Délivrance (film, 1972)
Délivrance (Deliverance) est un film américain réalisé par John Boorman, sorti en 1972. Il s'agit d'une adaptation du roman de même nom de James Dickey, publié en 1970, qui signe lui-même le scénario.
Pour les articles homonymes, voir Délivrance.
Titre original | Deliverance |
---|---|
Réalisation | John Boorman |
Scénario | James Dickey |
Musique | Eric Weissberg |
Acteurs principaux | |
Sociétés de production |
Warner Bros. Elmer Enterprises |
Pays de production | États-Unis |
Genre | thriller |
Durée | 109 minutes |
Sortie | 1972 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
En 2008, le film entre au National Film Registry pour conservation à la bibliothèque du Congrès aux États-Unis.
Synopsis
Ed Gentry, Lewis Medlock, Bobby Trippe et Drew Ballinger, quatre hommes d'affaires d'Atlanta, se réunissent lors d'un week-end afin de descendre en canoë une rivière très mouvementée, baptisée Cahulawasseea. Cette rivière prend sa source dans les Appalaches en Caroline du Nord et rejoint la Géorgie : comme elle doit être recouverte par l'inondation de la région à la suite de la construction d'un barrage, les quatre citadins montent cette expédition comme un dernier hommage à cette partie de la nature qui va être défigurée par l'homme. Néanmoins, les épreuves qu'ils vont affronter ne sont pas uniquement dues à la dangerosité du milieu naturel.
Le défi lancé par ces hommes s'adresse à la nature sauvage mais aussi à leurs propres faiblesses : Lewis est un modèle d'homme fort, champion de tir à l'arc, franc et dominateur, sûr de lui mais aussi rassurant pour les trois autres. Il voudrait que ce défi soit un jeu dont il serait le seul à maîtriser les règles. Il connaît les dangers de la nature sauvage et la respecte. Drew est un père de famille exemplaire, mélomane et sentimental. Il a emporté sa guitare et en joue dès que l'occasion se présente, notamment en improvisant un duo avec un garçon autiste rencontré au début de l'aventure. Bobby est un bon vivant, un peu balourd et primaire qui doit supporter les remontrances et les remarques blessantes de Lewis avec qui il fait équipe dans un des deux canoës. Ed, fumeur de pipe compulsif, affiche un air détaché de gentleman mais derrière cette façade austère, il s'avérera être résistant, courageux et intrépide. Il pratique comme Lewis le tir à l'arc mais sa main tremble lorsqu'il se retrouve seul face à un daim et qu'il doit décocher sa flèche.
Au matin du premier jour, alors que, isolé des deux autres, Ed et Bobby accostent, ils sont pris à partie par deux hommes armés. Bobby est sauvagement violenté par un des deux hommes (une scène brutale censurée en Norvège et au Brésil). Arrivé sur les lieux, Lewis transperce le violeur d'une flèche en pleine poitrine et le tue tandis que son comparse prend la fuite. Les quatre amis décident de ne pas prévenir la police afin d'éviter un procès à Lewis qui l'obligerait à faire face à un jury sans doute composé de membres de la famille du mort. Ils enterrent donc le cadavre plus loin et reprennent leur périple sur l'eau.
En pleine passe difficile, ils sont la cible d'un tireur qui les suit depuis la crête des falaises encadrant les rapides. Drew tombe à l'eau et sans son gilet, est emporté par le courant. Dans la panique, Lewis se blesse à la jambe et se réfugie sous un rocher, bientôt rejoint par Ed et Bobby. Ed décide alors de gravir la paroi rocheuse verticale et d'éliminer le tireur. Après une escalade vertigineuse, au matin, il se retrouve face à face avec l'homme au fusil qui les cherche plus bas. La main d'Ed tremble à nouveau mais cette fois, il ne rate pas sa cible. Dans l'action, Ed se blesse au flanc avec une de ses flèches. Ensuite, le corps de l'homme est descendu jusqu'à la rive et noyé pour le faire disparaître définitivement.
Embarquant Lewis blessé et incapable de bouger, les trois survivants reprennent leur descente et retrouvent plus en aval le corps de Drew, affreusement tordu contre un arbre mort. Ils fixent une lourde pierre à son corps et le laissent sur place, craignant une autopsie qui révèlerait des traces de balle et justifierait une enquête plus approfondie.
Enfin, des épaves d'automobiles signalent la proximité du but de leur voyage, où les attendent leurs voitures convoyées depuis l'amont par deux autochtones. Les trois amis s'entendent pour déclarer à la police que la noyade de Drew s'est passée en cet endroit et nulle part ailleurs. Arrivés à destination et tandis que Lewis est pris en charge pour être soigné, la police drague la rivière sans résultat. L'adjoint du shérif, un cousin des deux chasseurs abattus, doute de leur version des faits et devine qu'ils dissimulent la vérité. Le shérif, sans preuve formelle mais dubitatif, les laisse toutefois partir non sans essayer de les piéger une dernière fois.
Bobby et Ed conviennent de ne pas se revoir avant quelque temps. Ce sera Ed qui devra annoncer la mort de Drew à sa veuve. Revenu auprès de son épouse et de leur fils, Ed s'efforce d'oublier l'horreur de ces deux derniers jours. L'image d'une main remontant à la surface de l'eau fait craindre le pire au spectateur. Mais c'est seulement un cauchemar qui réveille Ed et le fait hurler de terreur. Réconforté par sa femme mais hanté par les fantômes de la rivière, il a irrémédiablement perdu son insouciance et son innocence d'avant cette terrible épreuve.
Fiche technique
Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations mentionnées dans cette section peuvent être confirmées par la base de données IMDb.
- Titre original : Deliverance
- Titre français : Délivrance
- Réalisation : John Boorman
- Scénario : James Dickey, d'après son roman Délivrance, avec la participation non créditée de John Boorman aux dialogues
- Décors : Fred Harpman
- Costumes : Bucky Rous
- Photographie : Vilmos Zsigmond
- Musique : Eric Weissberg
- Producteur : John Boorman
- Montage : Tom Priestley
- Distribution des rôles : Lynn Stalmaster
- Maquillage : Michael Hancock
- Effets spéciaux : Marcel Vercoutere
- Production : John Boorman
- Sociétés de production : Warner Bros. et Elmer Enterprises
- Société de distribution : Warner Bros. (États-Unis), Warner-Columbia Film (France)
- Budget : 2 millions de USD[1]
- Pays d'origine : États-Unis
- Langue originale : anglais
- Format : Couleur - 2,35:1 - CinemaScope
- Genre : thriller, drame, aventures, rape and revenge
- Durée : 109 min
- Dates de sortie :
- États-Unis :
- France : • (ressortie en salles)
- Classification :
- États-Unis : R - Restricted
- France : interdit aux moins de 12 ans
Distribution
- Jon Voight (VF : Michel Le Royer) : Ed Gentry
- Burt Reynolds (VF : Serge Sauvion) : Lewis Medlock (Louis en VF)
- Ned Beatty (VF : Albert Augier) : Bobby Trippe
- Ronny Cox (VF : Francis Lax) : Drew Ballinger (André en VF)
- Ed Ramey (VF : Henri Virlogeux) : le vieux pompiste au début du film
- Billy Redden : Lonny, l'adolescent au banjo
- Seamon Glass (en) (VF : Claude Joseph) : l'un des frères Griner
- Randall Deal : l'autre frère Griner
- Bill McKinney (VF : Gérard Hernandez) : le premier chasseur dans la montagne
- Herbert 'Cowboy' Coward (en) : le second chasseur dans la montagne (sans dents)
- James Dickey (VF : Claude Bertrand) : le shérif Bullard
- Macon McCalman (VF : Jacques Deschamps) : Queen, l'adjoint du shérif, cousin des chasseurs
- Pete Ware (VF : Georges Aubert) : le chauffeur de Taxi
- Ed O'Neill : le policier à l'hôpital (non crédité)
- Charley Boorman (crédité « Charlie ») : le fils d'Ed
- Belinda Beatty (créditée « Belinha ») : l'épouse d'Ed
Production
Genèse et développement
Le scénario est basé sur le roman de même nom de James Dickey, publié en 1970. L'auteur est engagé pour écrire lui-même le scénario. Sam Peckinpah avait été un temps intéressé pour le réaliser, mais les droits sont acquis par John Boorman avant lui[2].
Distribution des rôles
Pour tenir les deux rôles principaux, John Boorman souhaitait engager Marlon Brando et Lee Marvin. Ce dernier, avec qui le réalisateur a déjà tourné deux films, le persuade cependant que lui et Marlon Brando sont trop âgés pour jouer les scènes prévues. Il lui suggère de prendre deux acteurs plus jeunes. Jack Nicholson avait donné son accord pour incarner Ed mais son salaire était trop élevé. Le rôle est proposé à Gene Hackman et refusé par Donald Sutherland, qui trouve le script trop violent. Le rôle de Lewis est proposé à Henry Fonda, Charlton Heston ou encore James Stewart[2].
Ned Beatty, dont c'était le premier film, était le seul des quatre acteurs à avoir déjà pagayé avant le début du tournage.
À la fin du film, le romancier et scénariste James Dickey — dont le livre a servi de trame au film de John Boorman — interprète le shérif Bullard chargé de l'enquête sur les disparitions de Drew Ballinger et de deux hommes des montagnes (de la famille de Queen, l'adjoint du shérif).
Dans les dernières scènes, Charley Boorman, fils du metteur en scène, incarne le fils d'Ed Gentry, le personnage interprété par Jon Voight. Le rôle de l'épouse d'Ed Gentry est tenu par Belinda Beatty, alors mariée à l'acteur Ned Beatty (l'interprète de Bobby Trippe).
En raison du manque de budget et pour plus de réalisme, des habitants sont engagés[2].
Tournage
Le tournage a lieu en Géorgie (rivière Chattooga dans les Appalaches, lac Tallulah Falls, Tallulah Gorge, Rabun Gap, Clayton), en Caroline du Nord (Sylva) et en Caroline du Sud (lac Jocassee, Beaufort)[3].
Dueling Banjos a été la première scène tournée. Les autres scènes ont pratiquement toutes été tournées dans l'ordre chronologique du scénario.
En raison du budget limité, les acteurs n'ont pas de doublures pour les cascades. Les scènes dans les rapides n'ont pas été doublées. Jon Voight a ainsi escaladé lui-même la falaise dans la scène où il tente de neutraliser le tireur. Burt Reynolds s'est cassé le coccyx au chavirage du canoë[2].
Accueil
Critique
Délivrance est globalement très bien accueilli par les critiques et classé parmi les meilleurs films de 1972[4],[5],[6],[7]. Sur l'agrégateur américain Rotten Tomatoes, le film obtient 90 % d'avis favorables pour 61 critiques et une note moyenne de 8,48⁄10[8].
Gene Siskel du Chicago Tribune lui donne sa note maximale de 4⁄4[9]. Charles Champlin du Los Angeles Times souligne la beauté visuelle du film et les performances des acteurs principaux[10].
Roger Ebert du Chicago Sun-Times écrit quant à lui une critique négative du film[11], tout comme Arthur D. Murphy de Variety[12]. Vincent Canby de The New York Times est déçu du film[13].
En 2001, le film figure à la 15e place du AFI's 100 Years...100 Thrills, un classement de l'American Film Institute des 100 meilleurs thrillers du cinéma américain.
Box-office
Le film est un succès au box-office et l'un des plus lucratifs des films sortis en 1972. Aux États-Unis, il enregistre 46 millions de dollars de recettes[14]. Il réalise également des recettes sur l'année suivante[15], pour un budget de deux millions de dollars[1]. En France, il attire 1 466 025 spectateurs dans les salles[1]. Le film ressort dans quelques salles françaises en novembre 2002 et rapporte 4 534 $[16].
Distinctions
Récompenses
- National Board of Review: Top Ten Films 1972
- Festival du film des Îles Féroé 1972 : Grand prix du jury
- Grammy Awards 1974 : meilleure performance instrumentale de country pour Dueling Banjos
- National Film Registry 2008
Nominations
- Oscars 1973 : meilleur film, meilleur réalisateur et meilleur montage
- Golden Globes 1973 : meilleur film dramatique, meilleur acteur dans un film dramatique pour Jon Voight, meilleure chanson originale pour Dueling Banjos, meilleur réalisateur et meilleur scénario
- BAFA Awards 1973 : meilleur montage, meilleur son et meilleure photographie
- Directors Guild of America Awards 1973 : meilleure réalisation pour un film
- Writers Guild of America
Hommages et références au film
- Dans le film Le Projet Blair Witch, alors que les protagonistes sont perdus dans la forêt, Josh cite le film Délivrance en s'inquiétant de la possibilité d'une rencontre avec des personnages similaires aux agresseurs dans ce dernier.
- Le réalisateur Tim Burton fait allusion au film dans deux de ses œuvres :
- Dans Big Fish sorti en 2003, Edward Bloom (Ewan McGregor) rencontre un personnage identique au joueur de banjo difforme (joué par le même acteur, Billy Redden) à l'entrée du village perdu dans la forêt où il se retrouve par hasard. Ce dernier entonne d'ailleurs les mêmes notes qu'au début du morceau Dueling Banjos.
- Dans Dark Shadows sorti en 2012, Veronica Winters (Bella Heathcote) arrive dans la petite ville de Collinsport au début du film. Elle passe devant un cinéma, le Roxy Theater, où Délivrance est à l'affiche, avec la mention « Starring Burt Reynolds ». L'action se déroule effectivement en , soit une période de diffusion vraisemblable dans une très petite ville pour Délivrance, qui est sorti en juillet. Pour parfaire l'ambiance, la bande-son du film pour cette scène est constituée par la chanson Nights in White Satin des Moody Blues, sortie en 1967 mais revenue en tête des hit-parades en 1972.
- Dans la saison 12 de la série d'animation South Park, la scène du viol issue de Délivrance est parodiée à l'occasion de la sortie d'Indiana Jones et le Royaume du crâne de cristal en mettant dans le rôle des deux violeurs George Lucas et Steven Spielberg et dans le rôle de l'agressé, Indiana Jones.
- Dans le film Bienvenue à Zombieland, l'acteur Woody Harrelson entonne au banjo le début de Dueling Banjos lors de la scène du supermarché.
- Dans l'épisode 8 de la saison 5 des Simpson, Scout un jour, scout toujours, le groupe de scouts dont Bart fait partie descend une rivière à bord de canoës. Alors que Homer, Bart ainsi que Ned et Rod Flanders se sont trompés d'embranchement, le reste du groupe continue de descendre la rivière. On voit alors sur la rive des silhouettes qui ressemblent étrangement à celles des agresseurs et en fond sonore le fameux air au banjo.
- Dans La Classe américaine, Ned Beatty fait référence à ses vacances au « Tegsas ». On peut alors voir la scène du viol dans la forêt. De plus, la séquence entre Dustin Hoffman et Ned Beatty se termine par une allusion très claire.
- Dans le film Menace toxique, des hommes issus du cliché rural des USA tiennent Steven Seagal en joue, lequel leur répond : « Vous avez joué dans Délivrance, le film ? »
- Dans le film Détour mortel, Scott (joué par Jeremy Sisto), fait référence au film lorsque ses compagnons et lui sont sur le point de s'introduire dans une maison délabrée.
- Dans le film Père et Fils, le personnage joué par Pascal Elbé évoque Délivrance à la vue d'un paysage québécois, et dit qu'il s'agit d'un « documentaire sur les cochons ».
- Dans le film Cave, deux des personnages sur leur canoë sifflent l'air de banjo et citent le film en racontant la scène du viol.
- Dans le film d'animation Les Vacances des Tiny Toons, Buster et Babs accostent près d'une maison habitée par des opossums dont la tenue évoque celle des rednecks du film. Tandis que Babs tente d'échapper à la voracité des parents, Buster se lance dans un duo avec le jeune opossum qui joue du banjo, parodiant la scène du début de Délivrance.
- Dans l'épisode 18 de la saison 5 de Stargate SG-1, le colonel Jack O'Neill évoque la fin du film à ses interlocuteurs Jaffas, qui n'en connaissent évidemment pas la référence.
- Dans le film Génération rebelle, Ben Affleck qui s'apprête à bizuter un garçon, le plaque contre un grillage et lui demande de crier comme un porc.
- Dans le jeu vidéo Alan Wake, Barry l'agent d'Alan le met en garde contre les habitants de Bright Fall,citant la fin de Délivrance comme un avertissement.
- Dans la série Fringe . Saison 2 épisode 12. Walter Bishop pense avoir vu l'enfant qui joue du banjo.
Notes et références
Notes
Références
- « Délivrance », sur JP's Box-office (consulté le ).
- (en) Trivia sur l’Internet Movie Database
- (en) Locations sur l’Internet Movie Database
- « Greatest Films of 1972 », Filmsite.org (consulté le ).
- « The Best Movies of 1972 by Rank », Films101.com (consulté le ).
- « Best Films of the 1970s » [archive du ], Cinepad.com (consulté le ).
- IMDb: Year: 1972.
- « Deliverance », sur Rotten Tomatoes (consulté le ).
- (en) Gene Siskel, Deliverance; Chicago Tribune (section 2), , p. 4.
- (en) Charles Champlin, « Men Against River—of Life?—in 'Deliverance' », Los Angeles Times (Calendar), , p. 17.
- (en) « Deliverance », Chicago Sun-Times.
- (en) Arthur D. Murphy, « Film Reviews: Deliverance », Variety, , p. 14.
- (en) Vincent Canby, « The Screen: James Dickey's 'Deliverance' Arrives », The New York Times, , p. 21.
- « Deliverance, Box Office Information », The Numbers (consulté le ).
- (en) « Big Rental Films of 1973 », Variety, , p. 19.
- (en) « Délivrance (ressortie 2002) », sur Box Office Mojo (consulté le ).
Annexes
Articles connexes
Liens externes
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