Jean Corvin

Jean Corvin (Corvin János en hongrois, Ivaniš Korvin en croate, Jánoš Korvín en tchèque), né le à Buda, fils illégitime de Matthias Corvin[1], roi de Hongrie et de Barbara Edelpeck, mort le , fut comte Hunyadi, duc de Slavonie, d'Opava, de Głubczyce et de Głogów, prince de Liptó, roi de Bosnie de 1495 à 1499, et de 1498 à sa mort en 1504 Ban de Croatie et Slavonie.

Jean Corvin
Jean Corvin en 1486, par Baldassare Estense
Fonction
Ban de Croatie (en)
Titre de noblesse
Ban
Biographie
Naissance
Décès
(à 31 ans)
Krapina
Sépulture
Nom dans la langue maternelle
Corvin János
Activité
Famille
Père
Mère
Barbara Edelpöck (en)
Fratrie
Hunyadi de Hongrie (d)
Conjoint
Béatrice Frankopan (en) (depuis )
Enfants
Élisabeth Corvin
Christophe Corvin (en)
Matthias Corvin (d)
Autres informations
Religion
Signature
Sa signature
Armoiries des Corvin
Jean Corvin, roi de Bosnie
Vladislas Jagellon

Origine

C'est en 1470 que Barbara Edelpeck, roturière autrichienne de Stein an der Donau, et le roi Matthias s'étaient rencontrés lors d'une chasse aux environs de Vienne. À l'issue d'une relation suivie, Jean était né le . Cependant Barbara n'était pas noble, et en 1475 Matthias devait se marier avec Béatrice de Naples[2]. Même s'il avait reçu le nom de son grand-père Jean Hunyade, le petit Jean demeura pendant des années à l'écart de la politique. Jusqu'en 1476 il demeura à Besztercebánya, dans une résidence choisie par le roi. Il fut élevé par sa grand-mère paternelle Erzsébet Szilágyi, ses études étant confiées à Taddeo Ugoletto, directeur de la Bibliotheca Corviniana. Pendant son enfance, Jean Corvin eut un accident qui le laissa légèrement boiteux de la jambe gauche. « Jeune homme intelligent mais un peu mou »[3], Jean Corvin est décrit par un Vénitien en ces termes : « Il est dévot, religieux, ne se met jamais en colère ; si l'on accuse quelqu'un devant lui, il répond : ce n'est peut-être pas vrai. Il entend trois messes par jour, mais quant au reste il ne s'émeut pas plus qu'une statue »[4].

Tentative de légitimation

Comme c'était souvent le cas des enfants illégitimes, le roi Matthias l'avait d'abord destiné aux ordres ecclésiastiques comme évêque de Győr, mais perdant espoir de voir sa troisième épouse la reine Béatrice de Naples lui donner un héritier légitime, il décida d'en faire son successeur.

En 1479 il le reconnut officiellement et le couvrit d'honneurs et de biens jusqu'à ce qu'il fût le personnage le plus riche du royaume. Il le déclara publiquement comme son successeur, le faisant comte Hunyadi et en 1481 prince de Liptó[5], doté de vastes domaines en Silésie. En 1490, il avait fait de ce fils le seigneur de Toszek, Opava[6], Racibórz, Krnov, Kozel, Bytom, Głubczyce[7] et Głogów[8]

Matthias ordonna aux commandants de toutes les forteresses du royaume de jurer allégeance à son fils, tout en tentant d'organiser son mariage avec Bianca Maria Sforza de Milan – projet que les intrigues de la reine Béatrice s'efforçaient d'entraver.

Matthias entendait aussi faire reconnaître Jean comme prince héritier de Hongrie par l'empereur Frédéric III, en échange d'une renonciation à ses conquêtes aux dépens du domaine héréditaire des Habsbourg ; mais sa mort inopinée le fit échouer le projet, et le jeune prince se retrouva seul, à 17 ans, au milieu d'une foule d'ennemis.

Miné par les intrigants

On le convainquit de renoncer à ses prétentions sur le trône, en échange de la couronne de Bosnie ; puis de se retirer vers le sud avec les trésors que son père lui avait confiés, après quoi une armée partit à sa poursuite pour le dépouiller de tout.

Entre-temps, c'est Vladislas Jagellon que, le , la Diète avait élu roi de Hongrie. Jean se hâta de le reconnaître, pour tenter de sauver ce qui pouvait encore l'être. Il fut aussi reconnu duc de Slavonie et de Troppau, mais dut renoncer aux deux titres cinq ans plus tard.

Lors de l'invasion de la Hongrie par Maximilien, il montra sa loyauté en lui abandonnant les trois forteresses de Pozsony, Komárom et Tata, que son père lui avait confiées. Cependant, encouragés par sa complaisance, les grands dignitaires, menés par le Palatin de Hongrie István Zápolya entreprirent, par une série de procès, de le dépouiller des possessions qui lui restaient, tout en le diffamant auprès d'un roi trop indolent.

Chef militaire en Croatie

Cependant, en 1496, Jean Corvin épouse Béatrice, fille de Bernardin Frankopan, alors âgée de 16 ans. Admis dans la plus haute société croate il est nommé en 1498 ban à vie de Croatie et de Slavonie et c'est en tant que tel qu'en 1503, il accorde au capitaine Paul Rattkay le château et le fief de Veliki Tabor. De 1499 à 1502, il défend avec succès la partie ouest de la Bosnie contre l'envahisseur ottoman : en 1501, il reprend aux Turcs la ville royale de Jajce en Bosnie.

La frontière de la Hongrie avec l'Empire ottoman au début du XVIe siècle avant la défaite de Mohács en 1526, avec pour les villes conquises par l'envahisseur la date de leur chute.
Úljak = Ilok ; Nándorfehérvár = Belgrade ; Szendrő = Smederevo ; Érsomlyó = Vršac ; Orosva = Orșova ; Szörény = Severin ; Havasalföld = Valachie ; "Scardona" = Skradin ; Klissza = Klis

En 1503, il brigue le poste de Palatin, mais échoue du fait des manœuvres de la reine Béatrice et autres ennemis.
Il est mort à Krapina le , à l'âge de 31 ans. Sa tombe se trouve dans l'ancien monastère paulin de Lepoglava[9], qu'il avait fait fortifier en 1491.
Au XIXe siècle, Jean Corvin est devenu pour certains un personnage romantique.

Il laissait un fils, Christophe, né en 1499 et mort le , et une fille, Élisabeth, née en 1499 et morte en 1508 : avec Christophe s'éteint le dernier héritier mâle de Jean Hunyade.
Sa veuve devait épouser le margrave Georges de Brandebourg, et mourut en 1510.

Bibliographie

  • Historische Kommission für Schlesien (éd.): Geschichte Schlesiens ("Histoire de la Silésie"), t. 1, Sigmaringen, 1988, p. 226–230 & 233.
  • Karl Nehring : "Matthias I. Corvinus" dans : Neue Deutsche Biographie ("Nouvelle biographie allemande"), t. 16, Duncker & Humblot, Berlin 1990, p. 407 et suiv.
  • Schönherr Gyula : Hunyadi Corvin János: 1473-1504. Budapest: Magyar Történelmi Társulat (Société d'histoire hongroise), 1894.
  • Hugo Weczerka : Handbuch der historischen Stätten: Schlesien ("Manuel des États historiques : la Silésie"), Stuttgart, 1977, "Introduction historique" à la p. L.

Notes et références

  1. Il tenait son nom de son père Matthias Corvin ; Corvin (Corvinus en latin) trouve son origine dans le blason de la famille, qui représente un corbeau (corvus en latin) perché sur le « rocher du corbeau », dans la propriété de la famille en Transylvanie. D'après les Annales de Silésie, un corbeau aurait un jour emporté l'anneau que le roi Matthias avait retiré de son doigt. Matthias l'aurait attrapé et tué pour récupérer sa bague, et pris le corbeau comme le symbole de son sceau en mémoire de cet événement. D'autres prétendent que lorsque le jeune Matthias était en prison à Prague, sa mère lui aurait fait apporter un message par un corbeau
  2. En 1476 Barbara Edelpeck se maria avec un autre roturier du nom de Friedrich, et l'un et l'autre vécurent dans le château d'Enzersdorf que le roi Matthias avait acheté. Elle mourut à Klosterneuburg en février 1495, donc cinq ans après le roi de Hongrie. Cf. Ritoókné Szalay Ágnes : Borbála - Nympha super ripam Danubbi, Budapest, éd. Balassi, 2002, cité par Wikipedia "Bárbara Edelpeck" (es)
  3. Édouard Sayous, Histoire générale des Hongrois, tome II, Paris, 1876, p. 27 (lire en ligne).
  4. Ibid., p. 35 (lire en ligne).
  5. Liptov n'était qu'un comté, et aucun autre seigneur du lieu n'a porté le titre de prince ; Matthias Corvin entendait probablement doter son fils d'autres possessions en Haute-Hongrie (aujourd'hui en Slovaquie)
  6. Après la mort du Duc Przemysław en 1484, Matthias avait obtenu pour son fils le duché de Toszek et en 1485 celui d'Opava. Cf. : Wikipedia : "Johann Corvinus" (de)
  7. À la mort en 1385 de Jean II de Głubczyce. Cf. Wikipedia : "Johann Corvinus" (de)
  8. Le Duché de Głogów faisait partie des fiefs de la Couronne de Bohême depuis 1331 ; Matthias projetait depuis 1377 de le transmettre à son fils, qui devait en hériter en vertu d'un accord conclu en 1482. S'étant fâché avec Jean II de Żagań (dit « le Mauvais »), il avait fini, pour nommer son fils duc à sa place, par l'en chasser en 1488, lui faisant renoncer à ses droits pour 20 000 florins. Cf. : Wikipedia: "Jan II the Mad" (en)
  9. L'ancien monastère de Lepoglava est depuis 1854 la plus grande prison de Croatie, où sont passés la plupart des grands noms de la politique croate au XXe siècle, quand ils étaient dans l'opposition
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