Amblyopie

L’amblyopie est une différence d'acuité visuelle entre les yeux, qui ne peut pourtant pas être expliquée par une lésion organique[1]. Ce trouble semble affecter 2 à 5 % de la population[2]. L'amblyopie est un trouble cortical : la partie du cerveau traitant l'information venant d'un œil ne fonctionne pas de manière optimale[3]. Repérer l'amblyopie au plus tôt chez les enfants permet un traitement plus efficace.

Amblyopie
Traitement
Spécialité Ophtalmologie
Classification et ressources externes
CISP-2 F99
DiseasesDB 503
MedlinePlus 001014
eMedicine 1214603
MeSH D000550
Patient UK Amblyopia

Mise en garde médicale

Étymologie

Ce mot vient du grec ancien ἀμϐλύς / amblús obtus ») et ὄψις / ópsis vue »), « œil obtus » (Plenk, 1788)[4].

Définition et prévalence

L'amblyopie est définie comme une différence inter-oculaire de deux lignes ou plus sur le tableau de Snellen[3],[5], après correction optique maximale. Entre 2 %[2] et 5 %[6] de la population souffre de ce trouble. Au Royaume-Uni, 90 % des rendez-vous de santé visuelle chez l'enfant ont pour cause l'amblyopie[7].

Les différents types d’amblyopie

Ce qu'on appelle couramment amblyopie recouvre principalement l'amblyopie fonctionnelle, qui est liée à un trouble d’apprentissage de la fonction binoculaire[3] : strabisme, anisométropie, amétropie, privation visuelle.

Plus rarement, l'amblyopie peut signifier :

  • une amblyopie organique, une différence inter-oculaire de deux lignes ou plus, liée à une lésion organique curable ou non (défaut de transparence tels que : cataracte congénitale unilatérale, anomalie cornéenne, ptosis par exemple). Ce type n'est pas censé être réversible, alors qu'il existe un traitement de l'amblyopie fonctionnelle, sous certaines conditions ;
  • une amblyopie mixte (organique et fonctionnelle) ;
  • une amblyopie binoculaire, c'est-à-dire, une baisse d'acuité aux deux yeux après correction optique maximale, sans cause organique apparente.

Types fonctionnels d’amblyopie

On distingue deux types d’amblyopie fonctionnelle[3] :

  • l’amblyopie de distorsion spatiale ; elle a lieu lorsque les yeux présentent des indices de réfraction différents (l’anisométropie) ou des astigmatismes différents (amblyopie méridionale) ou lorsqu'une privation visuelle monoculaire a eu lieu sur un temps prolongé (Cataracte (maladie), ptosis). Elle peut guérir par le port de la correction optique totale ;
  • l’amblyopie de suppression corticale ; lorsque les yeux sont mal alignés (strabisme), il est possible que le cortex correspondant à un œil supprime celui de l'autre œil, afin d'éviter la double-vision (diplopie).

L’association des deux est toujours possible (amblyopie mixte).

Âge de découverte (âge de diagnostic)

Le diagnostic d’amblyopie est possible dès la naissance dans les amblyopies organiques sévères. C'est une recherche systématique par un examen ophtalmologique soigneux dans diverses situations où elle peut être suspectée : strabisme notamment, dès l'âge de 3-4 mois. Cela comporte une étude des mouvements oculaires, du comportement de l'enfant lors de divers tests : occlusion alternée, méthode du regard préférentiel, mesure de la réfraction et examen du fond d'œil qui permettent d’en faire le diagnostic et de préciser l’origine de l’amblyopie.

Trou sténopéïque

Le trou sténopéïque est d’une certaine aide. Si l’acuité visuelle reste constante, il s’agit d’une amblyopie fonctionnelle, si elle diminue on parle d’amblyopie organique. Par contre, si elle augmente, on est face à un problème réfractif. Cet examen est toujours utilisé[8],[9][réf. incomplète].

Méthode du regard préférentiel

Cette méthode est utilisée en complément des tests de réfraction et d’examen du fond d’œil pour dépister l'amblyopie[10] entre 4 mois et 1 an (âge pré-verbal et coopérant) : l'enfant, dans un environnement calme, sur les genoux de sa mère ou de son père, est placé devant un théâtre où apparaissent des cartons comportant d'un côté une mire faite d'un réseau plus ou moins structuré. L'enfant tourne son regard là où il voit ce réseau. L'examinateur observe ce comportement à travers un orifice du carton qu'il présente[11].

Cette méthode basée sur les observations de Fantz en 1958[12] est remises en cause par des études de 1995[13].

Traitement

Chez l’enfant (avant 6 ans)

Le traitement doit, si possible, être débuté avant l’âge de 6 ans[14] (bien que pouvant toujours être essayé jusqu'à l'âge de 10-12 ans). Plus il est débuté tôt, plus il est court et efficace. La surveillance d'éventuelles rechutes ou d'amblyopies « à bascule » (amblyopie de l'autre œil) devra être prolongée jusqu'à l'âge de 10-12 ans, âge où la maturation des voies visuelles est pratiquement celle de l'adulte. Surveillance au-delà dans certains cas.

Le traitement initial est basé sur :

  • la correction optique totale déterminée après cycloplégie (élimination transitoire de toute possibilité d’accommodation par instillation d'un collyre) (le collyre d'examen provoque aussi la gêne d'une dilatation de la pupille, responsable d'un éblouissement, heureusement transitoire) ;
  • l’occlusion du bon œil, pour une durée fonction de plusieurs paramètres : sévérité de l'amblyopie, de la cause, délai entre découverte et prise en charge, âge. La durée de ce traitement va de quelques jours à plusieurs mois, sous surveillance rapprochée (cette occlusion était dite « sauvage » car mal vécue au début par l'enfant qui a du mal à comprendre qu'on le prive de la seule vision du bon œil, qui lui suffit).

Par la suite, le traitement pourra, dans certains cas, être modifié et être basé sur :

  • la pénalisation est une méthode efficace parfois délicate à mettre en œuvre (équipement correct par lunettes adaptées que l'enfant doit accepter et porter correctement) ;
  • d’autres traitements peuvent être proposés : secteurs, filtres, occlusion alternée, pénalisation alternée, etc.

Des séances de rééducation active en orthoptie n’a pas d’efficacité prouvée[réf. nécessaire]. L'orthoptiste est en revanche le plus à même de s'assurer de la bonne conduite du traitement, de l'adhésion de tous les intervenants, avant tout des parents, au bien-fondé de celui-ci ainsi que d'adapter ce traitement en fonction de la récupération retrouvé chez l'enfant.

Ce traitement bien codifié, s’il est bien suivi et précoce, est très efficace : guérison de 80 à 90 % des amblyopies fonctionnelles[réf. nécessaire].

Chez l’adulte

En dehors de la correction optique totale, il n’y a pas de traitement de l’amblyopie de l’adulte. Au contraire, l’amblyopie de l’adulte doit être respectée. Les traitements actifs (rééducation active, post-images, posturologie, etc.) sont déconseillés car inefficaces et dangereux (risque de vision double dans certains cas d'anisométropie associant myopie et hypermétropie)[réf. nécessaire].

Quelques pistes de recherche se sont cependant ouvertes dans les années 2010, en utilisant l'apprentissage perceptif chez l'humain[15],[16], ou en stimulant la plasticité neuronale du cortex visuel chez l'animal, pour lui permettre de réapprendre à voir[17].

Méthodes alternatives

De nombreuses méthodes alternatives peuvent être proposées dans le traitement de l'amblyopie : la méthode Régine Zékri-Hurstel et Laurence Puchelle, les post-images. Cependant aucune publication parue dans des revues scientifiques ne valide ces methodes. L'acupuncture[18] s'est ajoutée à cette liste et suscite une controverse[19],[20],[21].

Certains jeux vidéo sont conçus pour aider à la correction de l'amblyopie. Les jeux Dig Rush et Monster Burner utilisent un système de lunette stéréoscopique pour forcer le cerveau à utiliser ses deux yeux pour voir toute l'action. Ils ont été approuvés par la Food and Drug Administration en [22] mais reste largement moins efficace que les traitements actuellement utilisés.

Notes et références

  1. Amblyopie sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales consulté le .
  2. (en) M. C. Flom et R. W. Neumaier, « Prevalence of amblyopia », Public Health Reports, vol. 81, , p. 329-341 (ISSN 0094-6214, PMID 4956100, PMCID 1919787, lire en ligne, consulté le ).
  3. (en) Wright, W. K., Handbook of Pediatric Strabismus and Amblyopia, New-York, Springer, , p. 103-137..
  4. Étymologie rapportée par WikiAmblyopie.net.
  5. « Amblyopie (nourrisson, enfant, adulte) définition traitement (médical et chirurgie) », sur www.amblyopie.net (consulté le )
  6. (en) Heike M. Elflein, Susanne Fresenius, Julia Lamparter et Susanne Pitz, « The prevalence of amblyopia in Germany: data from the prospective, population-based gutenberg health study », Deutsches Ärzteblatt International, vol. 112, , p. 338-344. (ISSN 1866-0452, PMID 26043421, PMCID 4458790, DOI 10.3238/arztebl.2015.0338, lire en ligne [PDF], consulté le ).
  7. (en) C. E. Stewart, A. R. Fielder, D. A. Stephens et M. J. Moseley, « Design of the Monitored Occlusion Treatment of Amblyopia Study (MOTAS) », British Journal of Ophthalmology, vol. 86, , p. 915-919 (ISSN 1468-2079, PMID 12140215, DOI 10.1136/bjo.86.8.915, lire en ligne, consulté le ).
  8. Tuil E, de Nicola R, Mann F, Miléa D, Ophtalmologie en urgence, Issy-les-Moulineaux, Elsevier Masson, coll. « Médecine en poche », , 418 p. (OCLC 495414120, lire en ligne), p. 6.
  9. MJ Bot-Escluse, Abord clinique en ophtalmologie, Paris, Springer, coll. « Abord clinique », 236 p. (OCLC 857069596).
  10. « Amblyopie - Symptômes et traitements », sur Association des Optométristes du Québec (consulté le )
  11. « Sensorio-motricité oculaire - Le Bébé-Vision comme méthode de dépistage de l’amblyopie ? », sur www.strabisme.net (consulté le )
  12. Fantz RL. Pattern vision in young infants. Psychol Record 1958 ; 8 : 43-7.
  13. Yves Matillon, Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) - Service des recommandations et références professionnelles, « Dépistage précoce des troubles de la fonction visuelle chez l’enfant pour prévenir l’amblyopie » [PDF], sur https://www.has-sante.fr/, (consulté le ), p. 48
  14. (en) Marjean T. Kulp, Susan A. Cotter, Alan J. Connor et Michael P. Clarke, « Should amblyopia be treated? », Ophthalmic & Physiological Optics: The Journal of the British College of Ophthalmic Opticians (Optometrists), vol. 34, , p. 226-232 (ISSN 1475-1313, PMID 24588534, DOI 10.1111/opo.12124, lire en ligne, consulté le ).
  15. (en) Dennis M. Levi et Roger W. Li, « Perceptual learning as a potential treatment for amblyopia: a mini-review », Vision Research, vol. 49, , p. 2535-2549 (ISSN 1878-5646, PMID 19250947, PMCID 2764839, DOI 10.1016/j.visres.2009.02.010, lire en ligne [PDF], consulté le ).
  16. (en) Li Jinrong, Thompson Benjamin, Deng Daming et al. « Dichoptic training enables the adult amblyopic brain to learn » Current Biology 2013;23(8):R308-R309.
  17. (en) David N. Bochner, Richard W. Sapp, Jaimie D. Adelson, Siyu Zhang, Hanmi Lee, Maja Djurisic, Josh Syken, Yang Dan & Carla J. Shatz (2014), « Blocking PirB up-regulates spines and functional synapses to unlock visual cortical plasticity and facilitate recovery from amblyopia » Sci Transl Med. 2014;6(258):258ra140. DOI:10.1126/scitranslmed.3010157 (résumé).
  18. (en) Zhao J, Lam D, Chen LJ et al. « Randomized controlled trial of patching vs acupuncture for anisometropic amblyopia in children aged 7 to 12 years » Arch Ophthalmol. 2010;128(12):1510. PMID 21149771.
  19. « Le blog du Pr Alain Péchereau, une source d'échange entre nous : Le traitement de l'amblyopie », sur fnro.net, .
  20. (en) P. Lempert « Acupuncture therapy for amblyopia » Ophthalmology 2012;119(4):886; réponse de l'auteur:886-7. PMID 22472263 DOI:10.1016/j.ophtha.2011.11.009.
  21. (en) LE. Leguire « Occlusion vs acupuncture for treating amblyopia » Arch Ophthalmol. 2011;129(9):1240-1; réponse de l'auteur:1241-2. PMID 21911682 DOI:10.1001/archophthalmol.2011.256.
  22. « Ubisoft : Les jeux sur ordonnance bientôt disponibles », Jeuxvideo.com (consulté le ).

Voir aussi

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