Patrimonialisation

La patrimonialisation est le processus socio-culturel, juridique ou politique par lequel un espace, un bien, une espèce[1] ou une pratique se transforment en objet du patrimoine naturel, culturel ou religieux digne de conservation et de restauration.

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Caractéristiques

Au XIXe siècle, la patrimonialisation s'attachait à rendre une voix aux monuments altérés par le temps « dans un sentiment d'urgence dû à la hantise de la perte ». Aujourd'hui, au contraire, la patrimonialisation correspond plus à jouissance promise à une communauté par la (ré)appropriation de biens communs[2].

Dans les sociétés occidentales, l'extension massive de ce qui fait patrimoine depuis le XXe siècle conduit certains auteurs critiques à parler d'un phénomène d'« inflation patrimoniale », qui pose de nombreux enjeux en matière de gestion, d'entretien, de valorisation et de vulgarisation[3],[4],[5].

Le concept de patrimoine commun de l'humanité émerge à la fin des années 1960 dans le contexte de la guerre froide et de la décolonisation. Conçu pour préserver les droits des pays en voie de développement sur les richesses naturelles « qu'ils n'avaient pas les moyens d’explorer et pour fonder leurs revendications d'une répartition plus équitable des ressources mondiales », il remet en cause la distribution du pouvoir et des richesses, si bien que les États répugnent à s'engager dans la patrimonialisation internationale et préfèrent s'en tenir à la « préoccupation commune »[6].

La patrimonialisation des sites religieux a coïncidé avec l'émergence du tourisme de masse (concernant notamment les visiteurs qui hésitent souvent entre le pèlerinage stricto sensu et le tourisme religieux) et la baisse de la pratique religieuse à partir des années 1960. Conscientes de la paternité effective des lieux sacrés, les communautés locales pouvant bénéficier de ce tourisme sont inégalement portées par ce mouvement de réappropriation collective que constitue la patrimonialisation[7].

La patrimonialisation des lieux légendaires s'appuie non plus sur l'intérêt historique ou les richesses naturelles des sites culturels qui servent à légitimer leur importance aux yeux des visiteurs, mais sur l'utilisation de constructions imaginaires comme outils de valorisation touristique de ces lieux[8].

Notes et références

  1. L'espèce patrimoniale est une « notion subjective qui attribue une valeur d'existence forte aux espèces qui sont plus rares que les autres et qui sont bien connues. Par exemple, cette catégorie informelle (non fondée écologiquement) regrouperait les espèces prise en compte au travers de l'inventaire ZNIEFF (déterminantes ZNIEFF), les espèces Natura 2000, beaucoup des espèces menacées ». Cf « Glossaire », sur mnhn.fr (consulté le ).
  2. Daniel J. Grange, Dominique Poulot, L'esprit des lieux : le patrimoine et la cité, Presses universitaires de Grenoble, , p. 30.
  3. Régis Debray, L'abus monumental, Fayard, 1999.
  4. Marc Guillaume, « La politique du patrimoine … vingt ans après », sur labyrinthe.revues.org, (consulté le )
  5. Nathalie Heinich, La fabrique du patrimoine : De la cathédrale à la petite cuillère, MSH, 2010, 286 p.
  6. Marie-Claude Smouts, « Du patrimoine commun de l'humanité aux biens publics globaux », in Patrimoines naturels au Sud : territoires, identités et stratégies locales (Marie-Christine Cormier-Salem, Dominique Juhé-Beaulaton, Jean Boutrais et Bernard Roussel dir.), Paris, IRD, 2005, p. 53-70
  7. Sylvette Denèfle, Identités et économies régionales : actes du Colloque Identités culturelles et développement économique, L'Harmattan, , p. 58.
  8. Daniel J. Grange, Dominique Poulot, L'esprit des lieux : le patrimoine et la cité, Presses universitaires de Grenoble, , p. 192.

Voir aussi

Bibliographie

  • Marie-Blanche Fourcade, Patrimoine et patrimonialisation : entre le matériel et l'immatériel, Presses Université Laval, , 347 p. (lire en ligne).

Articles connexes

  • Portail de la protection du patrimoine
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