Charles Barbier de La Serre

Nicolas-Charles-Marie Barbier de La Serre ( - ) est l’inventeur de plusieurs méthodes de sténographie et de procédés d’écriture novateurs dont l’un est à l’origine du système Braille.

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Ne doit pas être confondu avec Charles Barbier de Meynard.

Charles Barbier de La Serre
Biographie
Naissance
Décès
(à 73 ans)
Paris
Sépulture
Nationalité
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Famille
Autres informations
Grade militaire

Biographie

Barbier naquit à Valenciennes et servit dans l’armée entre 1784 et 1792. Pendant la Révolution, il partit s’installer quelques années aux États-Unis. De retour en France sous l’Empire de Napoléon Bonaparte, il ne rejoignit pas l’armée française[1].

Barbier s’intéressa à la sténographie[2] ainsi qu'à d’autres méthodes d’écriture alternatives. En 1815, il publia un ouvrage intitulé « Essai sur divers procédés d’expéditive française »[3]. Il y explique que l’écriture conventionnelle est une barrière à l’alphabétisation universelle car pour maîtriser la lecture et l’écriture plusieurs années d’études sont nécessaires. Ceux qui doivent travailler pour gagner leur vie, tels que les fermiers ou les artisans, n’ont pas de temps à consacrer à ce genre d’instruction. Barbier se préoccupait également de l’éducation des aveugles et des sourds.

Il proposa une méthode d’écriture simplifiée basée sur une grille de 5 rangées de 5 colonnes (à l’époque, la lettre W n’était pas systématiquement incluse dans l’alphabet français).

 12345
1 abcde
2 fghij
3 klmno
4 pqrst
5 uvxyz

Chaque lettre pouvait être représentée par deux chiffres : le premier indiquait la rangée, le second la colonne. Par exemple, Q = 4,2.

Les chiffres pouvaient eux aussi être représentés par des symboles : deux symboles ensemble formaient une lettre.

Il avait également conçu une version phonétique basée sur les sons de la langue française. Dans son livre publié en 1815, Barbier positionne 30 sons dans une grille de cinq rangées et six colonnes. Il ajouta plus tard six autres positions présentées sur une grille de six rangées et six colonnes. Barbier lui-même préférait le système phonétique car il pensait que les règles orthographiques étaient un obstacle de plus à l’alphabétisation de ceux qui n’avaient pas reçu une éducation formelle[4].

Son livre de 1815 inclut 12 planches avec des symboles différents pour représenter les chiffres en combinaison, qui à leur tour, représentaient des lettres. Une planche, la No VII, utilisait des points répartis verticalement. Par exemple, la lettre Q était représentée par quatre points dans une colonne et deux dans la suivante :

On ne formait pas ces points sur un papier avec une plume et de l’encre, mais dans l’épaisseur d’un papier avec un poinçon pour que le relief obtenu puisse être lu avec les doigts. Pour cette nouvelle forme d’écriture, Barbier inventa de nouveaux outils : une tablette pour recevoir des impressions, un poinçon et un guide-main pour s’assurer que les points s’alignaient sur une ligne droite verticale.

Pendant des décennies, on a pensé que Barbier avait créé cette forme d’écriture pour l’armée afin que les militaires puissent communiquer entre eux la nuit, mais son livre de 1815 indique clairement qu’avec cette méthode il ciblait les personnes aveugles.[5]

Barbier écrivit à l’Institution Royale des Jeunes Aveugles (actuellement l'Institut National des Jeunes Aveugles) de Paris pour offrir son invention. Le directeur ne s’y intéressa pas. En 1821, Barbier fit la même proposition à son successeur, Alexandre René Pignier. Celui-ci demanda à un étudiant d’apprendre la méthode puis de faire des démonstrations aux autres élèves et au conseil d’administration.

Ces démonstrations ayant été concluantes, les étudiants apprirent la méthode de l’alphabet conventionnel, même si Barbier continuait à promouvoir le système phonétique. Avant l’introduction de la méthode Barbier, les étudiants apprenaient à lire les lettres gaufrées qui étaient difficiles à déchiffrer avec les doigts et qui prenaient beaucoup de place par page. S’ils arrivaient à apprendre à écrire, ils pouvaient écrire uniquement à des voyants. La méthode de Barbier leur permettait au contraire de prendre des notes qu’ils pouvaient relire eux-mêmes, et de communiquer avec d’autres aveugles.

La méthode était loin d’être parfaite. Il manquait des symboles pour la ponctuation et les chiffres, et il n’y avait pas de distinction entre les majuscules et les minuscules. On ne pouvait pas non plus l’utiliser pour la musique. Mais elle était une preuve de faisabilité[6] – les aveugles pouvaient lire et écrire un code fait de points saillants, et ils pouvaient utiliser les outils inventés par Barbier.

Un des étudiants de l’école, Louis Braille, inventa une méthode plus compacte et plus flexible. Mais sans l’inspiration de la méthode Barbier et sans ses outils, il n’aurait jamais accompli cela. Comme il est écrit dans une histoire de l’Institution : « Le point, la tablette rayée, le guide cellulaire, c’étaient une triple invention d’où allait sortir l’instruction pratique des aveugles »[7].

Beaucoup plus tard, après la mort de Barbier et de Braille, Alexandre René Pignier écrivit une courte biographie de Louis Braille.[8] Il y suggérait que Braille, tout jeune, avait confronté Barbier aux défauts de sa méthode. Les autres biographies de Braille ont pris cette suggestion à la lettre pour décrire une confrontation hostile entre Barbier et un Braille adolescent. En effet, les deux ne se sont rencontrés qu’en 1833. Braille était alors adulte et quatre années s’étaient écoulées depuis la parution de sa propre œuvre. Les relations entre les deux hommes étaient amicales.[6] Les lettres qu’ils échangeaient étaient également cordiales, comme on peut le voir dans une lettre reproduite dans la biographie de Braille par Michael Mellor[9].

Barbier passa le reste de sa vie à essayer de promouvoir ses idées pour une éducation universelle.[10] Il écrivit plusieurs livres et essaya de faire introduire ses méthodes simplifiées d’écriture dans les salles d’asile (maintenant connues sous le nom d’écoles maternelles), mais en vain. Néanmoins, les modifications apportées à la méthode Barbier sont aujourd’hui devenues le système d’écriture pour aveugles utilisé dans le monde entier.

Il est inhumé au cimetière du Père-Lachaise. (53e division)[11]

Notes et références

  1. Une copie du dossier militaire de Barbier se trouve au Musée Louis Braille, à Coupvray, France.
  2. Voir Barbier, C., Principes d'expéditive française pour écriture aussi vite que la parole, Paris, 1809, https://www.google.ca/books/edition/Principes_d_exp%C3%A9ditive_fran%C3%A7aise_pour/FgVJ55_weywC?hl=en&gbpv=0
  3. Le livre, avec les illustrations, est disponible sur Google Books : https://books.google.com/books?id=lkVzrUr1RvEC&q=essai+sur+divers+proc%C3%A9d%C3%A9s+d%27exp%C3%A9ditive+fran%C3%A7aise&pg=PA1
  4. Plusieurs auteurs ont donné le nom « sonographie » à la version phonétique, mais Barbier n’a jamais utilisé ce mot dans ses publications.
  5. Cette erreur remonte au livre de Pierre Henri, « La vie et l’œuvre de Louis Braille » (Presses Universitaires de France, 1952), dans lequel Henri suggéra que Barbier aurait pu penser à l’emploi de cette méthode par les soldats. Mais le livre de 1815 ne contient point une telle suggestion.
  6. Campsie, Philippa, "Charles Barbier: A hidden story," Disability Studies Quarterly, vol. 41, no. 2, 2021, https://dsq-sds.org/article/view/7499/5947
  7. Guilbeau, Edgard, Histoire de l’Institution Nationale des Jeunes Aveugles, Paris : Belin Frères, 1907. https://www.google.ca/books/edition/Histoire_de_l_Institution_nationale_des/IMfTPgAACAAJ?hl=en
  8. Pignier, A.R., Notice Biographique sur Trois Professeurs, Anciens Élèves de l'Institution des Jeunes Aveugles de Paris. Paris: Imprimerie Buchard-Huzard, 1859.
  9. Mellor, C. Michael, Louis Braille : Le génie au bout des doigts, Paris : Éditions du patrimoine, 2008.
  10. Voir, par exemple, Instruction familière des classes laborieuses, 1837, https://www.google.ca/books/edition/Instruction_famili%C3%A8re_des_classes_labor/G5hnQwAACAAJ?hl=en
  11. Paul Bauer, Deux siècles d'histoire au Père Lachaise, Mémoire et Documents, , 867 p. (ISBN 978-2-914611-48-0), p. 77

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