Eldridge Cleaver
Leroy Eldridge Cleaver, né le à Wabbaseka (Arkansas) et mort le à Pomona (Californie), est un militant des droits civiques américain, membre important du Black Panther Party. En 1968, il signe une autobiographie remarquée, Soul on Ice. Il se rallie aux conservateurs républicains dans les années 1980.
Naissance | Wabbaseka (Arkansas) |
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Décès |
(à 62 ans) Pomona (Californie) |
Sépulture |
Mountain View Cemetery and Mausoleum à Altadena (Californie) |
Nom de naissance |
Leroy Eldridge Cleaver |
Nationalité |
américain |
Domiciles |
France, États-Unis (depuis ) |
Formation | Lincoln High School de Los Angeles, Bay View High School, |
Activité |
Militant politique |
Période d'activité |
1966-1998 |
Père |
Leroy Cleaver |
Mère |
Thelma Hattie Robinson |
Conjoint |
Kathleen Neal (1967-1987) |
Enfant |
Ahmad Maceo Eldridge Cleaver, Joju Younghi Cleaver |
Organisation |
Black Panther Party, Parti républicain |
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Religion |
catholique, évangéliste, mooniste, mormon, nouvelle naissance |
Parti politique | |
Membre de | |
Partenaire |
Bobby Seale, Huey Newton |
Condamné pour |
Voie de fait (en), trafic de stupéfiants |
Lieu de détention |
Prison d'État de Soledad, prison d'État de Folsom, prison d'État de San Quentin |
Soul on Ice, Soul on Fire |
Biographie
Jeunesse et formation
Leroy Eldridge Cleaver[1] est né à Wabbaseka, dans l'Arkansas, aux États-Unis. Il est le fils de Leroy Cleaver, un voiturier, et de Thelma Hattie Robinson Cleaver, une institutrice[2],[3],[4].
En 1943, sa famille emménage à Phoenix dans l'Arizona puis à Los Angeles[3].
Il se convertit au catholicisme à l'âge de douze ans[5].
Adolescent délinquant, il passe du temps dans des centres pour mineurs[6].
À l'âge de 18 ans, il est condamné pour trafic de drogue et purge une peine à la prison d'État de Soledad (pour adultes)[7].
En 1958, condamné cette fois pour viol, violences et tentative de meurtre, il est incarcéré à la prison d’État de Folsom et de San Quentin jusqu'en 1966[8],[9].
Soul on Ice
En 1968, sort son essai nommé Soul on Ice (traduit en France sous le titre Un noir à l'ombre), qui influence le mouvement Black Power et est aujourd'hui considéré comme un classique[10]. Il relate son expérience de la prison de Folsom, sa transformation de dealer de marijuana et de violeur en série « insurrectionnel » de femmes blanches[11] : « Quand je me suis retrouvé en prison, j’ai commencé par m’examiner attentivement et, pour la première fois de ma vie, j’ai reconnu que j’avais tort, que je m’étais perdu – non pas simplement éloigné de la loi de l’homme blanc, mais de la qualité d’être humain civilisé –, car je n’approuvais pas l’action de violer. Je connaissais plus ou moins mes motivations ; pourtant, je ne me sentais pas justifié. Je n’avais plus de respect pour moi-même. Ma fierté d’homme s’en allait en morceaux ; toute ma fragile structure morale semblait s’écrouler, complètement détraquée. Voilà pourquoi je me suis mis à écrire. Pour me sauver »[12].
Se considérant toutefois comme un patriote américain, il reste déterminé à vivre aux États-Unis. Il exhorte les Américains à démanteler la « ligne Maginot raciale » qui les diviserait et se déclare convaincu que « le prix de la haine qu’on voue à d’autres hommes est que l’on s’aime moins soi-même »[5].
Black Panther Party
Cleaver rejoint après sa sortie de prison en 1966 le Black Panther Party à Oakland, en Californie, et en deviendra le ministre de l'information (porte-parole)[1],[13]. Ce qui initialement attire Cleaver chez le Black Panther Party est son engagement en lutte armée, à la différence des autres groupes[14],[10].
En 1967, Eldridge Cleaver, Marvin X (en), Ed Bullins (en), et Ethna Wyatt, forment la Maison Noire (the Black House), centre politico-culturel à San Francisco[15].
Les membres réguliers en sont Amiri Baraka, Sonia Sanchez, Askia Toure (en), Sarah Webster Fabio (en), l'Art Ensemble of Chicago, Avotcja, Reginald Lockett, Emory Douglas (en), Samuel Napier, Bobby Hutton (en), Huey P. Newton, et Bobby Seale[16].
En 1968, il est candidat du Parti paix et liberté[17] à la présidence des États-Unis, bien que n'ayant pas l'âge requis et que les tribunaux de deux États aient rejeté sa candidature. Cleaver et sa suppléante Judith Mage obtiennent 36 571 voix, soit 0,05 % des votes. Cette même année, il est blessé lorsque la police d'Oakland ouvrit le feu sur des militants noirs, tuant notamment Bobby Hutton (le trésorier du parti). Victime de manœuvres illégales du FBI qui visaient à le démolir politiquement mais également à ruiner son foyer[5], il se voit accusé de tentative de meurtre et s'exile en Algérie[18] où il est rejoint par Timothy Leary. Il place ce dernier aux arrêts révolutionnaires comme contre-révolutionnaire, Leary est relâché peu de temps après.
Depuis Alger, il reste la cible d’une campagne de harcèlement personnel conduite par les autorités américaines. Le FBI multiplia les écoutes illégales, les fausses lettres, les provocateurs payés. Abusé par l’avalanche de fausses nouvelles et de lettres anonymes que les agents fédéraux faisaient pleuvoir sur lui, Cleaver dénonça publiquement Huey Newton, entrainant une rupture au sein des Panthères noires[5].
Puis Cleaver quitte l'Algérie et passe du temps à Cuba et en France, convaincu qu’il serait assassiné s’il rentrait aux États-Unis[19].
En France
Pendant son séjour en France, Cleaver tente de devenir créateur styliste. Sa création la plus connue est un pantalon avec « une pièce rapportée comme une chaussette détaillant les parties génitales du porteur », appelée aussi « penis pant ». Le magazine Newsweek le cite : « Je veux résoudre le problème de la mentalité de la feuille de vigne. S'habiller est une extension de la feuille de vigne — cela met notre sexe dans notre corps. Mes pantalons le ramènent là où il devrait être »[20].
Cleaver achète de l'espace publicitaire dans le journal The International Herald Tribune, espérant trouver investisseurs et fabricants[20],[21]. Il continue à promouvoir le pantalon après son retour aux États-Unis[22].
Ses convictions évoluent nettement et Cleaver, lors de discussion avec des militants d’extrême gauche, défend les États-Unis « avec une véhémence qui frisait l’hystérie », selon T. D. Allman[5].
Soul on Fire
En 1978, Cleaver publie un autre livre, Soul On Fire, et révèle plusieurs aspects surprenants de son exil en Algérie.
- Cleaver recevait régulièrement des dons de la République du Nord Viêt Nam avec laquelle les États-Unis étaient en guerre.
- Cleaver a été suivi par plusieurs ex-criminels devenus révolutionnaires. Plusieurs d'entre eux ont détourné des avions pour se rendre en Algérie. Les Algériens attendaient de Cleaver qu'il les surveille. Cleaver organisa un trafic de voitures volées pour les employer : les voitures étaient volées en Europe puis revendues en Afrique.
- Cleaver a fui l'Algérie pour vivre clandestinement en France. Par l'entremise de la photographe Marie-Laure de Decker, il rencontre Valéry Giscard d'Estaing, alors ministre des Finances, qui accepte d'intervenir auprès de Jacques Chirac, alors ministre de l'Intérieur, pour empêcher l'arrestation de Cleaver par la DST et son extradition. Ayant obtenu des permis de séjour pour lui et sa famille grâce à ces hautes protections, il s'établit quelque temps à Paris, où il se reconvertit dans la mode[23].
- Cleaver a fait l'expérience d'une « renaissance à Dieu » pendant son année d'isolement alors qu'il vivait dans la clandestinité.
Retour aux États-Unis
Cleaver retourne aux États-Unis en 1975, en ayant complètement changé[24], il renonce au Black Panther Party. Il est condamné à la probation pour agression et les poursuites judiciaires cessent. Il est soutenu financièrement par le millionnaire conservateur Arthur de Moss[25],[26].
Devenu conservateur et anticommuniste, il proclame son soutien indéfectible à Israël, dénonce l'Union soviétique et Cuba, approuve les tractations entre les États-Unis et l’Afrique du Sud ségrégationniste. Il se rapproche par ailleurs de personnalités controversées, telles que Daniel Patrick Moynihan, connu pour ses opinions conservatrices sur la question noire, ou encore du prédicateur évangélique Billy Graham. Il refuse en revanche de collaborer avec la NAACP, organisation visant à défendre les droits civiques des Afro-américains[5].
Au milieu des années 1980, Cleaver devient dépendant à la cocaïne. En 1992, il écope d'une condamnation pour détention de cocaïne et cambriolage. Après une agression liée à la drogue, en 1994, il est laissé pour mort. Il réussit ensuite à se désintoxiquer.
En 1986, il se présente, sans succès, à l'investiture du Parti républicain[27] en Californie pour le Sénat des États-Unis. Ensuite, il devient mooniste et s'implique dans l'organisation de Sun Myung Moon, puis avec les mormons[28],[29].
Vie personnelle
En 1967 Elridge Cleaver épouse Kathleen Neal Cleaver, (divorcé en 1987), le couple donne naissance à deux enfants Ahmad Maceo Eldridge Cleaver et Joju Younghi[30],[31],[2],[32],[33].
Cleaver décède des suites d'un cancer de la prostate au Pomona Valley Hospital Medical Center de Californie en 1998 à l'âge de 62 ans[34],[35],[4],[33].
Archives
Les archives d'Eldridge Cleaver sont disponibles sur les archives en ligne de l’État de Californie et à la Denver Public Library (en)[36],[37].
Œuvres
- Soul on Ice, Dell Publishing,
- Post-Prison Writings and Speeches, Random House,
- Soul on Fire, Word Books,
- Target Zero: A Life in Writing, St. Martin's Griffin, , ouvrage co-édité par Kathleen Cleaver
Notes et références
- (en) « Eldridge Cleaver | American author and activist », sur Encyclopedia Britannica (consulté le ).
- (en-US) « Eldridge Cleaver », sur www.encyclopedia.com (consulté le ).
- (en-US) « Leroy Eldridge Cleaver (1935–1998) », sur Encyclopedia of Arkansas (consulté le ).
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- T. D. Allman, « Eldridge Cleaver : le retour de l'enfant prodigue », sur Le Monde diplomatique, .
- (en-US) Victor Henry Jr, « Eldridge Cleaver (1935-1998) », sur BlackPast, (consulté le ).
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- (en-US) Michael Taylor et Chronicle Staff Writer, « Ex-Black Panther Eldridge Cleaver Dies / `Soul on Ice' author, voice of black resistance was 62 », sur SFGate, (consulté le ).
- « Finding Aid to the Eldridge Cleaver Papers, 1963-1988 », sur oac.cdlib.org (consulté le )
- (en-US) « Eldridge Cleaver Papers », sur Denver Public Library
Voir aussi
Articles connexes
- Sekou Odinga, membre de la section du Bronx du BPP, qui voyagea en Algérie pour organiser la section internationale du parti avant de rejoindre la Black Liberation Army et d'être arrêté en 1981 et condamné à la perpétuité en 1983.
- Eldridge Cleaver, Black Panther, film documentaire.
Bibliographie
- (en-US) Lee Lockwood, Conversations with Eldridge Cleaver, Paperbackshop, , 150 p. (ISBN 9780224005227, lire en ligne).
- (en-US) John A. Oliver, Eldridge Cleaver Reborn, Bridge-Logos, , 308 p. (ISBN 9780882702339, lire en ligne).
- (en-US) Justin Gifford, Revolution or Death: The Life of Eldridge Cleaver, Lawrence Hill Books, , 368 p. (ISBN 9781613739112).
- Régis Dubois, Eldridge Cleaver vies et morts d'une panthere noire, Afromundi, , 210 p. (ISBN 9782919215119).
- (en-US) Joyce Nower, « Cleaver's Vision of America and the New White Radical: A Legacy of Malcom X », Negro American Literature Forum, vol. 4, no 1, , p. 12-21 (lire en ligne).
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- (en-US) Eldridge Cleaver & Henry Louis Gates, Jr., « Eldridge Cleaver on Ice », Transition, nos 75/76, , p. 294-311 (lire en ligne).
- (en-US) Newell G. Bringhurst, « Eldridge Cleaver's Passage through Mormonism », Journal of Mormon History, vol. 28, no 1, , p. 80-110 (lire en ligne).
- (en-US) Sean L. Malloy, « Uptight in Babylon: Eldridge Cleaver's Cold War », Diplomatic History, vol. 37, no 3, , p. 538-571 (lire en ligne).
- (en-US) Josh Vandiver, « Plato in Folsom Prison: Eldridge Cleaver, Black Power, Queer Classicism », Political Theory, vol. 44, no 6, , p. 764-796 (lire en ligne).
- (en-US) Zoe A. Colley, « The Making of Eldridge Cleaver: The Nation of Islam, Prison Life, and the Rise of a Black Power Icon », Journal of Civil and Human Rights, vol. 6, no 1, 1 semestre 2020, p. 61-90 (lire en ligne ).
- Régis Dubois, « La fin granguignolesque d’un Black Panther », Revue du Crieur, vol. 14, no 3, , p. 86-103 (lire en ligne ).
Liens externes
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- (en) Henry Louis Gates et Eldridge Cleaver, « Interview With Eldridge Cleaver », PBS
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