Herbier (écologie)
Un herbier est un groupe de plantes aquatiques enracinées et densément présentes, vivant à faible profondeur (phytobenthos photophile[1]) et généralement ancrées dans le sable ou de la vase par des racines ou rhizomes. C'est aussi un habitat subaquatique.
Pour les articles homonymes, voir Herbier (homonymie).
Enjeux
Un herbier a une valeur trophique (comme source de nourriture pour d'autres espèces), par les plantes qui le composent et par les algues et communautés épiphytes qu'elles supportent[2].
Un herbier a aussi une valeur structurelle [3] ; c'est un habitat subaquatique (sous-marin ou d'eau douce) apprécié ou privilégié de nombreuses espèces aquatiques. C'est notamment une zone de ponte (frayère[4]) et/ou de refuge pour de nombreuses larves et alevins. Des interactions particulières y existent entre plantes et substrats[5], en particulier les herbiers modifient la forme du fond (effet sédimentologique[6]). Certains herbiers ont une valeur bioindicatrice[7],[8]. Les poissons et autres animaux s'y installent avec une certaine organisation spatiale (liée à la structure de l'herbier et aux effets de niches écologiques[9]) et d'une manière qui peut évoluer saisonnièrement et dans le temps[10]
Herbier marins
Un herbier marin est un peu l'équivalent d'une « prairie sous-marine ». En Europe, ces herbiers sont surtout constitués de zostères ou de posidonies.
Bien qu'il s'agisse de "plantes à fleurs" capables de reproduction sexuée, dans certaines conditions, la reproduction multiplicative prédomine ou semble assurer seule la conservation de la colonie. C'est ainsi qu'en 2006 une vaste colonie clonale de Posidonia oceanica, a été découverte au sud de l'île d'Ibiza, de 8 km de large et potentiellement âgée de 100 000 ans. Elle pourrait être le plus grand organisme vivant végétal marin connu et l'un des plus anciens[11].
Herbiers d'eau douce
On trouve en Europe des herbiers dulçicoles dans les fleuves et rivières par exemple constitués de rubaniers, vallisneria, ceratophyllum, myriophyllum, potamots à feuilles pectinées), voire dans certains étangs. En zone fraiche à tempérée, ils disparaissent presque entièrement en hiver et se reconstituent au printemps et en été. Ils constituent des habitats ou niches écologique importantes, notamment pour les alevins, écrevisses et de nombreux invertébrés aquatiques qui peuvent ainsi mieux échapper à leurs prédateurs et y trouver des sources de nourriture.
En zone tropicale et ensoleillée, ils peuvent être très denses et couvrir la surface de l'eau sur des centaines d'hectares[réf. nécessaire].
Les herbiers naturels tendent à régresser lors d'une augmentation générale de la turbidité de l'eau, des polluants qui s'accumulent dans les sédiments et probablement en raison d'autres facteurs encore mal compris (concurrence d'espèces invasives, impact de pesticides tels que les désherbants lessivés sur les zones de culture...).
État, pressions, menaces
Les herbiers marins (de posidonies notamment[12]) sont en régression presque partout dans le monde, à cause du chalutage des fonds, des ancres de bateaux de pêche ou de plaisance, de l'extension des ports et de l'activité portuaire ou par asphyxie (anoxie) suite à l'envasement induit par une turbidité accrue de l'eau du fait d'apports terrigènes de plus en plus chargés[13].
L'apparition d'espèces exotiques invasives (ex : Caulerpa taxifolia ou Caulerpa racemosa [14]) est aussi une menace pour les herbiers autochtones, en Méditerranée.
Certains herbiers sont menacés par des espèces introduites devenues invasives (ex : Caulerpa taxifolia en Méditerranée) ou par des phytopathogènes[15].
Certains herbiers sont aussi surexploités pour la récolte d'algues ou d'autres ressources marines ou aquatiques.
En eau douce, au contraire, certains herbiers prolifèrent au point de devenir invasifs et de poser des problèmes pour les activités humaines et la biodiversité aquatique ; c'est le cas des herbiers de Ludwigia peploides ou d'Elodea canadensis en Europe, où ces plantes ont été introduites. Globalement les herbiers de plantes autochtones tendent à régresser ou ont localement disparu, alors que quelques espèces invasives occupent des surfaces de plus en plus vastes.
Notes et références
- Verlaque, M. (1987). Contributions à l'étude du phytobenthos d'un écosystème photophile thermophile marin en Méditerranée occidentale: étude structurale et dynamique du phytobenthos et analyse des relations faune-flore (Doctoral dissertation, Université Aix-Marseille 2), (résumé).
- Moncreiff, C. A., & Sullivan, M. J. (2001). Trophic importance of epiphytic algae in subtropical seagrass beds: evidence from multiple stable isotope analyses. Marine ecology. Progress series, 215, 93-106.
- Edgar, G. J. (1999). Experimental analysis of structural versus trophic importance of seagrass beds. I. Effects on macrofaunal and meiofaunal invertebrates. Vie et milieu, 49(4), 239-248.(résumé)
- Francour, P., & Le Direac'h, L. (1994). Recrutement de l'ichtyofaune dans l'herbier superficiel à Posidonia oceanica dans la réserve marine de Scandola (Corse, Méditerranée nord-occidentale): données préliminaires. Travaux scientifiques du Parc naturel régional et des réserves naturelles de Corse, (46), 71-91.
- Boudouresque, C. F., & Jeudy de Grissac, A. (1983). L'herbier à Posidonia oceanica en Méditerranée: les interactions entre la plante et le sédiment. Journal de recherche océanographique, 8(2-3), 99-122.
- Jeudy de Grissac, A. (1984). Effets des herbiers à Posidonia oceanica sur la dynamique marine et la sédimentologie littorale. In International Workshop Posidonia oceanica beds, Boudouresque CF, Jeudy de Grissac A. & Olivier J.(eds), GIS Posidonie publ., Fr (Vol. 1, pp. 437-443).
- Pergent, G., Pergent-Martini, C., & Boudouresque, C. F. (1995). Utilisation de l'herbier à Posidonia oceanica comme indicateur biologique de la qualité du milieu littoral en Méditerranée: état des connaissances. Mésogée, 54, 3-27.
- Muehlstein L.K (1989) Perspectives on the wasting disease of eelgrass Zostera marina. Diseases of aquatic organisms, 7(3), 211-221.
- Aliaume, C., Lasserre, G., & Louis, M. (1990). Organisation spatiale des peuplements ichtyologiques des herbiers à Thalassia du Grand Cul-de-Sac Marin en Guadeloupe (résumé).
- Francour, P. (2000). Evolution spatio-temporelle à long terme des peuplements de poissons des herbiers à Posidonia oceanica de la réserve naturelle de Scandola (Corse, Méditerranée nord-occidentale). Cybium, 24(3), 85-95.
- Ibiza's Monster Marine Plant, par Ibiza Spotlight, 28 mai 2006, consulté 2007-05-09
- ex : Maggi, P. (1973). Le problème de la disparition des herbiers à Posidonies dans le golfe de Giens (Var). Science et Pêche, 221, 7-20.
- Boudouresque, C. F. (1990). Livre rouge" Gérard Vuignier" des végétaux, peuplements et paysages marins menacés de Méditerranée (No. 43). PNUE, Aires Spécialement Protégées.
- Piazzi L, Balestri E, Magri M, & Cinelli F (1997) Expansion de l'algue tropicale Caulerpa racemosa (Forsskal) J. Agardh (Bryopsidophyceae, Chlorophyta) le long de la côte Toscane (Italie). Cryptogamie. Algologie, 18(4), 343-350.
- Muehlstein, L. K. (1989). Perspectives on the wasting disease of eelgrass Zostera marina. Diseases of aquatic organisms, 7(3), 211-221.
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Hily, C., Duchêne, J., Bouchon, C., Bouchon-Navaro, Y., Gigou, A., Payri, C., & Védie, F. (2010). Les herbiers de phanérogames marines de l’outre-mer français. Hily, C., Gabrié, C., Duncombe, M. coord IFRECOR, Conservatoire du littoral.
- Pergent, G., Calvo, S., Cancemi, G., Djellouli, A., De La Grandrive, R. D., Langar, H., ... & Tomasello, A. (2010). Nouvelles connaissances sur les herbiers tigrés de Méditerranée. In 4th Mediterranean symposium on marine vegetation (pp. 95-98). UNEP-MAP-RAC/SPA (résumé).
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