Débarquement de la baie des Cochons

Le débarquement de la baie des Cochons est une tentative d'invasion militaire de Cuba par des exilés cubains soutenus par les États-Unis en avril 1961. Planifiée sous l'administration de Dwight D. Eisenhower, et organisée par la CIA, l'opération fut lancée au début du mandat de John F. Kennedy. Elle visait à faire débarquer à Cuba, le , environ mille quatre cents exilés cubains recrutés et entraînés aux États-Unis par la CIA. Leur objectif était de renverser le nouveau gouvernement cubain établi par Fidel Castro, qui menait une politique économique défavorable aux intérêts américains et se rapprochait de l'URSS[1]. L'opération fut un échec complet et les prémices d'une grave et profonde dissension entre la présidence et les services secrets américains[2],[3].

Débarquement de la baie des Cochons
Contre-attaque de forces armées cubaines le .
Informations générales
Date
(2 jours)
Lieu Baie des Cochons, Cuba
Casus belli Révolution cubaine
Issue Victoire du gouvernement cubain ; Fidel Castro se déclara ouvertement communiste et renforça son alliance avec l'URSS
Belligérants
Cuba Brigade 2506
États-Unis
Commandants
Fidel Castro
José Ramón Fernández
Juan Almeida Bosque
Raúl Castro
Che Guevara
Pepe San Román (en)
Erneido Oliva (en)
John F. Kennedy
Forces en présence

25 000 soldats
200 000 miliciens
9 000 policiers
(dans toute l'île, la plupart de ces forces ne furent pas engagées dans la bataille)

1 500 hommes


8 avions B-26
Pertes

176 morts
300 blessés

114 morts
1 202 prisonniers
(dont 360 blessés)


4 morts

Guerre froide

Coordonnées 22° 13′ 00″ nord, 81° 10′ 00″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Cuba

Contexte historique

Localisation de la baie des Cochons sur une carte de 1961.

Après leur arrivée au pouvoir en 1959, à la suite du départ du dictateur Fulgencio Batista, le , les révolutionnaires castristes menés par Fidel Castro engagèrent une politique de révolution agraire, entraînant la nationalisation des terres des grands propriétaires. En mai 1959, la réforme agraire élaborée par Che Guevara est publiée. Elle fixait le minimum de possession de la terre à 27 hectares et plafonnait le maximum à 400 hectares[4]. La nationalisation enlève aussi aux grands propriétaires terriens cubains leurs latifundios et minifundios ; la main d'œuvre ne leur appartient plus et ils ne bénéficient plus ou très peu des richesses qu'ils tiraient de leurs terres[5].

Dans un premier temps, l'administration américaine, sous la présidence Eisenhower, reconnut le nouveau régime considérant la fin du régime de Fulgencio Batista, qu'elle avait soutenu, comme une opportunité constructive tout en continuant à appliquer les règles de la doctrine Monroe en vigueur depuis 1823[2]. Le programme annoncé par Fidel Castro de démocratie, d'élections libres et de progrès social semblait compatible dans un premier temps, avec les intérêts des États-Unis en regard de la corruption du régime précédent et de son impopularité grandissante auprès de la population civile[2]. En outre, Washington envisageait de maîtriser la révolution grâce à la possibilité d'une aide économique au nouveau régime[6].

Or, dès avril 1959, à l'issue du voyage officiel à Washington de Fidel Castro, le vice-président Richard Nixon conclut qu'il ne serait pas possible d'entretenir des relations constructives avec le nouveau régime et qu'il fallait le renverser notamment en armant et en entraînant militairement les exilés anti-castristes.

En effet, la révolution cubaine s'accompagnait d'une vague de nationalisation de toutes les entreprises américaines qui intervint le 6 juillet et d'une réforme agraire menaçant les intérêts des États-Unis[6]. En effet, théoriquement libre depuis la modification de sa constitution en 1934, l'île de Cuba restait sous la très étroite tutelle politique et économique de leur puissant voisin nord-américain : par exemple 50 % des terres arables, 90 % des mines et 100 % des raffineries appartenaient à des compagnies américaines[7].

Parallèlement, le gouvernement révolutionnaire cubain amorça également un rapprochement diplomatique et commercial avec l'URSS[3], alors en pleine guerre froide avec les États-Unis, ce qui renforça les inquiétudes stratégiques de ces derniers. Les États-Unis instaurèrent des restrictions commerciales en 1960 et finalement un embargo total contre l'île ; tous les échanges commerciaux Cuba/États-Unis prirent fin, notamment les exportations importantes de sucre de canne que Cuba envoyait à l'acheteur nord-américain[5]. Véritable colonne vertébrale économique, l'exploitation de la canne à sucre représentait alors 80 % des exportations de Cuba, ce qui affectait profondément l'économie cubaine[6].

Le 17 mars 1960, le président Eisenhower signa un décret donnant le feu vert à toutes les tentatives de déstabilisation du régime castriste et d'assassinat de ses leaders. Parmi les premières mesures, fut adopté le principe de l'entraînement des exilés anti-castristes dans des camps situés au Guatemala. En août, la CIA contacta la mafia (ou Cosa nostra) américaine à Chicago pour tenter d'élaborer un projet d'assassinats simultanés de Fidel Castro, Raúl Castro et Che Guevara. En échange, si l'opération réussissait et qu'un gouvernement pro-américain était restauré à Cuba, les États-Unis s'engageaient à ce que la mafia y récupère « le monopole des jeux, de la prostitution et de la drogue »[8]. En effet, pour l'organisation criminelle, la révolution cubaine avait été la plus grave et coûteuse déroute de son histoire avec une perte chiffrée 100 millions de dollars annuels soit l'équivalent de 900 millions de dollars en 2013 après la fermeture des casinos, des lieux de prostitution et de trafic de stupéfiants[9].

Fin juillet 1960, Che Guevara indiquait que le régime cubain s'était aligné politiquement sur l'URSS. Parallèlement, Fidel Castro affirmait le « devoir des peuples d'Amérique latine de récupérer leurs richesses nationales » et annonçait la nationalisation des intérêts économiques que possédaient les États-Unis à Cuba. L'administration américaine classera dès lors le régime cubain comme ennemi. En janvier 1961, le gouvernement de Dwight Eisenhower rompit toutes relations diplomatiques avec Cuba[10].

Les préparatifs de l'opération

En août 1960, le président Eisenhower approuva un budget de treize millions de dollars pour financer l'opération paramilitaire contre le régime castriste, mais demandera qu'aucun membre de l'armée américaine ne soit impliqué[7]. L'opération, connue sur le nom de code de Pluton[11], devait apparaître comme un conflit interne cubain[12].

La première préoccupation dans la préparation de l'opération fut pour les autorités américaines de ne pas apparaître comme le soutien logistique et financier de l'opération et de demeurer invisibles[12]. Pour ce faire, au sein de la Central Intelligence Agency, une unité spécialement dédiée pour l'opération, la WH-4, donc ne transitant pas par les circuits classiques de l'agence de renseignements, fut fondée par Allen Dulles, le directeur de la CIA, Richard Bissell, son adjoint responsable des opérations spéciales et le général Charles Cabell[6]. Les agents choisis pour diriger l'opération avaient pour la plupart participé au renversement du président du Guatemala Jacobo Arbenz en 1953 (opération PB/Success)[13].

Au sein du Département d'État, les responsables des affaires latino américaines et cubaines furent maintenus également dans l'ignorance[6]. Au sein du pentagone, les membres du Comité des chefs d'état-major interarmées, s'ils furent consultés à titre personnel, ne le furent pas pour l'organisation militaire de l'opération et ne purent fournir d'expertise militaire. Ainsi, le , l'amiral Robert Dennison, commandant en chef de l'Atlantique, estimait qu'aucun des plans dressés jusque-là par la CIA n'était viable[7].

Lors du recrutement même du futur leader du groupe d'invasion, l'agent Franck Bender indiqua à Manuel Airtime (ancien directeur de l'Institut national de la réforme agraire), la chose suivante : « Rappelez vous bien ceci, Manolo, je ne travaille pas pour le gouvernement américain. Je suis au service d'un groupe extrêmement puissant qui lutte contre le communisme[12]. »

La CIA appliquait la doctrine de son directeur Allen Dulles suivant laquelle : « On peut échapper à la culpabilité en instaurant une chaîne de commandement assez floue pour ne laisser aucune preuve de son passage[7]. » L'objectif était pour l'agence de renseignement d'éviter toute implication et au travers d'elle, celui du gouvernement des États-Unis, conformément aux ordres données par la Maison Blanche.

D'une guérilla à un débarquement

L'objectif initial de la CIA était le suivant :

« utiliser les réfugiés volontaires cubains pour ce genre d'activités, en petite bande de guérilleros, opérant sous le contrôle du Comité des réfugiés cubains (CRC), mais avec l'aide de la CIA pour l'équipement, les communications et le transport. En fait, l'idée était d'utiliser contre Castro, les mêmes méthodes et le même genre d'utilisation dont il s'est servi contre Batista[6],[14]. »

Le 4 janvier 1960, la CIA établissait le plan définitif de l'invasion :

« La mission initiale sera de conquérir et de défendre une petite zone… il n'y aura pas de tentatives pour sortir du lieu choisi comme base pour des opérations ultérieures jusqu'à ce qu'il y ait soit un soulèvement général contre Castro, soit une intervention militaire ouverte des États-Unis. Nous nous attendons à ce que ces opérations précipitent un soulèvement général à travers Cuba et causent la révolte de larges segments de l'armée cubaine et de la milice… si les affaires ne tournent pas comme prévu au-dessus, le lieu qui servira de base… peut être utilisé comme site pour l'établissement d'un gouvernement provisoire qui pourra être reconnu par les États-Unis… de cette façon, la voie sera pavée pour une intervention militaire des États-Unis destinée à pacifier Cuba, qui débouchera sur le renversement rapide du gouvernement Castro. Nous considérons comme crucial que les forces navales et aériennes cubaines qui pourraient s'opposer au débarquement soient abattues et neutralisées avant que nos équipages amphibies fassent leur arrivée sur la plage[7]. »

Par la suite le projet évolua au sein de la CIA pendant la période de transition entre l'administration Eisenhower et Kennedy. Le , l'amiral Robert Dennison, commandant en chef de l'Atlantique, avait annoncé après analyses qu'aucun des plans de la CIA n'était viable en réalité. L'objectif devint alors de débarquer une force de 1 400 opposants cubains, qu'elle avait recruté et formé, afin qu'ils établissent une tête de pont[6] après un débarquement amphibie[15] avec une neutralisation préalable des moyens de riposte de l'armée cubaine, à savoir l'aviation et la marine par un bombardement aérien[7]. Mesurant ses forces, l'objectif de la troupe contre-révolutionnaire n'était pas de s'emparer de La Havane et de la totalité de l'île mais de conquérir une portion relativement importante du territoire par des combats internes[6], pour y établir un « gouvernement provisoire » grâce à la structure politique du Cuban Revolutionary Council, installé à Miami[14] avec à sa tête Miró Cardona, aussitôt reconnu par les États-Unis, qui réclamerait (et obtiendrait) une intervention militaire américaine[16].

Toutefois, malgré ce changement d'envergure, la CIA, désireuse de conserver la direction exclusive de l'opération n'inclut pas dans la gestion de l'opération le Pentagone qui disposait pourtant d'une expertise militaire dans la matière[15].

Le choix des organisateurs pour diriger la brigade se porta sur un ancien officier cubain, Jose Perez San Ronan[6] et son adjoint Erneido Oliva[12]. Les hommes étaient préparés dans des camps au Guatemala (le camp Trax situé à 2 000 mètres d'altitude qui offrait les mêmes conditions climatiques qu'à Cuba[17]) et en Floride, à Fort Gullick dans la région du canal de Panama et sur la base militaire américaine de Vieques à Porto Rico. La brigade était constituée de l'ensemble des couches sociales de la population cubaine en majorité de la classe moyenne, soit opposées au nouveau pouvoir cubain soit des anciens soutiens de Baptista. La troupe hétéroclite était composée par des paysans, des médecins, des mécaniciens, des musiciens, des dessinateurs, des avocats, des géologues, des journalistes, des artistes, des instituteurs, des employés administratifs et de bureau, des bergers, des banquiers, des militaires et des hommes d'église[12].

Pour tromper d'éventuelles actions d'espionnage et pour effectuer une campagne de désinformation, le numéro des volontaires démarra à partir du numéro 2 500 pour tromper la surveillance cubaine sur le nombre réel des volontaires. Ce fut en l'honneur du dissident cubain Carlos Rodriguez Santana tué au cours d'un entraînement le , que la brigade se mit à porter le numéro de série 2 506 de son blason[12].

Parallèlement, une opération de désinformation par les ondes fut mise en place avec la création le 4 mai 1960, d'une station de radio nommée Swan, dirigée par l'agent de la CIA, David Atlee Phillips, et destinée à la population présente sur l'île. Elle diffusait de la propagande anti-communiste[7]. L'agent de la branche Executive Action de la CIA, Howard E. Hunt, vétéran de l'opération menée au Guatemala, reçut la mission de former un gouvernement d'exilés avec pour mission de remplacer Fidel Castro à la suite de l'invasion de l'île[18].

En parallèle, des opérations de déstabilisation du régime castriste sous la forme de destructions de récoltes agricoles (notamment les champs de canne à sucre, principale ressource économique de l'île), industriel (comme les raffineries de pétrole) et portuaire (avec des destructions de navires) furent menées durant toute la période précédant l'opération de débarquement ainsi que de la propagande sous la forme de tracts diffusés par voie aérienne eut lieu[18].

Les dernières évolutions dans le plan

Face au risque de crise diplomatique notamment avec l'URSS, et en pleine guerre froide, l'administration Kennedy, successeur d'Eisenhower, qui privilégiait les considérations politiques par rapport à la tactique militaire, et qui ne voulait pas que les États-Unis soient perçus comme l'envahisseur, requit plusieurs changements : modification du lieu de débarquement de Trinidad, cité balnéaire de 18 000 habitants vers une autre zone moins peuplée de Cuba afin de diminuer la visibilité liée à l'opération. En second, toujours pour réduire la visibilité de l'opération et notamment le soutien par les États-Unis, le président demanda à ce que le nombre d'appareils B-26 pour la première frappe aérienne fut réduit. Ils passèrent de seize à huit appareils. Enfin, le débarquement devait avoir lieu de nuit[7].

Le 11 mars, Richard Bissel présenta 4 nouveaux plans différents qui furent refusés par la présidence qui donna 3 jours pour proposer un nouveau plan[19].

En réponse, la CIA présenta à l'état-major conjoint trois opérations alternatives les 14 et 15 mars 1961 : une modification du plan Trinidad, un débarquement sur une zone au nord-est de Cuba et un débarquement sur la nouvelle zone de Zapata[18],[19].

Dans ce dernier cas, il prenait en compte la proximité de la capitale cubaine de La Havane à moins de soixante kilomètres et la proximité d'une piste d'aéroport mais pas l'absence de zone portuaire équipée pour recevoir des navires et la zone marécageuse inhospitalière et infestée d'une faune sauvage rendant toute manœuvre de repli vers les montagnes de l'Escambria, foyer de guérilla anti-castriste mal soutenue par la CIA, extrêmement difficile[15]. L'état major valida la troisième opération de débarquement à Zapata mais indiqua qu'aucun des concepts alternatifs présentés n'était considéré comme réalisable et surtout susceptible d'atteindre l'objectif défini dans le plan d'invasion initial sur Trinidad.

Cependant, le 16 mars 1961, ces trois plans alternatifs étaient présentés à la Maison-Blanche par Richard Bissell et Allen Dulles et le , assurant que cette opération réussirait avec des chances supérieures à celles de l'opération PB Success au Guatemala. Après plusieurs vifs débats internes, l'opération Zapata fut validée par la présidence[18].

Différences de vues entre les opérationnels et les politiques

Dès novembre 1960, au cours de la passation de pouvoirs, le futur président John F. Kennedy fut informé des opérations et des plans destinés à renverser le régime de Fidel Castro par Allen Dulles et Richard Bissell, respectivement directeur et responsable des opérations clandestines de la CIA. Le 19 janvier 1961, il fut reçu par le président sortant, Dwight Eisenhower où ils abordèrent la nécessité de changer le régime installé à la Havane. Ce dernier recommanda alors au président nouvellement élu d'agir rapidement contre Cuba[20]. En effet, une livraison d'avions MiG devait intervenir à la suite de la visite en URSS du frère de Fidel Castro, Raúl Castro, qui garantirait la supériorité aérienne cubaine dans le ciel à partir du printemps 1961[12].

Toutefois, l'administration Kennedy hérita directement des divisions au sein même de l'appareil d'État américain. Initialement prévue pour l'automne 1960, l'opération fut décommandée une première fois par le président Eisenhower avec l'accord de Kennedy. En effet, si la CIA et le Pentagone étaient convaincus pour une intervention armée contre le régime castriste, le département d'État penchait davantage pour une solution de pourrissement indiquant qu'il fallait « laisser assez de corde à Castro pour pouvoir se pendre ». En parallèle, la communauté des réfugiés cubains anti-castristes demandait une action contre le régime de Fidel Castro[6]. Pourtant élu sur une ligne politique plus dure contre Cuba, face au candidat républicain Richard Nixon durant la campagne présidentielle de 1960, John F. Kennedy héritait de fait d'un plan imaginé et conçu par l'administration Eisenhower et devait composer et arbitrer avec l'ensemble des forces en action sur ce sujet au sein du Conseil de sécurité nationale[6]. Le , le président tenta d'amener le département d'État, la CIA et le département de la Défense à une action commune et coordonnée, ce qui s'avera être impossible en raison de la différence des points de vue[7].

Allen Dulles, le chef de la CIA, afin de rassurer le président Kennedy, initialement fort réservé sur le projet[6], en raison des menaces de l'URSS sur la partie ouest de Berlin en Allemagne alors divisé en deux, insista sur le fait qu'une fois le débarquement lancé, ce dernier ferait naître mécaniquement l'insurrection derrière les lignes cubaines et des défections dans le camp de Castro[20] en se basant sur la certitude, sur la foi des rapports d'analyse, d'un soutien populaire de l'invasion dans la société cubaine[11].

Le 11 mars fut également indiqué au président par Allen Dulles et Richard Bissell que le Guatemala ne tolérerait pas la présence des camps d'entrainement d'anti-castristes au-delà du , que le potentiel d'entrainement de la brigade était à son maximum (malgré une mutinerie incluant 500 exilés cubains dans le camp du Guatemala intervenue fin janvier). Enfin, en cas de dissolution, la présidence prenait le risque potentiel de renvoyer dans leurs foyers nombre de cubains déçus devant l'absence de fermeté des États-Unis[6]. En outre, le chef de la CIA insistait sur le fait qu'en cas de succès, qu'il considérait comme certain[19], le prestige du président nouvellement élu serait renforcé sur le plan international[21].

De fait, à la suite des modifications apportées sur le plan initial comme demandé (voir paragraphe précédent), sur la foi des rapports de la CIA et malgré l'avis de Dean Rusk et Chester Bowles, le dossier d'analyses du sénateur J. William Fulbright[note 1]et les interrogations de Dean Acheson, le président John F. Kennedy, renouvela l'accord d'aide pour l'invasion des anti-castristes aux dirigeants de la CIA à la condition impérative que les États-Unis n'interviendraient en aucun cas militairement[2],[20],[6]. En outre, le président se réserva le droit d'annuler l'opération jusqu'à 24 h avant son démarrage si la situation internationale l'exigeait[6]. De même, bien que l'opération soit menée par la CIA, avec la subordination des chefs d'état-major, le président conservait le droit d'intervenir sur l'emploi de la force armée et notamment aérienne[12].

Enfin, le , au cours de sa conférence de presse hebdomadaire, le président réaffirma publiquement que les États-Unis n'interviendraient en aucun cas en cas d'attaque contre Cuba[12] :

« Je veux dire d'abord qu'il n'y aura sous aucune condition d'intervention à Cuba par les forces armées des États-Unis. Ce gouvernement fera tout son possible, et je pense qu'il est à la hauteur de ses responsabilités, pour s'assurer qu'il n'y a aucun Américain impliqué dans des actions à Cuba. Ensuite, le Département de la Justice a accusé Mr Masferrer, de Floride, de tramer une invasion de Cuba pour établir un régime du type Batista. Cela devrait montrer les sentiments de ce pays envers ceux qui veulent rétablir ce type d'administration à Cuba. Troisièmement, nous n'entreprendrons aucune action quant aux intérêts économiques détenus par des citoyens américains à Cuba, autres que des négociations formelles et normales avec une Cuba libre et indépendante[7]. »

Le 14 avril, l'opération fut confirmée par la présidence[18].

Le déroulement de l'opération

12 avril : les prémices de l'opération

La troupe d'invasion fut regroupée le à Puerto Cabezas, un port sur la côte atlantique du Nicaragua. Elle fut embarquée sur cinq cargos simples non munis de protection, sauf antiaérienne : le Houston, le Barbara J, le Blagar, le Caribe et le Rio Escondido de la compagnie Garcia Line, dirigée par un exilé cubain permettant de camoufler la participation des États-Unis par voie maritime. Ils étaient appuyés par 2 navires d'escorte[12]. Les barges de débarquement étaient des canots de m de long de style hors bord mais non prévues pour le débarquement de troupes[12]. Lors de l'embarquement, les agents de la CIA assurèrent aux volontaires cubains, en montrant les appareils B-26 maquillés aux couleurs cubaines et stationnés sur la base que la maîtrise de l'air serait assurée pour le débarquement[12].

15 avril : démarrage du bombardement aérien et diversion médiatique

Le matin du samedi 15 avril 1961, huit bombardiers américains B-26 peints aux couleurs cubaines (dans l'intention de faire croire qu'il s'agissait d'une rébellion cubaine et non d'une attaque américaine), en violation des conventions internationales, décollèrent du Nicaragua et attaquèrent les bases aériennes de La Havane et de Santiago (sud). Les avions américains bombardèrent les aéroports et aérodromes du pays, détruisant une grande partie des avions au sol (civils et militaires). Les principaux bombardements touchèrent Ciudad Libertad, La Havane, San Antonio et Santiago de Cuba. La moitié des appareils de l'aviation militaire cubaine ainsi que des avions civils sont détruits au sol[22]. Sept victimes cubaines sont également relevées[11].

Un des B-26 qui avaient bombardé les sites, criblé de balles, demanda un atterrissage d'urgence en Floride. Le pilote, se présentant comme un membre de l'armée cubaine et déserteur, indiqua aux journalistes qu'avec d'autres militaires, il avait décidé de se rebeller et de prendre la fuite après avoir bombardé plusieurs sites[11]. Cette opération d'intoxication, qui avait été montée intégralement par la CIA, fut défendue par l'ambassadeur des États-Unis, Adlai Stevenson, laissé dans l'ignorance, à l'ONU (où il sera d'ailleurs en conséquence ridiculisé)[11]. Les journalistes américains découvrirent cependant rapidement la fraude[17] ce qui va influencer les décisions de l'administration Kennedy par la suite et notamment les bombardements prévus[11],[23]. Adlai Stevenson câbla en urgence auprès de Dean Rusk pour l'alerter du risque d'un scandale pour les États-Unis d'un niveau équivalent à celui provoqué par la chute de l'U2 du pilote Francis Gary Powers abattu au-dessus de l'URSS.

Cependant, Castro a caché ses avions hors des bases militaires : groupés par trois, camouflés et défendus par des batteries anti-aérienne, quatorze à quinze appareils sont restés intacts et joueront un rôle décisif 48 heures après. De plus, l'ensemble des forces armées sont placées en état d'alerte. Fidel Castro déclara alors « si ces attaques aériennes sont un prélude à une invasion, le pays est prêt à se battre et résistera et détruira les forces qui tentent d'envahir notre pays ».

Le même jour, en réaction au bombardement, Fidel Castro fait déployer les forces militaires sur l'île et les leaders rejoignent leur poste de commandement respectifs : Raúl Castro dans la province d'Oriente (partie orientale), Che Guevara à Pinar del Rio (partie ouest de l'île), Juan Almeida Bosque à Santa Clara (partie centrale), Ramiro Valdes au contre-espionnage et Guillermo Garcia au centre tactique de La Havane[7].

16 avril : les premières réactions diplomatiques et premières opérations en mer

Le dimanche 16 avril, lors de l'enterrement des sept victimes des bombardements, Fidel Castro, après avoir comparé le débarquement à l'attaque de Pearl Harbor, lança : « Ce que les impérialistes ne peuvent nous pardonner, c'est d'avoir fait triompher une révolution socialiste juste sous le nez des États-Unis »[6]. Il fait diffuser à la population les ordres suivants :

« Chaque Cubain doit occuper le poste qui lui revient dans les unités militaires et les centres de travail, sans interrompre ni la production ni la campagne d'alphabétisation[22]. »

En parallèle, l'annonce cubaine d'une invasion fut très mal accueillie dans les milieux diplomatiques y compris à Washington D.C.. De fait, elle contribua à faire annuler le second raid prévu de B-26 par Dean Rusk, ce qui fut confirmé par le président Kennedy[6],[2], faisant passer en priorité les exigences politiques par rapport aux opérations militaires sur le terrain[23].

Entre-temps, arrivée en face de Playa Larga, la brigade anti-castriste préparait son débarquement. À 23 h, cinq hommes grenouilles dont des agents de la CIA qui avaient tenu à accompagner les anti-castristes (malgré les ordres reçus qui leur interdisaient de le faire), débarquèrent du cargo Blagar[12] pour pouvoir gagner la plage et guider les premières barges de débarquement[6].

17 avril : débarquement handicapé et résistance cubaine inattendue

La baie des Cochons près de Playa Larga.

Le lendemain, le 17 avril vers 1 h 15, la brigade 2506 débarqua en deux endroits, à Playa Larga et Playa Girón, c'est-à-dire au fond et à l'entrée orientale de la baie des Cochons, à 202 km au sud-est de La Havane et à 25 km l'une de l'autre. Un troisième débarquement prévu dans l'anse de la Caleta Buena entre les deux plages ne put avoir lieu.

Au large, des cargos et de nombreux autres bâtiments de guerre américains n'intervinrent pas militairement, étant destinés à consolider la tête de pont. Les exilés cubains, qui débarquèrent dans une région agricole isolée peu peuplée et de charbonneries et dont les habitants avaient bénéficié des réformes agraires mises en place par le gouvernement de Castro, ne reçurent pas le soutien attendu de la part des populations civiles[7].

Dès le débarquement, les troupes sont repérées par les miliciens qui ont, eux aussi, été placés en état d'alerte depuis le bombardement du 15 avril et qui vont transmettre l'alerte auprès du commandement militaire cubain. La brigade, grâce à son armement moderne, prit rapidement le dessus sur les miliciens[11].

Dès que l'alerte fut transmise, Fidel Castro, qui se trouvait alors à la Havane, donna l'ordre à un premier bataillon de 900 soldats stationnés sur la route de Playa Larga d'intervenir et fit bloquer les trois seules routes d'accès qui traversaient le marécage. En parallèle, les forces aériennes cubaines et les miliciens reçurent l'ordre d'attaquer la force d'invasion dès l'aube. La brigade, qui d'après le plan initial était censée livrer des combats dans les terres et bénéficier de la supériorité aérienne, s'est retrouvée clouée sur les plages[6]. Des dizaines de péniches soumises au feu cubain sont alors coulées[21], obligeant les cargos à reculer pour se mettre hors de portée des tirs[12].

Bien qu'épaulée par un régiment de parachutistes largué le même jour avec l'objectif de prendre d'assaut et de verrouiller les trois routes qui mènent à la baie des Cochons, la brigade est également rapidement arrêtée par des tirs de mortiers des miliciens, tandis que les actions conjuguées de la défense aérienne et de l'aviation cubaine, dont les pilotes avaient été formés aux États-Unis, se révélaient particulièrement efficaces pour mitrailler les hommes et bombarder les bateaux de la brigade[21],[11]. Des soldats de la brigade tentèrent également de se replier vers les montagnes de l'Escambria au travers du marais ceinturant la plage, mais furent rapidement repoussés par l'armée cubaine.

Parallèlement, afin de gagner la bataille médiatique par les ondes et inciter la population cubaine à la rébellion, le poste Radio Swan, dans le cadre de sa campagne d'intoxication, incitait l'armée cubaine à se révolter et faisait croire que l'invasion était en passe de réussir. Elle diffuse également la fausse information du suicide de Raúl Castro[7].

18 avril : combats sur la plage et escarmouches diplomatiques

Au matin, les deux têtes de la brigade 2506 parvinrent à se rejoindre malgré le feu de l'armée cubaine.

À l'ONU, à New York, l'enceinte de l'institution fut dès le matin, le théâtre d'un intense combat diplomatique entre d'une part les États-Unis et d'autre part l'URSS. Cette dernière sommait les États-Unis de « mettre fin à l'agression contre la république de Cuba », indiquant qu'elle se réservait « le droit, au cas où l'intervention contre Cuba ne cesserait pas sur l'heure, de prendre, conjointement avec d'autres États, les mesures nécessaires pour porter assistance à la république de Cuba »[7].

À 10 h, les États-Unis nièrent toute implication de leur part dans l'intervention militaire sur le sol cubain et réaffirmaient leur droit à protéger l'hémisphère de toute agression extérieure.

À 12 h, sur la plage, une des têtes de pont de la brigade a cédé et les suivantes sont sur le point de le faire.

À Washington, un nouveau raid aérien avec des avions maquillés aux couleurs cubaines avec des munitions au napalm et pilotés par des américains est autorisé à 14 h[7]. Au sol, les troupes cubaines furent prises par surprise par les bombardements tandis que les anti-castristes tirèrent sur les appareils qui étaient censés les aider.

Parallèlement, des manifestations de soutien notamment devant les ambassades de Cuba avaient lieu à travers le monde entier[11].

19 avril : reddition de la brigade et implication américaine

A4D-2 Skyhawks américains déployés au-dessus de l'USS Essex.

Vers une heure du matin, la présidence américaine, au vu des rapports alarmants, autorisa un raid d'une heure, de 6 h 30 à 7 h 30 par des jets non identifiables mais avec l'interdiction d'engager le combat[7].

Richard Bissell sollicita la présidence pour obtenir l'intervention des forces armées aériennes de l'US Navy stationnées à proximité. Le président John F. Kennedy refusa et ne concéda que l'escorte par des avions de l'US Navy du nouveau raid des B-26. Cette protection, du fait de la mauvaise organisation de l'armée qui avait oublié la différence des fuseaux horaires entre le Nicaragua et Cuba[12], ne put avoir lieu. Les escadrilles ne se rencontrèrent pas et les quatre B-26 de ce raid, arrivés une heure trop tôt virent deux d'entre eux abattus par les forces aériennes cubaines[2],[12]. Les pilotes décédés, qui étaient de nationalité américaine après la défection des pilotes cubains anti-castristes inquiétés par les tirs de la DCA cubaine, contribuèrent à mettre en avant la responsabilité et l'implication des États-Unis, à la suite des déclarations de la délégation cubaine au sein de l'enceinte de l'ONU[7].

L'intervention de la milice et des troupes de Fidel Castro, appuyés par la dizaine d'avions militaires cubains encore en état et par les chars non détruits par les raids précédents des B-26, continuait à accroître la pression sur les troupes de la brigade. Rapidement à court de munitions, l'aviation cubaine ayant coulé le seul cargo porteur de ces dernières le cargo Rio Escondido porteur de 145 tonnes d'armement et de réserves de carburant[23],[19], les combattants anti-castristes se rendirent à l'armée cubaine le 19 avril après 72 h de combat[24]. À 14 h, sur Playa Larga, tandis que les forces au sol se rendaient, le commandant de la Brigade 2506 envoyait son dernier message : « Je détruis tout l'équipement et les communications. Je n'ai plus rien pour me battre. Je pars vers les bois. Je ne peux pas vous attendre »[7].

Quelques dizaines de combattants dont les trois chefs de la brigade seront capturés dans les jours suivants dans les marécages après avoir échappé au quadrillage des troupes cubaines pendant plusieurs jours[24] et notamment Manuel Airtime qui tint treize jours. Vingt-deux hommes ayant réussi à s'échapper par la plage dériveront pendant quinze jours, recourant au cannibalisme, avant d'être secourus en mer[12].

Fidel Castro, arrivé par la suite sur la plage du débarquement tira à l'aide d'un SAU-100 sur l'un des cargos échoués, le Houston, faisant coup au but lors du second tir. En fin d'après-midi, il communiquait sur l'invasion :

« Les forces de l'armée rebelle et des milices révolutionnaires nationales ont pris d'assaut les dernières positions occupées par les forces mercenaires sur le territoire national… Playa Giron, qui était le dernier point des mercenaires, est tombée à 5 h 30 de l'après-midi. L'ennemi a subi une défaite dévastatrice[7]. »

Le soir, il effectuait la revue des prisonniers de la brigade. Un membre de la brigade, Enrique Ruiz Williams qui avait dissimulé une arme tenta de l'assassiner avant d'être neutralisé par le service de sécurité[12].

Après la bataille, Che Guevara soutint des discours de moralité auprès de certains des prisonniers : un curé phalangiste qui demanda pardon mais qui fut bientôt renvoyé en Espagne, un play-boy qui plaida aussi non coupable et ne voulut pas être confondu avec les « sbires », un Noir à qui Guevara fit la leçon : « tu es venu te battre dans une invasion financée par un pays où règne la ségrégation raciale, pour permettre aux jeunes gens biens de récupérer leurs clubs privés, tu as moins d'excuses que les autres »[16].

Résultats

Bilan militaire

114 anti-castristes furent tués et 1 189 furent faits prisonniers. De plus, quatre pilotes civils aux commandes des B-26 abattus par l'aviation cubaine furent également perdus. En effet, la CIA avait, en outre, oublié d'informer les responsables politiques qu'à la suite de la défection des pilotes cubains, ces derniers avaient de fait été remplacés par des pilotes civils de nationalité américaine[2]. Contrairement aux analyses de la CIA, aucune tentative d'insurrection intérieure contre le pouvoir en place ne fut observée[22].

Acceptation de la défaite et reconnaissance de l'implication des États-Unis

Les États-Unis furent dénoncés à l'échelle internationale comme une puissance agressive à l'égard de l'île de Cuba[21]. De fait, les tentatives de l'administration Kennedy pour tenter de se dédouaner de toute implication des États-Unis dans cette tentative d'invasion furent vaines auprès de l'opinion publique nationale et internationale. Le président John F. Kennedy accepta l'entière responsabilité de l'opération et de l'humiliation vécue par les États-Unis le durant une conférence de presse[22]. Ce fut la première véritable épreuve de son mandat présidentiel au bout des cent premiers jours[2]. Il déclara à son conseiller Arthur Schlesinger Jr :

« Selon un vieux dicton, la victoire a des pères par centaines et la défaite est orpheline[20]. »

Libération des prisonniers

Les prisonniers de l'opération furent libérés le après un accord portant sur une somme globale de 53 millions de dollars, soit 47 000 dollars par prisonnier libéré[11], incluant de la nourriture, des fournitures agricoles et des médicaments[24], pour lesquels, Robert Kennedy, le procureur général américain, dut notamment faire pression sur les laboratoires pharmaceutiques américains[2]. Les négociations furent menées par l'avocat d'affaires James B. Donovan, ancien agent de l'OSS (l'ancêtre de la CIA), qui était intervenu auparavant dans l'échange du pilote de l'avion espion U-2, Gary Powers, abattu en 1960 au-dessus de l'URSS[12].

Les membres survivants de la brigade furent reçus par le président John Fitzgerald Kennedy et son épouse Jacqueline Kennedy, le aux États-Unis à Miami à l'Orange Bowl. Au cours d'une cérémonie, le drapeau de la brigade fut remis au président des États-Unis[25] qui, emporté par l'émotion[2], déclara alors : « Je vous assure que ce drapeau vous sera rendu dans une Havane libre. » Toutefois, en 1976, le drapeau fut redemandé pour promesse non tenue. Il fut renvoyé aux survivants de la brigade 2506 par voie postale[22].

Quelque 300 vétérans de la brigade intégrèrent par la suite les services secrets américains. Ils furent dépêchés fin 1962 au Congo pour soutenir les troupes de Joseph-Désiré Mobutu, prirent part à l'opération Phoenix au Viêt Nam , à la traque de Che Guevara en Bolivie, à des actions de déstabilisation du gouvernement chilien de Salvador Allende[13].

Causes de l'échec

Les causes de l'échec, comme le note l'inspecteur Lyman B. Kirkpatrick, Jr.[14], sont multiples, balayant du haut au bas les différentes instances de l'appareil d'État américain. Certaines causes étant de nature politique (niveau administratif), d'autres tactiques, opérationnelles et informationnelles (niveau des services secrets). L'ensemble de ces facteurs conjugués conduisirent à l'échec retentissant de l'opération Zapata.

Causes politiques

D'un point de vue institutionnel, en demandant le secret le plus absolu et qu'aucun membre des forces militaires ne soit impliqué dans l'opération par les différents présidents successifs, Dwight Eisenhower et John Fitzgerald Kennedy[26], aucune coordination inter services notamment entre le ministère de la défense (le Pentagone) et les services secrets ne fut possible ou admise (notamment par la CIA), ce qui priva du même coup le projet d'une expertise militaire dans le cadre d'un débarquement amphibie[7],[19]. Or, les militaires américains évaluaient les probabilités de réussite d'une telle opération à seulement 30 %. Cette information ne fut pas transmise au président Kennedy[21].

Pour John F. Kennedy, outre une volonté acharnée de se débarrasser de Fidel Castro comme il l'avait défendue lors de la campagne présidentielle face au candidat Richard Nixon, véritable initiateur du programme, jointe à un manque d'imagination stratégique relatifs aux moyens déployés, l'amenèrent malgré ses doutes, les nombreuses mises en garde de ses conseillers et ses propres interrogations, à se fier à la CIA et ses affirmations de succès "probable" tout en ignorant ses faiblesses réelles[7],[14].

Causes tactiques

Pour le journaliste français Pierre Kalfon, l'échec du débarquement résulterait de plusieurs raisons notables.

Absence de soulèvement populaire

D'une part, aucun soulèvement populaire tel qu'envisagé et pronostiqué par la CIA[7], ne s'est produit. Pour le journaliste, la CIA se serait à ce sujet laissée intoxiquer par sa propre propagande et aurait refusé de comprendre qu'en 1961, une très large majorité de Cubains soutenait une révolution qui, à ce moment, n'avait pas encore adopté un caractère communiste mais se traduisait plus simplement par des réformes démocratiques et un début de redistribution des richesses en plus d'une campagne d'alphabétisation. La CIA avait estimé au contraire que la population allait acclamer les libérateurs et aider au renversement du régime castriste[2],[6],[14]. En outre, à la différence des opérations précédentes, notamment au Guatemala durant l'opération PB Success, l'armée cubaine avait été, entre-temps, purgée idéologiquement par le régime de Fidel Castro de tous les éléments politiques favorables ou potentiellement favorables aux États-Unis et qui auraient pu procurer une aide aux forces d'invasion extérieures, permettant une loyauté des troupes au sol dont la valeur combative avait été en parallèle, sous-estimée par les services de renseignements américains[14].

Sous-estimation des capacités de résistance de l'armée cubaine

Par ailleurs, les Américains imaginaient avoir entièrement détruit la petite aviation cubaine qui comptait 36 appareils dans les bombardements des quelques bases aériennes du pays qui avaient précédé le débarquement, et n'avaient donc pas intégré à leur stratégie la possibilité et condition de la réussite sine qua non de l'opération, d'une intervention aérienne au côté des forces cubaines, les rapports initiaux de bombardement ayant surestimé très largement les dégâts[7]. En réalité, huit appareils avaient été dissimulés et convertis en avions de combat. Durant les combats, ceux-ci parvinrent à couler deux navires de transport et à abattre deux bombardiers B-26 américains du second raid aérien, ce qui influença fortement l'évolution de la bataille[16].

En parallèle, la CIA ne possédait aucune information intérieure fiable sur l'armée du régime cubain qui comptait 60 000 membres réguliers sans compter les forces de la milice[19].

Un environnement géographique insuffisamment étudié

De même, le lieu même du débarquement initialement prévu à Trinidad, cité balnéaire, simple et facile d'accès, près des groupes anti-castristes des montagnes de l'Escambray a été modifié pour la plage de la baie des Cochons, située plus à l'ouest[27]. Or, cette dernière, moins bien connue, cumule beaucoup d'obstacles naturels, tel les récifs coralliens sur lesquels coulèrent plusieurs chaloupes de débarquement et que les analystes de la CIA n'avaient pas détectés, des zones marécageuses naturelles à la flore impénétrable et une faune composée de crocodiles, de dangereux porcs sauvages, de serpents venimeux, de tarentules, de scorpions et d'escadrons de moustiques, de guêpes empêchant tout repli stratégique pour continuer le combat sur le mode de la guérilla et d'eaux infestées par des requins[7]. Les cartes en possession de la CIA dataient de 1895 et n'avaient pas été mises à jour[19]. À ces conditions extrêmes s'ajoutaient des handicaps tactiques comme l'absence de relief géographique protecteur permettant une approche dissimulée et donc un effet de surprise [28]. En outre, bien qu'effectué de nuit, le débarquement des exilés cubains ne bénéficia pas également des opérations de diversion prévues par la CIA mais non réalisées ou mal orchestrées par cette dernière, permettant d'éviter une concentration des moyens de riposte cubains sur la zone de la baie des Cochons[24]. En outre, le bombardement aérien 24 heures plus tôt avait placé les forces cubaines en état d'alerte[19].

Toutefois, le changement du lieu du débarquement qui fit l'objet de vives critiques aux États-Unis a également été relativisé en 2001 lors d'un colloque international faisant intervenir des acteurs directs de cette opération dont deux des conseillers spéciaux du président Kennedy, Richard Goodwin et Arthur Schlesinger Jr, deux anciens officiers de la CIA, ainsi que cinq vétérans de la brigade 2506 anti-castriste, le commandant des forces cubaines de l'époque le général José Ramon Fernandez et Fidel Castro lui-même. Il fut indiqué que les forces cubaines avaient préventivement renforcé Trinidad contre toute invasion par l'extérieur et par voie maritime mais au contraire n'avaient pas anticipé un débarquement sur la plage de la baie des Cochons[20].

Fidel Castro déclara :

« Nous avions étudié les lieux de débarquement possibles [... Et] nous pensions que Trinidad en était un. Nous étions fin prêts à Trinidad. Nous y avions posté des hommes, ainsi que de l'artillerie lourde. Si le débarquement avait eu lieu dans cette ville, il y aurait eu un bain de sang... En revanche, nous n'étions pas prêts à la Playa Giron. Ce choix n'était pas mauvais du tout. Le plan stratégique était impeccable, l'armement impeccable, l'utilisation des parachutistes aussi. S'ils avaient réussi à prendre les routes menant à la plage[20]... »

Une collecte déficiente des informations liée à une évaluation des données incorrecte

La Central Intelligence Agency, en montant l'opération, a commis plusieurs graves erreurs d'évaluation notamment celle des capacités militaires réelles de la brigade anti-castriste et de l'armée cubaine qui fut clairement sous-estimée[15], des conditions géographiques du lieu du débarquement, de l'absence de soulèvement populaire, condition pourtant indispensable pour la réussite de l'opération[21]. De même, la centrale de renseignement n'avait pas tenu compte d'une étude qui indiquait que le régime cubain bénéficiait alors d'un vaste soutien de la population cubaine[22]. Leurs homologues des services secrets britanniques avaient également pronostiqué que la brigade des exilés cubains ne devait s'attendre à aucun soutien ni volonté de changement de la part de la population cubaine en place[29].

De même, des défaillances d'organisation et de coordination furent également constatées en interne. En effet, la mission avait été confiée à un service d'action extérieur aux procédures de contrôle habituels de l'agence et composé d'agents de troisième ordre[2] afin de maintenir la dissociation maximale par rapport aux États-Unis. Or, ce faisant, la centrale de renseignement se priva de toute réflexion, d'évaluation constructive et esprit critique interne dans la conception et la mise au point de l'opération, ses concepteurs ne bénéficiant pas du recul nécessaire pour y apporter les corrections requises[30].

L'opération a, de ce fait, démontré la nécessité impérative de devoir maintenir une séparation nette et précise entre les évaluateurs chargés d'analyser la qualité des renseignements collectés et les organisateurs chargés de la conception des opérations basées sur ces derniers[14].

Plus profondément et gravement, cet échec a marqué également globalement l'échec de la mission première de la CIA à savoir : la collecte et l'évaluation de renseignements fiables pour aider la présidence dans la mise au point de sa politique étrangère qui avait dévié en se concentrant sur la mise au point d'actions clandestines pour influencer et renverser les régimes extérieurs[19].

À ce sujet, le prédécesseur de John F. Kennedy, le président Dwight D. Eisenhower, avait conclu en janvier 1961, après huit ans de mandat présidentiel et avant la passation de pouvoirs, que : « La structure de notre organisation de renseignement est défectueuse. Depuis 8 ans, je suis toujours vaincu dans ce combat », concluant que, face à une situation qui n'avait pas changé depuis l'attaque de Pearl Harbor, qu'il laisserait « des cendres en héritage » à son successeur[19].

Une CIA autonome par rapport au pouvoir politique

Plus profondément, et beaucoup plus gravement, la CIA a également agi de manière très autonome[12] par rapport au pouvoir politique en place à la Maison-Blanche en menant l'opération à son terme en mettant la pression sur la présidence et ce, malgré les fortes probabilités d'échec[21],[28],[19]. En 1996, Richard Bissell, le planificateur en chef de l'opération au sein de la CIA, reconnut que même avec un second raid aérien effectué, si accordé par le président Kennedy, les objectifs initiaux de création et consolidation par la brigade 2506 d'une tête de pont n'auraient pas pu être atteints[20]. Le chercheur Howard Jones a également analysé dans son ouvrage sur cette question parue en 2010[31] que la CIA savait que, « sans une insurrection de masse, la force d'invasion aurait besoin d'au moins cinq mille hommes pour occuper un secteur du pays »[22]. Or, cette information ne fut pas transmise au président John F. Kennedy[21].

Le 18 novembre 1960, l'agent Jack Easterline responsable de l'antenne de la CIA au Venezuela avait averti Richard Bissel en indiquant :

« Notre projet initial paraît maintenant irréalisable étant donné les contrôles institués aujourd'hui par Castro (..). L'agitation intérieure que l'on croyait jadis possible n'aura pas lieu, en outre les défenses cubaines ne permettent plus le genre d'assaut prévu. Notre second plan (une force de 1500 à 3000 hommes pour s'assurer la maîtrise d'une plage avec une piste d'atterrissage) est dorénavant considéré comme un objectif impossible à atteindre autrement que par une opération conjointe Agence-Département de la Défense[19]. »

De même, Jack Easterline l'avait également alerté à plusieurs reprises sur l'impérative nécessité de neutraliser l'intégralité de l'aviation cubaine[19]. Cette information ne fut pas transmise au président Kennedy.

Allen Dulles, à la différence du complet succès probable qu'il pronostiquait au président John F. Kennedy, avait précédemment informé le précédent président des États-Unis, Dwight D. Eisenhower, que l'opération de débarquement avait une chance sur cinq de réussir et nulle sans soutien aérien[19].

Les responsables de la CIA, Richard Bissel et Allen Dulles, n'informèrent donc pas les responsables politiques de la faible probabilité de réussite puis de l'échec quasi certain de l'invasion dès qu'ils eurent connaissance de l'annulation du second raid aérien de B-26 et ce, dans l'espoir secret de leur forcer la main en maintenant l'opération, et ainsi pouvoir faire intervenir la force armée. Allen Dulles avait en effet indiqué, dans ses mémoires, qu'il pensait qu'une fois le feu vert présidentiel obtenu et l'invasion lancée, toutes les mesures nécessaires, y compris militaires, auraient été prises par la Maison-Blanche pour en assurer le succès[2],[21]. Ce qui ne fut pas le cas[20], ce que la CIA fut incapable de concevoir[21].

En 1998, le dernier volume des cinq consacrés à l'opération de la baie des Cochons compilés par l'historien officiel de l'agence, Jack B. Pfeiffer, de 1974 à 1984, rendu public, a révélé que l'agence de renseignements, chargée de l'opération paramilitaire, n'envisageait aucune victoire possible sans l'intervention de la force armée américaine[7],[32].

Les dirigeants de la CIA avaient donc volontairement soumis au président John F. Kennedy un plan dont les conditions de réussite contredisaient ses propres règles d'engagement interdisant tout engagement des forces militaires américaines dans l'invasion de Cuba[33].

Un pouvoir politique sans capacité d'évaluation

Le président John F. Kennedy se rendit compte parallèlement qu'il avait mal évalué le dossier présenté par la CIA en n'analysant pas les forces en présence comme lui avait fait remarquer au cours d'une réunion de préparation son conseiller Dean Acheson. Ce dernier lui avait posé la question du rapport des forces en présence, soit 1 500 hommes pour la brigade anti-castriste contre 200 000 hommes de l'armée régulière cubaine[20]. Le président se rendit compte parallèlement du choix incorrectement analysé du lieu de débarquement et, avec le recul, de la nécessité de confier une telle opération aux militaires et non aux agents de la CIA qui avaient cherché à faire intervenir l'armée régulière[21]. Enfin, à la question de savoir si l'effet de surprise du débarquement ne serait pas éventé par le bombardement aérien qui eut lieu 24 heures plus tôt, la CIA n'avait également pas apporté de réponse concrète[19].

À son conseiller Ted Sorensen, il déclara : « Comment ai-je pu être assez stupide pour les laisser faire[2] ? »

Une préparation insuffisamment camouflée

Outre la préparation désastreuse du projet par la CIA, cette dernière n'avait pas pris les mesures nécessaires pour en maintenir la confidentialité en entraînant les exilés cubains directement dans des camps américains militaires strictement interdits d'accès au public[14]. De plus, des fuites au niveau de la presse du Guatemala puis des États-Unis en novembre 1960, notamment sur l'existence du camp d'entrainement au Guatemala par le New York Times[11], au sein de la communauté cubaine anti-castriste aux États-Unis, évaluée à 200 000 personnes[14] qui était infiltrée par les espions cubains et y compris au sein même de la brigade[23], avaient informé les Soviétiques et les castristes des détails du plan américain. En effet, plus tôt dans le mois d'avril 1961, l'ambassade de l'URSS à Mexico informait Moscou de l'imminence d'un débarquement pour le 17 avril[15].

Un régime cubain préventivement sur ses gardes

Enfin, contrairement à ce que prévoyait la CIA, qui pariait sur un effondrement du régime cubain et un soulèvement populaire[21], il n'existait pas d'opposition véritable sur lequel le projet d'invasion pouvait s'adosser[15],[14],[19]. En effet, les rares maquis d'opposition dans les régions reculées des montagnes cubaines, étaient, au mieux, soit isolés, soit harcelés par les forces cubaines, en plus d'être mal ravitaillés par la CIA notamment par le biais de largages aériens (sur un total de 30 opérations de largage d'armes et munitions, seules 3 réussirent[19]). Ils se soldèrent pour la plupart par un affaissement rapide de leur capacité de nuisance[7] et leur capacité à soutenir un gouvernement cubain anti-castriste à partir de l'opération de débarquement[14]. En mars 1961, un déploiement de 60 000 miliciens et soldats cubains sur la zone du massif montagneux de l'Escambray avait conduit à la neutralisation de 421 guérilleros opposants au nouveau régime dont 39 avaient été tués et 381 fait prisonniers[18].

Comme le rappelle l'historienne française Jeannine Verdès-Leroux dans La Lune et le Caudillo, Castro avait fait procéder à d'énormes détentions préventives, totalement illégales, estimées par Herbert L. Matthews et d'autres auteurs à entre 100 000 à 200 000 personnes simplement suspectées d'être des opposants, sur tout le territoire[34],[14]. Ces rafles massives sont confirmées par Carlos Franqui[35]. Ce qui eut pour conséquence d'affaiblir davantage la résistance interne sur laquelle aurait dû s'appuyer l'invasion pour consolider la tête de pont envisagée par la CIA dans son plan initial[14].

En 1975, Raúl Castro déclarera :

« Si à ce moment-là [Kennedy] avait décidé de nous envahir, il aurait pu étouffer l'île dans une mer de sang et détruire la révolution. Heureusement pour nous, il a vacillé[36]. »

Tous ces facteurs conjugués concoururent à l'échec de l'opération Zapata dont les conséquences furent profondes.

Conséquences du débarquement

Panneau commémoratif à Playa Girón.

Une humiliation américaine

Globalement, pour la professeure de politique appliquée à l'université canadienne de Sherbrooke, Karine Prémont, l'échec de l'opération de la baie des Cochons se traduisit par une victoire morale pour Fidel Castro. Sur le plan mondial, le régime castriste apparut comme un David cubain qui a su résister au Goliath américain et reçut le soutien de l'ensemble de l'Amérique latine[21]. De même, cet événement a renforcé la cohésion sociale du peuple cubain derrière le Lider maximo[11] et solidifié la légitimité du régime castriste pour les décennies suivantes[11],[21].

Pour les États-Unis, l'humiliation de la baie des Cochons fut également vécue et perçue comme la première défaite politique, diplomatique et militaire depuis la Seconde Guerre mondiale et fut qualifié dans les archives de « perfect failure » (un « échec parfait »)[11].

Le régime cubain dans la sphère d'attraction de l'URSS

D'un point de vue géopolitique, l'opération Zapata, par un effet de cercle vicieux, a poussé le gouvernement cubain à s'allier ouvertement à l'URSS, sous le nom d'« opération Anadyr » qui débouchera sur la crise des missiles cubains en 1962. Comme le notait Philip W. Bonsal, ambassadeur des États-Unis à La Havane dans les premiers jours du régime castriste, « l'URSS s'est portée au secours de Castro uniquement après que les États-Unis eurent pris des mesures destinées à le renverser »[37].

De fait, Castro, après cette première tentative d'invasion, redoutait désormais une intervention directe des États-Unis sous une forme militaire[12]. Et en effet, moins de deux semaines après l'échec de l'opération Zapata, le président américain avait donné son accord pour un projet d'invasion de 60 000 soldats de l'armée américaine[15] dont les chefs étaient, tout comme la CIA, favorables à une invasion de l'île[21].

Pour l'URSS, le ralliement de ce dernier constitua la première victoire tactique sur une zone géographique sous influence directe des États-Unis et ce en pleine guerre froide face à une administration Kennedy hésitante et inexpérimentée sur le domaine de la politique internationale[12]. Cuba, de ce fait, représentait aux yeux des dirigeants du Kremlin, une pièce de choix sur l'échiquier géopolitique de la guerre froide qui les opposait à leurs homologues de Washington[1].

Intensification de la guerre secrète

Pour contrer et résoudre le problème cubain présent à leurs frontières et l'enjeu géo-stratégique que représentait l'île, les États-Unis mirent en pratique l'opération Mongoose ou Cuban Project[38] et ce, sous la direction de Robert Kennedy. Elle visait à saboter l'économie cubaine (destructions des récoltes, minages des ports, attentats contre des usines, etc.) pour exacerber les tensions à Cuba et générer un soulèvement populaire contre son gouvernement. Pour ce faire, la CIA établit dans la Naval Air Station Richmond (en) un plus grand centre d'opérations clandestines hors de son quartier-général à Langley, le JMWAVE (en), situé sur le campus de l'université de Miami et sous la couverture d'une entreprise d'électronique Zénith Technicological Services. Dirigée par le général Edward Landsale, un spécialiste de la guerre secrète ayant œuvré dans les Philippines depuis la seconde Guerre Mondiale, cette opération comporta en 1962 jusqu'à 600 agents de la CIA et 3000 agents contractuels américains et cubains pouvant s'appuyer sur la communauté cubaine anti-castriste réfugiée aux Etats-Unis.[38]

Les projets d'attentats contre Fidel Castro alliant la CIA et la mafia (notamment au travers des parrains tel que Sam Giancana, Carlos Marcello et Santos Trafficante), qui avait également d'énormes intérêts financiers liés au jeu, au trafic de drogues et à la prostitution dans l'île avant l'avènement de la révolution cubaine[note 2], furent accélérés notamment avec l'opération Mongoose[2] qui fut approuvée le par la présidence[11]. Par la suite, pas moins de huit tentatives seront faites au cours des années suivantes pour éliminer physiquement le leader cubain.

Parallèlement, l'armée américaine, favorable à une invasion directe de l'île[21], conçut des opérations de terrorisme contre des civils directement sur le sol des États-Unis afin de manipuler l'opinion publique américaine au moyen d'attentats et notamment avec l'opération Northwoods, projet conçu par le général Lyman Lemnitzer en mars 1962 mais refusé par l'administration Kennedy la même année et jamais mis en œuvre[39],[38].

La recherche des responsabilités

Au niveau des États-Unis, les dysfonctionnements observés dans les services secrets entraînèrent la création d'une commission d'enquête présidentielle dirigée par le général Maxwell Taylor, le conseiller militaire de la Maison-Blanche, et animée par Robert Kennedy, procureur général des États-Unis, afin de déterminer les responsabilités des différents acteurs. Allen Dulles et Arleigh Burke, organisateur de l'opération, furent obligés d'y assister[2],[14].

Le rôle de National Security Council (ou NSC) dont John F. Kennedy n'avait pas tenu compte dans un premier temps[19], fut renforcé notamment sur l'évaluation des informations et une centralisation de ces dernières fut intensifiée afin d'avoir une image la plus réaliste avant d'intervenir[21]. Les enseignements directement tirés de cette crise furent mis en application au cours de la crise des missiles d'octobre 1962 où le président John F. Kennedy rejeta les recommandations d'invasion de l'île par la CIA et l'armée américaine préférant une riposte graduée en évitant une escalade irréversible et permettant une solution diplomatique d'émerger au bout du compte[29],[40].

De plus, à la demande du président, un examen approfondi des méthodes de la CIA fut mené en interne par un membre de cette dernière : l'inspecteur général Lyman Kirkpatrick[2].

Rapport de Lyman Kirkpatrick

Une analyse critique des renseignements collectés

Parmi les conclusions, l'inspecteur-général de la CIA, Lyman Kirkpatrick, pointa notamment que cette dernière avait utilisé comme des marionnettes les opposants cubains en exil placés à la tête de l'expédition[41]. De même, la CIA ne disposait que d'un nombre limité d'agents et la majorité de ces derniers ne parlaient pas espagnol.

En outre, les rapports d'analyse du mouvement castriste et du « faible » soutien populaire supposé dont il bénéficiait[11], fournis par la CIA et rédigés par les agents sur place et approuvés par les ambassadeurs américains en place à Cuba, s'inscrivaient globalement dans la ligne politique qui était celle des États-Unis et du département d'État : le soutien inconditionnel au dictateur Fulgencio Batista à Cuba, motivé sous couvert de lutte contre le communisme, par la défense des intérêts économiques américains sur l'île de Cuba, malgré l'hostilité croissante et continue d'une majorité de la population[37]. Ainsi, le vice-président Richard Nixon, estimait d'un retour de voyage à la Havane, que bien que corrompu et contesté par une majorité croissante de la population cubaine, le dictateur Batista était « un ami des États-Unis » qui admirait « le mode de vie américain » et « la libre entreprise » et qui bénéficiait du soutien de l'armée[37]. Cette vision américaine déformée par le prisme de la lutte contre le communisme, expliquait pourquoi la CIA et également le département d'État, furent, de ce fait, incapables conceptuellement et institutionnellement, d'appréhender la réalité du terrain cubain et notamment sur la véritable volonté et des raisons des cubains à soutenir le régime de Fidel Castro[11]. À ce sujet, le président Kennedy avait déclaré :

« Je pense qu’il n’y a pas un pays au monde, y compris les pays sous domination coloniale, où la colonisation économique, l'humiliation et l'exploitation ont été pires que celles qui ont sévi à Cuba, du fait de la politique de mon pays, pendant le régime de Batista. Nous avons refusé d’aider Cuba dans son besoin désespéré de progrès économique. En 1953, la famille cubaine moyenne avait un revenu de 6 dollars par semaine […]. Ce niveau de vie abyssal s’est enfoncé à mesure que la population s’accroissait. Mais au lieu de tendre une main amicale au peuple désespéré de Cuba, presque toute notre aide prenait la forme d’assistance militaire – assistance qui a simplement renforcé la dictature de Batista – […] [générant] le sentiment croissant que l'Amérique était indifférente aux aspirations cubaines à une vie décente. »

De même, son conseiller personnel, Arthur M. Schlesinger, Jr. témoigna d'un séjour à la capitale cubaine :

« J'étais enchanté par La Havane – et horrifié de la manière dont cette ville adorable était malheureusement transformée en un grand casino et bordel pour les hommes d’affaires américains […]. Mes compatriotes arpentaient les rues, et partaient avec des filles cubaines de quatorze ans et jetaient des pièces uniquement pour le plaisir de voir les hommes se vautrer dans les égouts et les ramasser. On se demandait comment les Cubains – au vu de cette réalité – pouvaient considérer les États-Unis autrement qu'avec haine[42]. »

La CIA s'était également aussi largement laissée auto-intoxiquer par la réussite de son opération précédente au Guatemala en 1954 (nom de code : PB Success), en n'analysant pas les causes multiples de la réussite conduisant à sur-estimer ses véritables capacités opérationnelles[1]. Lyman Kirkpatrick conclut : « Nous pouvons affirmer avec certitude que l'agence ne disposait d'aucun élément permettant d'indiquer qu'une quantité significative de Cubains rejoindrait les envahisseurs[43]. » Le rapport souligne également une « organisation complexe et bizarre [...]. Cette opération avait pris une vie autonome. L'agence allait de l'avant sans savoir précisément ce qu'elle faisait »[43], tandis que les officiers de la CIA « étaient si absorbés par l'opération en tant que telle qu'ils n'en percevaient plus les objectifs ultimes »[43]. Globalement, cette « opération grotesque ou tragique, ou les deux à la fois [...] fut provoquée par l'arrogance institutionnelle, l'ignorance et l'incompétence de l'agence de renseignements »[44].

En conclusion, il recommandait le changement de l'organisation et de sa gestion et que ses responsables Allen Dulles et Richard Bissel n'avaient pas suffisamment tenus informé la présidence et leurs administration de tutelle[19].

Un rapport classé confidentiel à sa parution

Les conclusions du rapport furent dénoncées en interne par les responsables de la CIA qui accusèrent Kirkpatrick de malveillance personnelle[43] et qui imputèrent le fiasco de la baie des Cochons au président Kennedy pour son non-soutien aérien à l'invasion[44]. Or ce dernier, observait justement à l'époque Lyman Kirkpatrick, n'était aux affaires que depuis trois mois au moment de l'opération, et peut-être ne percevait-il pas tous les éléments du projet[43] car la CIA ne les lui avait pas exposés en détail, et plus grave, volontairement dissimulés[21]. D'ailleurs, Lyman Kirkpatrick ajoutait que la CIA avait manqué à ses devoirs les plus élémentaires à l'égard du président en ne l'avertissant pas que « le succès était devenu douteux et en ne lui recommandant pas que l'opération soit par conséquent annulée »[43].

Les conclusions du rapport, jugées désastreuses pour la CIA[41] et qui auraient pu clairement signifier la fin de l'institution en tant que telle[19], furent conservées secrètes pendant plus de quarante ans. Publié à l'origine en vingt exemplaires, dix-neuf furent détruits sur l'ordre du nouveau directeur de la CIA et remplaçant d'Allen Dulles, le républicain John McCone et seul le dernier exemplaire du rapport fut conservé au secret dans un coffre, signe de la gravité des conclusions[11],[19]. Elles furent révélées uniquement en février 1998 par les archives de la sécurité nationale[44] où la CIA reconnut enfin l'ensemble de ses erreurs[11] (rapport disponible en anglais en ligne).

Conséquences institutionnelles

Limogeage de la direction de la CIA

William Colby, directeur de la CIA de 1973 à 1976, rapporta dans son ouvrage qu'à la suite de « l'humiliation » infligée à Kennedy, ce dernier s'avoua tenté de « répandre les cendres de la CIA aux quatre vents ».

Dans un premier temps, le président lui retira la gestion des opérations spéciales au profit de l'armée américaine et réduisit son budget à hauteur de 20 %. Parallèlement pour contenir et empêcher durablement toute nouvelle interférence future de la CIA dans le déroulement de la politique étrangère des États-Unis, il écrivit également le 29 mai 1961 une lettre à l'attention de tous les ambassadeurs américains en poste à l'étranger libellé en ses termes : « Vous êtes en charge de toute l'action diplomatique des États-Unis, et j'attends de votre part de superviser l'ensemble des opérations. Cette mission inclut non seulement le personnel du Département d'État du Foreign Office, mais également de tous les représentants de tous les services des autres agences des États-Unis[33]. »

Dans un second temps, le 28 novembre 1961, Allen Dulles fut congédié de son poste historique de directeur de la CIA et remplacé par le républicain John McCone. Son adjoint Richard Bissell fut envoyé à l'Institut d'Analyses de la Défense après avoir présenté sa démission. Il fut remplacé par Richard Helms. Le Général Charles Cabell, chef des opérations (et frère d'Earle Cabell, maire de Dallas de 1961 à 1964), fut également limogé[2].

Il faut noter que lors de la passation de pouvoir le nouveau directeur de la CIA, John McCone ne fut pas informé par Allen Dulles de l'existence du programme illégal d'ouverture des courriers sur le territoire des États-Unis et dirigé par James Angleton. Fondée en 1947 par le président Harry Truman, la CIA avait l'interdiction formelle d'intervenir à l'intérieur des frontières du pays. Richard Bissel et Allen Dulles ne révélèrent pas également le programme planifié d'assassinat visant Fidel Castro en lien avec la mafia américaine. John McCone, pourtant nouveau directeur, mit deux ans pour découvrir ce second programme[19].

Ces informations furent révélées au grand public par la suite par la commission d'enquête sénatoriale sur les agissements illégaux des Services Secrets, dite Commission Church de 1975 à 1976, constituée par le congrès pour faire face aux révélations en cascade du grave scandale du Watergate qui secoua durablement la démocratie américaine.

Une CIA critiquée en externe et très critiquée en interne

Au sein de la CIA, le sentiment d'un abandon par la présidence, voire d'être devenu un bouc émissaire et, plus grave, d'une trahison, malgré la série d'erreurs, d'imprécisions et d'omissions accumulées par la centrale de renseignements commença à se répandre[2],[11],[21],[38]. Certains éléments de la centrale de renseignements vécurent cet événement comme une défaite dont ils tinrent pour responsables le président John Fitzgerald Kennedy[11],[33],[38] et notamment le général Charles Pearre Cabell (et frère d'Earl Cabell, maire de Dallas de 1961 à 1964) qui critiqua vivement par la suite en privé la politique menée par John F. Kennedy.

Dans un troisième temps, le président étudia très sérieusement la possibilité de réduire sensiblement pour l'avenir les possibilités de l'agence qui avait outrepassé ses pouvoirs et qui était à la fois peu ou mal contrôlée par l'exécutif et soumise à aucun contrôle de la part du Congrès[2]. Il envisagea le projet pour son potentiel second mandat de fusionner le FBI et la CIA sous la direction de l'attorney général (l'équivalent du ministre de la Justice en France), son frère Robert Kennedy[2] ce que ne permit pas son assassinat le 22 novembre 1963 à Dallas.

Cette affaire entraîna également au sein du monde politique américain au cours des deux décennies suivantes, et notamment la présidence, une méfiance accrue et redoublée vis à vis de la centrale de renseignements[19].

Conséquences militaires

Aux États-Unis, l'enseignement tiré de cette campagne et renforcé par la campagne du Viêt Nam fut le suivant : le déploiement de la totalité de la puissance militaire était une condition sine qua non de la victoire[21]. Par la suite, lors des campagnes d'invasion de la Grenade et du Panama, les États-Unis déploieront alors tous les moyens nécessaires sur tous les théâtres où ils interviendront afin de s'assurer de leur victoire militaire.

Évocations ultérieures

La baie des Cochons revint au premier plan lors de deux évènements dans les années 1970 lors de l'affaire du scandale du Watergate en 1974 puis pendant les travaux d'enquête du House Select Committee on Assassinations qui repris le travail d'enquête sur l'assassinat de John Fitzgerald Kennedy en novembre 1963 et celui de Martin Luther King en 1968.

Au cours du scandale du Watergate

En effet, le 5 août 1972, le président Richard Nixon, sous la menace grandissante d'un impeachment, décida de révéler le texte intégral de l'une des bandes enregistrées au cours des années précédentes et demandées à plusieurs reprises par le département de la Justice, mais qu'il avait refusé de transmettre alors pour des raisons de sécurité nationale. Datant du 23 juin 1972, surnommée « The Smoking Gun Tape », littéralement, la « bande pistolet fumant », en référence à la preuve flagrante que constitue un pistolet fumant retrouvé sur les lieux d'un crime, retranscrivant un entretien avec son chef de cabinet Bob Haldeman fut rendue publique. Au cours de cet entretien, où le président Richard Nixon autorise ses collaborateurs d'approcher le directeur de la CIA, Richard Helms, afin qu'il demande au directeur du FBI, Patrick Gray, d'enterrer l'enquête fédérale sur le cambriolage pour des raisons de sécurité nationale, il fit alors directement référence à l'invasion de la Baie des Cochons[45].

Ainsi d'après le texte de la retranscription, Nixon conseille de façon sibylline à Haldeman de glisser au directeur de la CIA (Richard Helms) : « Le problème est que ça pourrait rouvrir tout le truc de la baie des Cochons ». Haldeman prétend en 1978 que cela avait calmé Helms, car il pouvait s'agir d'une allusion directe au rôle de la CIA en lien avec les exilés anti castristes, en lien avec le crime organisé, dans les tentatives d'assassinat et de provoquer la chute du régime de Fidel Castro.

Lors des travaux du House Select Committee on Assassinations

Le House Select Committee on Assassinations fut institué en 1976 pour reprendre l'enquête sur l'assassinat du président résultant de plusieurs facteurs conjugués et interconnectés. D'une part, une remise en cause des conclusions de la Commission Warren de novembre 1964 se manifesta de manière accrue par l'opinion publique américaine à la fois à la suite des révélations de la presse et à la suite du scandale du Watergate. D'autre part, les résultats obtenus par la Commission Church instaurée de 1975 à 1976, qui révéla les agissements illégaux des services secrets américains sur le territoire des États-Unis et notamment de la CIA, et souligna la déficience des résultats des enquêtes fédérales menées en 1963 sur l'assassinat du président[46].

Le HSCA restitua le contexte historique de la création de l'opération de la baie des Cochons. Le HSCA enquêta plus spécifiquement sur le contexte historique des opérations anti-castristes afin de déstabiliser le régime cubain menées par la CIA sur ordre de la Maison-Blanche à partir de 1960, et l'alliance avec les exilés cubains anti-castristes recrutés et formés par cette dernière et avec le crime organisé pour mettre fin au régime de Fidel Castro.

Il révéla notamment qu'au cours de la préparation de l'invasion, le directeur de l'opération, l'agent de la CIA Franck Bender, s'entretint début avril 1961 au camp du Guatemala avec les commandants San Roman et Einerdo de la force d'invasion d'exilés anti-cubains. Il leur indiqua, qu'en cas d'une possible annulation par le pouvoir politique avant le démarrage de l'opération en raison des hésitations de l'administration Kennedy, ils devraient suivre le plan suivant :

« Si cela arrive, vous venez ici et vous faites une sorte de spectacle, comme si vous nous mettez, les conseillers, en prison et que vous continuez avec le programme tel que nous en avons parlé et nous vous donnerons le plan d'ensemble même si nous sommes vos prisonniers. À la fin, nous gagnerons[47]. »

Le HSCA détermina enfin que le changement progressif de politique menée par l'administration de John Fitzgerald Kennedy à l'égard de Cuba, d'abord avec l'échec de l'opération d'invasion de la baie des Cochons en avril 1961, puis plus profondément avec la crise des missiles d'octobre 1962, afin d'apaiser durablement les relations avec le régime cubain et d'ouvrir de nouvelles perspectives, avait contribué à braquer sinon à renforcer, au sein même des nombreux groupes d'opérations paramilitaires, la frange la plus radicale de cubains anti-castristes, d'agents américains du monde du renseignement et des criminels de la mafia qui continuèrent leurs opérations pour renverser le régime de Fidel Castro de manière autonome, malgré les demandes d'arrêts formels de la Maison-Blanche pour faire respecter l'accord de neutralité à la suite de la crise des missiles à partir de début 1963[47].

Célébrations et entretien de la mémoire dans les deux camps

Du côté cubain

L'évènement de la baie des Cochons reste célébré annuellement par chacun des deux camps à ce jour, chacun entretenant la mémoire du souvenir resté vif pour des raisons différentes. Pour le camp castriste, cette invasion ratée reste vue dans la rhétorique castriste comme « la première grande défaite de l'impérialisme yankee en Amérique » et a conforté le régime dans « l'irréversibilité du processus révolutionnaire »[48].

Ainsi, le 17 avril, date du débarquement raté, est célébré tous les ans à Cuba par le régime castriste par un tir de batterie depuis la caserne de la Cabana en haut de la baie de La Havane[26]. En avril 1981, pour célébrer les vingt ans de la victoire, le Museo Girón (un musée) a été ouvert représentant l'évènement du point de vue cubain[49] et exposant des reliques du débarquement comme les péniches du débarquement[11].

Pour la communauté cubaine aux États-Unis

À l'opposé, à Miami en Floride, dans le quartier de Little Havana, cœur géographique de la communauté cubaine exilée, le monument de la baie des Cochons (en) a été érigé le . Il est dédié à l'ensemble des membres tombés au cours de l'opération dont les noms ont été gravés dans le marbre[50]. Un musée et une bibliothèque, la Manuel F. Artime Library (où se trouve le drapeau originel de la brigade[51]), consacrés à l'invasion, ont ouvert leurs portes en 1988. L'association Brigada de Asalto 2506 tient un site Web sur l'opération[52].

Dans la culture

La lutte contre le régime castriste et notamment la préparation de l'invasion de la Baie des Cochons avec le soutien de la mafia sont présentés dans le film de Martin Scorsese The Irishman sorti en 2019 sur le réseau Netflix. Inspiré de la biographie de l'homme de main de la Cosa Nostra, Frank Sheeran (parue en 2003 sous le titre J'ai tué Jimmy Hoffa), le film restitue l'interconnexion CIA-mafia et leurs intérêts croisés.

Dobbs et Mr Fab ont publié la bande dessinée Rendez-vous avec X - La Baie des Cochons chez Comix Buro en 2019[53].

Notes et références

Notes

  1. Ce rapport, remis par le sénateur J. William Fulbright au président John Fitzgerald Kennedy le à bord d'Air Force One, l'alertait sur la résistance certaine auxquelles les exilés anti-castristes allaient se retrouver confrontés. Le Sénateur estimait que : « L'opération d'intervention à Cuba est hâtive et inutile, et un renversement du régime de Castro n'apportera pas de grand gain politique, ni économique. ».
  2. En 1959, le montant annuel dégagé par le crime organisé à Cuba était évalué à 100 millions de dollars annuels, soit 900 millions de dollars rapportés en 2013.

Références

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  3. Équipe de Perspective Monde, « Débarquement d'exilés cubains à la baie des Cochons », Perspective Monde (consulté le ).
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Voir aussi

Bibliographie

  • Hernando Calvo Ospina, « 1961, baie des Cochons », dans Le Monde diplomatique, avril 2011.
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  • (es) Manuel Hevia Frasquieri et Andrés Zaldívar Diéguez, Girón : preludio de la invasión : el rostro oculto de la CIA, Editora Política, La Havane, 2006, 253 p. (ISBN 978-959-010710-8).
  • (en) Howard Jones, The Bay of Pigs, Oxford University Press, Oxford, New York, 2008, 237 p. (ISBN 978-0-19-517383-3).
  • Jacobo Machover, Anatomie d'un désastre : Baie des Cochons, Cuba, avril 1961, Vendémiaire, Paris, 2011, 190 p. (ISBN 978-2-36358-004-7).
  • (en) Jim Rasenberger, The brilliant disaster : JFK, Castro, and America's doomed invasion of Cuba's Bay of Pigs, Scribner, New York, 2011, 460 p. (ISBN 978-1-4165-9650-9).

Filmographie

Articles connexes

Liens externes

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