Bruit sous-marin

Le bruit sous-marin constitue l'ensemble des sons aquatiques en milieu marin, soit non structurés, soit considérés comme indésirables, par analogie avec le bruit dans l'atmosphère.

En l'absence d'activité humaine, les vagues, la pluie et les émissions des animaux marins constituent les principales sources de bruit ; les évènements sismiques survenant dans les roches ou les glaces provoquent des crêtes occasionnelles[1]. L'écoute du bruit sous marin permet à la marine de guerre de détecter la navigation par sonar passif.

La croissance du bruit sous marin est une préoccupation environnementale à cause de sa capacité à perturber les êtres vivants du milieu subaquatique maritime. La navigation est l'origine principale des bruits d'origine humaine, tandis que l'impact des sonars actifs, ainsi que celui des chantiers sous-marins  explosions, battage de pieux  inquiète pour leur intensité momentanée[1]. De nombreuses publications concernent l'impact de l'activité humaine sur la pression acoustique en milieu marin, soit en ce qu'elle perturbe les différentes espèces, soit en ce qu'elle interfère avec les systèmes de détection piscicoles ou militaires, eux-mêmes producteurs d'ondes puissantes, ce qui les pousse à les renforcer encore.

Classes de bruits sous marins

Bruit anthropique et bruit naturel

On appelle bruit anthropique, par opposition au bruit naturel, celui causé par l'activité humaine : navigation principalement, observation par sonar ou par générateur d'ondes sismiques, travaux sous-marins, installations industrielles comme les forages ou les éoliennes[2], etc.

Bruit continu et bruits impulsifs

Il convient de différencier le bruit continu des bruits impulsifs, brefs.

Les sources de bruits impulsifs incluent les battages de pieux dans les constructions sous marines ou côtières (aménagements portuaires, installation d'éoliennes, etc), les études sismiques (en vue de repérer des gisements de pétrole ou de gaz), les explosions, et les sonars notamment[3]. Les sources continues proviennent essentiellement du trafic maritime[3], et comprennent aussi des installations industrielles permanentes.

Impact du bruit sous marin

La notion de "bruit sous-marin" implique généralement des conséquences négatives sur la faune marine[3]. La plupart des animaux marins possèdent des organes de l'ouïe. Ils se servent des indices sonores de leur environnement  par exemple, ils s'éloignent des zones bruyantes de déferlantes et de brisants.

Le bruit peut impacter à la fois les mammifères marins, les poissons et le plancton.

Lorsque les bruits anthropiques causent la fuite de certaines espèces, leurs prédateurs sont également affectés. Les mammifères marins utilisent le son pour la communication entre individus. L'élévation du niveau continu du bruit perturbe la réception de leurs signaux, tandis que des bruits impulsionnels puissants peuvent causer des lésions à leurs organes auditifs.

Mesure des bruits sous marins

La mesure des bruits sous marins est nécessaire à leur comparaison. Elle permettra de dire, par exemple, que dans telle ou telle zone de trafic maritime intense, les bruits d'origine humaine dominent.

Grandeurs pertinentes

Les ondes de pression acoustique transportent de l'énergie. C'est cette puissance seule qui peut avoir des effets, comme en particulier mobiliser les organes de l'ouïe animale et humaine. L'intensité acoustique s'exprime en watts par mètre carré, dans le sens de la propagation, c'est-à-dire perpendiculairement au front de l'onde. Pour les bruits aériens, la valeur de référence est de milliwatt/m2. Dans l'air, pour une onde plane, cette valeur correspond à une pression acoustique de 20 micropascals et à un son imperceptible. L'eau oppose aux déformations élastiques qui constituent le son une bien plus grande résistance. Son impédance acoustique est d'environ 1 540 000 Pa s m−1, alors que celle de l'air est de 415 Pa s m−1. La même puissance crée une pression 3700 fois plus forte dans l'eau. Une intensité de milliwatt/m2 correspond dans l'eau à une pression acoustique de 74 millipascals, 36 décibels de plus que dans l'air[4].

On donne normalement les valeurs de pression acoustique dans l'eau par rapport à 1 µPa. Une onde plane en champ libre d'intensité W/m2 équivaut à une pression acoustique de 182 dB re 1 µPa dans une eau de mer typique[5]. Le bruit ambiant sous-marin varie entre 60 et 100 dB re 1 µPa selon l'état de la mer, de calme à agitée[4].

La distribution de la pression acoustique dépend de la profondeur. À proximité de la surface ou d'un fond peu accidenté, la réflexion des ondes acoustiques les renforce par effet de proximité, surtout jusqu'au quart de la longueur d'onde concernée  la vitesse du son étant d'environ 1 500 m/s dans l'eau[6], le quart d'onde à 100 Hz est d'environ 3,7 m[7]. Les variations de pression qu'induisent les vagues compliquent la mesure. 10 m de profondeur d'eau équivaut à peu près à la pression atmosphérique, 100 kPa. Une fluctuation de hauteur d'eau, par une faible houle de 10 cm de creux, donne une variation de pression d'une période de quelques secondes et d'une amplitude de 1 kPa, équivalente à 180 dB re 1 µPa dans la bande passante acoustique. Des variations aussi importantes sont difficile à filtrer[8].

Le bruit sous-marin peut varier de plusieurs ordres de grandeur, en quelques minutes ou au cours de l'année, ou selon l'emplacement de la mesure. Cette variabilité implique d'effectuer plusieurs mesures réparties dans le temps et dans l'espace[9].

Bruit de fond sous la mer

Pour apprécier l'importance d'un son perturbateur, il faut mesurer le bruit de fond sous la mer. Il n'existe pas de définition conventionnelle de ce bruit de fond ; les études utilisent des méthodes différentes selon leur objectif, qu'il s'agisse d'évaluer l'impact d'un évènement connu, comme un forage ou le passage d'un navire, ou de mesurer le « paysage sonore » ordinaire d'un biotope marin[10].

Évaluation des sources de bruit

Quand il s'agit d'évaluer l'impact d'une source de bruit contrôlée par les humains, on effectue le plus souvent des mesures à une distance suffisante pour que l'effet des interférences entre sources de la structure émettrice ne joue plus[11].

Pour un bruit continu, on peut utiliser la puissance acoustique émise ; par exemple, un navire de commerce à une vitesse modérée produit quelques dizaines de watts acoustiques. Pour des bruits impulsionnels, on mesure l'énergie d'une impulsion ; pour certaines applications, celle-ci peut atteindre des dizaines de kilojoules[12]. La pression acoustique subit l'affaiblissement de propagation, par atténuation géométrique et absorption par le milieu, suivant la distance à la source.

Le son d'un sonar s'exprime généralement en décibels re 1 µPa mesuré à m, équivalent à des dB m−1[13].

Gestion du bruit sous marin

Réglementation internationale

Des normes internationales sont en cours d'élaboration pour la mesure des bruits sous-marins[14], mais il n'existe aucune réglementation contraignante[15].

Réglementation européenne

La Directive-cadre Stratégie pour le milieu marin de l'Union européenne impose aux États membres d’élaborer une stratégie applicable à leurs eaux marines en vue de l’atteinte et du maintien du bon état écologique qui inclut l'évaluation de l'état et de l'évolution des pressions et impacts des bruits sous-marins dus à l'activité humaine[16].

Mesures de réduction

La réduction du bruit sous-marin dû à la navigation s'obtient instantanément en réduisant la vitesse des navires, et à long terme en optimisant la forme des carènes et des hélices[15]. La réduction des vibrations dans toutes les structures est profitable autant pour la fiabilité que pour la réduction du bruit.

Dans le cadre de travaux, les industriels utilisent parfois des rideaux de bulles afin d’intercepter les bruits.

Annexes

Bibliographie

Articles connexes

Notes et références

  1. Laura Recuero Vito, Hervé Dumez, Pascal Galichon, Florent Le Courtois et Manuel Muntoni, « Bruit sous-marin : Que pouvons-nous apprendre de l’étude de cas du port du Havre ? », Policy brief, (lire en ligne).
  2. Milieu marin France, « Le bruit sous-marin », 2019/2021 (consulté le ).
  3. https://www.ospar.org/work-areas/eiha/noise
  4. (en) A.R Collins, « Underwater sound levels » (consulté le ).
  5. NPL 2014, p. 21.
  6. Calculs à (en) National Physical Laboratory, « [sound in sea water] simple equations », s.d. (consulté le ).
  7. NPL 2014, p. 37.
  8. NPL 2014, p. 41.
  9. NPL 2014, p. 46sq.
  10. NPL 2014, p. 45-46.
  11. NPL 2014, p. 57sq.
  12. NPL 2014, p. 59.
  13. NPL 2014, p. 61.
  14. NPL 2014, p. 8-9.
  15. Gouvernement français. Ministère de la mer, « Pollution sonore sous-marine, quels impacts ? », (consulté le ).
  16. Yann Stéphan, Jean-Michel Boutonnier et Christine Pistre, Bilan des activités anthropiques génératrices de bruit sous-marin et de leur récente évolution en France métropolitaine, France, Service hydrographique et oceanographique de la Marine, (lire en ligne)
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