Didius Julianus

Didius Julianus (Imperator Caesar Marcus Didius Severus Julianus Augustus) (-) est un empereur romain qui régna du 28 mars au .

Didius Julianus
Empereur romain

Buste de Didius Julianus, Résidence de Munich.
Règne
-
(2 mois et 4 jours)
Période 2e année des quatre empereurs
Précédé par Pertinax
Usurpé par Pescennius Niger
Septime Sévère
Suivi de Septime Sévère
Biographie
Nom de naissance Marcus Didius Severus Julianus
Naissance [1]
Mediolanum (Italie)
Décès (à 60 ans) - Rome
Père Quintus Petronius Didius Severus
Mère Aemilia Clara
Épouse Manlia Scantilla
Descendance Didia Clara

Enfance et jeunesse

La date de naissance de Julianus est variable selon les sources : selon Dion Cassius ou selon l'Histoire Auguste[2]. Il était le fils de Quintus Petronius Didius Severus et d'Aemilia Clara[3]. Quintus, le père, était issu d'une famille importante de Mediolanum (Milan), les Petronii. Aemilia, la mère, avait quant à elle des origines nord-africaines par son père, originaire de la cité d'Hadrumetum[4]. Deux autres fils naquirent de cette union : Didius Proculus et Didius Nummius Albinus, frères de Julianus[3].

Il fut élevé par Domitia Lucilla Minor, mère de Marc Aurèle[5], et tous deux contribuèrent à l'ascension du jeune Didius. A une date indéterminée, il épousa Manlia Scantilla, qui lui donna une unique fille, Didia Clara, née peut-être vers 175[6],[7].

Carrière sénatoriale

Grâce à la recommandation de Domitia Lucilla, Julianus put obtenir le vigintivirat[8], première étape de son cursus honorum[9]. Il obtint par la suite les postes de questeur[8] (un an avant l'âge légal) et d'édile[10] avant d'être nommé, aux alentours de 162, préteur[10],[11]. Il obtint ensuite le commandement de la Legio XXII Primigenia, stationnée à Mogontiacum (Mainz) en Germanie supérieure[11],[12]. En 171, il devint préfet de la Gaule Belgique, poste qu'il occupa durant cinq années[11],[13]. Son action pour la défense de la province, menacée par une attaque des Chauques[13], lui aurait valu d'être récompensé par le consulat en 175, aux côtés de Pertinax[14],[15]. Julianus se distingua ensuite dans une campagne contre les Chattes[16], avant d'être chargé vers 176 du gouvernement de la Dalmatie[17], puis de la Germanie inférieure de 180 à 185[11],[18].

La carrière de Julianus se trouva toutefois ralentie sous le règne de Commode, qui le nomma ainsi praefectus alimentorum, chargé d'organiser l'aide alimentaire destiné aux enfants des citoyens italiens les plus pauvres (les alimenta, créées par Trajan)[19]. Cette "rétrogradation" pourrait s'expliquer par l'implication de Didius Julianus dans un complot contre Commode, auquel participa notamment un de ses proches, P. Salvius Julianus[20]. Il fut ensuite nommé gouverneur de la province de Bithynie[21], l'éloignant ainsi de Rome, avant d'obtenir, en 189-190, le poste de proconsul d'Afrique, où il succéda à Pertinax[15],[22].

Une prise du pouvoir contestée et courte

Sesterce de Didius Julianus

Lorsque l'empereur Pertinax fut assassiné par la garde prétorienne, Didius Julianus, poussé par ses proches, revendique le trône. Il se rendit au camp des prétoriens, mais se heurta au beau-père de Pertinax, Titus Flavius Claudius Sulpicianus, qui revendiquait aussi l'empire. Les prétoriens poussèrent alors chacun des deux prétendants à enchérir sur leurs futurs bienfaits. Julianus l'emporta en promettant à chaque soldat de la garde 25 000 sesterces. Cet épisode fut par la suite considéré comme particulièrement honteux, l'empire paraissant avoir été mis aux enchères par ses soldats. Le Sénat, menacé par les militaires, le nomma empereur, et son épouse et sa fille reçurent le titre d'« Augusta »[23].

Rapidement, Julianus se révéla très impopulaire (la foule l'aurait conspué alors qu'il se présentait au cirque) et trois généraux entrèrent rapidement en rébellion : Pescennius Niger en Syrie, Clodius Albinus en Bretagne et Septime Sévère en Pannonie, chacun refusant de reconnaître l'autorité de Julianus et se déclarant empereur[24]. Septime Sévère, dont les troupes étaient les plus proches de Rome, fut déclaré ennemi public[25]. Julianus tenta par tous les moyens de contrecarrer son avancée : il envoya un sénateur pour convaincre les soldats de Septime d'abandonner leur général, nomma un nouveau gouverneur de Pannonie Supérieure et chargea même un centurion d'assassiner Septime[26]. Toutefois, toutes ces tentatives échouèrent et Julianus ne put empêcher son ennemi de s'emparer du port et de la flotte de Ravenne[27]. Septime refusa également la proposition de Julianus de partager l'empire[28] et poursuivit sa route, se ralliant différentes cités d'Italie[29] tout en s'assurant, qu'à Rome, les assassins de Pertinax se trouvaient sous bonne garde[30]. Abandonné de tous, en dehors d'un de ses préfets et de son gendre Cornelius Repentinus[31], Julianus se vit retirer son titre au bénéfice de Septime Sévère, déclaré empereur par le Sénat le . Le 2 juin 193, le Sénat condamna Julianus à mort et ce dernier fut assassiné par un soldat, dans le palais impérial[32].

Si sa mémoire fut condamnée (damnatio memoriae)[11] et son patrimoine saisi, son corps fut rendu à sa femme Manlia Scantilla et à sa fille Didia Clara par Septime Sévère, pour être inhumé dans le tombeau de son bisaïeul (le juriste Salvius Julianus), au cinquante mille de la Via Labicana[33].

Monnaies

Dupondius à la déesse Fortuna.

Le monnayage de Didius Julianus fut exclusivement réalisé à l'atelier monétaire de Rome, avec une production de monnaies en or (aurei), argent (deniers) et bronze (sesterces, dupondii et as)[34]. Son épouse, Manlia Scantilla, et leur fille, Didia Clara, disposèrent également d'un monnayage en leur nom propre[35].

Du fait de la brièveté du règne de Julianus, les thèmes abordés par le monnayage sont peu nombreux. L'empereur est ainsi associé à Fortuna, représentée par une figure féminine debout à gauche, tenant un gouvernail reposant sur un globe et une corne d'abondance[36]. Il est également désigné en tant que RECTOR ORBIS, sur des revers présentant le nouvel empereur, debout, tenant un globe et un rouleau de parchemin[37]. Enfin, Julianus veilla à promouvoir la concorde des armées (concordia militum), avec un type présentant la Concordia, tenant une aigle de légion et un étendard, et cela dans un contexte où la fidélité des prétoriens et des armées provinciales ne lui était pas pleinement assurée[38].

Manlia Scantilla, épouse de l'empereur et augusta, fut, quant à elle, principalement associée sur son monnayage à la déesse Junon, avec des revers présentant la déesse accompagnée d'un paon et de la légende IVNO REGINA[39]. Leur fille, Didia Clara, fut pour sa part associée à l'Hilaritas Temporum, « l'allégresse du temps présent »[40].

Noms successifs

  • 133 ou 137, né Marcus Didius Severus Julianus.
  • Mars 193, accède à l'Empire : Imperator Cæsar Marcus Didius Severus Julianus Augustus.
  • Juin 193, titulature à sa mort : Imperator Cæsar Marcus Didius Severus Julianus Augustus, Tribuniciæ Potestatis I, Imperator I, Consul I, Pater Patriæ.

Bibliographie

Sources :

Articles et ouvrages :

  • Chastagnol André, Histoire Auguste. Les empereurs romains des IIe et IIIe siècles, Paris, 1993.
  • Christol Michel, L'Empire romain du IIIe siècle, Paris, 1997.
  • Kienast Dietmar, Eck Werner, Heil Matthäus, Römische Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt, 2017.
  • Leaning J.B., « Didius Julianus and his Biographer », Latomus, 48, 1989, p. 548-565.
  • Mattingly Harold, Sydenham Edward A., The Roman Imperial Coinage, Vol. IV, Part I, Pertinax to Geta, Londres, 1936 (= RIC IV, Part I).
  • Pasek Steve, Coniuratio ad principem occidendum faciendumque, Der erfolgreiche Staatsstreich gegen Commodus und die Regentschaft des Helvius Pertinax (192/193 n. Chr.), Beiträge zur Geschichte, AVM, München, 2013, (ISBN 978-3-86924-405-1).
  • Pasek Steve, Imperator Cæsar Didius Iulianus Augustus. Seine Regentschaft und die Usurpationen der Provinzstatthalter (193 n. Chr.), Beiträge zur Geschichte, AVM, München, 2013, (ISBN 978-3-86924-515-7).
  • Woodward A. M., « The Coinage of Didius Julianus and his family », The Numismatic Chronicle, Seventh Series, Vol. I, 1961, p. 71-90.

Notes et références

  1. Dion Cassius, Histoire romaine.
  2. Dion Cassius, LXXIV, 17, 5 ; Histoire Auguste, Didius Julianus, 8-9.
  3. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 2.
  4. (en) J. B. Leaning, « Didius Julianus and his Biographer », Latomus, 48, juillet-septembre 1989, p. 553.
  5. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 3.
  6. Histoire Auguste, Didius Julianus, III, 4.
  7. (de) Dietmar Kienast, Werner Eck, Matthäus Heil, Römische Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt, , p. 148.
  8. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 4.
  9. L'inscription CIL,VI, 1401 = ILS, 412 résume l'intégralité de la carrière de Didius Julianus (en dehors de son poste de vigintivir). Aujourd'hui disparue, cette inscription fut "élevée dans le parc de sa maison à Rome par ses administrés de Biscia Lucana, satisfaits de son service". Voir ainsi André Chastagnol, Histoire Auguste, Paris, 1994, p. 282-283
  10. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 5.
  11. (de) Dietmar Kienast, Werner Eck, Matthäus Heil, Römische Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt, , p. 147.
  12. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 6.
  13. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 7.
  14. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 8 et II, 3 ; Pertinax, XIV, 5.
  15. (de) Dietmar Kienast, Werner Eck, Matthäus Heil, Römische Kaisertabelle. Grundzüge einer römischen Kaiserchronologie, Darmstadt, , p. 145 et 147.
  16. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 8.
  17. Histoire Auguste, Didius Julianus, I, 9.
  18. Histoire Auguste, Didius Julianus, II, 1.
  19. Histoire Auguste, Didius Julianus, 2.1. Pour l'instauration de cette institution sous Trajan, voir Pline, Panégyrique, 26-28
  20. Histoire Auguste, Didius Julianus, II, 1. Voir également André Chastagnol, Histoire Auguste, Paris, 1994, p. 282-283.
  21. Histoire Auguste, Didius Julianus, II, 2
  22. Histoire Auguste, Didius Julianus, II, 3 ; Pertinax, IV, 1 et XIV, 5.
  23. Histoire Auguste, Didius Julianus, III, 3-4 et IV, 5.
  24. Dion Cassius, LXXIV, 14, 3-4 ; Histoire Auguste, Didius Julianus, V, 1-2.
  25. Histoire Auguste, Didius Julianus, V, 3 ; Septimius Severus, V, 5.
  26. Histoire Auguste, Didius Julianus, V, 4-8.
  27. Dion Cassius, LXXIV, 16, 5 ; Histoire Auguste, Didius Julianus, VI, 3.
  28. Dion Cassius, LXXIV, 17, 2 ; Histoire Auguste, Didius Julianus, VI, 9 et Septimius Severus, V, 7 ; Hérodien, II, 12, 3.
  29. Hérodien, II, 11, 6.
  30. Dion Cassius, LXXIV, 17, 3.
  31. Histoire Auguste, Didius Julianus, VIII, 6.
  32. Dion Cassius, LXXIV, 17, 4-5 ; Histoire Auguste, Didius Julianus, VIII, 7-8 ; Hérodien, II, 12, 6. Dion Cassius rapporte que ses dernières paroles auraient été les suivantes : « Mais qu'ai-je donc fait ? Qui ai-je volé ? Qui ai-je assassiné ? ».
  33. Histoire Auguste, Didius Julianus, VIII, 10.
  34. Mattingly H., Sydenham E.A., The Roman Imperial Coinage, vol. IV, Part I, Pertinax to Geta, p. 13. Si les dupondii au nom de Didius Julianus peuvent clairement être identifiés comme tels, grâce au portrait radié de l'empereur, il n'en est pas de même pour les exemplaires au nom de Manlia Scantilla et Didia Clara. Pour ces derniers, seule la connaissance du diamètre et du poids d'un exemplaire peut aider à déterminer s'il s'agit d'un dupondius ou d'un as.
  35. Mattingly H., Sydenham E.A., The Roman Imperial Coinage, vol. IV, Part I, Pertinax to Geta, p. 14.
  36. RIC IV, Part I, Didius Julianus 2 ; 6 ; 12 et 15.
  37. RIC IV, Part I, Didius Julianus 3 ; 13 et 14. Nous trouvons également une variante, avec l'empereur assis à gauche sur une chaise curule et tenant un globe (RIC IV, Part I, Didius Julianus 17).
  38. Mattingly H., Sydenham E.A., The Roman Imperial Coinage, vol. IV, Part I, Pertinax to Geta,p. 13. Pour les exemplaires en question, voir RIC IV, Part I, Didius Julianus 1 ; 5 ; 11 et 14.
  39. RIC IV, Part I, Didius Julianus 7 ; 18 et 19.
  40. RIC IV, Part 1, Didius Julianus 10 ; 20 et 21

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