Grand Liban
Le Grand Liban (en arabe : دولة لبنان الكبير / dawlat lubnān al-kabīr), en forme longue l'État du Grand Liban, était un État autonome qui faisait partie de la Syrie mandataire (alors administrée par la France sous un régime de mandat de la Société des Nations) entre 1920 et 1926 et qui prit le nom de République libanaise (en arabe : الجمهورية اللبنانية / al-jumhūriyya al-lubnāniyya) en 1926.
République libanaise (–)
Drapeau |
Statut | République, mandat de la Société des Nations exercé par la France |
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Texte fondamental | Constitution de 1926 |
Capitale | Beyrouth |
Langue(s) | Français, arabe, arménien[réf. nécessaire] |
Religion | Islam, christianisme |
Monnaie | Livre libano-syrienne |
Conférence de San Remo | |
Entrée en vigueur de l'arrêté no 318 et proclamation du général Gouraud depuis la résidence des Pins | |
Charles Debbas est élu président | |
La France accepte l'indépendance du Liban | |
Entrée en vigueur de l'indépendance |
Entités précédentes :
Entités suivantes :
Les frontières géographiques du « Grand Liban » correspondent à celles du Liban actuel.
Historique
1920 : création
L'autonomie du Grand Liban réclamée par le gouverneur du mont-Liban Habib Pacha es-Saad (décret du ) via la délégation du mont Liban, est signée avec la protection de la France, le dans le but de protéger la communauté chrétienne maronite, dominante sur le territoire libanais à cette époque grâce notamment à la protection française[1].
Le , le Congrès national syrien (en) vote l’indépendance de la Syrie et son unité intégrale avec la Palestine et la Transjordanie, et proclame l'émir Fayçal ben Hussein « roi constitutionnel » du Royaume arabe de Syrie sous le nom de Fayçal Ier.
Le , la Syrie est placée sous mandat français par la conférence de San Remo. Refusant de céder à l'ultimatum du haut-commissaire, le général Gouraud, les nationalistes dirigés par Youssef al-Azmeh sont finalement écrasés le par les troupes françaises dirigées par le général Mariano Goybet à la bataille de Khan Mayssaloun. Le roi Fayçal est contraint à l'exil.
L'État du Grand Liban est créé par l'arrêté no 318 du 31 août 1920 du général Henri Gouraud, représentant l'autorité française mandataire sur la Syrie, le même jour que le territoire des Alaouites (arrêté no 319), avec une entrée en vigueur le lendemain (article 3). Le général proclame l'État du Grand Liban le du haut des marches de la résidence des Pins à Beyrouth, le même jour que sont créés les États d'Alep et de Damas (arrêté no 330).
La formation du Grand Liban consiste à tracer, dans le territoire de l'Empire ottoman déchu, une frontière séparant un État syrien d'un autre libanais annexant à l'ancienne moutassarifat du Mont-Liban (circonscription autonome de l'Empire ottoman) Beyrouth, les régions de Tripoli, du Akkar, du Hermel et de la Bekaa, ainsi que de Rachaya, Hasbaya, et le Sud-Liban. Ce tracé avait été souhaité par le patriarcat maronite soucieux de la « viabilité » du futur État libanais, qui ne pouvait être assurée sans les ressources agricoles des territoires ainsi rattachés.
L'État baassiste syrien a souvent considéré ces annexions comme des amputations de la Syrie historique.
La création de l'Etat du Grand Liban coïncide avec celle de la nationalité libanaise, légalement reconnue le par l’arrêté no 2825 du Haut-Commissaire Maxime Weygand, pris en application du Traité de Lausanne de 1923[3], qui déclare que « toute personne qui était un sujet turc [c'est-à-dire ottoman] et qui résidait dans les territoires du Liban le est confirmée comme sujet libanais et est désormais considérée comme ayant perdu la citoyenneté turque [c'est-à-dire ottomane]»[4].
Cette période voit la première vague d'apatrides libanais, certains groupes sont exclus de la nationalité libanaise, afin notamment de maintenir l'équilibre démographique et confessionnel du pays.
Dans les années 1920, le Liban n'accède cependant pas encore à l'indépendance, le mandat français étant confirmé par la Société des Nations le [5].
1926 : première constitution
La première constitution du Liban est proclamée le , créant un système parlementaire (initialement bicaméral, mais devenu monocaméral après la suppression du Sénat en 1927) ainsi que des postes de Président de la République et de chef du gouvernement. Le pays prend alors le nom de République libanaise. De 1934 à 1936, Habib Pacha es-Saad en devient le président. Lui succédera Émile Eddé.
1941 : accord de principe pour l'indépendance
En 1941, l'invasion de la Syrie et du Liban par les Alliés entraîne l'élimination des autorités françaises vichystes. Sous la pression des Britanniques, les représentants de la France libre donnent leur accord de principe pour l'indépendance de la Syrie et du Liban, mais tentent de maintenir le contrôle français.
En , le chrétien maronite Béchara el-Khoury s'entend avec d'autres notables comme le musulman sunnite Riyad es-Solh pour partager le pouvoir entre les communautés, la présidence de la République étant réservée aux maronites, la présidence du Conseil aux sunnites, et la présidence de la Chambre aux chiites. Béchara el-Khoury, élu président de la République le , s'affirme aussitôt comme un adversaire résolu du mandat français.
1943 : indépendance
Jean Helleu, nommé par la France libre représentant au Levant, s'oppose à la modification de la constitution : la Chambre de Beyrouth passe outre et abolit le mandat français en novembre. Le , Helleu fait arrêter Béchara el-Khoury et le chef du gouvernement Riyad es-Solh, Émile Eddé redevenant chef de l'État. Un gouvernement « national » libanais se constitue aussitôt dans la montagne, soutenu par le président syrien Choukri al-Kouatli et par les Britanniques. Des manifestations violentes éclatent dans tout le pays. Georges Catroux est envoyé d’urgence à Beyrouth pour rétablir le statu quo. Le , les Français libèrent les dirigeants politiques prisonniers et acceptent le principe de l'indépendance. C'est la date anniversaire que les Libanais ont retenue pour fêter l'indépendance du pays (en).
Dans les mois suivants, la France transfère toutes les compétences étatiques aux gouvernements syriens et libanais. L’indépendance politique du Liban est officielle le . La France conserve cependant jusqu’à la fin de la guerre le contrôle des troupes spéciales du Levant, et conditionne toujours l’indépendance à la conclusion d’un traité. Les dernières troupes françaises quittent le Liban en 1946.
Économie
Les autorités françaises choisissent d'axer l’économie libanaise sur le négoce, le secteur des services et les importations, jugés plus rentables à court terme. Ce système favorisa l’émergence d’une bourgeoisie compradore liée aux grands clans confessionnels. À l’indépendance, quelques milliers de ces familles constituent l'essentiel de la nouvelle élite libanaise[6].
Notes et références
- Le grand Liban et la prise de pouvoir des maronites en 1920.
- Jean-Pierre Filiu, « Le défi pour Macron du centenaire du Liban », Le Monde, (lire en ligne).
- Thibault Jaulin, « Démographie et politique au Liban sous le Mandat. Les émigrés, les ratios confessionnels et la fabrique du Pacte national », Histoire & Mesure, XXIV – 1 (2009), p. 198.
- MARCH Lebanon, The Plight of the Rightless. Mapping and Understanding statelessness in Tripoli (mars 2019), p. 21, URL : https://www.marchlebanon.org/report/plight-of-the-rightless.
- « Mandat de la SDN, Syrie, Liban, 1922, Digithèque MJP », sur mjp.univ-perp.fr (consulté le ).
- Akram Belkaïd et Olivier Pironet, « L’urgence d’un État social et souverain au Liban », sur Le Monde diplomatique, .
Annexes
Articles connexes
Bibliographie
- Gérard D. Khoury, La France et l'Orient arabe : Naissance du Liban moderne 1914-1920, Armand Colin, 1993.
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