Mélias

Mélias (en grec : Μελίας) ou Mleh (en arménien : Մլեհ, ou souvent Մլեհ Մեծ, Mleh Mets, « Mleh le Grand » dans les sources arméniennes) est un prince arménien de la fin du IXe et du début du Xe siècle. Entré au service des Byzantins, il devient un général reconnu, fondant le thème du Lykandos, et participe aux campagnes de Jean Kourkouas contre les Arabes.

Ne pas confondre avec Mleh, prince arménien de 1170 à 1175.

Mélias
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Biographie

Origines

Mleh est un membre de la noblesse arménienne des nakharark appelé Mélias, peut-être issu du clan des Varažnouni (et dans ce cas petit-fils de Mliah, prince de Varažnounik, en Vaspourakan[1]), apparaît pour la première fois dans les sources historiques comme un vassal (ou serviteur[2], ou compagnon[3]) d'Achot Makrocheir, « à la longue main », un prince arménien (vraisemblablement un Bagratide du Taron)[1],[4],[5].

Émigration et exil

Achot se met au service des Byzantins vers 890. En tant que membre du contingent arménien, Mleh ou Mélias combat du côté des Byzantins lors de la désastreuse bataille de Bulgarophygon contre les Bulgares. Achot périt lors de la bataille aux côtés de la plus grande partie des forces byzantines[4],[5]. Mélias s'échappe et retourne vers la frontière orientale byzantine. Là, apparemment sous l'autorité de l'hypostratège du thème des Anatoliques, il mène une vie de brigandage et combat les Arabes[1], notamment l'émirat de Mélitène, et établit une seigneurie semi-autonome dans collines à l'ouest de la cité. Après avoir participé à la rébellion aristocratique ratée d'Andronic Doukas contre l'empereur Léon VI le Sage en 905, Mélias est contraint de fuir à Mélitène avec d'autres nobles arméniens pour échapper aux représailles[5],[6].

Retour

Toutefois, en 907[7] ou 908, l'empereur Léon accorde son pardon aux rebelles qui reviennent assurer des fonctions de commandement sur la frontière orientale. Mélias est d'abord nommé tourmarque de la région de Trypia (Euphratéia, Erèmia, Défilés, dans le thème de Sébaste[1]), avant de devoir se replier vers l'ouest en 909[1].

Il est ensuite nommé kleisourarque d'une kleisourie, un commandement régional fortifié. Cette kleisoura est un district centré autour du fort de Lykandos que Mélias reconstruit et qui est colonisé par des Arméniens. Lors des décennies suivantes, elle devient l'une des principales bases byzantines pour lancer des attaques contre les Arabes[8]. Presque immédiatement, Mélias se lance dans l'extension de sa province. Très compétent dans les guerres frontalières de petite échelle, il s'empare des régions montagneuses de Tzamandos et Symposion qu'il fortifie[9]. Ces différents travaux de fortification consolident la frontière et « prépar[e]nt une base solide pour les futures grandes offensives du Xe siècle »[7].

Les thèmes en Asie Mineure vers 950.

La menace que fait peser cette nouvelle province sur Mélitène est reconnue dans les sources arabes (qui appellent Mleh Malîh ai-Armani et Sahib al-Douroûb[10], « seigneur des Défilés »[11]). De fait, en 909 ou 912, un assaut majeur est lancé contre Mélias mais est repoussé avec succès. En 915, Mélias et ses troupes lancent un raid contre le territoire arabe qui atteint Germanicée (aujourd'hui Kahramanmaraş)[5],[6] ; il s'accompagne d'une offensive sur la Cilicie[11]. En 916, en récompense de sa valeur et de sa loyauté, la kleisoura de Lykandos est élevée au rang de thème et Mélias en devient le stratège avec le rang de patrice puis de magistros. L'année suivante, Mélias et ses hommes prennent part à la campagne contre la Bulgarie qui se termine par une nouvelle défaite désastreuse lors de la bataille d'Anchialos[12]. Dans les campagnes de Jean Kourkouas à partir de 926, Mélias joue un rôle important. En 927, Kourkouas et Mélias attaquent Mélitène et parviennent à s'emparer de la cité, sauf la citadelle qui continue à résister. Mélitène jure allégeance à l'Empire byzantin[13],[14]. Bientôt, Mélitène renie le traité et est de nouveau assiégée par les Byzantins. Selon un récit arabe, Mélias tente d'infiltrer la cité en déguisant certains de ses hommes en artisans mais la ruse est déjouée. Néanmoins, la cité accepte peu après d'accueillir une garnison byzantine[15],[16]. En 930, Mélias lance un raid contre le territoire près de Samosate mais il est vaincu par le général Nedjm et l'un de ses fils est capturé et amené à Bagdad. Rien n'est connu de ses activités ultérieures en Orient. On sait toutefois qu'il entre en 934 dans Mélitène aux côtés de Jean Kourkouas[17]. Il meurt la même année[5].

Postérité

Les descendants de Mélias continuent de jouer un rôle important dans le Lykandos et dans l'armée byzantine. Un autre Mélias est mentionné comme étant au service de Jean Tzimiskès, d'abord sous le règne de Nicéphore II Phocas puis sous le règne personnel de Jean Tzimiskès (en tant que domestique des Scholes[18]) jusqu'à sa mort en 976. Il a aussi été suggéré que la mémoire de Mélias a été préservée dans la figure du dénommé Melementzès, un personnage du Digénis Akritas[5],[19].

Notes et références

  1. Dédéyan 1993, p. 69
  2. Brousselle 1996, p. 47
  3. Dédéyan 1993, p. 68
  4. Whittow 1996, p. 315-316
  5. Kazhdan 1991, p. 1334
  6. Whittow 1996, p. 316
  7. Cheynet et Dédéyan 2007, p. 309.
  8. Kazhdan 1991, p. 1258, 1334
  9. Porphyrogénète et Bekkerus 1840, De Thematibus, p. 33 et De Administrando Imperio, p. 228
  10. Dédéyan 1993, p. 72
  11. Dédéyan 1993, p. 71
  12. Treadgold 1997, p. 474
  13. Treadgold 1997, p. 479
  14. Runciman 1988, p. 136
  15. Treadgold 1997, p. 480
  16. Runciman 1988, p. 138-139
  17. Dédéyan 1996, p. 79-80
  18. Cheynet 2006, p. 35
  19. Whittow 1996, p. 356

Bibliographie

Source primaire
  • Constantin Porphyrogénète et Immanuel Bekkerus, Constantinus Porphyrogenitus : De Thematibus et De Administrando Imperio. Accedit Hieroclis Synecdemus cum Bandurii et Wesselingii Commentariis, Bonn, Ed. Weberi,
Sources secondaires
  • Isabelle Brousselle, « L'intégration des Arméniens dans l'aristocratie byzantine au XIe siècle », dans Nina Garsoïan (dir.), L'Arménie et Byzance : histoire et culture : Actes du colloque organisé à Paris par le Centre de recherches d'histoire et de civilisation byzantines, Paris, Publications de la Sorbonne, (ISBN 978-2859443009), p. 43-54.
  • Jean-Claude Cheynet (dir.), Le monde byzantin, vol. II : L'Empire byzantin (641-1204), Paris, Presses universitaires de France, coll. « Nouvelle Clio », (ISBN 978-2-13-052007-8).
  • Jean-Claude Cheynet et Gérard Dédéyan, « Vocation impériale ou fatalité diasporique : les Arméniens à Byzance (IVe – XIe siècle) », dans Gérard Dédéyan (dir.), Histoire du peuple arménien, Toulouse, Privat, (1re éd. 1982) [détail des éditions] (ISBN 978-2-7089-6874-5), p. 297-326.
  • Gérard Dédéyan, « Mleh le Grand, stratège de Lykandos », Revue des études arméniennes, vol. XV, , p. 73-102.
  • Gérard Dédéyan, « Les Arméniens sur la frontière sud-orientale de Byzance, fin IXe - fin XIe siècles », dans Yves Roman (dir.), La Frontière : Séminaire de recherche, Lyon, Maison de l'Orient et de la Méditerranée Jean Pouilloux, (lire en ligne), p. 67-85.
  • Gérard Dédéyan, « Les princes arméniens de l'Euphratèse et l'Empire byzantin (fin XIe- milieu XIIe S.) », dans Nina Garsoïan (dir.), L'Arménie et Byzance : histoire et culture : Actes du colloque organisé à Paris par le Centre de recherches d'histoire et de civilisation byzantines, Paris, Publications de la Sorbonne, (ISBN 978-2859443009), p. 79-88.
  • Rodolphe Guilland, Recherches sur les institutions byzantines, Tome I, Berlin, Akademie-Verlag, (lire en ligne)
  • (en) Alexander Kazhdan (dir.), Oxford Dictionary of Byzantium, New York et Oxford, Oxford University Press, , 1re éd., 3 tom. (ISBN 978-0-19-504652-6 et 0-19-504652-8, LCCN 90023208)
  • (en) Steven Runciman, The Emperor Romanus Lecapenus and His Reign : A Study of Tenth-Century Byzantium, Cambridge, United Kingdom, Cambridge University Press, (1re éd. 1929), 275 p. (ISBN 0-521-35722-5, lire en ligne)
  • (en) Warren Treadgold, A History of the Byzantine State and Society, Stanford University Press, , 1019 p. (ISBN 0-8047-2630-2, lire en ligne)
  • (en) Mark Whittow, The Making of Byzantium, 600–1025, University of California Press,
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