Charlotte von Stein

Charlotte Albertine Ernestine von Stein[N 1] (née von Schardt le à Eisenach, † le à Weimar) était une dame d'honneur de la duchesse Anne-Amélie de Brunswick à la cour ducale de Weimar, une proche confidente de la duchesse Louise de Hesse-Darmstadt, et également une amie proche de Goethe, de la famille de Johann Gottfried von Herder et de Schiller, dont les œuvres et les vies furent fortement influencées par elle. Elle était la sœur cadette de Ernst von Schardt Carl Constantin.

Charlotte von Stein
Charlotte von Stein (autoportrait, 1790).
Biographie
Naissance
Décès
(à 84 ans)
Weimar
Sépulture
Cimetière historique de Weimar (en)
Nom de naissance
Charlotte von Schardt
Nationalité
Activités
Fratrie
Ernst Carl Constantin von Schardt (d)
Louise Francisca Sophia Imhof (d)
Conjoint
Josias Freiherr von Stein (d)
Enfants
Gottlob Carl Wilhelm Friedrich von Stein (d)
Ernst von Stein (d)
Gottlob Friedrich Konstantin von Stein (d)
Œuvres principales
Rino (d)
Plaque commémorative
Vue de la sépulture.

Elle fut aussi l'autrice de quatre drames, ainsi que de deux autres œuvres aujourd'hui perdues.

Sa maison à Weimar.
La tombe de Charlotte von Stein au cimetière historique de Weimar.

Biographie

Enfance

Charlotte Albertine Ernestine von Stein, qui est entrée dans l'histoire littéraire allemande grâce à sa relation avec Goethe, était la fille du maréchal de la cour de Weimar, Johann Wilhelm Christian von Schardt, et de Concordia Elisabeth, son épouse, d'ascendance écossaise[2].

Ses parents déménagent à Weimar, alors qu'elle est toute jeune. Son éducation, qui la prépare à un rôle de demoiselle d'honneur, correspond à celle des jeunes filles de la bonne société : on lui enseigne la littérature, les beaux-arts, le chant et la danse. Elle se révèle discrète, spirituelle, gracieuse et dévouée à l'image de sa mère.

Profession : dame d'honneur

En 1758, elle devient demoiselle d'honneur de la duchesse Anna Amalia, qu'elle servira jusqu'à la mort de celle-ci en 1807. Le 8 mai 1764, elle épouse l'écuyer du duc de Saxe-Weimar-Eisenach, Gottlob Ernst Josias Friedrich von Stein (né le 15 mars 1735, mort le 28 décembre 1793 à Großkochberg). La profession de son mari, qui l'oblige à beaucoup se déplacer, la laisse souvent seule. Pourtant de 1764 à 1773, elle donne naissance à sept enfants. Les quatre filles décèdent, tandis que les trois garçons, Karl, Ernst et Fritz, survivent. Physiquement épuisée après la naissance du dernier, elle doit suivre plusieurs cures.

Rencontre avec Goethe

Admiratrice enthousiaste de Goethe, elle fait sa connaissance en novembre 1775. C'est le commencement d'une relation profonde qui durera près de douze ans. Bien qu'elle ait près de sept ans de plus que lui, qu'elle soit mariée et mère de sept enfants, Goethe ne tarde pas à l'aimer passionnément. L'amour de Goethe pour Charlotte von Stein est exposé dans environ 1700 lettres[3] : il se bat désespérément pour gagner les faveurs de la dame qui, malgré sa fascination pour Goethe, reste initialement réservée devant ses assauts. En mai 1783, Goethe accueille chez lui son plus jeune fils, Fritz, alors âgé de onze ans, pour assurer son éducation, à la pleine satisfaction de Charlotte[4].

Lorsque, en 1786, Goethe entame son voyage de près de deux ans en Italie, sans même la prévenir, leur relation connaît une pause, et elle ne se rétablit pas vraiment après le retour de Goethe. Leur rapprochement est rendu plus difficile par la relation amoureuse de Goethe avec une roturière, Christiane Vulpius, sœur de l'écrivain Christian August Vulpius. Goethe et Christiane vivent maritalement de 1788 jusqu'en 1806, date de leur mariage.

Solitude et mort

Il faut attendre 1800 pour que la relation entre Charlotte et Goethe se rétablisse, sans pourtant retrouver leur intimité d'avant. Lorsque son mari meurt en 1793, Charlotte se retire de la société et connaît une solitude de plus en plus grande. En 1794, elle écrit un drame inspirée de sa vie, Dido, où elle dépeint sa déception causée par l'attitude de Goethe[5]. Elle y fait aussi allusion à ses relations avec d'autres membres de la cour, retraçant la situation à Weimar de 1770 à 1790. Cette pièce ne sera publiée qu'après sa mort, par Heinrich Düntzer (de) à Leipzig en 1867.

Elle meurt le 6 janvier 1827 à 85 ans.

Nature de leur relation

Les spéculations sur la nature érotique, sexuelle ou platonique de leur relation sont toutes restées stériles. La seule certitude est que cette histoire d'amour eut une signification biographique énorme tant pour Goethe que pour Charlotte von Stein. Que le mari, Josias von Stein, n'ait probablement pas réagi à cette relation n'a rien d'inhabituel dans le cercle de la noblesse de Weimar, où les mariages se faisaient principalement pour des raisons économiques ou sociales.

Quatre ans après le retour de Goethe d'Italie, leur amitié se renoue, et elle durera alors jusqu'à la mort de Charlotte. Goethe mentionne son nom, même dans sa correspondance avec sa femme, et leur fils unique, August, est souvent envoyé chez elle, soit pour des leçons, soit pour des jeux.

De leur abondante correspondance, il ne reste que les lettres de Goethe. En effet, peu de temps avant sa mort, Charlotte lui demande de lui restituer ses lettres, qu'elle brûle. Il manque aussi les lettres écrites par Goethe en Italie, qu'il a dû lui réclamer pour s'en servir dans la composition de son Voyage en Italie[6].

On peut trouver certaines lettres de Charlotte von Stein dans :

Œuvre

Charlotte von Stein est aussi une femme de lettres. Elle est l'autrice de quatre drames dont l'attribution ne font aucun doute. Son œuvre a longtemps été ignorée, ou analysée uniquement sous le prisme de ses relations avec Goethe. En 2000, Susanne Kord a rassemblé et analysé cette œuvre, en se départant de ce prisme[7].

  • (de) Rino (1776)
  • (de) Dido (1794)
  • (de) Neues Freiheitssystem oder die Verschwörungen gegen die Liebe (1798)
  • (de) Die zwey Emilien (1800)

En 1803, Die zwey Emilien parait anonymement mais avec le nom de Schiller sur la page de titre. Quant à Dido, son drame le plus célèbre, il ne fut publié qu'après sa mort, en 1885.

On lui attribue aussi Die Probe, un drame qui a été perdu, ainsi que deux autres œuvres perdues elles aussi : une histoire étant probablement l'adaptation d'une histoire française et une autre comédie[8].

Notes et références

Notes

  1. On trouve parfois Madame de Stein dans la littérature francophone. Voir par exemple la traduction de Jaccottet de L'Homme sans qualités[1] : « personne ne va chercher dans la vie de Gauss, de Maxwelle ou d'Euler les traces d'une Madame de Stein… ».

Références

  1. Musil 1956, p. 376.
  2. von Bode 1919, p. 6.
  3. Richard Friedenthal: Goethe. 15. Aufl. Piper, Munich, 2005, S. 230
  4. Valerian Tornius: Goethe — Leben, Wirken und Schaffen. Ludwig Röhrscheid, Bonn 1949, p. 212
  5. Der Große Brockhaus. 16. edition. Vol. 11. F. A. Brockhaus, Wiesbaden 1957, p. 193
  6. Larousse du XIXe siècle, article Charlotte von Stein, tome 14, p. 1078
  7. Sarah Colvin et Kord, « Susanne Kord :Charlotte von Stein: Dramen (Gesamtausgabe) [Book review] », The Modern Language Review, vol. 95, no 3, , p. 882 (DOI 10.2307/3735586, lire en ligne, consulté le )
  8. Susanne Kord: Einleitung. In: Charlotte von Stein: Dramen. Gesamtausgabe. G. Olms, Hildesheim/New York 1998, (ISBN 978-3-487-10331-0), S. 11–12.

Annexes

Bibliographie

 : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle, tome 14, page 1078
  • (de) Wilhelm von Bode, Charlotte von Stein, Berlin, Mittler & Sohn, . 
  • Richard Friedenthal (de), Goethe. Sein Leben und seine Zeit, éditions Piper-TB 2850, Munich / Zürich, 2005, (ISBN 3-492-22850-X).
  • (de) Jochen Klauß, Charlotte von Stein. Die Frau in Goethes Nähe, éditions Artemis und Winkler, Zürich, 1995, (ISBN 3-7608-1121-3).
  • (de) Doris Maurer, Charlotte von Stein, Eine Biographie, éditions Insel-TB 2120, Francfort-sur-le-Main / Leipzig, 2009 (première édition 1997), (ISBN 978-3-458-33820-8).
  • Robert Musil (trad. de l'allemand par Philippe Jaccottet), L'Homme sans qualités Der Mann ohne Eigenschaften »], t. 1, (1re éd. 1930-1932), 834 p. 

Liens externes

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