Les Dales Hawerchuk (album)
Les Dales Hawerchuk est le premier album du groupe rock québécois Les Dales Hawerchuk. Il est paru le .
Sortie | 22 août 2005 |
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Durée | 32:00 |
Genre | Garage rock, rockabilly |
Format | CD, téléchargement |
Réalisateur | Olivier Langevin |
Label | C4 |
Albums de Les Dales Hawerchuk
Bien accueilli par la critique, il propulse le groupe au premier plan de la scène rock québécoise. L'extrait Dale Hawerchuk, prisé par les stations de radio et de télévision pour son caractère rassembleur et sa mélodie accrocheuse, est élevé au rang d'hymne sportif et festif.
Le groupe écoule 10 000 exemplaires de son premier opus, qui récolte une nomination au gala de l'ADISQ et au Gala alternatif de la musique indépendante du Québec.
Historique
Contexte
Les quatre membres originaux du groupe sont des amis d'enfance partageant une passion pour le hockey. S'étant perdus de vue au début de l'âge adulte, les frères Séguin, Martin Bergeron et Pierre Fortin se retrouvent par hasard à Montréal durant une prestation de Galaxie, où ils se convainquent de former un groupe[1]. C'est en jouant une partie de hockey avec Fred Fortin et Olivier Langevin que vient à Sylvain Séguin l'idée du nom et du concept de l'album. Le fils de Fortin, distribuant des cartes à collectionner aux joueurs de l'équipe, en donne une de Dale Hawerchuk à Séguin ― geste apparemment anodin, mais lourd de conséquences : « Mes chums se sont mis à m’appeler Dale… On est tous des malades de hockey, surtout moi; j’ai joué toute ma vie, sans jamais arrêter. C’est nos deux passions, le rock puis le hockey, qu’on a foutus dans le même panier; c’est un peu ça, tout le concept »[2]. Ainsi, le nom du groupe et le titre de l'album sont des hommages à la détermination et au dévouement du joueur étoile lors des matches[3].
Peu de temps après, les Dales Hawerchuk interprètent en première partie d'un spectacle de Grimskunk les quelques pièces de leur répertoire. Galvanisés par le succès qu'ils connaissent à la suite de cette prestation, ils écrivent une panoplie de chansons dans le but d'en faire un disque. Ils enregistrent eux-mêmes une maquette qui connait un succès sur les radios communautaires et universitaires, mais demeurent insatisfaits du résultat. Mal équipé et devant enregistrer dans son local de pratique, le groupe est incapable d'obtenir la sonorité qu'il désire[1].
La maquette permet à la formation d'être remarquée par l'étiquette C4, qui assure notamment la production de leurs homologues et amis jeannois Fred Fortin et Galaxie[1], mais aussi de groupes au rock plus soigné comme Karkwa[4].
Enregistrement et production
Faute de moyens[5], l'album est enregistré en direct[2] en quatre jours au printemps par Pierre Girard et Olivier Langevin, tous deux du groupe Galaxie[1], au studio Chez Pierre Bazinet et Frank Lalonde[6]. Langevin revoit les arrangements des pièces au fur et à mesure de leur enregistrement. Les Dales se surprennent eux-mêmes du professionnalisme de leur performance malgré leur talent limité[4],[1].
Le mixage et la masterisation ont été effectués au studio Chez Victor en [6].
Parution et accueil
Accueil critique
Périodique | Note |
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Le Devoir | Positif[4] |
La Presse | [7] |
Voir | [8] |
L'album est lancé le [6], à la veille de la rentrée culturelle. Il est généralement bien reçu. On associe les sonorités à d'autres rockeurs québécois (Groovy Aardvark, Grimskunk, Galaxie)[1] et américains (Jon Spencer, Beck)[2]. On remarque les « multiples références [au] sport national [du Canada] »[7]. La critique dresse des parallèles entre le rock garage du quatuor et le hockey pratiqué dans les ligues d'amateurs : une « équipe étoile »[5] qui prodigue des « mises en échec soniques »[8] avec son « rock de puck »[7] « qui travaille fort dans les coins [de la patinoire], à saveur ligue de garage, mais avec un son de pro »[4] et des morceaux qui pourraient « amener le groupe sur de plus grosses patinoires »[8].
Les critiques s'entendent sur la facture soignée de la réalisation et sur le potentiel commercial de morceaux comme Dale Hawerchuk[4],[7],[8], qui « reste collée dans le cerveau dès la première écoute »[1].
Philippe Papineau du Devoir applaudit le choix du nom, le design de la pochette et la critique que formule le quatuor envers le vedettariat et la télé-crochet à la Star Académie. Il relève le côté énergique de la réalisation[4]. Richard Labbé de La Presse abonde dans le même sens : il apprécie les textes humoristiques et incisifs, et l'énergie des membres qui « donnent toujours leur 110 % »[7].
Si Marie-Hélène Poitras du Voir célèbre l'utilisation par Séguin de vocabulaire et de sonorités langagières régionales propres au Lac-Saint-Jean[1], son collègue Olivier Robillard-Laveaux est moins élogieux. Il reproche au groupe la brutalité de son style, ainsi que des « textes sarcastiques et grivois »[8]. Labbé relève aussi une vulgarité qui peut déranger[7].
En somme, Graeme Hamilton du National Post rapporte que l'album s'attire des « rave reviews » (« critiques élogieuses »)[3].
Succès et classements
Le groupe écoule 10 000 exemplaires de son album[9],[10]. Le vidéoclip de la piste Dale Hawerchuk tourne régulièrement à Musique Plus[9]. Grâce à la popularité de ce morceau, le groupe émerge rapidement de l'anonymat[11] ; pour preuve, il est invité à se produire à l'émission La Fureur à Radio-Canada aux heures de grande écoute[12]. L'existence du groupe est notifiée par Graeme Hamilton à Dale Hawerchuk[1], qui ne s'objecte pas à l'hommage que lui rendent les rockeurs, se disant même flatté[3].
Deux extraits de l'album tournent sur les ondes des stations de radio commerciales. La chanson-titre Dale Hawerchuk figure dans le palmarès BDS ADISQ[note 1] pendant 25 semaines consécutives, atteignant la 4e position. La pièce J'monte au lac figure quant à elle au palmarès des correspondants ADISQ, avec une diffusion limitée à certaines stations[13].
L'album est nominé en pour un prix Félix dans la catégorie « Album alternatif de l'année », en compétition en outre contre Les tremblements s'immobilisent de Karkwa, futur récipiendaire du prix Polaris, et Trompe-l'œil de Malajube, qui remporte finalement le prix[14]. Il est aussi nominé dans la catégorie « Meilleur album alternatif » au Gala alternatif de la musique indépendante du Québec de la même année, en compétition notamment avec Galaxie, le groupe de son producteur[15].
Dans le Voir, malgré sa critique mitigée, Olivier Robillard-Laveaux place le disque au deuxième rang de son palmarès des albums de rock francophone[12], et la chanson Dale Hawerchuk au troisième rang des morceaux rock et pop les plus marquants de l'année pour ses qualités festives et viriles, ainsi que son refrain « béton »[16]. En , 33Mag et CISM-FM classent le morceau Dale Hawerchuk au 104e rang des chansons de groupes québécois ayant marqué les années 2000[17].
Caractéristiques artistiques
Thèmes et composition
Selon Philippe Papineau du Devoir, les textes de l'album abordent principalement trois sujets — la bière, les femmes et l'amitié — et évitent les sujets politiques, à l'exception d'une critique de Star Académie et du succès fabriqué de ses participants[5]. Du côté du National Post, Graeme Hamilton souligne justement le caractère apolitique des textes, alors que le groupe est originaire d'une région reconnue pour son adhésion au mouvement souverainiste du Québec[3]. Amy Ransom, en revanche, affirme que le succès de l'album est intrinsèquement lié aux codes véhiculés : l'identité du groupe est forgée par le hockey, un sport rassembleur qui constitue l'un des fondements de l'identité québécoise ― tant dans son passé idéalisé que dans son présent vécu[20].
Sur le plan musical, l'album contribue à définir « le son du Lac »[21],[8],[11], un rock puissant et rapide associé aux productions d'Olivier Langevin et aux groupes originaires de la région du Lac-Saint-Jean[21]. L'historienne Amy Ransom décrit le style musical comme du « rockabilly agressif, rapide et rythmé par de la guitare et de la batterie, mêlé à du punk », notant que cela rappelle l'« énergie et la vélocité » de Dale Hawerchuk[20].
Sébastien Séguin affirme s'inspirer d'Elvis Presley dans son approche d'interprétation. Martin Bergeron avoue avoir forgé son style de guitare basse sur celui de Les Claypool, à force d'écouter Primus. L'influence se traduit notamment dans les arrangements de Me casa es su casa. Quant à Pierre Fortin, il associe ses percussions au style grunge[1].
Dale Hawerchuk : hymne à la camaraderie et au hockey
La pièce maîtresse et premier extrait radiophonique de l'album, Dale Hawerchuk, raconte l'histoire d'un fan de hockey qui, prenant conscience de ses défauts en les énumérant, rêve d'être le joueur-étoile qu'il idolâtre. Lors du refrain, le narrateur répète ce souhait tel un mantra, au point où un transfert d'identité semble se produire[20] :
« Car je ne suis plus Sylvain Séguin
Moi je suis Dale Hawerchuk
Non je ne suis plus Sylvain Séguin
Moi je suis Dale Hawerchuk »
Ce transfert d'identité est partagé par l'ensemble des membres du groupe, qui, même s'ils ne sont pas tous de la même famille, sont réunis en fratrie par une passion commune pour le rock et le hockey. Les paroles du refrain final viennent affirmer cette identité commune et duelle, incarnée dans le groupe de musique qui porte le nom de leur idole : « Vu qu'on n'est pas tous des Séguin, on est les Dales Hawerchuk »[20].
Le vidéoclip produit par C4 productions, qualifié de « jouissif » dans le Voir[1], illustre graphiquement les thèmes de camaraderie, ainsi que de la « synergie bière-hockey ». Les membres du groupe se rassemblent pour boire de la bière, manger de la pizza et regarder un match de hockey enregistré sur une vidéocassette. L'action se déroule dans un salon à la décoration typique années 1980 (l'apogée de la carrière de Dale Hawerchuk) avec quantité de bouteilles de bière vides qui jonchent la pièce. Les protagonistes évoluent dans une atmosphère de vestiaire sportif, vêtus de pièces d'équipement de hockey, buvant des bières et se chamaillant, imitant l'action qui se déroule sur la vidéocassette et reprenant les codes homosociaux véhiculés par la pratique du hockey et ses représentations[20].
Pochette et illustrations
La pochette montre l'image de Dale Hawerchuk tirée d'une carte à collectionner le représentant[3]. Stéphane Demers en assure la conception[6].
Fiche technique
Liste des chansons
L'album, d'une durée de 32 minutes, compte 13 pièces[4]. Toutes les paroles sont écrites par Sébastien Séguin, Sylvain Séguin et Pierre Fortin, toute la musique est composée par Sébastien Séguin, Sylvain Séguin, Pierre Fortin et Martin Bergeron[6].
Interprètes
- Sylvain Séguin : voix et guitare
- Sébastien Séguin : voix et guitare
- Martin Bergeron : guitare basse
- Pierre Fortin : batterie, tambourine
- Olivier Langevin : guitares additionnelles sur Crocodile, J'monte au lac!, Le king du triple swing[4], claviers sur En déshabillé et Ya![6]
- Charles Perron : guitare additionnelles sur Crocodile[6]
Notes et références
Notes
- Mesuré par Nielsen.
Références
- Poitras 2005.
- Ouellet 2005.
- Hamilton 2005.
- Papineau, 2005a.
- Papineau, 2005b.
- « Les Dales Hawerchuk, by Les Dales Hawerchuk », sur bandcamp.com, Les Dales Hawerchuk (consulté le )
- Labbé 2005.
- Robillard-Laveaux, 2005a.
- Philippe Renaud, « Rock sale, deuxième service », La Presse, , p. C8 (lire en ligne).
- Isabelle Labrie, « Droit au but! », Le Soleil, , p. A14 (lire en ligne).
- Amengual Garí 2017.
- Robillard-Laveaux, 2005b.
- Michel Gignac, « Les succès de la chanson populaire du Québec,selon des palmarès reconstitués », sur banq.qc.ca, Bibliothèque et Archives nationales du Québec, (consulté le )
- « Archives 2006 – », sur adisq.com, ADISQ (consulté le )
- Frédérique Doyon, « Première cuvée de nominations du GAMIQ », Le Devoir, , p. B7 (lire en ligne).
- Francis Hébert, Lelièvre Denys, Marie Hélène Poitras, Olivier Robillard Laveaux, Ralph Boncy, Richard Lafrance, Stéphane Martel, « Les chansons de l’année », sur voir.ca, Voir, (consulté le )
- « Top 200 des chansons québécoises qui ont marqué les années 2000 » [archive], sur 33Mag.com, (consulté le ).
- Philippe Beauchemin, « Montréal plaque musicale incontournable », L'Artisan, , p. 2 (lire en ligne).
- Valérie Lesage, « Le cœur tempête », Le Soleil, , p. A4 (lire en ligne).
- Ransom 2014.
- Émilie Côté, « Le son du Lac », La Presse, , p. C2 (lire en ligne).
Annexes
Bibliographie
- Margalida Amengual Garí, Arcade Fire et le paradoxe de l’indie : de la scène montréalaise à la reconnaissance internationale (mémoire de maîtrise en Musique, option Musicologie), Montréal, Université de Montréal, , 199 p. (lire en ligne), p. 62.
- (en-CA) Graeme Hamilton, « Quebec Rock Band in Hall of Fame », National Post, , p. 3 (lire en ligne).
- Richard Labbé, « Du rock de puck... », La Presse, , p. C10 (lire en ligne).
- Patrick Ouellet, « Les Dales Hawerchuk : Tour du chapeau », sur voir.ca, Voir, (consulté le ).
- Philippe Papineau, « Rock : Les Dales Hawerchuk », Le Devoir, , p. F6 (lire en ligne).
- Philippe Papineau, « Coup de coeur francophone - Les Dales Hawerchuk : l'équipe étoile de Roberval » , sur ledevoir.com, Le Devoir, (consulté le ).
- Marie Hélène Poitras, « Les Dales Hawerchuk : Being Dale Hawerchuk », sur voir.ca, Voir, (consulté le ).
- (en-CA) Amy J. Ransom, Hockey, PQ: Canada's Game in Quebec's Popular Culture, Toronto, University of Toronto Press, , 280 p. (ISBN 9781442670020, lire en ligne ), « Hockey Music as an Expression of National Identity in Quebec : Les Dales Hawerchuk », p. 176-178.
- Olivier Robillard Laveaux, « Les Dales Hawerchuk: Les Dales Hawerchuk », sur voir.ca, Voir, (consulté le ).
- Olivier Robillard Laveaux, « Rétrospective 2005, Les Dales Hawerchuk, Afrodizz, Marquis, Polémil Bazar », sur voir.ca, Voir, (consulté le ).
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
Liens externes
- Ressource relative à la musique :
Vidéographie
- Dale Hawerchuk, de C4 Productions, 2005, 2 min 12 s
- Mais où est donc Carnior ?, de C4 Productions (prod.) et de Nú Films (réal.), 2006, 1 min 39 s [voir en ligne]
- J'monte au lac, de C4 Productions (prod.) et de Gabriel Allard-Gagnon, Martin Fournier (Nú Films) (réal.), 2006, 2 min 42 s
- Face au mur : une brève histoire du son du Lac-Saint-Jean, de Bande à part (Radio-Canada) (prod.) et de Yuani Fragata (réal.), 2010, 41 min [présentation en ligne]
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