Charles-Janus de Buttet

Charles-Janus de Buttet (v. 1590 - ), seigneur d'Entremont, au Bourget-du-Lac[1], avocat et conseiller du duc Charles-Emmanuel Ier de Savoie. Il fut Ier syndic de Chambéry, négociateur et signataire du traité d'armistice passé le 15 mai 1630, entre le Duché de Savoie et le Royaume de France représenté par Louis XIII, dont les armées avaient envahi les États de Savoie.

Pour les autres membres de la famille, voir Famille de Buttet.

Charles-Janus de Buttet
Fonction
Syndic
Chambéry
-
Biographie
Naissance
Décès
Activités

Pressenti pour être admis comme sénateur au Sénat de Savoie, il meurt prématurément, le 16 septembre 1630, de la peste qui frappe le duché de Savoie[2].

Biographie

Origines

Charles-Janus de Buttet est né vers 1590 à Chambéry. Il est issu d'une famille savoyarde originaire d'Ugine.

Son grand-père, Jean-François Ier de Buttet, est maréchal-des-logis de S.A. deçà les monts en 1560, du duc Emmanuel-Philibert de Savoie. Sa grand-mère est Humberte de Pingon, sœur d'Emmanuel-Philibert de Pingon. Son père est Jean-François II de Buttet (1561-1613)[3] avocat du duc Henri Ier de Savoie-Nemours de 1604 à 1608, sénateur au Souverain Sénat de Savoie, à Chambéry, de 1608 à 1610, puis président du Conseil de Genevois, à Annecy[4] de 1610 à 1613. Sa mère, Antoinette du Coudray, est la fille d'Amédée du Coudray, conseiller d'État et de Charlotte Bollaye. Il est le frère cadet de sept sœurs, dont quatre sont entrées au couvent.

Il épouse le , Jeanne de Reydet, fille de Claude, seigneur de Manigod et de Pressy, conseiller d'État du duc de Savoie, et d'Isabelle de Lescheraine[5],[3]. De cette union sont nés trois enfants, morts de la peste en 1630, dont François de Buttet, le fils aîné, est directement inhumé dans le verger de la maison Forte d'Entremont au Bourget, en raison des prescriptions imposées en période de contagion de la peste, en Savoie. Son père obtiendra ultérieurement la translation de son corps dans le tombeau de famille de Sainte-Marie-Égyptiaque.

Carrière

Charles-Janus de Buttet est avocat et conseiller du duc Charles-Emmanuel Ier de Savoie en 1612. Il est nommé Ier syndic de la ville de Chambéry, de 1624 à 1630[3]. À ce titre, il est délégué le , par le duc de Savoie, pour négocier au camp de Barraux, un traité d'armistice avec le roi de France, Louis XIII, à la suite de l'invasion de la Savoie par les troupes françaises.

Le traité du 15 mai 1630

Au camp de Barraux, Charles-Janus de Buttet, en compagnie du seigneur de Sainte-Colombe, négocie au nom du duc de Savoie un traité d'armistice en 18 points[6] :

  • 1/L'honneur, les biens, meubles et immeubles, en quel lieu qu'ils soient, appartenant aux habitants de Chambéry, seront conservés pour tout ordre de personnes, sans aucun ravage, ni pillage, emprisonnement, ni rançon; et tous les papiers et titres de son altesse de Savoie pourront être retirés en lieu de sureté.
  • 2/Les ministres, officiers et serviteurs de S.A. continueront à jouir de leurs privilèges.
  • 3/Il sera loisible aux gentilshommes qui se trouvent en campagne, d'aller et de revenir en ville, pendant deux mois, pour se résoudre au parti qui leur paraîtra plus convenable.
  • 4/Entre toutes les conditions demandées par les habitants de Chambéry, la suivante sera la première et la principale, savoir: qu'ils seront conservés dans la religion Catholique, Apostolique et Romaine, sans qu'on puisse exercer aucun autre culte dans leur ville.
  • 5/Les privilèges accordés à la ville seront maintenus et observés, selon leur forme et teneur, et les habitants ne seront point désarmés, attendu qu'ils offrent le serment de fidélité à S.M.
  • 6/L'armée de S.M. n'entrera point dans la ville, mais seulement le roi et les seigneurs de sa Cour.
  • 7/Les prisonniers de guerre seront remis en liberté.
  • 8/Ceux qui ont été envoyés aux études hors du pays, avant la présente guerre, et tous les bourgeois habitant hors de la ville, pourront y rentrer.
  • 9/Les arrêts rendus par les tribunaux suprêmes seront exécutés selon leur forme et teneur.
  • 10/Les magistrats seront remboursés de leurs charges, si elles sont supprimées.
  • 11/Toutes les inféodations, donations et mandats de S.M. et de ses prédécesseurs auront plein effet.
  • 12/Les États Généraux de Savoie seront convoqués et se tiendront comme c'était l'usage anciennement.
  • 13/La justice souveraine et suprême pour le duché de Savoie, devra s'exercer à Chambéry et non ailleurs.
  • 14/Les monnaies de Savoie auront cours dans le pays, pendant six mois et par provision.
  • 15/Les bourgeois seront exempts de taille, pour tous les biens qui en furent déclarés exempts, l'an 1584.
  • 16/Les ecclésiastiques ne payeront aucun décime.
  • /17 et 18: supprimés par les émissaires de Louis XIII. En effet, Charles-Janus de Buttet avait demandé un délai de six jours pour obtenir la ratification du traité par le duc de Savoie, car le roi de France veut faire son entrée à Chambéry dès le , sans tenir compte du duc de Savoie. Charles-Janus de Buttet est donc amené à ratifier directement le traité au nom de son souverain. Le roi Louis XIII va supprimer le Souverain Sénat de Savoie auquel il substitue un Conseil Souverain de Justice Français, mais il observe les autres clauses du traité jusqu'à la Paix de Cherasco, intervenue le , sous le règne de Victor-Amédée Ier de Savoie, successeur de son père, mort de la peste le .

Le traité de Cherasco du , inspiré par l'abbé Mazarin , permet au duc Victor-Amédée de Savoie, de recouvrer la totalité de la souveraineté de son pays, à l'exception du fort de Pignerol, cédé au royaume de France et d'obtenir la réouverture du Souverain Sénat de Savoie que Louis XIII avait dissous au mois de .

L'entrée solennelle de Louis XIII à Chambéry

Louis XIII, entouré des seigneurs de sa Cour, fait son entrée solennelle à Chambéry dès le , à 8 heures du matin. Il est reçu en grande pompe par Charles-Janus de Buttet, entouré des syndics de la ville en robe de satin violet et de tous les magistrats du Souverain Sénat de Savoie, en toge de pourpre et en toque de fourrure d'hermine. Les clauses du traité de Barraux vont s'appliquer pendant 13 mois, mais entretemps, le Ier syndic de Chambéry est mort en fonction au cours de l'épidémie de peste qui ravage le pays.

Contexte historique

Les savoyards ont pris depuis longtemps l'habitude de voir leur pays envahi par les troupes françaises, au temps du roi François Ier, de son fils Henri II et d' Henri IV. Les ducs de Savoie, tournés vers l'Italie, privilégiaient la défense du Piémont et, au grand désarroi des savoyards, dégarnissaient la Savoie de leurs troupes.

Le roi Louis XIII et Richelieu bénéficient en 1630 de cette faiblesse stratégique. Bien décidé à faire la conquête du pays, le monarque arrive en personne à la frontière de la Savoie, à la tête d'une armée de vingt mille hommes. Il était accompagné de la plus brillante noblesse du royaume. Trois maréchaux de France dirigeaient alternativement l'expédition: Chatillon, Bassompierre et Créqui.

Chambéry est attaqué le . Les habitants livrés à eux-mêmes se défendent autant qu'ils peuvent et capitulent le avec des conditions honorables. Puis l'armée française investit Rumilly qui se signale par sa défense héroïque. Les vainqueurs démolissent la place de fond en comble ainsi que le Fort de l'Annonciade. Puis, ils occupent Annecy, Talloires, Faverges, Ugine et Conflans. Les troupes du prince Thomas de Savoie se replient sur le fort de Briançon. Tandis que Basompierre refoule les savoyards au-delà des Alpes, Créqui s'empare du fort de Charbonnières occupe la Maurienne jusqu'au Mont-Cenis. Le maréchal de Chatillon passe à l'attaque de Montmélian… Mais, la citadelle est défendue vaillamment par le comte Jaffré de Cavour et les Français doivent se contenter de faire vainement le siège de la citadelle: ils ne bénéficieront pas du même succès que celui des armées d'Henri IV au siège de la célèbre forteresse savoyarde en 1600[7]

Trente-quatre jours ont suffi pour la conquête de la Savoie. Elle coûtait 64 hommes à l'armée royale française. Le duc Charles-Emmanuel Ier, accablé par ses défaites successives, parle d'abdiquer, mais il meurt de la peste [8] le au camp de Savillan, sans avoir revu sa patrie savoyarde. Les chroniqueurs de son temps estiment que sa mort fut le salut de la dynastie et de la Savoie, après quelque cinquante années de bataille. La Savoie devait renaître avec la Paix de Cherasco et le printemps de 1631.

Mort et sépulture

Charles-Janus de Buttet meurt de la peste le et il est inhumé à Sainte-Marie-Égyptiaque de Chambéry dans le tombeau de la famille de Buttet[9].

Notes et références

  1. Laurent Perrillat, L'apanage de Genevois aux XVIe et XVIIe siècles : pouvoirs, institutions, société, vol. 113, Académie salésienne, , 1070 p., p. 841, Annexe n°2.
  2. Mémoires et documents (Volume 36), Société savoisienne d'histoire et d'archéologie, 1897, page CXXVII. Charles-Janus de Buttet est mentionné en tant que sénateur dans les ouvrages du comte de Foras et de François Mugnier, mais contesté par Laurent Périllat en 2018, dans le Dictionnaire des magistrats du Souverain Sénats de Savoie, qui le considère comme « un cas douteux  ». Ce Ier syndic de Chambéry, négociateur et signataire du traité d'armistice du camp de Barraux, face au roi Louis XIII dont l'armée avait envahi le duché de Savoie, est mort prématurément de la peste,sans avoir exercé le mandat sénateur qui devait lui être attribué , et ce, d'autant plus que Louis XIII avait dissous le Sénat de Savoie.
  3. Roger Devos, La Pratique des documents anciens : actes publics et notariés, documents administratifs et comptables, Archives départementales de la Haute-Savoie, , 335 p., p. 98.
  4. Les officiers et conseillers du duc de Savoie étaient indistinctement employés dans le duché de Savoie à Chambéry ou dans l'apanage de Genevois à Annecy, en fonction de leur compétence et des besoins des deux branches de la dynastie de Savoie. La famille de Buttet, originaire de la ville d'Ugine, située à la frontière entre la Savoie et le Genevois, s'est depuis le Moyen Âge, partagée au service des deux pays, puis des deux dynasties, ce qui a provoqué les erreurs récurrentes des généalogistes, tel Désormeaux, qui n'ont pas compris le lien de parenté existant entre les Uginois résidant à Chambéry et ceux d'Annecy . (J. Désormeaux et C.Faure, Sur la généalogie du poète Marc-Claude de Buttet, Revue Savoisienne, V. 65 (1924) pp. 81-92).
  5. Le contrat de mariage est acté le par Maître Pierre Monard, notaire ducal et procureur au Souverain Sénat de Savoie, dans la maison de Georges de Lescheraine (grand-oncle maternel de la mariée), chevalier de l'Ordre des Saints-Maurice-et-Lazare, conseiller d'État, président de la Chambre des Comptes, en présence de- Claude-Jérome de Chabod, futur marquis de Saint-Maurice, chevalier de l'Annonciade et ministre d'État, - Vincent du Coudrey, seigneur de Luttrin, sénateur au Souverain Sénat de Savoie, Pierre de Loche, conseiller d'État, maître-auditeur en la Chambre des Comptes de Savoie, Charles-Sébastien de Pradel d'Authurain, seigneur de La Croix, - Jean de Coysia, (allié à la famille de Buttet), sénateur au Souverain Sénat de Savoie, - Louis de Buttet, (cousin du marié, qui héritera la seigneurie d'Entremont en 1630), seigneur de Malatrait et du Foug, - Isaac des Champs, (époux de Jeanne-Marie du Coudrey, oncle par aliiance de Charles-Janus de Buttet), seigneur de Rochefort en Savoie.
  6. Jean-Louis Grillet, Dictionnaire Historique, Littéraire et Statistique des Départements du Mont-Blanc et du Léman, Chez J.F. Puthod, Chambéry, 1807, T.2, pp.50-52.
  7. Le maréchal de Chatillon investissait Montmélian et en commençait le siège. Le capitaine Vignolles, chargé d'attaquer la ville, parvint le 18 juin à y pratiquer une brèche qui lui en livra l'entrée. On ouvrit alors plusieurs boyaux autour de la forteresse, afin de la cerner et de couper toutes les communications. Deux batteries furent dressées au nord, là ou précisément Sully, en 1600, avait établi ses grandes batteries des précipices, l'une tournée vers le bastion de Bonvoisin ( surnommé Mauvoisin par les Français !), et l'autre contre le donjon. Deux autres batteries furent dressées face aux premières, sur le rideau escarpé de l'Isère pour viser l'entrée du donjon et ruiner les logements et les magasins. Mais le comte Jaffré de Cavour, qui y commandait, montra tant de courage et d'activité dans sa défense de la citadelle, que ses ennemis se contentèrent d'en former le blocus sans tenter d'y pénétrer . D'après Léon Ménabréa, Montmélian et les Alpes, in Mémoires de la Société Royale Académique de Savoie, Chambéry, 1841.
  8. La peste s'était abattue sur l'Europe, et, pendant les derniers mois de 1628, au cours des années 1629 et 1630, elle fit en Savoie des ravages terribles . Les mesures de salut public prises dans les cités étaient sans effet.Les paysans désertaient les campagnes et la famine commençait à régner. Statistique partielle: de juin à décembre 1630, il périt en Maurienne 3 403 individus sur une populatioon de 40 545 habitants (Archives de la chancellerie épiscopale de Saint-Jean-de-Maurienne).
  9. Extrait du Testament de Charles-Janus de Buttet : " Par devant moi, notaire royal soussigné et témoins nommés, s'est personnellement établi et constitué, Charles-Janus de Buttet, gentilhomme, bourgeois et premier syndic de la ville de Chambéry… lequel, sain de jugement, mémoire et croyant encore être sain de corps, quoique soupçonné de maladie contagieuse, considérant la crainte et l'instabilité des choses mondaines, l'incertitude des bornes de la vie et de l'heure de la mort, mêmement en cette année malheureuse en laquelle la Savoie est affligée de guerre, de peste et de famine… Il prie encore demoiselle Jeanne de Reydet, sa très chère femme et compagne, si faire se peut, avec le temps, de faire lever les os de François, leur très cher fils et leur délice, lesquels reposent dans le verger d'Entremont situé au Bourget, décédé depuis peu de contagion et les faire inhumer avec les siens d'iceluy testateur, comme en la prie de faire et conserver les chapelles et tombeaux de sa maison à Sainte-Marie-Égyptiaque, où reposent leur fils Charles et leur fille Isabelle…" Fait et prononcé à Chambéry le 16 septembre 1630, à la Porte du Reclus et Ravelin. Signé; Les témoins et le notaire Favre. (Les cendres de son fils François avaient été provisoirement inhumées hors l'église de Sainte-Marie-Égyptiaque, conformément aux règles de précaution édictées pour les morts victimes de la peste. La veuve de Charles-Janus fera transférer les cendres de leur fils ultérieurement. (Par ce testament, Charles-Janus de Buttet lègue la seigneurie d'Entremont à son cousin Louis de Buttet).

Voir aussi

Bibliographie

  • Amédée de Foras, Armorial et nobiliaire de l'ancien duché de Savoie, vol. 1, Grenoble, Allier Frères, 1863-1966 (lire en ligne), p. 287 à 294, « Buttet (Barons et comtes de) »
  • Jean-Louis Grillet, Dictionnaire historique, littéraire et statistique des Départements du Mont-Blanc et du Léman. Chez J.F Puthod, Chambéry, 1807, 3 tomes, voir T.II, p.50-52.
  • Victor Flour de Saint-Genis, Histoire de Savoie, chez Bonne, conte et Co, Chambéry, 1868.3 Vol.

Articles connexes

Liens externes

  • Portail du XVIIIe siècle
  • Portail de l'histoire de la Savoie
  • Portail de Chambéry
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.