Filière d'Artigat
La filière d'Artigat[1] ou communauté d'Artigat[2] est une filière djihadiste basée au lieu-dit Les Lanes à Artigat, en Ariège. Dirigée par Olivier Corel, elle forme de nombreux djihadistes dont Mohammed Merah.
Historique
Années 80 : les débuts
À la fin des années 1980, Olivier Corel (né Abdulilah al-Dandachi), musulman originaire de Syrie et naturalisé français en 1983, s'installe avec sa femme dans une vieille ferme sur les hauteurs d'Artigat au lieu-dit Les Lanes. Surnommé « l'Émir blanc d'Artigat »[3], il fonde en 1987 une communauté islamiste d'obédience salafiste piétiste et attire ainsi une dizaine de familles, pour la plupart des Français récemment convertis à l'islam, qui construisent leurs maisons dans le hameau[4]. La communauté qui vit de façon recluse périclite au bout de quelques années.
Olivier Corel est parti rejoindre les rangs de l'État islamique du Levant après avoir passé cinq ans en prison. Il a ensuite été à l'origine d'une des filières majeures du djihadisme en France, la « filière d'Artigat ». Il est ainsi devenu un proche de Mohammed Merah et de sa famille, ainsi que de Fabien Clain (dit Omar), qui a revendiqué les attentats du 13 novembre 2015 pour l'État islamique.
2007: arrestation d'Olivier Corel
En février 2007, une perquisition est menée chez lui. Les policiers découvrent des images de Ben Laden et d'Al-Zarqaoui, ex-chef d'Al-Qaïda en Irak et des livres djihadistes.
Olivier Corel est alors mis en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » par le juge Marc Trévidic et placé sous contrôle judiciaire avant de bénéficier d'un non-lieu[5].
Thomas Barnouin, Sabri Essid, Fabien Clain et cinq de leurs complices seront condamnés en décembre 2009 à cinq ans de prison[6]. Après avoir purgé leur peine, les membres d’Artigat n’ont pas renié leurs convictions puisqu'en janvier et février 2014, plusieurs dont Jean-Michel Clain, Imad Djebali, Sabri Essid (dont le père a épousé la mère de Mohammed Merah), Mohamed Megherbi (époux de l'une des sœurs de Fabien Clain) ou Thomas Barnouin trompent la légère surveillance dont ils font l'objet et rejoignent la Syrie avec femmes et enfants[6].
Autres affaires auxquelles est liée la filière
En 2011, Olivier Corel a célébré le mariage religieux entre la mère de Mohammed Merah, responsable des tueries de mars 2012 à Toulouse et Montauban[3], et le père de Sabri Essid[7].
La filière apparaît également dans l'affaire Sid Ahmed Ghlam, associant l'assassinat d'Aurélie Châtelain et un attentat manqué visant une église de Villejuif[2].
Le , la filière d'Artigat, et plus particulièrement le logement d'Olivier Corel font l'objet d'une perquisition administrative dans le cadre de l'enquête diligentée sur les attentats survenus à Paris et Saint-Denis le 13 novembre 2015[8]. Olivier Corel, dit l'« émir blanc », est alors mis en garde à vue[9] et condamné le 25 novembre 2015 à six mois de prison avec sursis pour détention d’arme (un fusil de chasse), en comparution immédiate au tribunal correctionnel de Foix. Cette condamnation a été assortie d’une mise à l’épreuve de deux ans avec obligation de prévenir tout changement dans sa situation personnelle, d’informer le juge de l’application des peines de tout déplacement à l’étranger avec nécessité d’obtenir une autorisation et enfin l’interdiction totale de détention d’une arme pendant cinq ans[10].
Les élèves d'Olivier Corel
De nombreuses personnes connues pour leur salafisme et des personnes connues comme terroriste islamiste sont passées par les cours d'Olivier Corel, il y a notamment :
- Sabri Essid, un demi-frère par alliance de Mohammed Merah[12]son père ayant épousé la mère de Mohammed Merah[6]. Il apparaît le 11 mars 2015, dans une vidéo ultra-violente du groupe terroriste Daech[11],[13] ;
- Fabien[13],[14] (dit Omar) et Jean-Michel Clain, deux frères d'ascendance réunionnaise convertis à l'islam. Leurs voix ont été identifiées sur la bande audio de revendications des attentats du 13 novembre 2015. Olivier Corel les a côtoyé régulièrement depuis la fin des années 1990[11] ;
- Thomas Barnouin, né vers 1981[6] converti à l'islam vers 2000, Barnouin s'est progressivement radicalisé en fréquentant des mosquées à Albi, Toulouse et Château-Chinon[15]. Vers 2002, quand il intègre la mouvance salafiste toulousaine en fréquentant une mosquée du quartier de Bellefontaine, il s'y lie avec les frères Clain et Sabri Essid[6], puis part étudier la théologie wahabbite à l’Université islamique de Médine, en Arabie Saoudite, entre 2003 et 2006. De retour en France, il décide de participer au djihad irakien[6]. En décembre 2006, lui et Sabri Essid sont arrêtés les armes à la main par les autorités syriennes. Après deux mois d’incarcération, ils sont expulsés le 13 février 2007 et interpellés à leur descente d'avion à Orly, puis condamnés en décembre 2009 à cinq ans de prison[6]. Non repenti, il part rejoindre l'État islamique en 2014 avec sa famille et Jean-Michel Clain en 2014[15], où il devient un cadre influent du groupe terroriste[12]. Il est capturé mi-décembre 2017 par des combattants kurdes en Syrie alors que les troupes de l'EI n'occupent plus qu'une petite fraction de territoire[6] ;
- Thomas Collange, né en 1983, converti à l'islam, et capturé en même temps que Thomas Barnouin[6].
La filière est soupçonnée d'avoir envoyé encore après 2014 depuis la région toulousaine plusieurs jeunes djihadistes vers l'État islamique[16].
En décembre 2017, six djihadistes français sont arrêtés en Syrie par la branche armée du Parti de l'union démocratique kurde syrien. Parmi eux se trouvent Thomas Barnouin et Thomas Collange[6]. Il en est de même pour le Toulousain Mohamed Megherbi (beau-frère de Fabien Clain), qui s'est rendu avec son frère Najib en Syrie en 2014 après voir purgé sa peine de prison, et de Kevin Gonod, 31 ans, converti à l'islam originaire du Lot[17].
Notes et références
- Cet article est partiellement ou en totalité issu de l'article intitulé « Artigat » (voir la liste des auteurs).
- « Artigat, cette filière qui n'en finit pas de revenir à la Une », sur ladepeche.fr, (consulté le )
- William Molinié, « Attentat évité à Villejuif: La filière d’Artigat refait surface depuis la Syrie, trois ans après Merah », sur 20minutes.fr, (consulté le )
- « Affaire Merah: « l'Emir blanc » d'Artigat placé en garde à vue » [fr], sur BFMTV, (consulté le )
- « Antiterrorisme. Islamistes discrets à Artigat », sur ladepeche.fr, (consulté le )
- « Affaire Merah : la communauté musulmane d'Artigat ressurgit », sur bfmtv.com, (consulté le ).
- Allan Kaval et Soren Seelow, « Plusieurs djihadistes français arrêtés en Syrie par des combattants kurdes », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- « Pourquoi Olivier Corel, "l'émir blanc" d'Artigat, n'a jamais été condamné pour terrorisme », sur Le Point, (consulté le )
- Guillaume Descours, « Ariège : «L'émir blanc» d'Artigat placé en garde à vue », sur Le Figaro, (consulté le )
- « Filière jihadiste en Ariège: « l'émir blanc » perquisitionné », sur BFMTV, (consulté le )
- « Olivier Corel, « l’Emir blanc », condamné à six mois de prison avec sursis », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- Article du Monde : Qui est Olivier Corel, « l’Émir blanc », mentor de djihadistes français ?
- Article de Libération : À Artigat, le clan de « l’émir blanc »
- « Attentats à Paris: Qui est Fabien Clain, le djihadiste suspecté d'avoir revendiqué les attaques? », sur 20minutes.fr, (consulté le )
- « Attentats du 13 novembre : un Français « très probablement » identifié dans une revendication de l’EI », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- Agence France-Presse, « Arrêté en Syrie, le djihadiste Thomas Barnouin a côtoyé Mohamed Merah et les frères Clain », 20minutes.fr, (consulté le )
- Pourquoi Olivier Corel, "l'émir blanc" d'Artigat, n'a jamais été condamné, Le Point, 24/11/2015
- « Le djihadiste toulousain Mohamed Megherbi arrêté en Syrie », ladepeche.fr, (lire en ligne, consulté le )
Sources
- Jean-Manuel Escarnot, « A Artigat, le clan de « l’émir blanc » », Libération, (ISSN 0335-1793, lire en ligne, consulté le )
- Philippe Gagnebet, « Qui est Olivier Corel, « l’Émir blanc », mentor de djihadistes français ? », Le Monde, (ISSN 0395-2037, lire en ligne, consulté le )
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