Liberté académique
La liberté académique[note 1] ou liberté universitaire[3] est la liberté que le personnel universitaire doit avoir en matière de recherche scientifique, d'enseignement et d'expression dans le cadre de leur fonction, sans subir de pressions économiques, politiques ou autres.
Droit international
Plusieurs organisations internationales ont adopté des textes, à la contrainte variable, pour tenter de définir et faire respecter la liberté académique. La plupart relient la liberté académique à l'autonomie institutionnelle des établissements d'enseignement.
En 1966 et 1997, l'UNESCO avec l'OIT adopte des recommandations concernant la condition du personnel enseignant qui consacrent notamment la liberté académique. La déclaration de Lima de 1988 pour la World University Service (en) fait référence. En 1988, la Magna Charta Universitatum (en) de l'Université de Bologne est créée et adoptée par plusieurs universités. En 2020, pour l'ONU, le rapporteur David Kaye (en) définit la liberté académique dans un rapport ; il est aussi inidiqué que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels englobent la liberté académique. En Afrique, avec l'UNESCO, la Déclaration de Kampala sur la liberté intellectuelle et la responsabilité sociale, la Déclaration de Juba sur la liberté académique et les franchises universitaires et la Déclaration de Dar Es Salaam sur la liberté académique et la responsabilité sociale des universitaires abordent ce thème[4],[5].
Au Canada
La liberté académique n'est pas prévue dans la Charte canadienne des droits et libertés[6]. Les provinces peuvent toutefois adopter des lois qui la reconnaissent. Certains arrêts des tribunaux tels que Mckinney c. Université de Guelph[7] ou Barreau du Québec c. Boyer considèrent comme un principe de droit administratif que l'État doit s'abstenir de trop intervenir dans les affaires internes d'une université.
Québec
La liberté académique est définie et encadrée par la Loi sur la liberté académique dans le milieu universitaire[8]. Cette loi a été adoptée à la suite des travaux de la Commission Cloutier, laquelle fut créée afin de se pencher sur les questions liées à la liberté académique en réaction, entre autres, à la polémique sur la liberté académique à l'Université d'Ottawa. Le législateur a préféré adopter cette loi plutôt que d'inscrire la liberté académique dans la Charte des droits et libertés de la personne[9]. Les libertés académiques inhérentes à une institution universitaire sont par ailleurs reconnues à l'article 3 de la Loi sur l'Université du Québec[10].
Au sein même d'une université, les professeurs sont des employés de l'université et sont liés par un contrat de travail avec lien de subordination[11]. Les chargés de cours sont aussi des employés de l'université. Les professeurs qui obtiennent la titularisation ont en principe davantage de sécurité d'emploi, conformément aux règles contenues dans les conventions collectives[12]. Les Chartes des universités reconnaissent généralement la liberté d'enseignement et la liberté de recherche[13].
En France
La loi Savary sur l'enseignement supérieur de 1984, incluse en 2000 dans le Code de l'éducation, consacre le principe de la liberté académique et donc de l'indépendance des chercheurs et de la liberté d'expression. Le conseil constitutionnel la définit comme un principe fondamental reconnu par les lois de la République[14] et réaffirma ce statut à plusieurs reprises[15].
« À l'égard des enseignants-chercheurs, des enseignants et des chercheurs, les universités et les établissements d'enseignement supérieur doivent assurer les moyens d'exercer leur activité d'enseignement et de recherche dans les conditions d'indépendance et de sérénité indispensables à la réflexion et à la création intellectuelle. »
— Article L123-9 du Code de l'éducation[16]
« Le service public de l'enseignement supérieur est laïque et indépendant de toute emprise politique, économique, religieuse ou idéologique ; il tend à l'objectivité du savoir ; il respecte la diversité des opinions. Il doit garantir à l'enseignement et à la recherche leurs possibilités de libre développement scientifique, créateur et critique. »
— Article L141-6 du Code de l'éducation[17]
« Les enseignants-chercheurs, les enseignants et les chercheurs jouissent d'une pleine indépendance et d'une entière liberté d'expression dans l'exercice de leurs fonctions d'enseignement et de leurs activités de recherche, sous les réserves que leur imposent, conformément aux traditions universitaires et aux dispositions du présent code, les principes de tolérance et d'objectivité. »
— Article L952-2 du Code de l'éducation[18]
Notes et références
Notes
- En français, l'adjectif « académique » renvoyait historiquement aux académies et non aux universités[1]. Cependant, cet anglicisme est maintenant entré dans l'usage, y compris à l'UNESCO[2] et dans les textes de loi français.
Références
- « Académique pour Universitaire / Académie française », sur academie-francaise.fr (consulté le ).
- UNESCO, Débat sur l’éthique, la science et la société dans la ville de Québec
- « liberté universitaire », Le Grand Dictionnaire terminologique, Office québécois de la langue française (consulté le ).
- https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/education/publications-adm/enseignement-superieur/organismes-lies/11_Echaiz_Lucia_Flores_20210710.pdf?1629733517
- https://www.senat.fr/fileadmin/Fichiers/Images/commission/affaires_europeennes/avis_politiques/Avis_politique_liberte_academique.pdf
- Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11
- [1990] 3 RCS 229
- La Presse. 3 juin 2022. « Le projet de loi 32 adopté à l'Assemblée nationale ». En ligne. Page consultée le 2022-06-06
- RLRQ c C-12
- RLRQ, U-1
- Jonathan Leblanc. Liberté d’enseignement, principales questions juridiques. En ligne Page consultée le 2021-01-02
- Convention collective intervenue entre l'Université de Montréal et le Syndicat général des professeurs et professeures de l'Université de Montréal. En ligne. Page consultée le 2021-01-02
- Charte de l'Université de Montréal, 1967, 15-16 Eliz. II chap. 129, Modifiée par la Loi modifiant la Charte de l’Université de Montréal, 2018, PL 234
- « La liberté académique des enseignants-chercheurs face à des étudiants derrière leur écran : l’université après la crise du covid-19 », sur Dalloz Actu,
- Agnès Roblot-Troizier, « Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques », Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, no 49, , p. 145-163 (lire en ligne)
- Article L123-9 du Code de l'éducation, sur Légifrance
- Article L141-6 du Code de l'éducation, sur Légifrance
- Article L952-2 du Code de l'éducation, sur Légifrance
Annexes
Bibliographie
- Enseignement universitaire - L'argent, une limite à la liberté académique. Clairandrée Cauchy, Le Devoir, .
Articles connexes
Lien externe
- UNESCO, Recommandation concernant la condition du personnel enseignant de l'enseignement supérieur -
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