Lieutenant-gouverneur du Québec
Le lieutenant-gouverneur du Québec est le représentant de la reine du Canada au Québec. En son nom, il fait partie du Parlement du Québec où il doit approuver les lois. Il est aussi officiellement à la tête du pouvoir législatif au Québec. Il assume des responsabilités équivalentes à celles qu'exerce le gouverneur général du Canada dans l'État fédéral. Malgré ses pouvoirs officiels, le lieutenant-gouverneur exerce actuellement une fonction essentiellement symbolique. La place qu'on lui donne varie au fil des époques.
Lieutenant-gouverneur du Québec | ||
Drapeau du lieutenant-gouverneur | ||
Titulaire actuel Michel Doyon depuis le | ||
Création | ||
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Mandant | Élisabeth II | |
Durée du mandat | 5 ans; irrévocable et renouvelable |
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Premier titulaire | Narcisse-Fortunat Belleau | |
Résidence officielle | Aucune (depuis 1997); Maison Dunn (1967-1997); Spencer Wood (1867-1967) | |
Rémunération | 114 000 $[1],[2] | |
Site internet | http://www.lieutenant-gouverneur.qc.ca | |
Michel Doyon exerce la fonction depuis son assermentation le .
Histoire
Origines
Le poste de lieutenant-gouverneur du Québec est créé en 1867, en même temps que la Confédération canadienne. Cependant, la fonction s'inscrit dans une longue tradition politique ayant ses racines jusqu'en Nouvelle-France. Dans tous les cas, le gouverneur a été celui qui représentait le roi dans sa colonie. Sous le régime français, de 1534 à 1763, le gouverneur de la Nouvelle-France joue ce rôle. Ensuite, sous le régime britannique, un lieutenant-gouverneur représente la Province de Québec puis plus tard la Province du Bas-Canada. Avec l'union du Bas-Canada (Québec) et du Haut-Canada (Ontario), un gouverneur général administre la Province du Canada. Avec la Confédération canadienne, la Loi constitutionnelle de 1867 prévoit qu'un gouverneur général dont la juridiction est l'ensemble du pays puisse nommer pour chacune des provinces fédérées un lieutenant-gouverneur. Même si le Canada accède à une souveraineté complète avec le Statut de Westminster de 1931, la monarchie constitutionnelle reste en vigueur et donc le poste de lieutenant-gouverneur également.
De rôle politique à rôle protocolaire
La place qu'occupe le lieutenant-gouverneur au sein du gouvernement du Québec varie selon les époques. Jusqu'à très récemment, tous les lieutenants-gouverneurs étaient d'abord des politiciens. À titre d'exemple, Joseph-Adolphe Chapleau et Lomer Gouin furent tous les deux premier ministre du Québec. Le poste leur est souvent accordé pour les récompenser de leur carrière politique. Étant nommé par le premier ministre du Canada (officiellement par le gouverneur général), il pouvait arriver qu'un lieutenant-gouverneur soit de l'allégeance du parti au pouvoir à Ottawa et ennemi politique de celui au pouvoir à Québec. C'est le cas de Luc Letellier de Saint-Just, un libéral. Ce dernier passe à l'histoire en remplaçant le gouvernement conservateur de Charles-Eugène Boucher de Boucherville par l'opposition libérale. Bien qu'il possède le pouvoir de le faire, cette décision lui vaudra une démission forcée. Jusqu'en 1967, le lieutenant-gouverneur possède Spencer Wood, un domaine d'environ 25 hectares où se trouvent une villa et des jardins. Il joue alors un rôle protocolaire actif en recevant plusieurs dignitaires. À titre d'exemple, le roi George VI visite le domaine en 1939.
Époque contemporaine
Avec l'arrivée du nationalisme québécois contemporain au milieu du XXe siècle, l'attachement à la monarchie britannique est à son plus bas. En parallèle, la fonction de lieutenant-gouverneur, en tant que symbole monarchique, est graduellement discréditée. En 1950, Spencer Wood est francisé en Bois-de-Coulonge. En 1964, une visite d'Élisabeth II suscite une émeute qui sera fortement réprimée, aujourd'hui désignée samedi de la matraque. En 1966, la villa du Bois-de-Coulonge est détruite par le feu. Elle ne sera pas reconstruite, mais on déménage le lieutenant-gouverneur dans une résidence à proximité. En 1968, le gouvernement du Québec abolit le Conseil législatif. En 1997, ce même gouvernement décide de vendre la résidence officielle du lieutenant-gouverneur.
À l'aube du XXIe siècle, de plus en plus de voix s'élèvent pour réclamer l'abolition de ce poste. Des pétitions citoyennes sont déposées en ce sens à l'Assemblée nationale. La polémique s'accentue à partir de 2007, quand la lieutenant-gouverneure sortante Lise Thibault est accusée de dépenses excessives dans ses fonctions. Elle reconnaîtra finalement sa culpabilité. En 2012, le Parti québécois dépose une motion en chambre pour abolir la fonction[3]. Il n'obtient cependant pas l'appui nécessaire du Parti libéral du Québec et de la Coalition avenir Québec.
Rôle actuel
Dans ce contexte, le rôle public du lieutenant-gouverneur est actuellement réduit aux cérémonies d'assermentations[4],[5]des députés et à l'ouverture des législatures. Il décerne aussi annuellement la Médaille du lieutenant-gouverneur en plus d'assumer différentes autres fonctions[6]. Figure méconnue de la population et attirant peu l'attention, les titulaires de ce poste jalousent traditionnellement leur anonymat, ne sont pratiquement jamais en contact avec la presse et font peu d'apparitions publiques[7].
Légalité des tentatives d'abolition
En réalité, toute modification de sa charge se fait en vertu de l’article 41 de la loi constitutionnelle de 1982. Le Sénat, la Chambre des communes et l'assemblée législative de chaque province du Canada doivent approuver ensemble d'éventuelles modifications. Il s'agit d'un processus politique très difficile à accomplir, car il y a l'exigence de l'unanimité. Ce poste ne pourrait pas être aboli par la formule de modification ordinaire de Constitution du Canada, d'après le Renvoi sur le Sénat de la Cour suprême. En outre, la clause nonobstant[8] ne peut pas être utilisée pour s'opposer à l'existence du poste de lieutenant-gouverneur car elle ne concerne que les articles 2 et 7 à 15 de la Charte canadienne, qui n'ont rien à voir avec le lieutenant-gouverneur.
Puisque le lieutenant-gouverneur est l'une des deux composantes actuelles du Parlement du Québec, avec l'Assemblée nationale, les députés ne pourraient vraisemblablement pas éliminer ce poste sans porter atteinte à la règle fondamentale de la souveraineté parlementaire. L'arrêt de principe relativement au rôle du lieutenant-gouverneur est le renvoi Referendum and Initiative Act [9]de 1919. Dans cette décision historique, la Cour suprême a jugé qu'on ne peut pas complètement supprimer le pouvoir discrétionnaire du lieutenant-gouverneur au moyen de référendums parce que cela limiterait la souveraineté du Parlement dont le lieutenant-gouverneur est un élément essentiel.
La conséquence juridique pratique d'une abolition inconstitutionnelle du poste de lieutenant-gouverneur pourrait être de créer un vice de forme inconstitutionnel dans le mode d'adoption des lois, car l'exigence de la sanction des lois par le lieutenant-gouverneur demeure une règle de forme constitutionnelle importante[10]. À titre d'exemple, dans le Renvoi sur les lois du Manitoba[11], la loi manitobaine avait comme exigence de forme que les lois soient écrites en anglais et en français, mais le législateur manitobain adoptait des lois seulement en anglais. La Cour suprême a donc prononcé une déclaration d'inconstitutionnalité sur l'ensemble des lois manitobaines en raison de cette violation d'une règle de forme importante.
Listes des lieutenants-gouverneurs
Nom | Début | Fin | Durée | |
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1er | Narcisse-Fortunat Belleau | 5 ans, 7 mois et 10 jours | ||
2e | René-Édouard Caron | 3 ans, 10 mois et 2 jours | ||
3e | Luc Letellier de Saint-Just | 2 ans, 7 mois et 11 jours | ||
4e | Théodore Robitaille | 5 ans, 2 mois et 8 jours | ||
5e | Louis François Rodrigue Masson | 3 ans | ||
6e | Auguste-Réal Angers | 5 ans, 2 mois et 1 jour | ||
7e | Joseph-Adolphe Chapleau | 5 ans, 1 mois et 15 jours | ||
8e | Louis-Amable Jetté | 10 ans, 7 mois et 26 jours | ||
9e | Charles-Alphonse-Pantaléon Pelletier | 2 ans, 7 mois et 14 jours | ||
10e | François Langelier | 3 ans, 9 mois et 3 jours | ||
11e | Pierre-Évariste Leblanc | 3 ans, 8 mois et 10 jours | ||
12e | Charles Fitzpatrick | 5 ans et 10 jours | ||
13e | Louis-Philippe Brodeur | 2 mois et 1 jour | ||
14e | Narcisse Pérodeau | 4 ans, 11 mois et 23 jours | ||
15e | Lomer Gouin | 2 mois et 25 jours | ||
16e | Henry George Carroll | 5 ans et 27 jours | ||
17e | Ésioff-Léon Patenaude | 5 ans, 8 mois et 1 jour | ||
18e | Eugène Fiset | 10 ans, 9 mois et 3 jours | ||
19e | Gaspard Fauteux | 7 ans, 4 mois et 11 jours | ||
20e | Onésime Gagnon | 3 ans, 7 mois et 28 jours | ||
21e | Paul Comtois | 4 ans, 4 mois et 10 jours | ||
22e | Hugues Lapointe | 12 ans, 2 mois et 5 jours | ||
23e | Jean-Pierre Côté | 5 ans, 11 mois et 1 jour | ||
24e | Gilles Lamontagne | 6 ans, 4 mois et 12 jours | ||
25e | Martial Asselin | 5 ans, 11 mois et 30 jours | ||
26e | Jean-Louis Roux | 2 mois et 28 jours | ||
27e | Lise Thibault | 10 ans, 4 mois et 8 jours | ||
28e | Pierre Duchesne | 8 ans, 3 mois et 17 jours | ||
29e | Michel Doyon | En cours | 6 ans, 11 mois et 11 jours |
Fonctions
Le Lieutenant-gouverneur du Québec assume 3 fonctions[6] :
- Fonctions constitutionnelles
- Fonctions protocolaires
- Fonctions communautaires
Fonctions constitutionnelles
Les principales fonctions constitutionnelles du Lieutenant-gouverneur du Québec sont[6]:
Au niveau exécutif
- Nomination du Premier ministre
- Nomination des ministres, sur recommandation du Premier ministre
- Ratification des décrets pris par le Conseil des ministres
Au niveau législatif
- Convocation de l’Assemblée nationale
- Lecture du discours d’ouverture d’une session parlementaire
- Sanction des projets de loi adoptés par l’Assemblée nationale
- Prorogation d’une session parlementaire
- Dissolution de l’Assemblée nationale
- Convocation des élections générales
Fonctions protocolaires
Le Lieutenant-gouverneur du Québec assume certaines fonctions protocolaires[6]:
- Accueille les membres de la famille royale à leur arrivée et les salue à leur départ
- Reçoit les membres du corps diplomatique lors de leur passage à Québec
- Préside des cérémonies officielles relatives à
- La remise de médailles commémoratives de la Chancellerie
- La remise de médailles pour services distingués (policiers, pompiers et urgence médicale)
- L’investiture, à titre de vice-prieur de l’Ordre de Saint-Jean
- La remise de la Médaille du Lieutenant-gouverneur
- La participation à des évènements militaires et civils
- La participation à des activités culturelles
Fonctions communautaires
Le Lieutenant-gouverneur du Québec assume aussi des fonctions communautaire en soutenant trois principales causes[6]:
- Caritatives
- Éducationnelles
- Sociales
Emblème
Les lieutenants-gouverneurs disposent chacun d'armoiries personnelles réalisées par l'Autorité héraldique du Canada après leur nomination. La fonction est également représentée par les armoiries du Québec ainsi qu'un drapeau :
Dépenses
Les dépenses du Lieutenant-gouverneur du Québec, au niveau fédéral sont, pour la période 2017-2018 [12] :
- Déplacements et hébergement : 13 066 $
- Frais d'accueil : 6 782 $
- Dépenses opérationnelles et administratives : 56 351 $
- Dépenses totales : 76 199 $
Notes et références
- Rapport au ministre du Patrimoine canadien sur l'utilisation des fonds publics par l'ancien lieutenant-gouverneur du Québec
- Plus une allocation annuelle d'environ 150 000 $ pour les dépenses liées aux activités officielles.
- « Premières salves du gouvernement Marois contre Ottawa », La Presse, 7 novembre 2012
- « Hollande à Québec: la présence du lieutenant-gouverneur jugée inopportune », Le Soleil, 4 novembre 2014
- « Le lieutenant-gouverneur boude les élus », Le Soleil, 4 février 2010
- https://www.lieutenant-gouverneur.qc.ca/roles-et-fonctions/fonctions.asp
- Le lieutenant-gouverneur a un agenda peu rempli
- Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11, art. 33
- [1919] A.C. 935 (C.P.)
- Nicole Duplé, Droit constitutionnel : principes fondamentaux, Montréal, Wilson & Lafleur, 2011, 5e éd., 772 p.
- [1985] 1 RCS 721
- https://www.canada.ca/fr/patrimoine-canadien/services/couronne-canada/lieutenants-gouverneurs/depenses.html
Bibliographie
- Henri Brun et Guy Tremblay, Droit constitutionnel, Cowansville, Québec, Éditions Y. Blais, , 1232 p. (ISBN 2-89073-736-5).
- Manon Tremblay, Réjean Pelletier et Marcel R. Pelletier (dir.), Le parlementarisme canadien, Sainte-Foy, Québec, Presses de l'Université Laval, , 461 p. (ISBN 2-7637-7695-7).
- Canada. Loi constitutionnelle de 1867.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- Site officiel du Lieutenant-gouverneur du Québec
- Famille royale britannique
- Assemblée nationale du Québec
- Assemblée nationale du Québec - Présentation Lieutenant-gouverneur du Québec
- Gouvernement du Canada - Présentation du Lieutenant-gouverneur
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