Traitement des semences

En agriculture et horticulture, le traitement des semences est la préparation des graines destinées aux semis, notamment au moyen de pesticides les protégeant des germes pathogènes et des parasites animaux.

Graines ayant subi un traitement fongicide avant semis, traitement qui peut ensuite fortement nuire à la mycorhyzation de la plante[1].
Les graines de canola (colza) de couleurs différentes mélangées.

Les adjuvants tels que les pelliculants et les enrobants permettent de faciliter les semis et d'améliorer l'efficacité des traitements. Le pelliculage par un film microporeux permet de fixer les produits par une couche très fine sans modifier la forme de la graine. L'enrobage des semences est une forme de recouvrement des semences plus épaisse, destiné à faciliter le semis et qui peut contenir des engrais, des facteurs de croissance, ainsi qu'une charge inerte et une enveloppe extérieure en polymère.

Principe et technique

Dans le cadre de la défense des cultures, les traitements des semences sont utilisés pour lutter contre les maladies des semences et pour protéger les jeunes plantes contre les parasites naturellement présents dans le sol. Ils permettent une protection efficace contre des attaques précoces de maladies et de parasites en végétation[2].

Les traitements des semences permettent de lutter également contre de nombreuses autres agressions :

Le choix de la ou des substances actives (mode et spectre d’action, persistance…) doit tenir compte des analyses sanitaires des lots bruts de semences qui arrivent dans les stations (et donc des éventuelles maladies présentes qui varient d’une année sur l’autre et du niveau de contamination) ainsi que du type de protection recherchée.

Le traitement est normalement appliqué après l'élimination de la balle, des graines de mauvaises herbes et de débris de paille. Les semences traitées sont souvent colorées tant pour les rendre moins attrayantes pour les oiseaux, que pour faciliter leur repérage et leur élimination en cas de déversement accidentel.

Les matières actives utilisées peuvent être des bactéricides, des fongicides, des insecticides de contact ou systémiques. Ils peuvent également être des répulsifs pour animaux.

Différents appareils de traitements industriels spécialisés permettent d’appliquer les matières actives et les produits d'enrobage à des doses très précises.

Réglementation

L'utilisation des produits phytosanitaires est réglementée. De nombreuses évolutions réglementaires ont eu lieu ces dernières années dans le cadre du plan Ecophyto.

Le catalogue des produits utilisables est consultable sur le site E-Phy de l'Anses[3]

Interdiction en Agriculture biologique

Pour obtenir la certification biologique, les agriculteurs européens et américains doivent rechercher des semences biologiques. S'ils ne peuvent s'en procurer, ils sont autorisés à utiliser des semences conventionnelles non traitées[4]. Les semences traitées cependant ne sont jamais autorisées[5].

Des alternatives aux traitements chimiques des semences sont en développement, dont :

  • par des huiles essentielles par exemple[6]
  • en intégrant dans la réflexion et les pratiques agricoles les organismes utiles aux symbioses mycorhiziennes, ce qui est aussi favorables à la conservation ou restauration des sols agricoles. Par exemple, quand les semences de maïs ont été traitées avec un fongicide (ex : Thirame), la colonisation mycorhizienne de la plante se fait mal (4 fois moins bien en termes d'intensité arbusculaire de la partie mycorhizée selon une étude (Mycoagra, 2022) portée en France par la chambre d’agriculture de Dordogne)[1].

Intérêts

Les traitements des semences permettent de protéger les jeunes plantes lors de leur germination contre de nombreuses maladies telluriques, contre de nombreux ravageurs des cultures. Si certaines recherches suggèrent que cela permet de diminuer les doses de pesticides répandus dans l'environnement, dans la mesure où les quantités utilisées sont relativement plus faibles que les traitements en plein champ[7], le traitement devient préventif plutôt que curatif ce qui pose la question de la réalité de ces conclusions. Pour vérifier cela, il suffirait d'avoir les doses de produits utilisées en traitement de semences en France par exemple.

Pour des grandes cultures, telles que les céréales, les traitements de semences sont essentiels contre les maladies charbonneuses (carie, charbon nu) et très précieux face aux bio-agresseurs contre lesquels d’autres méthodes de lutte sont inexistantes ou difficiles à mettre en œuvre[8].

Le choix du traitement doit être fait selon la qualité sanitaire des semences, l'historique de la parcelle et la date de semis. Ces critères aident à mieux évaluer les risques d’infections et d’attaques de ravageurs.

Inconvénients

Les graines traitées peuvent provoquer des empoisonnements (mortels ou non mortels) pour les animaux granivores si elles sont ingérées en quantités assez importantes[9]. En laboratoire, ou en captivité, les oiseaux - quand ils ont le choix - évitent les graines colorées artificiellement[10].

Dès les années 1970 il a été montré que des molécules toxiques comme la dieldrine[11], le chlorfenvinphos[11] ou le carbophenothion[11] ont été ingérées avec des graines par certains animaux sauvages[11], puis de nombreuses autres études ont confirmé que les graines enrobées peuvent être consommées par des animaux malgré la coloration visant à réduire ce risque[9],[12],[13], parfois de manière très significative[11]. Le pigeon ramier compte parmi les animaux les plus fréquemment empoisonnés par des graines enrobées[14],[15],[16],[17].
Ainsi une étude a montré que parmi 61 pigeons ramiers tués à la chasse dans une zone suivie durant trois hivers, 26 s'étaient nourris de graines de céréales enrobés de fonofos et parmi ces 26 pigeons, la chair de six d'entre eux contenait une teneur en résidus de fonofos comparable à celles retrouvées chez des oiseaux empoisonnés durant une enquête sur les accidents de la faune par le MAFF[9]. Les auteurs ont conclu que les graines traitées par le fonofos peuvent être partiellement évitées dans la nature par ces oiseaux, mais que cet évitement échoue à prévenir l'empoisonnement dans certaines conditions (rares), par exemple quand la densité de graines accessibles, les concentrations en fonofos et le niveau de faim sont supérieurs à la moyenne[9]. Des poussieres sont émises lors du semis qui volent et contaminent les terrains adjacents ou les organismes vivants via les voies respiratoires. L'usage des néocotinoides en enrobage a contribué à une large contamination de l'environnement.

Le traitement est exécuté alors que la maladie ne sera pas forcément présente. Cela occasionne une augmentation de l'usage des pesticides et donc une contamination plus forte de l'environnement puisqu'il s'agit d'un traitement préventif. C'est comme si on traitait systématiquement avec un antibiotique sans maladie. La sélection d'espèces et de souches résistantes aux maladies est une alternative écologique intéressante.

L'agriculture biologique se passe de traitements de semence, sans pour autant trop perdre de récoltes, ce qui pose la question de l'intérêt du traitement préventif systématique des semences.

Controverses

Le traitement des semences à base d'imidaclopride, insecticide de la famille des néonicotinoïdes, est controversé. Il a été interdit en France pour le traitement des semences de tournesol puis de maïs, les autorités étant convaincues que cette substance est impliquée dans le déclin des insectes pollinisateurs et peut-être dans le syndrome d'effondrement des colonies d'abeilles[18]. D'autres néonicotinoïdes, tels que le thiaméthoxame, sont également menacés d'interdiction en France.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

  1. Cécile Waligora, « Mycoagra, ses enseignements », sur A2C le site de l'agriculture de conservation, (consulté le )
  2. principes et techniques des traitements de semences sur le site Gnis-pédagogie
  3. site de consultation du catalogue sur le site E-Phy de l'Anses
  4. voir la réglementation semence sur le site officiel Semences-biologiques.org
  5. (en) Electronic Code of Federal Regulations.
  6. FW Kagambega et S Traore, « Impact de trois techniques de restauration des sols sur la survie et la croissance de trois espèces ligneuses sur les « zipellés » au Burkina Faso », sur International Journal of Biological and Chemical Sciences, (ISSN 1991-8631, DOI 10.4314/ijbcs.v5i3.72174, consulté le )
  7. Dewar, A.M. & Asher, M.J.C. 1994 A European perspective on pesticide seed treatments in sugar beet. Pesticide Outlook, 5, 11–17.
  8. Traitement des semences, toujours d'actualité sur Arvalis info Institut du végétal
  9. H. V. McKay, P. J. Prosser, A. D. M. Hart, S. D. Langton, A. Jones, C. McCoy, S. A. Chandler‐Morris, J. A. Pascual (1999), http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1046/j.1365-2664.1999.00398.x/full Do wood‐pigeons avoid pesticide‐treated cereal seed?] ; Journal of Applied Ecology First , avril 1999, DOI: 10.1046/j.1365-2664.1999.00398.x PDF (1072K)
  10. Pascual, J.A. & Hart, A.D.M. (1997), Exposure of captive feral pigeons to fonofos-treated seed in a semifield experiment. Environmental Toxicology and Chemistry, 16, 2543–2549.
  11. Stanley, P.I. & Bunyan, P.J. (1979) Hazards to wintering geese and other wildlife from the use of dieldrin, chlorfenvinphos and carbophenothion as wheat seed treatments. Proceedings of the Royal Society of London B, 205, 31–45.
  12. Hazards to wildlife from pesticide seed treatments. Application to Seeds and Soil (ed. T.Martin), pp. 127–134. British Crop Protection Council, Thornton Heath.
  13. Fletcher, M.R., Hunter, K. & Barnett, E.A. (1995), Pesticide Poisoning of Animals 1994: Investigations of Suspected Incidents in the United Kingdom. MAFF Publications, London.
  14. Fletcher, M.R., Hunter, K., Quick, M.P., Thompson, H.M. & Greig-Smith, P.W. (1991), Pesticide Poisoning of Animals 1990: Investigations of Suspected Incidents in Great Britain. MAFF Publications, London.
  15. Fletcher, M.R., Hunter, K. & Barnett, E.A. (1992), Pesticide Poisoning of Animals 1993: Investigations of Suspected Incidents in the United Kingdom. MAFF Publications, London.
  16. Fletcher, M.R., Hunter, K. & Barnett, E.A. (1995), Pesticide Poisoning of Animals 1994: Investigations of Suspected Incidents in the United Kingdom. MAFF Publications, London
  17. Fletcher, M.R., Hunter, K., Barnett, E.A. & Sharp, E.A. (1996), Pesticide Poisoning of Animals 1995: Investigations of Suspected Incidents in the United Kingdom. MAFF Publications, London
  18. (en) « 16 Seed-dressing systemic insecticides and honeybees », Agence européenne de l'environnement (consulté le ).
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