King Kong Théorie

King Kong Théorie est un essai de Virginie Despentes, publié en 2006 chez Grasset.

King Kong Théorie
Auteur Virginie Despentes
Pays France
Genre Essai
Éditeur Grasset
Lieu de parution Paris
Date de parution 2006
Couverture Marie Meïer
Nombre de pages 160
ISBN 978-2-246-68611-8

Présentation générale

Titre

Le titre est une référence à la créature du film King Kong de Peter Jackson[1].

« King Kong, ici, fonctionne comme la métaphore d'une sexualité d'avant la distinction des genres telle qu'imposée politiquement autour de la fin du XIXe siècle. King Kong est au-delà de la femelle et au-delà du mâle. Il est à la charnière, entre l'homme et l'animal, l'adulte et l'enfant, le bon et le méchant, le primitif et le civilisé, le blanc et le noir. Hybride, avant l'obligation du binaire [...] »

 Page 120, édition Grasset, 2006.

Contenu

King Kong Théorie est à la fois un essai autobiographique et une réflexion. Virginie Despentes revient sur les questions inhérentes à ses œuvres et à son parcours littéraire. Elle relate son expérience de la prostitution, ainsi que le trauma lié au viol et l'exploration des milieux et pratiques pornographiques. Son texte cherche à interroger la sexualité féminine et la définition originelle du féminin.

Présenté par son éditeur comme « un manifeste pour un nouveau féminisme », King Kong Théorie esquisse à la fois un constat du féminin au présent et tente d'ouvrir le champ des possibles futurs.

L'illustration de couverture est signée Marie Meïer.

Résumé par chapitre

Bad Lieutenantes (prologue)

Virginie Despentes se présente comme faisant partie des femmes « exclues du grand marché à la bonne meuf »[2], inaptes à attirer l'attention masculine et trop souvent occultées au sein de la tradition littéraire. L'idéal de la femme blanche, quant à lui omniprésent dans les œuvres littéraires, se compose d'injonctions contradictoires et représente par conséquent un idéal impossible à atteindre.

Je t'encule ou tu m'encules ?

L'autrice, née en 1969, a grandi pendant la révolution sexuelle des années 1970. Si cette révolution a joué un rôle important dans le processus d'émancipation des femmes, elle n'a engendré aucune réorganisation en ce qui concerne la garde des enfants et les travaux domestiques. Despentes soutient ainsi que la révolution des genres doit être poursuivie, afin que les femmes puissent accéder au pouvoir politique et que les hommes puissent accéder à une paternité active, et s'émanciper de la virilité traditionnelle qui leur impose de museler leurs vulnérabilités et leur sensibilité.

Impossible de violer cette femme pleine de vices

Virginie Despentes raconte le viol qu'elle a subi à l'âge de 17 ans, alors qu'elle faisait de l'auto-stop avec une amie. Elle dénonce le silence qui enveloppe l'événement du viol : du côté de l'agresseur comme de l'agressé, le mot « viol » est évité, contourné. Despentes démontre que le sentiment de culpabilité des victimes de viol et l'idée que les femmes n'ont pas le droit d'utiliser la violence pour se défendre génèrent un paradoxe qui consacre le viol comme un évènement dont les femmes ne peuvent ni se défendre, ni se remettre. Concernant son expérience personnelle, l'autrice définit le viol comme un évènement « fondateur » en ce qu'il la « défigure » et la « constitue » à la fois[3].

Coucher avec l'ennemi

Virginie Despentes aborde une position pro-prostitution. Retraçant les deux années où elle se prostitua de façon occasionnelle, l'autrice qualifie cette expérience d'étape essentielle dans son processus de reconstruction après le viol. Elle dénonce la stigmatisation de la figure de la prostituée comme celle d'une femme victime et soutient que la prostitution reflète plusieurs réalités et se compose de profils hétérogènes. Despentes se positionne en faveur d'un cadre légal adéquat pour l'exercice de la prostitution, laquelle permet aux femmes, selon elle, de retirer un bénéfice pécuniaire de leur position.

Porno sorcières

Despentes observe que si la pornographie se construit autour du sexe masculin, c'est le corps féminin qui est systématiquement représenté et valorisé. Puisque les hommes imaginent, produisent et visionnent les images de l'industrie pornographique, le désir féminin est représenté au travers du prisme du regard masculin.

King Kong Girl

Despentes interprète le film King Kong de Peter Jackson[1] comme une métaphore du monde moderne au sein duquel la femme « est coupée de sa puissance fondamentale »[4]. L'autrice définit la féminité comme « l'art de la servilité » : si les pratiques relevant de la puissance sont associées à la virilité, les comportements féminins sont exclus de ce qui relève du pouvoir et du prestige. Ainsi, Despentes soutient que les qualités féminines sont perçues comme contraires à l'agressivité, l'humour ou le fait de s'exprimer sur un ton catégorique par exemple.

Salut les filles (épilogue)

Virginie Despentes démontre que les hommes sont, comme les femmes, victimes de ces stéréotypes de genre et qu'ils ont tout intérêt à s'en émanciper. Elle soutient que le féminisme n'a pas pour objectif d'établir une opposition entre les femmes et les hommes, mais de susciter une révolution afin de réinventer quelque chose de neuf, de meilleur. L'autrice conclut son ouvrage en écrivant que « le féminisme est une aventure collective, pour les femmes, pour les hommes, et pour les autres »[5].

Réception et critiques

La publication de l'œuvre a très vite fait de Virginie Despentes la « papesse » du néo-féminisme français[6] — et telle était sans doute l'ambition du texte puisque présenté comme un manifeste féministe par son éditeur[7]. Pourtant, Virginie Despentes se détachera, dans une certaine mesure, de cette image en déclarant ne pas avoir mené de combat féministe et ne pas être, à proprement parler, militante. Elle se considère, en quelque sorte, du côté d'un « combat écrit », littéraire[8].

Le livre reçoit des critiques hétérogènes. Le Figaro littéraire en donne une critique négative, en écrivant : « On aura saisi qu'il est inutile de chercher une cohérence intellectuelle à cet essai plein de gros mots. »[9]. Au contraire, Libération écrit : « Despentes s'est mise en situation de se faire haïr par les philosophes autant que par les psys, et par les dames patronnesses autant que par les chiennes de garde. Le bonheur, quoi... ».

Josyane Savigneau, dans Le Monde des livres, appelle à lire le livre : « On pourrait offrir aux lecteurs, aux lectrices, tout un florilège de phrases à méditer. Mais il vaut mieux lire tout le livre. ».

Alternative libertaire, enfin, écrit : « Il aurait été étonnant qu’un livre aussi iconoclaste, aussi violemment dérangeant, ne suscite pas des réticences sur certains de ses aspects. Cela ne diminue pas la jubilation qu’on a à lire les pages féroces de ce livre qui réveille, enrage, dévaste, heurte, fait rire, rassure, effraie, désacralise, déconstruit et ouvre les yeux. Parce que le féminisme n’est pas une cause secondaire, "de luxe"... »

Éditions

Adaptations théâtrales

L'ouvrage de Virginie Despentes a été adapté plusieurs fois au théâtre, notamment :

Notes et références

  1. Virginie Despentes, King Kong Théorie, Grasset, , p. 119 « La version de King Kong réalisée par Peter Jackson en 2005 commence au début du siècle dernier. En même temps qu'on construit l'Amérique industrielle, moderne, on dit adieu aux vieilles formes de divertissement, le théâtre burlesque, la troupe solidaire, on se prépare aux formes d'entertainment et de contrôle moderne : le cinéma et le porno. »
  2. Virginie Despentes, King Kong Théorie, Grasset, , p.7
  3. Virginie Despentes, King Kong Théorie, Grasset, , p. 51
  4. Virginie Despentes, King Kong Théorie, Grasset, , p. 113
  5. Virginie Despentes, King Kong Théorie, Grasset, , p. 144
  6. « La Pépinière Théâtre »
  7. Virginie Despentes, King Kong Théorie, Paris, Grasset, 2006, quatrième de couverture.
  8. « Je n’ai pas vraiment mené un combat féministe, je ne suis pas très militante. Parce qu’écrire est trop prenant, et parce que j’ai encore beaucoup de mal avec les groupes. Moins je vois de gens et mieux je me porte. Donc ça ne va pas trop bien avec une activité politique. » Interview dans Le Matin
  9. King Kong Théorie, Le Matricule des anges, no 79, janvier 2007.
  10. « Arsenic. »
  11. https://www.timeoutmexico.mx/ciudad-de-mexico/teatro/una-investigacion-pornografica
  12. https://teatroalfil.es/teatro-porno-una-investigacion-pornografica/
  13. « King Kong Théorie – Archive | lesrichesclaires » (consulté le )
  14. https://www.eluniversal.com.mx/tag/imposible-violar-una-mujer-tan-viciosa
  15. https://teatroalfil.es/obras-de-teatro-en-madrid-imposible-violar/
  • Portail de la littérature française
  • Portail des femmes et du féminisme
  • Portail de la sexualité et de la sexologie
  • Portail de la pornographie
  • Portail du punk
  • Portail des années 2000
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.