Jonction triple de Rodrigues

La jonction triple de Rodrigues est une jonction triple reconnue en 1971[1] située dans le sud de l'océan Indien, où se rencontrent les africaine, indo-australienne et antarctique. Elle est formée de la jonction de trois dorsales : la dorsale centrale indienne, la dorsale sud-ouest indienne et la dorsale sud-est indienne. Elle tire son nom de l'île de Rodrigues située à environ 1 000 km au nord-ouest de celle-ci.

Jonction triple de Rodrigues, vue du sud.

Frontières

Les frontières des trois plaques qui se rencontrent à la jonction triple de Rodrigues sont toutes des dorsales actives, ce qui en fait une jonction triple de type R-R-R (pour l'anglais ridge-ridge-ridge, soit « dorsale-dorsale-dorsale »)[2]. Certains travaux suggèrent cependant une jonction triple instable « dorsale-dorsale-faille »[3]. La dorsale centrale indienne (entre les plaques africaine et indo-australienne) a une vitesse d'expansion de 50 mm/an, la dorsale sud-ouest indienne (entre les plaques africaine et antarctique) de 16 mm/an et la dorsale sud-est indienne (entre les plaques indo-australienne et antarctique) de 60 mm/an[4].

La dorsale sud-est indienne a la vitesse d'expansion la plus élevée à la triple jonction, et bien que dorénavant considérée comme un centre d'expansion intermédiaire, elle était une dorsale à expansion rapide entre les anomalies magnétiques 31 et 22, avec une vitesse de 110 km/million d'années à l'anomalie 28. La vitesse d'expansion est similaire pour la dorsale centrale indienne, mais légèrement plus lente et présentant une géométrie plus complexe. La dorsale sud-ouest indienne a une vitesse d'expansion très lente, une topographie accidentée et un nombre important de zones de fractures décalées[5].

Ces trois frontières sont elles mêmes coupée par des frontières diffuses : la dorsale centrale indienne est coupée par la frontière indo-texte=capricorne[6], la dorsale sud-est indienne par la frontière capricorne-australienne[7] et la plaque sud-ouest indienne par la frontière nubio-somalienne[8]. Ces deux dernières plaques sont l'œuvre du rift est-africain divise l'Afrique entre plaques nubienne et somalienne. Elles convergent au sud de la vallée du Rift (mm/an) mais divergent au nord (mm/an) et une légère différence dans la vitesse d'expansion le long de la partie centrale de la dorsale sud-ouest indienne indique l'existence d'une triple jonction vague quelque part au sud de Madagascar[8].

Évolution de la tectonique

La jonction triple de Rodrigues s'est formée lorsque le microcontinent des Seychelles (en) a dérivé de la plaque indienne il y a 64 Ma entraînant l'ouverture de la dorsale de Carlsberg[9]. Depuis la jonction triple a migré vers l'est depuis le sud de Madagascar (dans ses coordonnées modernes) jusqu'à sa situation actuelle[10].

Depuis 65 Ma, la vitesse de migration vers le nord-est de la jonction triple de Rodrigues a diminué : d'abord de 10 cm/an, puis 2,6 cm/an il y a 43 Ma, enfin environ 3,6–3,8 cm/an depuis 41 Ma. La stabilité de la vitesse de migration vers 41 Ma coïncide avec la plissement de la chaîne sous-marine Hawaï-Empereur, suggérant une réorganisation globale de la tectonique des plaques à cette époque[11].

D'abord considéré comme une jonction triple stable de type « dorsale-dorsale-dorsale », la jonction triple de Rodrigues est maintenant considérée comme une jonction triple instable « dorsale-dorsale-faille » dans laquelle l'axe de la dorsale centrale indienne se décale vers l'est à une vitesse de 14 cm/million d'années à cause des différences de vitesse d'expansion entre la dorsale centrale indienne et la dorsale sud-est indienne. Cette configuration est similaire à celle de la jonction triple des Galápagos à l'est de l'océan Pacifique[3]. À chaque fois que la jonction triple de Rodrigues est décalée vers l'est, un nouveau segment est àjouté à la dorsale centrale indienne, entraînant une croissance constante de la dorsale centrale indienne et une longueur constante pour la dorsale sud-est indienne. Au contraire, les vitesses d'expansions de la dorsale sud-ouest indienne sont intermittentes et très lentes, mais l'extension des plaques dans les dorsales sud-est et centrale indienne entraînent une augmentation constante de la longueur de la dorsale sud-ouest indienne près de la jonction triple[5].

Notes et références

  1. McKenzie et Sclater 1971, Indian Ocean triple junction, pp. 488–494.
  2. Mitchell 1991, Introduction, pp. 8019–8020.
  3. Munschy et Schlich 1989, Abstract.
  4. Sauter et al. 1997, Introduction.
  5. Dyment 1993, Introduction, pp. 13863–13864.
  6. Wiens et al. 1985, Abstract.
  7. Royer et Gordon 1997, Abstract.
  8. Chu et Gordon 1999, p. 64–67.
  9. Masalu 2002, Introduction, pp. 87, 89.
  10. Zhou et Dick 2013, Tectonic setting, p. 196.
  11. Masalu 2002, Conclusions, p. 92.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) D. Chu et R. G. Gordon, « Evidence for motion between Nubia and Somalia along the Southwest Indian Ridge », Nature, vol. 398, no 6722, , p. 64–67 (DOI 10.1038/18014, lire en ligne)
  • (en) J. Dyment, « Evolution of the Indian Ocean Triple Junction between 65 and 49 Ma (anomalies 28 to 21) », Journal of Geophysical Research: Solid Earth, vol. 98, no B8, , p. 13863–13877 (DOI 10.1029/93JB00438, lire en ligne)
  • (en) D. C. P. Masalu, « Absolute migration and the evolution of the Rodriguez Triple Junction since 75 Ma », Tanzania Journal of Science, vol. 28, no 2, , p. 97–104 (lire en ligne)
  • (en) D. P. McKenzie et J. G. Sclater, « The evolution of the Indian Ocean since the Late Cretaceous », Geophysical Journal International, vol. 25, no 5, , p. 437–528 (DOI 10.1111/j.1365-246X.1971.tb02190.xM)
  • (en) N. C. Mitchell, « Distributed extension at the Indian Ocean triple junction », Journal of Geophysical Research: Solid Earth, vol. 96, no B5, , p. 8019–8043 (DOI 10.1029/91jb00177, lire en ligne)
  • (en) M. Munschy et R. Schlich, « The Rodriguez Triple Junction (Indian Ocean): structure and evolution for the past one million dates », Marine Geophysical Researches, vol. 11, no 1, , p. 1–14 (DOI 10.1007/BF00286244, lire en ligne)
  • (en) J. Y. Royer et R. G. Gordon, « The motion and boundary between the Capricorn and Australian plates », Science, vol. 277, no 5330, , p. 1268–1274 (DOI 10.1126/science.277.5330.1268, lire en ligne)
  • (en) D. Sauter, V. Mendel, C. Rommevaux-Jestin, P. Patriat et M. Munschy, « Propagation of the southwest Indian Ridge at the Rodrigues triple junction », Marine Geophysical Researches, vol. 19, no 6, , p. 553–567 (DOI 10.1023/A:1004313109111, lire en ligne)
  • (en) D. A. Wiens, C. DeMets, R. G. Gordon, S. Stein, D. Argus et J. F. Engeln, « A diffuse plate boundary model for Indian Ocean tectonics », Geophysical Research Letters, vol. 12, no 7, , p. 429–432 (DOI 10.1029/GL012i007p00429, lire en ligne)
  • (en) H. Zhou et H. J. Dick, « Thin crust as evidence for depleted mantle supporting the Marion Rise », Nature, vol. 494, no 7436, , p. 195–200 (DOI 10.1038/nature11842)

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