Gudea

Gudea, ou selon sa forme francisée Goudéa (« l'Appelé »), est un souverain de la cité-État de Lagash, en Mésopotamie, dans le pays de Sumer. Il règne d'environ 2140 à 2120 av. J.-C. Il est célèbre pour de nombreuses statues qui le représentent. Plusieurs sont faites en diorite, roche magmatique noire extrêmement solide.

Sauf précision contraire, les dates de cette page sont sous-entendues « avant Jésus-Christ ».

Gudea

Statue de Gudea dédiée au dieu Ningishzida, v. 2120 av. J.-C., musée du Louvre[2]
Titre
Roi de Lagash
vers 2141 – vers 2122
Prédécesseur Ur-Bau
Successeur Ur-Ningirsu
Biographie
Dynastie Seconde dynastie de Lagash
Conjoint Nin-alla
Enfants Ur-Ningirsu

Règne

Par son mariage avec Ninalla, fille d’Ur-Bau, ensi de Lagash, Gudea entre dans la famille royale. Si ses inscriptions revendiquent une campagne victorieuse contre Anshan, Gudea est un prince avant tout bâtisseur. Il fait reconstruire une vingtaine de temples à Ur, Nippur, Adab, Uruk et Bad-Tibira — indice intéressant de l'influence de Gudea à Sumer.

Le plus important est l’Eninnu, dédié à Ningirsu, divinité tutélaire de Girsu — actuelle Tellō, l’une des villes de l'État de Lagash. Selon des inscriptions figurant sur des cylindres ou les statues de Gudea, la décision de construire l'Eninnu est prise à la suite d'une série de rêves dans lesquels Ningirsu — directement ou par le biais de sa sœur, Nanshe, interprète des rêves — réclame un temple à Gudea. Les inscriptions décrivent ensuite comment Gudea, après avoir fait régner la paix à Lagash, purifie la cité, délimite une enceinte sacrée et établit le plan du temple. Après avoir dessiné le moule à briques, il choisit une argile pure, purifie les fondations, fait la première brique, la porte sur sa tête et la pose. Puis les artisans, venus d’Élam et de Suse, poursuivent le chantier. On utilise les matériaux les plus précieux : cèdre, or, argent, porphyre, ce qui témoigne de la grande prospérité de la cité-État. En un an, l’Eninnu est achevé et Gudea peut clamer : « Le respect du temple emplit tout le pays ; la crainte qu’il impose habite l’étranger ; l’éclat de l’Enninu couvre l’univers comme un manteau ! »

Fragment d'une stèle trouvée à Girsu, musée du Louvre

Statues

De nombreuses statues du prince Gudea (pour la plupart en diorite) et des fragments de bas-reliefs ont été découverts sur le site de Tello, anciennement Girsu.

La matière première, belle pierre dure importée sans doute d’Arabie méridionale, a été retrouvée en telle quantité que l’on doit songer à un approvisionnement régulier et quantitativement important, ce qui implique des relations suivies et un système économique équilibré. On sait d'après les textes que la diorite, qui est la pierre majoritairement utilisée pour les représentations de Gudea provenait du « pays de Magan » qui correspond à l'actuel sultanat d'Oman. La qualité plastique du travail signifie que l’atelier d’où sont sorties ces œuvres avait une longue tradition de la sculpture sur de la pierre dure et qu’il ne saurait être question d’une renaissance ou d’une redécouverte consécutive à un siècle d’effacement total. On constate un retour aux conventions qui avaient cours avant les créations agadéennes, mais la série des Gudea n’est en rien conforme à la production des sites de Mari ou de la vallée de la Diyala de l’époque des dynasties archaïques : l’usage de la diorite, pierre particulièrement dure, impose des formes très massives où les éléments du corps sont très peu sortis de la masse.

Sur le plan iconographique et stylistique, les différentes représentations de Gudea obéissent à un modèle bien précis. Tout d'abord le souverain est représenté avec une tiare. Le costume est une sorte de toge découvrant l'épaule droite.

Le visage, dont les sourcils se rejoignent en « arêtes de poisson », est identique d'une statue à l'autre. À l'époque, cette distinction anatomique était le signe d'une grande intelligence.

Il faut aussi souligner l'attention toute particulière portée par l'artisan aux mains et aux pieds, travaillés avec finesse. Le rendu des bras laisse découvrir la musculature du souverain, qui se surnommait lui-même « Gudea, l'homme aux bras forts ».

Statue de Gudea, dite "statue A", dédiée à la déesse Ninhursag (détail des mains jointes) - Musée du Louvre.

Sur le plan symbolique, il faut voir ces statues comme l'expression de la piété de Gudea. Son visage est en effet empreint de sérénité, et il est souvent représenté dans la position de l'orant, les deux mains jointes. Il faut de plus remettre ces statues dans le contexte de l'époque, puisqu'elles étaient placées dans des temples. Gudea s'inscrit à ce propos dans la catégorie dite des « rois bâtisseurs », puisqu'il fit ériger plusieurs temples sous son règne. Le dieu de l'État de Lagash sur lequel il régnait était Ningirsu et son dieu personnel était Ningishzidda[3] dont l'animal-attribut est le dragon-serpent bashmu[4],[5].

Références

  1. « Gudea, prince de Lagash, statue assise dédiée au dieu Ningishzida », sur Musée du Louvre (consulté le )
  2. « Gudea, prince de Lagash, statue assise dédiée au dieu Ningishzida », sur Musée du Louvre (consulté le )
  3. (en) Frans Wiggermann, « Nin-giszida », dans Reallexikon der Assyriologie und Vorderasiatischen Archäologie, vol. IX, Berlin - New-York, Walter de Gruyter, (ISBN 3-11-013932-4), p. 372
  4. Frans Wiggermann 1998, p. 373.
  5. (en) Frans Wiggermann, « Transtigridian Snake Gods », Sumerian Gods and their Representations, , p. 33-55

Bibliographie

  • Bertrand Lafont, « Gudea », dans Francis Joannès (dir.), Dictionnaire de la civilisation mésopotamienne, Paris, Robert Laffont, coll. « Bouquins », , p. 352-354
  • (en) Flemming Johansen, “Statues of Gudea Ancient and Modern”, Mesopotamia. Copenhagen Studies in Assyriology, 6 (1978), Copenhague ;
  • André Parrot, Tello : vingt campagnes de fouilles (1877-1933), Paris, Albin Michel,
  • Georges Roux, La Mésopotamie, Seuil, coll. « Points histoire », 1995 (nouv. édition) (ISBN 2-02-023636-2) ;
  • (de) W.H.Ph. Römer, « Zum heutigen Stande der Gudeaforschung », Bibliotheca orientalis, 26 (1969), p. 159–171 (recension bibliographique).
  • Agnès Benoit, Art et archéologie : les civilisations du Proche-Orient ancien, Paris, RMN, coll. « Manuels de l'école du Louvre »,
  • (en) C. E. Suter, Gudea's Temple Building: The Representation of an Early Mesopotamian Ruler in Text and Image, Groningue, 2000
  • (en) Dietz Otto Edzard, The Royal inscriptions of Mesopotamia, Early periods, vol. 3/1, Gudea and His Dynasty, Toronto, University of Toronto Press,
  • Edmond Sollberger et Jean-Robert Kupper, Inscriptions royales sumériennes et akkadiennes, Paris, Le Cerf, coll. « Littératures anciennes du Proche-Orient »,

Liens externes

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