Allèle

Un allèle (abréviation d'allélomorphe) est une version variable d'un même gène, c'est-à-dire une forme variée qui peut être distinguée par des variations de sa séquence nucléotidique. Il existe généralement quelques allèles pour chaque gène, mais certains gènes (par exemple ceux du CMH) possèdent plusieurs dizaines d'allèles. Les allèles d'une paire de chromosomes homologues peuvent être identiques, c'est l'homozygotie, ou différents, c'est l'hétérozygotie.

Représentation de l'ADN

C'est ainsi qu'au sein d'une même espèce, le génome d'un individu est différent de celui d'un autre individu, c'est le polymorphisme génétique. Ce polymorphisme est également dû à l'apparition de mutations qui sont des variations de la séquence nucléotidique. Il peut donc exister dans les populations naturelles plusieurs séquences différentes d'ADN pour un même locus.

Exemple

Dans le cas du gène déterminant le groupe sanguin ABO, situé sur le chromosome 9 humain (en 9q34.1-q34.2), l'un des allèles, A, code la présence de la molécule A, un autre, B, la présence de la molécule B, et un troisième allèle O, ne codant pas de molécule active, détermine, chez l'homozygote O/O, le groupe o.

Généralités

Le gène est constitué d'une séquence de nucléotides, fragments unitaires de l'ADN. Cette séquence peut être modifiée d'une manière naturelle et (surtout) aléatoire au niveau d'un ou plusieurs nucléotides, on parle de mutation. Une mutation introduit une variation par rapport à la séquence de départ : la séquence modifiée est un allèle du gène de départ.

Dans une cellule diploïde, il y a deux allèles présents pour chaque gène autosomique, un allèle transmis par chaque parent. Les allèles transmis par les parents peuvent être identiques ou non. Chez l'être humain, chaque gène situé sur un autosome est présent en double exemplaire, l'un provenant du père, l'autre de la mère, dans les cellules dites somatiques qui sont diploïdes (c'est-à-dire toutes les cellules à l'exception des cellules reproductrices ou gamètes, spermatozoïdes et ovocytes). Dans les cellules reproductrices ou gamètes qui sont haploïdes, un seul allèle est présent (loi de Mendel dite de ségrégation ou pureté des gamètes) puisqu'au cours de la méiose il y a eu séparation des deux allèles portés par les deux chromosomes homologues.

En ce qui concerne les chromosomes sexuels X et Y, les gènes ne correspondent pas d'un chromosome à l'autre et ne sont représentés qu'en un exemplaire chez le garçon (XY) et en deux exemplaires chez la fille (XX). D'où, par exemple, une fréquence du daltonisme de 7 % chez l'homme, et de 5/1000 chez la femme (7 % × 7 %) — fréquence génique de la mutation, tous types, protanope ou deutéranope, confondus, de 7 % — un gène normal compensant le gène muté. Idem pour l'hémophilie, liée au chromosome X, transmise par les femmes et touchant quasi exclusivement les hommes (les filles peuvent être atteintes d'hémophilie si leurs deux chromosomes X sont porteurs du gène défaillant, ce qui est statistiquement très rare).

Dans une population, on peut avoir plusieurs allèles d'un gène, représentant plusieurs formes alternatives du même gène.

Si les allèles apportés par chaque parent sont identiques dans leur séquence nucléotidique, l'individu est homozygote pour ce gène. S’ils sont différents, l'individu est hétérozygote. Dans ce dernier cas, deux possibilités sont envisageables quant au phénotype résultant de l'expression du gène. Si l'un des deux allèles s'exprime et l'autre reste « sourd », on dit que le premier est dominant et l'autre récessif. Les allèles dominants sont symbolisés par une lettre majuscule (ou une lettre avec un +), et les récessifs par une lettre minuscule.

Dans une population, un gène peut donc exister sous plusieurs variantes, le locus et la fonction restant constants. On dit qu'un gène est polyallélique ou polymorphe s’il est représenté par plus de deux allèles, ceux-ci étant reconnus en tant que tels s'ils se retrouvent à plus de 1 % dans une population. Voir fréquence allélique.

Relations entre allèles

Chez la poule Wyandotte les deux allèles qui déterminent le caractère de la couleur du plumage s'expriment dans une même proportion. Blanc et noir étant codominants, on obtient un plumage bigarré. En cas de dominance incomplète de ces deux allèles, le plumage aurait été entièrement gris.
  • On parle d'allèles multiples lorsque dans une population, on observe plus de deux allèles pour un même locus.

Pour caractériser les relations entre allèles, on parle :

  • d'allèle récessif pour l'état allélique d'un gène où l'homozygotie est nécessaire pour l'expression du phénotype approprié, au contraire d'un allèle dominant ;
  • d'allèles codominants (codominance) lorsque des allèles s'expriment en même temps et que le phénotype est l'expression conjointe des deux allèles, et que ce phénotype n'est pas le même que les phénotypes associés à l'état homozygote des deux allèles ;
  • un allèle létal est une forme mutante d'un gène, qui entraîne la mort de l'individu à l'état homozygote s'il est récessif ou hétérozygote s'il est dominant. Dans le cas d'un gène létal dominant, il est éliminé lorsqu'il survient (mort de l'individu avant la naissance) et il ne sera donc pas transmis ;
  • un allèle nul est un allèle qui fournit un produit génique non fonctionnel ;
  • dominance incomplète : les caractères ne sont pas tous exclusivement dominants ou récessifs. Dans certains cas, aucun des allèles qui déterminent un caractère n'est dominant. Lorsque c'est le cas, un mélange des deux caractères peut se produire : on parle alors de dominance incomplète. Le mélange apparent des caractères en une expression intermédiaire peut survenir chez les individus hétérozygotes. On trouve des exemples de dominance incomplète chez de nombreuses espèces de plantes, dont le muflier ou le maïs. Heureusement pour Mendel, les caractères qu'il a étudiés chez les plants de pois n’étaient pas sujets à la dominance incomplète. Si cela avait été le cas, il n'aurait probablement jamais été en mesure d'établir les fondements de la génétique[1].

Origine moléculaire des différentes relations entre allèles

Le phénomène de dominance et récessivité s'explique par la fonction même des gènes. En effet, un gène est une portion d'ADN. Après être transcrit en ARN, l'ADN va coder des protéines. Ce sont ces protéines qui vont régir les caractères.

Le fait qu'un allèle soit dominant ou récessif par rapport à un autre peut avoir plusieurs raisons :

  • La première est que l'allèle récessif est souvent dû à une mutation de l'ADN. Les nucléotides qui le codent ne sont pas fonctionnels, et ne vont donc pas produire de protéine, ou alors des protéines non fonctionnelles. C'est alors la protéine produite par l'allèle « sauvage » (l’allèle fonctionnel possédé originellement par l’espèce) qui va avoir une influence sur le caractère en question. Dans ces cas-là, c'est l'absence de protéine qui fait l'expression du gène. On peut prendre l'exemple des albinos, qui n'ont pas de coloration de la peau à cause de l'absence de mélanine, qui n’est donc pas synthétisée.
  • La seconde raison est la quantité de protéine nécessaire pour exprimer le caractère. Lorsque les deux allèles d'un gène sont identiques sur les deux chromosomes homologues, on dit que la quantité de protéine est maximale (100%). Pour les allèles dominants, l'expression du caractère ne nécessite que la moitié de la protéine (50%), alors que pour les allèles récessifs, il faut 100 %.

Les cas plus nuancés de dominance trouvent eux aussi leurs origines dans l'expression moléculaire des gènes. Il faut cependant faire attention à ne pas confondre codominance et dominance incomplète. En effet, on parle de codominance quand les deux allèles s’expriment et produisent un intermédiaire entre les deux, et de dominance incomplète lorsque deux gènes donnent lieu à un phénotype à mi-chemin entre leurs caractéristiques respectives.

  • Dans les cas de codominance, les deux allèles s’expriment tous les deux, et le caractère phénotypique qui en résulte contient les traits portés par chacun des deux allèles. On peut prendre l’exemple du sang par exemple, car lorsqu’on a l’allèle A et l’allèle B, on est AB. Un autre exemple est repris en illustration de cet article : les poules Wyandotte dont la couleur blanc et noir du plumage est due à une codominance entre deux allèles.
  • La dominance incomplète (qui est très rare), c’est lorsque l’un des deux allèles ne produit pas de protéine et donc ne s’exprime pas, et que l’autre allèle n’est pas auto-suffisant, c’est-à-dire que la protéine synthétisée par cet allèle ne suffit pas à l’expression complète du caractère. Ce dernier va donc être exprimé, mais pas de manière totale. Par exemple, une plante qui a l’allèle violet et l’allèle blanc pour la couleur des pétales, comme l'Antirrhinum (ou muflier), sera rose dans le cas d’une dominance incomplète. Dans ce cas, l’allèle blanc est un allèle qui ne produit pas de protéine, il n’y a donc pas de couleur sur les pétales ; et l’allèle violet produit une protéine qui colore les pétales. Lorsque cette dernière est produite à 100%, la couleur violette est intense, lorsque seule la moitié est produite, la couleur est moins forte, et donne une coloration rose aux pétales.

Notes et références

Articles connexes

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