Henri Donnedieu de Vabres

Henri Donnedieu de Vabres, né le à Nîmes et mort à Paris 6e, est un professeur de droit français, qui a été l'un des quatre juges titulaires du procès de Nuremberg en 1945.

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Henri Donnedieu de Vabres
Henri Donnedieu de Vabres au procès de Nuremberg
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Juge
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Jacques Donnedieu de Vabres (d)
Jean Donnedieu de Vabres
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En 1914, il est chargé d’un cours de procédure civile à l’université de Montpellier[1]. Après la Grande Guerre, il est nommé professeur à la Faculté de droit de Paris où il occupe pendant trente ans la chaire de droit criminel. Parallèlement, il s’oriente vers le droit pénal international ce qui l’amène à participer à de nombreuses réunions à Paris, en Europe et aux États-Unis.

Avant la Seconde Guerre mondiale

En 1928, il publie un livre qui fait référence, Les Principes modernes du droit pénal international[2]. Cet ouvrage a été réédité en France en 2005 en raison de son « étonnante actualité ». Dans sa conclusion, il écrivait : « Seul l’attachement de la loi pénale à une idée d’obligation morale fait reconnaître à ses prescriptions une valeur obligatoire pour l’humanité tout entière… Seul un droit supérieur à l’État peut prétendre au privilège de l’universalité… »

Favorable à l’application par les tribunaux nationaux des lois pénales étrangères et à la reconnaissance de la valeur internationale des jugements répressifs, Henri Donnedieu de Vabres prédisait l’effacement de la diversité des lois pénales.

Ses contributions sont multiples : il est l'un des fondateurs et principaux animateurs de la Revue de science criminelle et de droit pénal comparé', membre du comité de direction de la Revue internationale de droit pénal, collaborateur des Études criminologiques, vice-président de la Société générale des prisons, président de la Société de médecine légale, président de la Société de patronage des prisonniers libérés protestants, président du Patronage des jeunes garçons en danger moral.

Ses travaux sont également reconnus par les autorités civiles et juridiques qui le sollicitent afin d’assurer de multiples responsabilités. Il se voit ainsi confier la présidence de la commission chargée de la révision du code de procédure criminelle[3].

Procès de Nuremberg

En 1945, au procès de Nuremberg, il est l’un des quatre juges titulaires, représentant la justice française, et son juge suppléant était Robert Falco, conseiller à la Cour de Cassation.

Durant le procès, il se rapprocha du président du tribunal, l’Anglais Geoffrey Lawrence, qui veillait à une procédure méthodique et équitable. Il était inquiet en revanche de la rigueur de la délégation soviétique, et dans une certaine mesure de celle des États-Unis qui dominaient le procès par leur volonté politique et grâce à leurs ressources judiciaires, financières et logistiques.

Il s'opposa à l'inculpation de crime contre la paix, la notion lui apparaissant comme trop large et imprécise pour être utilisée dans un procès aussi monumental. Parallèlement, il protesta aussi fortement contre la condamnation du Generaloberst Alfred Jodl, déclarant que la condamnation d'un soldat de carrière n'ayant aucune allégeance à l'égard du Parti nazi constituait une erreur judiciaire. Cette déclaration sera reprise le par la München Hauptspruchkammer (principale cour de dénazification allemande) dans une décision qui réhabilitera Jodl, la cour déclarant que Jodl ne pouvait être classé ni dans le groupe 1 (coupables majeurs), ni dans le groupe 2 (coupables).

Il fut aussi celui qui suggéra qu'un peloton d'exécution serait une méthode d'exécution plus honorable pour les condamnés à mort. Cette suggestion fut fortement contestée par le juge américain Francis Biddle et le juge soviétique Iona Nikitchenko. L'exécution par pendaison fut finalement retenue.

Après la guerre

En 1946-1947, il professe un cours à l’Institut de criminologie de Paris sur le procès de Nuremberg, ainsi qu’à l’Académie internationale de La Haye.

Avec Raphael Lemkin (le professeur de droit qui, dans son livre Axis Rule in Occupied Europe publié en 1944, crée et définit le terme "génocide") et Vespasian V. Pella, il fut consulté par John Humphrey afin de préparer la Convention sur la prévention du génocide de l'ONU.

Il participa activement aux travaux des commissions créées au sein de l’ONU, pour l’établissement d’un « code des crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité » et pour l’institution d’une cour criminelle permanente. Il ne se dissimula pas l’extrême difficulté de cette tâche qu'il ne put achever.

Il meurt dans le 6e arrondissement de Paris le .

Famille

Gendre de David Beigbeder, Henri Donnedieu de Vabres a eu cinq enfants, dont deux conseillers d’État (Jacques et Jean). Il est le grand-père du ministre Renaud Donnedieu de Vabres.

Controverse

Laurence Leturmy et Michel Massé, de l'université de Poitiers, ont créé une controverse en reprochant au livre Retour à Lemberg de Philippe Sands (en) d'avoir mis en parallèle l'étonnante opposition de De Vabres à la peine de mort pour Hans Frank lors du procès de Nuremberg, et le fait qu'il avait dîné avec lui en compagnie de Julius Streicher en 1935[4],[5]. Hans Frank était jugé pour son rôle comme tout puissant gouverneur du Gouvernement général de Pologne, où quatre des pires centres d'extermination nazis avaient opéré (Chelmno, Belzec, Sobibor et Treblinka), tandis que son volumineux journal, fréquemment cité durant le procès, attestait de son implication[6]. Le juge américain Francis Biddle avait noté à ce propos que de Vabres était « étonnamment tendre[7] ».

Ce dîner avec Frank et Streicher créait une situation que de Vabres lui-même, à l'époque, comme juge, considérait gênante, selon ce qu'en rapporte le second juge français au procès de Nuremberg Robert Falco[8]. Le neveu de De Vabres aussi, Yves Beigbeder, assistant de son oncle lors du procès de Nuremberg devenu ensuite expert en droit international, estime quant à lui le fait « embêtant [...] Peut-être Donnedieu vivait-il sur un nuage[9] ? ».

Notes

  1. D'après la liste des professeurs de l'université répertoriés en introduction de l'ouvrage de Maurice Evesque, Les finances de guerre au XXe siècle, éditions Alcan, 707 pages, 1914, exemplaire commercial de la thèse soutenue par M. Evesque à l'université de Montpellier le 27 février 1914.
  2. « les principes modernes du droit pénal international »
  3. Mickaël BERTRAND, « Henri Donnedieu de Vabres et la mémoire de Nuremberg », sur blog.com, Histoire, Mémoire et Société (ISSN 2261-4494), (consulté le ).
  4. Laurence Leturmy et Michel Massé, Henri Donnedieu de Vabres. Le juge et le professeur, in « Mélanges en l'honneur de Jean Danet. Les mots du droit, les choses de justice », Collectif, éd. Dalloz, .
  5. Intervention de Michel Massé à 3h29 dans « Colloque "Actualité du procès de Nuremberg, 75 ans après" » , sur memorializieu.eu. -- Massé en fait prête à tort à Sands l'opinion d'un article de Le Populaire, et dit à tort que Sands « déduit que... D. de V. aurait dû refuser de siéger à Nuremberg » : ce qu'il ne dit pas.
  6. Le journal de Hans Frank, extraits présentés par Henri Monneray, Le Monde Juif, 1947/7, pp. 2-4.
    Journal de Hans Frank (extraits), traduit et annoté par Willy Coutin, Revue d’Histoire de la Shoah, 2012/1, pp. 329-372.
  7. Telford Taylor (procureur au procès de Nuremberg), The Anatomy of the Nuremberg Trials - A Personal Memoir, New York, Knopf, 1992 : « De Vabres voted life imprisonment for Frank and reserved his opinion on Frick, leading Biddle to remark in his notes that de Vabres was “curiously tender.” »
  8. Robert Falco, Juge à Nuremberg : Souvenirs inédits du procès des criminels nazis, Arbre bleu éditions, , p. 41 à 42 : « Cette situation le gène davantage que le fait d'avoir dans l'un de ses écrits traité Staline de "bourreau sanglant". »
  9. Samuel Blumenfeld, Yves Beigbeder, 96 ans, ultime survivant du procès des nazis à Nuremberg, Le Monde, 20-11-2020.

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