Manuel Mathieu
Manuel Mathieu (né en octobre 1986) est un artiste visuel contemporain haïtien, surtout connu comme peintre d’œuvres abstraites qui souvent évoquent des formes figuratives dans des environnements indéfinissables. Mathieu s’inspire des cultures visuelles haïtiennes, ainsi que des mouvements artistiques occidentaux tels que l’expressionnisme[1] et l’existentialisme. Sa pratique conjugue des techniques formelles et des mouvements de l'art contemporain haïtien pour explorer les phénoménologies des relations humaines relatives à la dynamique du pouvoir, la loyauté, l'amour, la nature, l'expérience subjective et l'écriture de l'histoire[2].
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Jeunesse et formation
Manuel Mathieu est né le 9 octobre 1986, à Port-au-Prince (Haïti). Ses parents sont haïtiens et ont élevé leurs enfants avec de grandes attentes en matière de réussite scolaire. Son père, Philippe Mathieu, est agronome[3] et sa mère a un doctorat en psychologie. Il a deux sœurs plus jeunes qui toutes deux résident au Canada. Lorsqu’il avait 15 ans il s’est rapproché de son cousin, l’artiste avant-gardiste haïtien Mario Benjamin. Il allait souvent chez lui, un endroit rempli de magazines, de catalogues d’art et de sculptures. Chez Benjamin il a fait la connaissance d’artistes qui ont influencé son propre travail, des pionniers tels que Mona Hatoum[4] et Glenn Ligon[5]. Benjamin a partagé avec ce dernier son approche de la pratique artistique, très liée à son environnement tout en étant critique envers le panorama socio-politique d’Haïti.
À l'âge de 19 ans, Mathieu s'installe au Québec chez sa grand-mère, qui avait émigré au Canada avec ses enfants et sans son mari, un colonel du régime dictatorial de Jean-Claude Duvalier. Lorsqu'il a déménagé à Blainville, au Québec, il a commencé à peindre, ainsi qu'à faire de la photographie et de l'art vidéo plus intensément avec le soutien de sa grand-mère.
En 2010, il a obtenu un bachelor en arts visuels et médias à l'Université du Québec à Montréal. En 2016, il a acquis une maîtrise en beaux-arts à Goldsmiths, à l’Université de Londres, en Angleterre. Depuis lors, Manuel est devenu un artiste international reconnue et représenté par les galeries d'art Kavi Gupta à Chicago (États-Unis), Maruani Mercier à Bruxelles (Belgique) et la galerie HDM à Pékin (Chine) et Londres (Royaume-Uni)[6].
Influence artistique et style
En 2015, un an après son programme de troisième cycle chez Goldsmiths, Mathieu a été victime d’un accident de moto presque mortel, avec délit de fuite du coupable. Il a souffert d'une grave commotion cérébrale, d'un traumatisme facial, de fractures de la mâchoire et de la perte de mémoire à court terme. Cette expérience a eu une influence sur le sujet de son mémoire de maîtrise en beaux-arts : « One Future »[5]. Après son rétablissement physique, et n’ayant plus aucune trace visible de son accident, il a voulu exprimer ce qui persistait chez lui de façon innée. Il a trouvé une corrélation entre son traumatisme invisible et celui de son pays après la dictature de Duvalier. Dans « Un avenir » il a examiné le régime Duvalier dans le but de faire face au traumatisme national qui était rarement abordé collectivement. L'accident l'a également rapproché de sa famille et a renforcé ses amitiés. De nombreux portraits dessinés par Manuel concernent son entourage immédiat[5].
Les principaux sujets de l’œuvre de Mathieu sont façonnés par des processus déconstruits, alors qu'il développe un langage visuel qui repousse les limites des représentations figuratives et de ce qui est considéré comme figuratif[7]. Il extrapole des techniques formelles abstraites pour représenter des personnages et des sujets haïtiens historiques, créant un langage visuel qui indique son point de vue à travers des considérations interprétatives. La transparence de l’œuvre de Mathieu en ce qui concerne la texture, la composition et la thématique souligne sa pratique et son souci profond de découvrir le pouvoir et les structures spirituelles derrière les modes de pensée, de comportement et de manifestations de la réalité[1].
Ses peintures reproduisent souvent des documents classés, tels que des vidéos et des photographies, afin de faire ressortir l'effacement, l'invisibilité et la curiosité et les questions qui en découlent face aux vides narratifs. Il explore cette sensation comme une réalité collective de la diaspora noire imposée violemment par le silence historique et la marginalisation[8].
En tant qu’artiste multidisciplinaire, il puise dans diverses pratiques musicales — l’improvisation et la répétition du jazz — et des processus matériels qui lui permettent d'élargir et de diversifier son approche d’un sujet qu'il explore au fil des années.
Mathieu fait constamment référence aux cultures visuelles haïtiennes de l'hybridité religieuse, comme celle du mouvement Poto-Mitan, à l'écologie ou à la nature, telle qu'elle est représentée dans d'autres mouvements comme le Saint Soleil[6].
Dessins et autres supports
Mathieu travaille également dans les domaines du dessin, du textile, de la vidéo et de l'installation artistique. Ses dessins sont conçus à des échelles plus petites que ses peintures. C'est à travers ses dessins que d'importants progrès ont eu lieu dans sa pratique de la peinture[9].
Ses courts métrages repoussent les limites de la narration conceptuelle dans son étude perpétuelle de la façon dont les croyances et l'histoire façonnent nos perspectives et nos réactions aux événements politiques ou intimes[5].
Expositions sélectionnées
Solo
- 2019 - Wu ji, HDM Gallery, Beijing, Chine
- 2018 - The Spell on You, Maruani Mercier, Bruxelles, Belgique
- 2018 - Nobody is watching, Kavi Gupta Gallery, Chicago, États-Unis
- 2017 - Truth to Power, Tiwani Contemporary Gallery, Londres, Royaume-Uni
- 2017 - Art Brussels, Maruani Mercier, Bruxelles, Belgique
- 2016 - One Future, Goldsmiths Graduating Show, Royaume-Uni
- 2012 - Prémices / Open-Ended, Montréal arts interculturels, Montréal, Canada
Groupe
- 2019 - The other side of now, Pérez Art Museum Miami, Miami, États-Unis
- 2019 - Over my Black Body (avec Nakeya Brown, Marilou Craft, Erika DeFreitas, Amartey Golding, Stanley Février, Chloé Savoie-Bernard), Galerie de l'UQAM, Montréal, Canada[10],[11]
- 2018 - Arco Madrid, Maruani Mercier, Madrid, Espagne
- 2018 - CIRCA 2018 benefit exhibition, Montréal, Canada
- 2018 - Playlist, Antoine Ertaskiran, Montréal, Canada
- 2018 - Nous sommes ici, d’ici : L’art contemporain des Noirs canadiens[12], Musée des beaux-arts de Montréal, Montréal, Canada
- 2017 - We are all very anxious, Dye House 451, Londres, Royaume-Uni
- 2017 - In-visibilité Ostentatoire, Fondation Clement, Martinique
- 2016 - Deptford X Festival, London, Royaume-Uni (commande)
- 2016 - Will Nature Make a Man of Me Yet? PI Artworks, London, Royaume-Uni
- 2016 - Myth Material, TAP, Londres, Royaume-Uni
- 2014 - Haïti, 2 centuries of creations, Grand Palais, Paris, France
- 2014 - Consisting of superposed Layers that sometimes partially merged, POPOP Gallery, Montréal, Canada
- 2014 - Les Contemporains, Artv Studio, Montréal, Canada
- 2014 - Les Contemporains, Musée d'art contemporain de Montréal, Canada
- 2014 - Les Ateliers TD, ARSENAL, Montréal, Canada
- 2013 - In Extremis: Death and Life in 21st Century Haitian Art, Musée de la civilisation au Québec, Québec, Canada
- 2013 - On Common Ground, Art Museum of the Americas, Washington, D.C., États-Unis
- 2013 - Haïti: Radical and contemporary, Grande Finale - 2013 A.R.T Fabric, Freland, France
- 2012 - Haïti: Radical and contemporary, Musée du Montparnasse, Paris, France
Références
- (en-US) Caroline Elbaor, « Why Artist Manuel Mathieu Is on His Way Up », sur artnet News, (consulté le )
- (en-GB) Emily Spicer, « Manuel Mathieu: ‘Life experience sometimes forces you to see things that you wouldn’t otherwise have seen’ », sur Studio International - Visual Arts, Design and Architecture (consulté le )
- Patricia Grogg, « In Haiti, April Showers Don't Always Bring Flowers | Inter Press Service », sur www.ipsnews.net (consulté le )
- (en-US) Sara Roffino, « Fast-Rising Painter Manuel Mathieu Creates Deeply Personal Work », sur Galerie, (consulté le )
- (en-US) Raquel Villar-Pérez, « Manuel Mathieu: reflections on abstract painting and trauma », sur AFRICANAH.ORG, (consulté le )
- (en) Rianna Jade Parker, « ‘We Are Rebellious Souls’: Manuel Mathieu Imagines a Caribbean of the Future », sur Frieze (consulté le )
- (en-GB) Maruani Mercier, « Press release: Manuel Mathieu, The Spell on You », sur www.artnet.com (consulté le )
- (en-GB) Tiwani, Contemporary, « Press Release: Manuel Mathieu, Truth To Power », sur https://www.artforum.com/, PDF (consulté le )
- (en) Patricia Donatien et Rodolphe Solbiac, Critical Perspectives on Conflict in Caribbean Societies of the Late 20th and Early 21st Centuries, Cambridge Scholars Publishing, , 165 p. (ISBN 978-1-4438-8247-7, lire en ligne)
- Éric Clément, « Over My Black Body : ode à la pluralité », sur La Presse, (consulté le )
- Jérôme Delgado, « La Galerie de l'UQAM ferme la saison avec deux expositions solides et pertinentes », Le Devoir, , p. D18
- Musée des Beaux-Arts de Montréal, « Communiqué : NOUS SOMMES ICI, D’ICI : L’ART CONTEMPORAIN DES NOIRS CANADIENS », sur https://www.mbam.qc.ca (consulté le )
- « Spooky - Manuel Mathieu », sur Collections - Musée de la civilisation (consulté le )
- « Mathieu, Manuel », sur Collections | MNBAQ (consulté le )
- (en) « fig-2 open call winner: Manuel Mathieu », sur https://www.artfund.org, (consulté le )
- « Le Prix Sobey pour les arts 2020 augmente les bourses octroyées aux artistes de la liste préliminaire », sur https://www.beaux-arts.ca/ (consulté le )
Liens externes
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