Marabout (islam)

Un marabout (en arabe : مَربوط [marbūṭ] ou مُرابِط [murābiṭ], appliqué, assidu ; en garnison) est un saint homme (il s'agit rarement d'une femme) et un sage musulman facilitant la vulgarisation de l’islam et faisant l'objet d'un culte populaire. On en retrouve en Afrique du Nord[1] et dans certaines régions d'Afrique subsaharienne.

Grand marabout toucouleur (Sénégal) (1853)

Pour les articles homonymes, voir Marabout.

Ce saint patron donne parfois son nom à un lieu-dit, à un village, à une ville, à qui il offre protection et bénédiction.

Le terme désigne aussi le tombeau à coupole (قُبّة [qubba], au pluriel قِبَاب [qibāb]) de la personne vénérée (saint).

Chaque année des milliers de fidèles se réunissent dans des zaouïa, autour du culte d'un marabout.

Origine du terme

Le substantif masculin[2],[3]  marabout  est emprunté[2],[3], par l'intermédiaire[2] du portugais[2],[3] marabuto, à l'arabe[2],[3] murābiṭ[3] qui désignait, à l'origine l'homme vivant dans un ribat[3].

Fonctions

Marabout et son chapelet (1890)
Marabout sénégalais (1890)

En Afrique subsaharienne

En Afrique subsaharienne, les marabouts sont des personnages à qui l'on prête des pouvoirs multiples, sortes de chamans. Ils rétablissent la santé ou l'ordre social à l'aide de talismans et d'explications du malheur. Ces pratiques magiques sont critiquées par les musulmans orthodoxes, mais n'ont jamais cessé d'exister jusqu'à ce jour. Les marabouts sont aussi, de leur vivant, considérés comme sages, car ayant étudié au cours de leur retraite les divers aspects de l'islam. Ils agissent souvent comme conseil des villageois. Leur vie à l'écart des autres est censée leur donner le recul nécessaire ainsi que le détachement qui leur permet d'obtenir une grande autorité morale.

Ils ne demandent en général pas de salaire pour leurs actions, mais l'obligation morale tacite est de pourvoir à leurs besoins, qui, dans la mesure où ils sont ascètes, se réduisent à la nourriture et à la boisson, ainsi qu'au vêtement. Ils s'interdisent de demander un salaire.

Dans les confréries musulmanes en Afrique de l'Ouest, notamment au Sénégal, les marabouts sont organisés en hiérarchies élaborées. Le marabout le plus élevé de la confrérie des Mourides est ainsi élevé au rang de calife.

En Afrique subsaharienne, l'usage du terme a été étendu aux prêtres, chasseurs traditionnels ou sorciers relevant de rites animistes traditionnels, vaudous ou yoruba par exemple, travaillant à guérir leurs patients d'un mal ou aider à toute autre action sociale. Bien qu'abusif, car se rapportant à des pratiques peu en rapport avec l'islam, cet usage est néanmoins devenu courant.

Des tribus lettrées, notamment maures et touarègues, sont parfois désignées comme des tribus maraboutiques, comme les Kel Ansar.

Au Maghreb

Dans le Maghreb, les marabouts sont le plus souvent musulmans. Ils basent leurs techniques sur une lecture ésotérique du Coran. L'attention est portée sur un système de numérologie assez similaire au système de la kabbale, la lecture de certains versets, aux bénédictions (al-Fatiha).

Le terme "marabout" ne désigne pas un sorcier comme cela peut-être le cas en Afrique noire car il ne pratique aucun rite sacrificiel ou animiste au nom d'une quelconque divinité ou esprit. Le terme arabe "marabout" en Afrique correspond en réalité à un saint soufi mystique rattaché (mûra-bet en arabe) à une silsila (chaîne de transmission de la maîtrise spirituelle appelée hekme) qui suit une voie (tariqa) ésotérique de l'islam (voir soufisme). C'est en réalité un maître spirituel qui mène une vie de dévotion, recluse et ascétique. Souvent la population locale arabo-berbère, d'origine paysanne ou montagnarde, lui attribue toutes sortes de "miracles" qui ont donné lieu à de nombreuses croyances populaires. Le saint est généralement enterré dans un sanctuaire appelé qubba en raison de son dôme. Le vert et le blanc, symbole de la paix et de la bénédiction en islam, sont les couleurs qui leur sont toujours associées. Le saint n'a pas de pouvoir politique en général, mais les soufis lui rendent visite (ziyarra) pour le consulter ou s'entretenir sur des problèmes d'ordre spirituel.

Marabouts et saints par pays

Les zaouïa sont des lieux de visites pieuses autour du personnage d'un saint musulman. Le terme de « pèlerinage » est en principe réservé hajj, le pèlerinage à La Mecque.

Alger

Mostaganem

  • Sidi Said son mausolée se trouve près du siège de la mairie de Mostaganem
  • Sidi Abdellah dans une hauteur qui surplombe le quartier El-Matmor.
  • Sidi Lakhdar Ben Khlouf. Situé dans la commune portant le même nom distante de 50 km du chef-lieu de la wilaya.
  • Sidi Maazouz El-Bahri (سيدي المعزوز) situé dans le quartier historique de Tijdit, dans un cimetière portant son nom.
    • Sidi Bensaber.
    • Sidi Othman.
  • Sidi Allel El-Ksouri considéré comme l'une des plus anciennes tombes de la ville, anciennement située le long de l'oued de Ain Safra.
  • Sidi Madjdoub.
  • Sidi Belkacem situé dans la commune de Mazagran.
  • Sidi Bendhiba El-Mdjahri.

La ville connue pour ses mille et une coupoles abrite aussi des mausolées (مقام) qui sont décrits dans le folklore local comme étant l'itinéraire de ces saintes personnes ou l'endroit où ils se sont reposés comme :

  • Sidi Abdelkader de El-SAFAH (الصفاح)
  • Sidi Abdelkder de Essebsadjia.
  • Sidi Blel situé dans le quartier de El-Arssa.
  • Sidi El-Mokhfi littéralement et traduit par «le discret» car sa tombe est inconnue.
  • Sidi Maamar quartier de Tijdit.

Kabylie

  • Sidi lhadj Mhemed, tadart n wadnan n At Boudrare
  • Sidi mohand Rezag ou Assous, akfadou, bejaia
  • Djeddi Belkacem Ouali, taddert Ath Izid Souk-letnyen, Maatkas Tizi-Ouzou
  • Lalla Fatma N'Soumer
  • Lalla Khlidja
  • Sidi Ali Moussa, taddert Sidi Ali Moussa Souk-letnyen, Maatkas Tizi-Ouzou
  • Sidi Ammar Ighil El Mal, At-zmenzer, Tizi-Ouzou
  • Sidi Touati, Béjaia
  • Sidi El Hadj Hassaïne
  • Sidi M'hamed Ouali à Bouzahrir Mekla
Sidi M'hamed Ouali à Bouzahrir Mekla
  • Sidi hand oussaid, ouzellaguen,
  • Sidi younes, ouzellaguen,
  • Sidi Omar Ou El Hadj, Bouzguène, Azazga,
  • Sidi Ahmed Ibn Idriss, Bouzguène,
  • Sidi Ali Ouyahya Bni Qoufi, Boghni
  • Sidi Bahloul Cheufa, Azazga,
  • Sidi Abdel Kader Al Oudhi Al Hammami, Bouira
  • Cheikh AlHeddad, Seddouk, Béjaia
  • Sidi Said Amsisen, Seddouk, Béjaia
  • Sidi Ahmad OuHaddad, Akfadou, Béjaia
  • Sidi Ahmad Ouyahyan Oumalou, Béjaia
  • Sidi Adli, Tamokra, Béjaia
  • Abi Kacem Al Husseyni Al Boudjeli, Akbou, Béjaia
  • Yemma Gouraya, sainte patronne de Béjaïa
  • Sidi Boudrahem
  • Sidi El Mouhoub
  • Sidi El Moufak
  • Sidi Mansour
  • Sidi Mohand Chrif
  • Sidi Mohand Oulahdir
  • Cheikh Ouboudaoud
  • Sidi Yahia El Aidli
  • Sidi Bahloul Ouassem
  • Sidi Lahlou
  • Sidi Abderahmen (L'Vahloul - Beni Ksila)
  • Sidi Abdelmalek Cheurfa Ouadhias
  • Sidi Ouelhadj Amghar, Ait Ouelhadj Ait Bouaddou Ouadhias.
  • Sidi M’hend G Heddad, saint patron de la région Amacine (Feraoun et Ibarbachen"Tayma N ath Ouhddad") et Sidi-Aich (Hammam Sillal)
  • Yemma Mezghitane, sainte patronne de Jijel
  • Sidi Ahmed Taffer
  • Sidi Ahmed Aqellal
  • Sidi M'hend Amokrane
  • Sidi Merabet Moussa
  • Sidi Lebsir
  • Sidi Boukebrayene Cherif, Ighil Tazert, Larbaa Nath Irathen
  • Sidi Ali oubou-issa, Ait oumalou, Larbaa Nath Irathen
  • Sidi Abdelaziz ou rached Ait oumalou, Larbaa Nath Irathen
  • Sidi Ali acherif Tizi Rached, Larbaa Nath Irathen
  • Sidi Mohamed Chorfi, Ain Tolba (Algérie)
  • Sidi M'hand Oumalek, Ait Oumalek, Tifrit N'ath Oumalek

Maroc

Tombeau d'un marabout dans le Maroc méridional
  • Molay Driss
  • Lalla chafia
  • Lalla mira lhartiya
  • Sidi simohamed Boudargua
  • Sidi Abdelkader Bouderka (Photo)
  • Sidi Abderahman el Mjdoub
  • Sidi Ali Menoun (Meknès)
  • Sidi M'hamed el-Ayachi
  • Sidi Ahmed Hajji
  • Sidi Abdellah ben Hassoun
  • Sidi Ben Acher al-Andaloussi
  • Sidi Moussa Doukkali
  • Sidi Bouhaja
  • Sidi Mhammed mfadel Moul goumri
  • Sidi Abdelkader el Harrati
  • Sidi moussa doukkali
  • Lalla Aicha Massoud
  • Lalla Taja
  • Sidi Abderrahman Ajjamar
  • Sidi Ahmed Taghi
  • Sidi Ahmed Ben Ichou
  • Sidi Ahmed Bel Lahcen
  • Sidi Ahmed Omoussa
  • Zaouïa du cheikh Sidi Ahmed Rguibi
  • Sidi Allal Al Kairaouani
  • Sidi Ali Ifni
  • Sidi Beliout
  • Sidi Ahmed Zeriab
  • Sidi Mbarek Regragui
  • Sidi Messaoud
  • Lalla Kadiria
  • Sidi Mohamed Moul Assabiane
  • Sidi Mohamed Ben Abdallah (Mirleft)
  • Sidi Fettah
  • Sidi Moumen Boulhnich
  • Sidi Maarouf
  • Sidi Abdellah Bel Hadj
  • Sidi Hajjaj
  • Sidi Moumen
  • Sidi El Khadir
  • Sidi Moussa El Majdoub
  • Zaouïa Naciria
  • Zaouïa Cherqaouia
  • Zaouia Sidi el Mir Cherkaoui
  • Zaouia Sidi el Mekki
  • Zaouïa Aïssaouia
  • Zaouïa Hamdouchia
  • Zaouïa Tijaniyya
  • Zaouïa de Sidi Ali Bouatel
  • Zaouïa de Sidi Ali Ben Sidi Larbi Benazzouz Derkaouiyya
  • Zaouïa Qadiriyya
  • Zaouïa de Sidi Rezzoug
  • Sidi Mohammed Ben Slimane
  • Zaouïa de Sidi Boudala

Tunisie

Imrabdhen

En Kabylie (Algérie), les Imrabdhen, (pluriel de amrabedh en kabyle[4]) sont les marabouts et saints et plus généralement dans l'Afrique du Nord berbérophone. Les lignages d'imrabden sont souvent des familles d'origine chorfa (pas tous chérifiennes). Imrabden est une dynastie berbère fondée par Yahia Ben Brahim en 1035, à l'origine des Imravdhen en Kabylie reste inconnue (avec manque d'études scientifiques crédibles sur le sujet).

Origine

Le mot amrabed signifie littéralement marabout en français et est un emprunt à l'arabe mrabet, qui signifie : « un soldat ou un enseignant stationné dans un lieu déterminé »[5].

Les imrabden comme tous les Chérifs, bénéficient du titre honorifique de Sidi qui est traditionnellement utilisé pour se référer aux gens reconnus descendants du prophète de l'Islam. Et les femmes sont appelées généralement Lalla.

La majorité des familles chorfa en Kabylie (Algérie) sont issues de la lignée d'Idriss le Petit, fils dIdriss le Grand, fils d'Abd Allah Al-Kamil dit « le Parfait », fils d’Al-Hassan Al-Muthanna « le deuxième », fils d'Al-Hassan « Sibt » lui-même fils de l'imam Ali ibn Abi Talib et de Fatima Zahra, fille de Mahomet, prophète de l'Islam.

Histoire

Les marabouts Chorfas du Maghreb se rattachent, pour beaucoup, traditionnellement à une migration venue de l'Oued Draa dans le centre du Maroc, mais aussi de l’Andalousie, en Espagne après la Reconquista à la fin du XVe siècle, et se sont dispersés dans toutes les régions de l’Afrique du Nord, notamment au Maroc, en Algérie (surtout dans l’ouest et en Kabylie), en Tunisie et en Libye[6].

Le premier arrivé au Maghreb de la descendance de Ali ibn Abi Talib (gendre de Mahomet) est Idriss le Grand, le fondateur du royaume des Idrissides entre 789 et 985[7]. Après la chute de ce royaume au Xe siècle, leur descendance était tuée et pourchassée par le pro-fatimide Moussa ibn Abi Al-Afya el Miknasi. D’après la légende, ceux qui ont survécu aux massacres ont fui vers le désert et les montagnes pour se protéger[8].

Ils seraient arrivés en Kabylie entre le XIIe et le XVe siècle, se voulant plus instruits que les montagnards et connaisseurs du droit musulman (Fiqh) mais surtout neutres dans les luttes tribales[9] ; ces « nouveaux-venus » ne tardèrent pas ainsi à acquérir la considération générale des habitants.

À l’époque, les conditions exigées pour la prétention au chérifat sont généralement la possession d’un manuscrit de l’arbre généalogique de la famille et le témoignage de quatre personnages eux-mêmes Chorfa, comme le témoigne une attestation qui daterait de la fin du XIVe siècle, appartenant à un chérif andalou, remise à l’historien Ahmed Taoufik al Madani en 1979 à Alger[10].

Bibliographie

  • Edmond Doutté, Notes sur l'Islâm maghribin : Les Marabouts, Paris, Ernest Leroux (réimpr. 2008) (1re éd. 2000), 124 p. (OCLC 8279711, lire en ligne) — Extrait de la Revue de l'histoire des religions, t. XL et XLI.
  • Christian Coulon, Pouvoir maraboutique et pouvoir politique au Sénégal, Paris, Université de Paris, 1976, 2 vol., 594 p. (thèse d’État remaniée et publiée en 1981 sous le titre Le Marabout et le Prince : Islam et pouvoir au Sénégal, Paris, Pedone, XII-317 p.)
  • Bassirou Diop, Le Rôle joué par les marabouts toucouleurs dans l’islamisation du Sénégal, Dakar, Université de Dakar, 1983 (mémoire de maîtrise)

Notes et références

  1. Jean-Louis Margolin, « L'Asie, frontière de l'islamisme ? », Mouvements, nos 21-22, , p. 111-120 (lire en ligne).
  2. « Marabout », dans le Dictionnaire de l'Académie française, sur Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le 15 mai 2016).
  3. Définitions lexicographiques et étymologiques de « marabout » (sens I, A) dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le 15 mai 2016).
  4. Kabylie et coutume kabyles, Tome I, Adolph Hanoteau, artiside Horace, Letourneux, imprimerie national
  5. « LA RÉACTION DES AUTOCHTONES DANS LE CENTRE ET LE SUD TUNISIEN CONTRE L'OCCUPATION FRANÇAISE ENTRE 1881 & 1888 : MOUVEMENT DE RÉSISTANCE OU RÉBELLION PRIMITIVE. », sur Academia.edu (consulté le ).
  6. Étude sur le passé et l’avenir de Kabylie, les kabyles et la colonisation de l’Algérie, le Baron Henri Aucapitaine.
  7. « La dynastie Alide des Idrissides 789–985 par Ibn Khaldoun al-Hadrami : », sur Histoire Islamique, (consulté le ).
  8. Ibn Khaldoun, Al-Muqaddima (Introduction à l'histoire universelle).
  9. la Kabylie, recherche et observation, Colon, imprimerie librairie et lithographie, juillet 1846
  10. Poésie berbère et identité : Qasi Udifella, héraut des At Sidi Braham, tassadit yacine, édition de la maison des sciences de l’homme, Paris.

Voir aussi

Articles connexes

  • Jean-Eugène Robert-Houdin en 1856, face aux marabouts algériens, décrit ce qu'il appelle des « faux-prophètes » qui parviennent à « enflammer le fanatisme de leurs coreligionnaires à l'aide de tours de passe-passe ».

Liens externes

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