Gonadotrophine chorionique équine

La gonadotrophine chorionique équine (couramment abrégée en eCG, de l'anglais equine chorionic gonadotropin) est une hormone glycoprotéique de type gonadotrophine (agissant sur les fonctions des gonades), sécrétée par le placenta (ou chorion) des juments gestantes à partir du 35e jour de gestation. Elle était auparavant connue sous le nom anglais de Pregnant Mare Serum Gonadotropin (PMSG).

Pour les articles homonymes, voir eCG.

Produite par des élevages équins dédiés, elle est conditionnée et commercialisée par des laboratoires afin d'être utilisée dans l'exploitation des animaux de production, notamment pour la synchronisation des chaleurs (en) et des inséminations artificielles en élevage bovin, ovin, caprin et porcin, ainsi que pour générer des superovulations (en) chez ces femelles, préalablement à des transferts d'embryons.

L'exploitation des juments pour la production de cette hormone, peu réglementée et principalement localisée en Amérique du Sud, est critiquée en Europe pour cruauté envers les animaux.

Dénomination

L'eCG portait autrefois le nom anglais de Pregnant Mare Serum Gonadotropin (PMSG) avant que son origine chorionique (placentaire) ne soit mise en évidence[1].

Physiologie

L'eCG est sécrétée par des cellules trophoblastiques binucléées migratrices, à partir du 35e jour de gestation de la jument et jusqu'au 120e[1]. Il semble que le zèbre et les ânes sauvages soient également capables d'en sécréter[1].

Chez la jument, son activité est similaire à celle de l'hormone lutéinisante (LH).

Utilisation en élevage

La gonadotrophine chorionique équine est utilisée en médecine vétérinaire des animaux de rente, pour des usages divers. Chez les espèces n'appartenant pas aux équidés, elle a une activité mixte hormone lutéinisante (LH) / hormone folliculo-stimulante (FSH). Ce sont ces propriétés qui sont utilisées.

Elle est notamment utilisée pour la synchronisation des chaleurs (en) (et donc des inséminations artificielles) en élevage bovin, ovin, caprin et porcin. Après pose d'une spirale vaginale ou d'un implant auriculaire de progestatif pendant une dizaine de jours, l’injection d’eCG est utilisée lors du retrait pour parfaire la synchronisation, particulièrement chez les vaches allaitantes non cyclées lors du traitement, et renforcer l’induction de l’œstrus et de l’ovulation (c'est son "effet FSH" qui est utilisé)[2],[3],[4]. Selon le même principe, elle est utilisée pour le traitement médical du syndrome anœstrus de la vache lorsqu'il est d'origine fonctionnel.

Elle peut aussi être utilisée afin de générer une superovulation (en) chez ces femelles, en vue de production d'embryons pour réaliser des transferts d'embryons[5],[6],[7]. C'est alors son effet LH qui est utilisé.

Cette hormone n'est pas utilisée en élevage équin sur les juments, car le principe d'action serait non-fonctionnel[8].

Par ailleurs, son dosage dans le sang des juments gestantes a été utilisé comme diagnostic de gestation, mais cette méthode tend à être moins utilisée car elle ne tient pas compte de la mortalité embryonnaire et n’est réalisable que du 40ème au 140ème jour[9].

Production

L'eCG est extraite du sang de juments gravides, collecté dans des élevages dédiées. La plupart se situeraient aux États-Unis, en Argentine, en Uruguay et en Corée du Sud. Le sang est collecté par cathétérisme de la veine jugulaire externe, théoriquement dans une limite d'environ 15 % du volume total de sang circulant, par période de 4 semaines[10].

Les poulains générés par ces gestations sont considérés comme des coproduits, ils sont donc avortés ou vendus à la naissance. Quand les juments ne sont plus suffisamment productives, c'est-à-dire quand leur fécondité n'est plus suffisante pour mener à bien des gestations successives, elles sont abattues pour leur viande[10].

L'une des principales entreprises du secteur est la société Syntex, active en Argentine et en Uruguay[11]. L'Islande est aussi un pays producteur[12].

D'après l'enquête des associations de protection animale, les fermes uruguayennes reçoivent des subventions de la part de leur gouvernement et de l’alliance commerciale Mercosur depuis 2013, pour développer cette activité[11].

Controverses

En plus des aspects inhérents à la production de cette hormone pour l'industrie pharmaceutique (exploitation des chevaux pour leur sang, gestations répétées, avortement des fœtus, réforme des juments pour leur viande), les associations de protection animale dénoncent des actes de cruauté envers les animaux[13],[14].

Aux États-Unis, Animals Angels rapporte que les fermes à sang d'Argentine et d'Uruguay prélèvent dix litres de sang aux juments gestantes à chaque ponction, et laissent mourir sur place les animaux trop faibles pour le supporter[15]. Animals Angels dénonce aussi les méthodes d'élevage, en particulier l'utilisation excessive d'aiguillons électriques pour faire avancer les juments[16]. L′Animal Welfare Foundation témoigne n'avoir pu enquêter dans la ferme à sang de Loma Azul, en Uruguay, car le lieu est gardé par des militaires. Elle cite néanmoins 795 chevaux envoyés à l'abattoir par cette ferme en 2014[15].

Ces associations déplorent l'absence de lois de protection animale réglementant l'élevage des chevaux pour leur sang, notamment concernant le volume de sang qu'il est possible de collecter en garantissant le minimum de risques pour la santé des juments (anémie, avortement, collapsus de la veine jugulaire, formation d'hématomes, choc hypovolémique...)[10].

Une pétition lancée sur le site Avaaz.org pour demander l'interdiction de l'importation d'eCG par l'Union européenne a réuni plus d'1,6 million de signatures en [17]. En , les laboratoires MSD (Merck & Co) annoncent cesser leurs importations depuis les fermes à sang incriminées[11]. En revanche, selon Libération[14] et le Daily Geek Show[18], le laboratoire Ceva Santé Animale continue à s’approvisionner auprès de Syntex, en Argentine, malgré des alertes répétées, et justifie ce choix par la visite d'un expert indépendant accompagné d’une équipe en interne et par celles du ministère de l’Agriculture argentin, pour s’assurer que les conditions d’élevage seraient décentes.

En , le Parlement européen a estimé que la production de cette hormone par les pays tiers concernés n’était pas conforme aux standards de l’Union européenne, à travers l'adoption d'un amendement. Le Conseil des ministres européens a prévu de statuer sur ce sujet le [19]. Les organismes interprofessionnels d'élevage contactés en France pour s'exprimer à ce sujet (Interbev, Inaporc et Anicap) n'ont fait aucun commentaire[20]. En revanche, le périodique La France agricole s'est exprimé contre cette production[11].

Notes et références

  1. Marie Saint-Dizier et Sylvie Chastant-Maillard, La reproduction animale et humaine, Versailles, Éditions Quae, , 800 p. (ISBN 978-2-7592-2208-7 et 2-7592-2208-X, lire en ligne), p. 383.
  2. « Résumé des caractéristiques du produit CRESTAR PACK », sur ircp.anmv.anses.fr,
  3. « Résumé des caractéristiques du produit PRID DELTA 1,55 G SYSTEME DE DIFFUSION VAGINAL POUR BOVINS », sur ircp.anmv.anses.fr,
  4. (en-GB) « Why is the world out for horses’ blood? », The Guardian, (ISSN 0261-3077, lire en ligne, consulté le )
  5. F. Forcada, M. Ait Amer-Meziane, J. A. Abecia et M. C. Maurel, « Repeated superovulation using a simplified FSH/eCG treatment for in vivo embryo production in sheep », Theriogenology, vol. 75, no 4, , p. 769–776 (ISSN 1879-3231, PMID 21144569, DOI 10.1016/j.theriogenology.2010.10.019, lire en ligne, consulté le )
  6. « Training manual for embryo transfer in cattle », sur www.fao.org (consulté le )
  7. (en) « Endocrine consequences of superovulation in Ruminants », sur medvet.umontreal.ca (consulté le )
  8. Emmanuel Jeangirard, « Scandale des fermes de sang : l’hormone n’est pas utilisée en élevage équin », L'Eperon, (lire en ligne, consulté le )
  9. « Diagnostic de gestation chez la jument par un test rapide de dosage semi-quantitatif de la Relaxine », sur orbi.ulg.ac.be,
  10. (en) « Animals Angels - The Trade with Horse Blood and Pregnant Mare Serum Gonadotropin (PMSG) in the United States, Argentina and Uruguay », sur files.ctctcdn.com (consulté le ).
  11. Hélène Chaligne, « Bien-être animal : De la pampa à l’Europe, du sang de juments sur les mains des labos pharmaceutiques », sur La France Agricole, (consulté le )
  12. Sarah Finger, « En Islande, le calvaire des juments envoyées dans les «fermes à sang» », sur Libération (consulté le )
  13. (en) Martin Bagot, « Vampire farm hell as Brit meat at centre of horse hormone 'torture' scandal », mirror, (lire en ligne, consulté le ).
  14. Sarah Finger, « Des juments saignées aux quatre veines pour l’élevage français », Libération, (lire en ligne, consulté le ).
  15. (en) « The cruel trade with pregnant mare blood in the United States, Uruguay, and Argentina 9/30/15 | Animals Angels - North America », sur www.animalsangels.org (consulté le ).
  16. Animals' Angels, « Turning Horse Blood into Profits », The Dodo, (lire en ligne, consulté le ).
  17. (en) « Vampire farms exposed: British meat in cruel horse hormone scandal as pregnant mares' blood is injected into pigs », sur mirror.co.uk, .
  18. Matthieu Garcia, « Des “fermes de sang” torturent et mutilent des milliers de juments pour le compte des laboratoires », Daily Geek Show, (lire en ligne, consulté le )
  19. Patricia Jolly, « Le triste sort des juments élevées pour leur sang « jusqu’à l’épuisement » », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le ).
  20. « "Fermes à sang" : des juments martyrisées au profit des éleveurs français », L'Obs, (lire en ligne, consulté le ).

Annexes

Articles connexes

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