Dave Jenniss
Dave Jenniss est un artiste autochtone canadien. Il a commencé sa carrière en tant que comédien et acteur. En plus de cela, il écrit pour le théâtre, la télévision et le cinéma depuis 2008. Il est également metteur en scène et le directeur artistique du théâtre Ondinnok. La réflexion sur l'identité autochtone, notamment malécite, est au centre de sa création théâtrale.
Naissance | |
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Nationalité |
Autochtone canadien |
Activité |
Auteur, metteur en scène, comédien, acteur et scénariste |
Représenté par |
Agence Diane Riel |
Biographie
Dave Jenniss est né en 1974 à Trois-Pistoles d’un père métis malécite [réf. à confirmer] et d’une mère québécoise.
Carrière de comédien
Formation
Dave Jenniss a suivi diverses formations théâtrales et cinématographiques[1].
- Jeu devant la caméra: stage intensif de Denis Chouinard
- École 7e acte – Paris: stage intensif
- École de mime Omnibus: stage intensif
- Conservatoire d’art dramatique de Montréal: formation en doublage
- Ateliers Danielle Fichaud: jeu devant la caméra
- École de théâtre du Parenthèse: formation en jeu
- Théâtre Ondinnok : programme de formation pour les Autochtones[2]
Théâtre[1]
- L'Amour à l'agenda, 1er rôle: Jérôme. Théâtre de l’île, mise en scène de Jean-Stéphane Roy
- Confidence trop intime, 1er rôle: William. Théâtre de l’île, mise en scène de Magalie Lemèle
- V comme canard, 2e rôle: Coco. Théâtre de l’île, mise en scène de Magalie Lemèle
- Boeing Boeing, 1er rôle: Robert. Théâtre de l’Île, mise en scène de Mathieu Charrette
- Zone, 1er rôle: Moineau. Théâtre la Catapulte, mise en scène de Jean-Stéphane Roy
- Les Papillons de nuit, 1er rôle: Mario.Théâtre de l’île, mise en scène de Mathieu Charrette
- Contes urbains, 1er rôle: le conteur. Mise en scène d'Yvan Bienvenue
- Wulustek, 1er rôle: Marc.Théâtre Ondinnok, mise en scène de Peter Batakliev
- Portalafrapon, 1er rôle: Laporte. Mise en scène de Michel Gatignol
- Wigwam, 1ers rôles: Namouk et Kino. Théâtre Ondinnok, mise en scène de Jean-Frédéric Messier
- Hamlet le Malécite, 1er rôle: Dave. Théâtre Odinnok, mise en scène de Jean-Frédéric Messier
Télévision et cinéma[1]
- Aboriginal Day: co-animateur.
- La grande bataille 2, de Alain Chicoine. Il y a interprété le rôle de Pierrot.
- Shaputwan, de Illade Poulin. Il y tient le rôle d'Akamit.
- Mouki: dans cette série jeunesse de Sonia Boilau qui était diffusée sur APTN, il interprétait le raton-laveur éponyme[3].
- Roxy, de Stéphane Lapointe.
Œuvres
Créations scéniques
- Pokuhule, le tambour du temps, 2013, Théâtre Ondinnok, mis en scène par Clément Cazelais. Dans cette pièce, on découvre un homme qui retourne au camp de chasse familial pour renouer avec son identité et pouvoir répondre à la question de sa fille: « Papa? Qui est grand-papa? »[4]. Il finit alors par parler à l'esprit de son père et de son grand-père. La communication est difficile, comme elle pouvait l'être de leur vivant. Il y a tout au long du spectacle un questionnement sur la langue, la communication et la transmission. Des traditions n'ont pas été transmises et cela manque à l'homme, le personnage principal de la pièce. En effet, son père ne lui a pas appris à jouer du tambour auquel son grand-père savait jouer. Et pour pouvoir transmettre à sa fille, il se doit de rétablir cette transmission[5].
« Sans le tambour qui bat, les mots n’existent pas. », l'homme dans Le tambour du temps.
- Ktahkomiq, 2017, théâtre Ondinnok. Il a cocréé ce spectacle mélangeant théâtre et danse avec Ivanie Aubin-Malo, qui est également une artiste malécite. Cette pièce est la rencontre entre un homme et une femme qui revendiquent chacun leur identité. Cette idée de spectacle vient de la querelle entre les familles des deux artistes: la famille d'Ivanie Aubin-Malo accuse celle de Dave Jenniss d'avoir pris l'identité malécite sans être réellement de cette communauté[6]. Ce spectacle est alors l’occasion d'une réconciliation entre les deux. La querelle est laissée derrière pour pouvoir créer quelque chose de nouveau. Le titre de la pièce, Ktahkomiq, signifie "territoire" en Malécite. Des mots et des phrases dans cette langue sont d'ailleurs intégrés au spectacle.
« C’est notre histoire qu’on a décidé de mettre sur scène. On avait besoin d’en parler pour se libérer de plein de choses. C’est une forme de guérison »,Dave Jenniss[7].
- Mokatek et l'étoile disparue, 2018, coproduction d'Ondinnok et Vox Theatre. Cette pièce de 35 minutes est à destination des enfants de 2 ans et demi à 6 ans. C'est un spectacle mêlant théâtre de marionnettes, théâtre d'objets, chants et musiques. Dans cette pièce, Mokatek part à la recherche de l'étoile du nord qui a disparu. C'est alors pour lui également l'occasion de partir à la recherche de ses origines et de son identité. Son voyage sera ponctué par sa rencontre avec des animaux et l'esprit des sons. Il est aidé de son ami le corbeau Kahkakuhs. Cette recherche d'identité par le personnage et l'apprentissage de sa langue sont également des moyens pour les spectateurs, enfants et parents, d'en apprendre plus sur la culture Malécite. En même temps que Mokatek, ils apprennent à nommer les choses en Malécite. Il s'agit d'une idée originale de Dave Jenniss. Il en est l'auteur et l'interprète. La mise en scène est de Pier Rodier[8].
- Delphine rêve toujours: création jeunesse à venir[5].
Livres publiés
Wulustek est paru en 2011 chez Dramaturges Éditeurs . La pièce est diffusée au théâtre par Ondinnok. Dave Jenniss y interprétait le rôle de Marc Miktouch. ette pièce raconte l'histoire de la famille des Miktouch. Ils font partie des derniers membres de la communauté Malamek, qui est un peuple fictif, représentant les Malécites[5]. Cette famille est composée de Matthew Miktouch (le père), Hélène Desrois (la mère), David et Marc Miktouch (les deux fils) . Et sont également présents les personnages de Jimmy Rock, qui est le gardien du territoire, et Julie Reynolds, une amie journaliste de David. Ces personnages se retrouvent donc sur le territoire revendiqué de leur communauté. Ce retour au territoire se veut comme un retour à leurs racines. Seulement, ces racines se sont perdues, et le personnage de David se dira même « plus capable de jouer à l'indien »[9]. Leur langue s'est perdue (leur rituel se retrouve alors prononcé dans d'autres langues autochtones) , et ils sont sur le point de perdre leur terre. Ils se battent tout de même, plus ou moins convaincus, pour récupérer ce territoire appartenant à leurs ancêtres. Cependant, à la fin, la famille apprend que le père l'a déjà vendu. On peut voir dans la perte du territoire une métaphore de leur perte d'identité[5]. Il s'agit d'une manifestation physique de la perte de leur culture. Et la transmission est brisée: ce qui appartenait au grand-père ne leur appartient plus. Dans un entretien, Dave Jenniss a d'ailleurs dit: « Quand tu n’as pas de territoire, tu n’as pas de lien avec toi-même. Tu n’as pas de culture. »[6] On peut également voir dans la pièce un manque de visibilité pour les différentes communautés autochtones. En effet, dès le début, ils sont dans l'attente de journalistes qu'ils ont appelé pour couvrir la réappropriation de leur terre. Mais ceux-ci ne viendront jamais.
Il a également publié le 27 novembre 2018 le conte jeunesse Mokatek et l'étoile disparue, illustré par Claudie Côté Bergeron, aux éditions Hannenorak. Il s'agit de l'adaptation de sa pièce du même nom. C'est le premier écrit de Jenniss dans le genre du conte. À la fin du livre, on trouve un petit lexique Wolastoqey latuwewakon (langue malécite) - français.
Scénarios
- La Grande Bataille 2, Films Projeks, pour la télévision.
- Chaman, Alouki Films Projeks, pour le cinéma.
- Docu-fiction, co-scénariste, Alouki Films Projeks, pour la télévision.
Récompenses
Dave Jenniss a reçu plusieurs récompenses pour son travail de comédien et également d'auteur[1].
- Prix du public étudiant du meilleur acteur de soutien en 2014 pour le rôle de Moineau dans Zone de Marcel Dubé au Théâtre Denise-Pelletier
- Bourse du Conseil des arts du Canada: financement de l’écriture de son spectacle Takustshin/Trois hommes... un peuple
- Bourse du Conseil des arts du Canada: financement de l’écriture de sa pièce Wulustek
- Masque des Enfants terribles (Académie de théâtre du Québec): choix du public: meilleur pièce jeune public pour Wigwam
- Prix de la Critique (Association québécoise des critiques de théâtre) pour Wigwam
- Aboriginal Art Foundation: pour son rôle dans Hamlet, le Malécite
Thèmes centraux de son œuvre
Les œuvres de Dave Jenniss ont toutes une dimension autobiographique. Il évoque dans plusieurs entretiens le fait que ses personnages sont des mises en scène de lui-même[5]. Il a également dit, lors d'une table ronde sur la littérature jeunesse du Salon du livre des Premières Nations: "Mokatek, c'est moi!"[10] Ses créations reflètent ses questionnements concernant son identité de métis Malécite dans le Québec d'aujourd'hui. Il accorde donc dans ses pièces une forte place à la recherche d'identité et à la question de l'héritage culturel.
La perte d'un des parents, ou de la perte du lien avec les parents est également présente dans une majorité de ses œuvres théâtrales. Dans Wulustek, le père a vendu le terre du grand-père et les enfants se retrouvent alors privés de cet héritage. Dans Le tambour du temps, l'homme tente de rétablir un contact avec son père et son grand-père qui sont morts. Dans cette pièce, l'héritage était également brisé par l'absence de l'apprentissage du tambour par l'homme. Dans Mokatek, le jeune garçon a perdu sa mère, et il perd également son étoile qui le guidait et le protégeait. Cette perte du parent peut symboliser la perte du contact avec ses origines. Contact que les personnages tentent de retrouver.[5] Et le fait de renouer ce contact, permet résoudre la crise identitaire, et ainsi par ses pièces, il tente d'opérer une guérison[5].
Dans ses créations scéniques, le corps et les gestes occupent une place importante. Les silences sont importants dans son œuvre et permettent le mouvement corporel. Le corps exprime alors ce qui ne l'est pas par les mots. Et pour Dave Jenniss, cela permet un retour à une forme théâtrale archaïque autochtone, où c'était le corps uniquement qui était le moyen d'expression, et non le texte[5] .
Le rapport à la langue Malécite est aussi un élément important de ses créations. Les mots malécites sont de plus en plus présents au fur et à mesure de ses pièces. Leur intégration au texte permet de rendre vivante cette langue que Jenniss croyait disparue car il ne l'avait jamais entendu. Il intègre donc peu à peu cette langue, et il l'apprend également au fur et à mesure. Il évoque, dans des entretiens, le fait de se retrouver de nouveau dans la position de l'enfant qui apprend à parler. Utiliser cette langue, c'est également se la réapproprier et de faire entendre sa culture et ses origines[5].
Le théâtre Ondinnok
Dave Jenniss en est le directeur artistique depuis 2016. Il s'agit de la première compagnie de théâtre autochtone du Québec[11].
La compagnie Ondinnok a été fondée en 1985 par Yves Sioui Durand, Catherine Joncas et John Blondin[12], à l'occasion de la création du spectacle Porteur des peines du monde[11]. Le théâtre produit des pièces sur l'enjeu de l'identité amérindienne aujourd'hui en Amérique du nord. Il a également, entre 2004 et 2007, proposé un programme de formation théâtrale pour les Autochtones en collaboration avec l’École nationale de théâtre du Canada. Après la fin de cette collaboration en 2008, l'offre de formation s'est faite directement en lien avec leurs productions théâtrales, et cela jusqu'à 2011. Ce programme avait pour intérêt d'offrir à la relève artistique théâtrale autochtone une formation mêlant des pratiques théâtrales de différentes cultures autochtones et celles du théâtre contemporain. Il s'agissait également, en formant au métier de comédien, « de renforcer l’identité autochtone des participants par une redécouverte des valeurs et des pratiques théâtrales issues des diverses cultures autochtones d’ici et d’ailleurs »[2]. Dave Jenniss a été un des finissants de cette formation[2].
Le mot "Ondinnok" désigne un rituel théâtral de guérison « qui dévoile le désir secret de l'âme »[13] en huron. Ce terme représente l’esprit de ce théâtre qui désire opérer une reconstruction culturelle. Leur théâtre « vise à reconquérir un imaginaire, une terre de rêve, à rapatrier une mémoire pour dégager un avenir »[13].
Visibilité de la culture autochtone
Dave Jenniss œuvre à la visibilité de la culture autochtone, et plus particulièrement de la culture malécite.
Il participe notamment à des évènements faisant la promotion d'artistes autochtones. Ainsi, en août 2018, il a participé au festival Kwe! (qui signifie "bonjour" en langue wendat[14]), un évènement qui célèbre les cultures autochtones du Québec[15]. Le festival offre différentes activités comme des spectacles de musique, la diffusion de courts-métrages, des ateliers, des conférences ou encore des discussions sur des enjeux concertants les peuples autochtones[15]. Dave Jenniss y a participé dans le cadre d'une rencontre d'écrivains autochtones et a lu des passages de Mokatek et l'étoile disparue. Il a également participé en novembre 2018 au 7e Salon du livre des Premières Nations à Québec. Cet évènement a marqué la publication de son conte jeunesse, dont il a fait une lecture. Il a également, toujours dans le cadre du salon, participé à une table ronde sur la littérature jeunesse.
Outre les participations à ces évènements, il utilise la lange malécite dans ses productions. Il l'intègre sans traduction pour que les spectateurs l'entendent réellement[5]. Et cette présence au théâtre, dans des productions artistiques, de la langue malécite permet de la rendre, et de montrer qu'elle est, vivante. Pour Dave Jenniss, faire entendre sa langue, c'est également une manière de se faire entendre soi[5].
Le 14 juillet 2018, il fait partie de la vingtaine d'artistes autochtones signataires d'une lettre ouverte destinée à Ariane Mnouchkine et à Robert Lepage publiée dans Le Devoir. Les signataires réagissent au projet Kanata du Théâtre du Soleil mis en scène par Robert Lepage. Cette pièce veut raconter « l’histoire du Canada à travers le prisme des rapports entre Blancs et autochtones »[16]. Elle doit être montée à Paris et ensuite être jouée au Québec. Des autochtones ont été consultés pour la création du projet, mais aucun ne figure à la distribution. Les artistes qui ont signé la lettre et dénoncent ce projet y voient une nouvelle marque d'invisibilisation envers les autochtones[17]. Ils disent être « saturés d’entendre les autres raconter [leur] histoire. »[17] En réaction, Mnouchkine évoque une volonté de censure exercée par ces artistes[5].
Bibliographie
- Wulustek, Dramaturges éditeurs, 2011.
- Mokatek ou l'Étoile disparue, éditions Hannenorak, 2018.
- M. Hellot, Transmettre, mais quoi ? / Wulustek, Jeu (141), 2011, p. 11–13.
Références
- « Curriculum vitae de Dave Jenniss »
- « Programme de formation pour les autochtones | Ondinnok » (consulté le )
- « Mouki | APTN » (consulté le )
- « La quête des origines de Dave Jenniss », sur La Fabrique culturelle (consulté le )
- (en) La littérature du Nord et des Premières nations, avec Dave Jenniss I Conférence (lire en ligne)
- « Langues autochtones: le retour aux sources du malécite », sur Le Devoir (consulté le )
- « Danse et théâtre : les Malécites racontent leur histoire dans la pièce Ktahkomiq », sur Le Nord-Côtier, (consulté le )
- « Mokatek et l’étoile disparue (diffusion) | Ondinnok » (consulté le )
- Dave Jenniss, Wulustek
- « Accueil », sur Kwahiatonhk! (consulté le )
- « Ondi … quoi? | Ondinnok » (consulté le )
- « Les fondateurs | Ondinnok » (consulté le )
- « Ondinnok » (consulté le )
- « Mots de la langue wendat - Le troc des idées », sur www.letrocdesidees.ca (consulté le )
- (en) « KWE! À la rencontre des peuples autochtones | Kwe » (consulté le )
- « «Kanata»: les Amérindiens du Canada lus par Lepage et Mnouchkine », sur Le Devoir (consulté le )
- « Encore une fois, l’aventure se passera sans nous, les Autochtones? », sur Le Devoir (consulté le )
Liens externes
- Biographie
- Site de la compagnie Ondinnok
- Article sur Ondinnok
- Lettre ouverte à Ariane Mnouchkine et Robert Lepage
- Jeniss sur kwahiatonhk (Nous écrivons), 2020
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