-Sever (homonymie).

Abbaye de Saint-Sever-de-Rustan
Présentation
Culte Catholique romain
Type Abbaye (ancienne)
Fin des travaux reconstruite au XVIIIe siècle
Protection  Classé MH (1914, 1991)
 Inscrit MH (1999)
Géographie
Pays France
Région Occitanie
Département Hautes-Pyrénées
Ville Saint-Sever-de-Rustan
Coordonnées 43° 21′ 07″ nord, 0° 13′ 31″ est[1]
Géolocalisation sur la carte : France
Géolocalisation sur la carte : Hautes-Pyrénées

Histoire

Statuette de saint Sever

Severus (saint Sever), († vers 502), à ne pas confondre avec Severus, évangélisateur des pays de l’Adour, était un grand propriétaire issu de famille noble, prêtre d'une paroisse de Bigorre dont Grégoire de Tours louait le soin porté à faire l’aumône et la charité. Il est sanctifié et ses reliques sont apportées dans l'église de Rustan qui changea de nom à la suite de cette déposition de reliques[2].

Son tombeau, sur lequel sont prodigués des miracles, attire de nombreux pèlerins et un monastère est fondé à une date incertaine autour de l’an 800[3] par des moines bénédictins.

Cette église fut détruite au temps de Charlemagne ou de Louis le Pieux et, après une première restauration, de nouveau ravagée par les Normands. La vie monastique n'est réintroduite que par le comte de Gascogne, Guillaume Sanche à la fin du Xe siècle. Vers 1060-1065, les bâtiments monastiques et l'église sont brûlés. De nouveaux bâtiments sont alors élevés rapidement puisque le maître-autel est consacré en 1072.

L'abbaye est soumise à Saint-Victor de Marseille par un décret du .

En 1297, une bastide est installée à proximité.

L'abbaye fut à cette époque l'une des plus puissantes du Sud-Ouest. Elle étendait ses possessions dans les diocèses d'Aire-sur-Adour, de Dax, d'Agen et de Bordeaux.

Après cette période de prospérité de deux siècles, l'abbaye connut une période sombre : au cours des guerres incessantes que se livrèrent Anglais et Français pour le contrôle de la Gascogne, les troupes françaises occupèrent Saint-Sever en 1295 après un siège de trois mois, puis en 1360 et en 1435. Cette dernière occupation par les troupes royales de Charles VII vit l'incendie de l'abbaye. Durant cette période de trois siècles marquée par la guerre, l'abbaye souffrit aussi de la nature : en 1372, elle subit les conséquences d'un tremblement de terre.

Pendant les guerres de Religion, vers 1569-1570, une bande de huguenots aux ordres du comte de Montgomery, s'installa pendant onze mois dans l'abbaye : le trésor fut pillé, l'église vandalisée, quelques voûtes du sanctuaire s'effondrèrent. L'abbaye fut alors dirigée par des abbés commendataires : par exemple Jean de Bertier, né à Toulouse en 1556, issu d'une puissante famille parlementaire, chanoine et archidiacre de Toulouse, fut abbé commendataire de Saint-Pierre de Mas-Garnier[4], de Saint-Sever de Rustan, de Saint-Vincent de Senlis et de l'Abbaye Notre-Dame de Lieu-Restauré, et évêque de Rieux entre 1602 et sa mort survenue en 1620. Il est aussi attesté comme prieur de Saint-Tutuarn en 1605[5].

À la suite du Concile de Trente, l'abbaye passe à la Congrégation des Exempts puis, à la suite de l'interdiction de celle-ci, l'abbé Guillaume de Richard en fait une abbaye mauriste par contrat le .

Restaurée par les moines à la fin du XVIe siècle et remaniée au XVIIIe siècle, l’abbaye devient bien national le . À ce titre, elle est vendue en 1792 à la famille Mérens qui, une fois la Révolution passée, transforme son nom en de Mérens et appelle l'abbaye « le château ».

En 1815, l'orgue de l'abbaye est attribué à la paroisse de l'église Saint-Jean de Tarbes, sur décision du ministre de l'intérieur. Face à l'hostilité des habitants du village, le préfet des Hautes-Pyrénées aura recours à la force : le , il envoie 500 soldats et deux pièces d'artillerie sous la conduite du général de Lintihiac, qui commande alors la place de Tarbes.

En 1890, le cloître de l’abbaye, sur le point d’être vendu à des marchands d’antiquités, est acheté par la ville de Tarbes et transporté dans le Jardin Massey.

L’abbaye est classée à l’inventaire des monuments historiques. Ce classement concerne « l'église, la sacristie et l'ensemble des monuments abbatiaux » en 1914, l'aile des moines et le cloître en 1991, et une inscription pour la ferme en 1999[6].

En 1938, l'obtention d'une subvention permet de remettre à neuf les toitures du pavillon central et de l'église.

Le , les toitures de l'aile nord de l'abbaye s'écroulent. Elles ne font pas partie du classement et resteront donc à l'état de ruine.

Architecture

Façade classique du Pavillon des Hôtes
Façade percée d'un portail roman menant à l'église

L’architecture dépareillée de l’abbaye donne la mesure de l’histoire mouvementée de la région. Le lieu a en effet connu cinq campagnes de restauration d'envergure, aux Xe siècle, XIIe siècle, XVe siècle, XVIe siècle et XVIIIe siècle. Le plan général date du XVIIIe siècle, le pavillon central de l’abbaye est couvert à la manière Mansart.

L'église abbatiale

L'abbatiale de Saint-Sever est un parfait exemple du style d'architecture qu'ont développé les Bénédictins dans le Sud-Ouest de la France et plus particulièrement en Bigorre. Ce style caractérise aussi les abbatiales de Saint-Savin-en-Lavedan ou de Saint-Orens.

Ces édifices ont en commun d'avoir en arrière d'une nef unique relativement courte, un transept très développé sur lequel s'ouvrent trois absides en échelon.

Extérieur

Avec ses sept absides parallèles et échelonnées, l'église abbatiale de Saint-Sever offre le développement le plus ample du style bénédictin. Elle comporte une élévation complexe, fruit de l'histoire mouvementée de l'abbaye et de ses diverses restaurations plus ou moins heureuses.

Les parties hautes du clocher datent de 1930.

Le portail a été restauré au XIXe siècle. Les deux chapiteaux de marbre proviennent de Morlanne. Les voussures et les pieds-droits ont été restaurés maladroitement au XXe siècle. Le seul élément authentique est le tympan avec son Christ en majesté encadré par un chérubin et un séraphin et par deux animaux couchés (difficiles à définir, compte tenu des mutilations des sculptures). À une extrémité, Saint Michel foulant un démon à ses pieds et le frappant de sa lance ; de l'autre, un ange enveloppe de son bras les épaules d'un personnage prosterné devant l'image de gloire.

Intérieur

Le plan de l'édifice est une croix latine, avec une nef unique séparée du chœur par le transept. La nef comporte quatre travées. La plus ancienne est de style roman, voûtée en coupole, la deuxième date du XVIe siècle, les deux dernières ont été refaites au XVIIIe siècle. La longueur totale du vaisseau est de 40 m, la largeur de la nef est de m et sa longueur jusqu'au transept est de 25,5 m. La hauteur des voûtes sous la coupole est de 16 m. L'épaisseur de la voûte sous la coupole est de 1,3 m.

Le triforium visible à l'heure actuelle a été construit en 1900.

On peut voir quelques chapiteaux historiés dans la nef : par exemple, le Christ en majesté dans une mandorle tenue par deux anges ; ou des oiseaux affrontés aux angles tenant dans leurs serres de petites têtes d'animaux ; ou le châtiment du péché originel ; ou Daniel au milieu de lions ; ou une scène de chasse avec un personnage émergeant des feuillages entre des lions et des chiens ; ou un personnage se dressant entre deux aigles dont il étreint le cou ; ou quatre personnages accroupis ou agenouillés aidant quatre autres personnes à se hisser dans des arbres ; ou l'histoire de Saint Jean-Baptiste racontée sur trois faces : sur la face principale, Hérode et ses convives sont assis à la table d'un banquet tandis que Salomé danse devant eux ; sur la face gauche Saint Jean-Baptiste est agenouillé à l'entrée de sa prison et tend la tête à un soldat qui s'apprête à la trancher ; sur la face de droite, Salomé, conseillée par un diable penché vers elle, remet à sa mère la tête de Saint Jean-Baptiste.

L'escalier monumental

Un escalier monumental du XVIIIe siècle dessert les chambres des moines. Il s'agit d'un ouvrage remarquable car il n'est maintenu que par l'encastrement de ses marches et par les murs de l'édifice : il n'y a pas de piliers de soutien. La cage de l'escalier fait 8,10 × 8,4 m de base pour une hauteur d'une quinzaine de mètres. De grandes fenêtres inondent le lieu de lumière. La rampe de l'escalier était autrefois dorée à l'or fin.

Le cloître

Après le passage des Huguenots en 1573, le cloître, dans un état lamentable, est reconstitué à partir d'éléments architecturaux achetés aux Carmes de Trie-sur-Baïse.

Sur proposition de la société académique des Pyrénées, la ville de Tarbes acquiert le cloître pour la somme de 4 000 francs le . La municipalité de Saint-Sever n'avait en effet pas les moyens d'en assurer la restauration. Le monument est alors transféré dans le Jardin Massey.

Galerie d'images

Bibliographie

  • Xavier de Cardaillac, Le Cloitre de Saint-Sever de Rustan : Étude sur l'habillement et l'armement en Bigorre au XVe siècle, Toulouse, Edouard Privat, , 98 p. (lire en ligne)
  • Abbé Louis Péman, L’abbaye de Saint-Sever-de-Rustan, éd. Les éditions pyrénéennes, 1982.
  • Abbé Louis Péman, Le cloître du jardin Massey à Tarbes, éd. Les éditions pyrénéennes, 1988.

Notes et références

  1. Source des coordonnées : Géoportail.
  2. « Saint Sever », sur cef.fr (consulté le ).
  3. Peut-être à l'époque carolingienne selon Louis Péman 1982. Certains textes évoquent l'existence d'une première abbaye (peut-être l'église de Severus) qui aurait été détruite à la fin du VIIe siècle par les Sarrasinss.
  4. http://www.mauristes.org/spip.php?article123&PHPSESSID=538bc34ca38b4798533319c335917e32.
  5. Henri Bourde de La Rogerie, Le prieuré de Saint-Tutuarn ou de l'Île Tristan, "Bulletin de la Société archéologique du Finistère", 1905, consultable https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k207673q/f292.image.
  6. « Ancienne abbaye », notice no PA00095417, base Mérimée, ministère français de la Culture.

Voir aussi

Articles connexes

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