Marian de Forest

Marian de Forest ( - ) était une journaliste et dramaturge américaine qui fut révélée par son adaptation de Little Women de Louisa May Alcott. Elle joua un rôle majeur dans le mouvement féministe progressiste. Elle fut la fondatrice de Zonta (plus tard Zonta International ), une organisation de services de femmes ayant une activité professionnelle au service des autres femmes pour la reconnaissance de leur travail et pour améliorer l'accès des femmes à l'éducation et au travail. Elle a été intronisée au Temple de la renommée nationale des femmes en 2001.

Marian de Forest
Biographie
Naissance
Décès
(à 70 ans)
Buffalo
Sépulture
Cimetière de Forest Lawn de Buffalo (en)
Nationalité
Formation
Buffalo Seminary (en) (jusqu'en )
Activités
Autres informations
A travaillé pour
Buffalo Morning Express and Illustrated Buffalo Express (d) (-), The Buffalo Commercial (d) (jusqu'en ), The Buffalo News
Membre de
Distinction

Biographie

Enfance et formation

Née à Buffalo (New York) en 1864[1] dans une famille aisée, elle était la cadette de Cyrus Hawley de Forest et Sarah G. Sutherland[2]. Son père était un homme d'affaires important de la ville et ses activités concernaient essentiellement la manufacture de fournitures et aussi l'industrie du charbon. Son père décédera au début de mai 1889 et laissera derrière lui son épouse et six enfants (James S. De Forest, Herman P. De Forest, Miss Schuyler Coye, Miss Henry Marvin, Miss Edward S. et Marian De Forest)[3]

Une blessure à un œil força Marian de Forest à rester trois années dans l'obscurité pour éviter la perte de la vision. Elle fut donc contrainte d'effectuer sa scolarité à domicile avec un tuteur privé[4]. Les cours s'effectuaient essentiellement de manière orale l'obligeant à mémoriser ce qu'elle ne pouvait voir et écrire. Elle entra au lycée Buffalo Female Academy à Johnson Park, désormais connu sous le nom de Buffalo Seminary et réussit à être diplômée en 1884, devenant par la même occasion la plus jeune diplômée de l'époque[2].

Très jeune, elle s'intéressa à l'écriture et rencontra l'actrice Lily Langtree qui l'encouragea à poursuivre dans cette voie[5]. Elle participa avec des poèmes et des essais au journal de son lycée, The Magnet. En 1884, elle en devint même la rédactrice en chef[6].

Journaliste

Elle opta pour une carrière de journaliste et devint l'une des premières femmes reporters de l'ouest de l'État de New York. Elle écrivit pour The Buffalo Evening News puis pour The Buffalo Commercial Advertiser[2],[1]où elle resta jusqu'en 1901[6].

Son travail de journaliste était reconnu par ses pairs et reçut notamment le second prix (somme de 10$) de la Fine Arts Academy pour le concours du meilleur article sur la récente exposition à laquelle ils avaient participé[7].

Lors de la Pan-American exposition de Buffalo en 1901, elle fut la secrétaire exécutive du conseil des femmes dirigeantes du Pavillon des Femmes[2]. Ce conseil s'attacha à montrer que les femmes de la «Pan Am» étaient plus que seulement des hôtesses en établissant des comités de dirigeantes pour les différents domaines présentés dans l'exposition en collaboration avec leurs équivalents masculins[6].

Peu après, elle rejoignit l'équipe du journal Buffalo Morning Express et y devint éditrice du département des femmes et critique d'art dramatique durant 22 ans[2],[6].

Katharine Cornell est devenue une star dans la London production de 1919 de l'adaptation théâtrale de De Forest en 1912 de Little Women.

Dramaturge

En 1911, à la demande de Jessie Bonstelle, dirigeant d'une compagnie de Théâtre, elle adapta le roman de Louisa May Alcott Les Quatre Filles du docteur March en pièce dramatique[8]. Marian de Forest écrivit la première ébauche de mémoire sans avoir relu la nouvelle, éliminant donc tout le superflu. Elle compléta ensuite avec le texte du livre mais aussi avec du texte provenant d'autres œuvres d'Alcott. John Pratt Alcott (neveu et fils adoptif de Louisa May Alcott aurait voulu que la pièce soit beaucoup plus une comédie. Les deux objectèrent que supprimer la mort de Beth ruinerait tout le jeu d'acteur et ferait perdre l'esprit de la nouvelle. Marian de forest ajouta un peu de comédie mais conserva globalement l'esprit de l'ébauche et de la nouvelle[9].

La première fut jouée au Teck Theatre en janvier 1912 à Buffalo[2]. Le succès grandissant, la pièce fut jouée ensuite 184 fois à New York au Playhouse du 14 octobre 1912 à mars 1913[10]. La pièce fut produite par la London production au New Theatre de Londres en 1919 ce qui permit de lancer la carrière de Katharine Cornell, alors seulement actrice locale[11]. Une autre de ses pièces Erstwhile Susan adaptée du roman Barnabetta de Helen R. Martin fut jouée 167 fois à Broadway en 1916 à la Gaiety Theatre[12]. Dramaturge de premier plan, elle apporta son soutien à la place des femmes dans le théâtre et voyagea beaucoup de New York à Londres et Paris comme dramaturge, éditrice et aussi directrice. Les oeuvres dramatiques de Marian de Forest font partie de la collection du Buffalo History Museum[13].

De Forest a été la cofondatrice de la Buffalo Musical Foundation et en devint la directrice en 1924[6]. Elle permit ainsi d'amener l'American Opera Company dans l'ouest de New York. Elle a aussi participé à la formation du Buffalo Philharmonic Orchestra[6]. En 1932, elle fit la promotion des premiers concerts Pops qui permettaient aux musiciens sans emploi de trouver du travail[6].

Améliorer le statut des femmes

En 1893 fut créé par Charlotte Mulligan, le Scribblers, club de Buffalo destiné aux écrivaines locales et Marian de Forest invitée, en fut l'une des toutes premières membres. En janvier 1894, se tint à l'Hôtel Genesee sa première convention et Marian de Forest fit don d'un encrier en verre taillé artisanal[14]. Le but de l'association était d'aider à établir des standards d'écriture et les écrivaines devaient à tour de rôle faire lecture d'une sélection de leurs écrits suivi d'une séance de questions et discussions. De Forest en fera partie toute sa vie durant, deviendra la trésorière puis la présidente[6].

Après avoir participé à une réception du Kiwanis (club exclusivement masculin), Marian de Forest et quelques autres femmes invitées ressentirent le besoin de créer un équivalent pour les femmes[15]. En février 1919, un nouveau club féminin fut donc créé par Wanda Frei Joiner[16] et appelé Quota [17]. Ce club regroupait des femmes d'affaires et des femmes exerçant un métier dans le but de partager leurs expériences et d'en faire profiter les autres femmes. Marian de Forest en fit partie parmi les premières. Le 27 mai 1919, elle en était la présidente et participa à ce titre au County League of Woman Voters, une convention qui réunit 400 femmes au Gold and White ball Room de l'Hôtel Statler et dont le but était de discuter de l'impérative nécessité pour les femmes de devenir électrices[18].

L'accès à ce Quota club était payant et en théorie était limité aux meilleures femmes de leur catégorie professionnelle. Des dissensions naquirent rapidement lorsque certaines femmes dont Marian de Forest reprochèrent au club de privilégier la quantité de membres à la qualité. En effet, il y avait un intérêt à intégrer le maximum de nouveau membres puisqu'une partie de la cotisation (10$) revenait aux marraines qui en général étaient les principales organisatrices du club[19]. Cela semblait s'éloigner des préoccupations initiales du mouvement et ressemblait plus à de l'enrichissement personnel[20]. Marian de Forest qui en fut brièvement la président tenta de changer les choses mais n'y parvint pas. Une autre raison, officieuse, était lié au fait que Marian de Forest fut vexée de voir une autre écrivaine inscrite au club alors que chaque membre était censée être la meilleure de sa catégorie[20]. Du fait de ces dissensions, plusieurs femmes décidèrent de quitter le Quota club[17].

Création du Zonta Club

Le 8 novembre 1919, lors d'une réunion à l'hôtel Statler, un groupe de femmes d'affaires fonda le Zonta club de Buffalo à l'instigation de Marian de Forest. Le Zonta club était « une organisation de services de femmes cadres travaillant à l'amélioration du statut juridique, politique, économique et professionnel des femmes dans le monde »[6]. Il faut toutefois noter que Marian de Forest ne participa pas à cette première réunion car elle se trouvait en tournée avec toute la compagnie pour les représentations de Little women[6] et c'est Mai Davis Smith qui y relaya son point de vue[21]. Les objectifs affichés de ce nouveau club étaient à peu de chose près, les mêmes que le Quota club. Ce qui différenciait les deux était les règlements intérieurs des membres et la manière de recruter de nouvelles adhésions avec comme moto «privilégier la qualité à la quantité».

En peu de temps s'ouvrirent d'autres Zonta Club dans différentes villes des États-Unis (Rochester, Binghamton, Elmira, Syracuse, Ithaca, Utica, Detroit et Erie, PA). Elle fut la première présidente du Zonta club de Buffalo (1919-1922)[6]. Le nom de l'organisation, Zonta, est un mot indien des Sioux Lakota qui signifie « honnête et digne de confiance »[17]. Dans l'un de ses premiers discours, Marian de Forest expliqua : « Le Zonta représente les normes les plus élevées dans le monde des affaires et le monde professionnel… la recherche de la coopération plutôt que la concurrence et considère comme règle d'or non seulement une bonne éthique mais aussi de bonnes affaires ». En 1922, elle devient la présidente de Zonta au niveau national alors que 16 clubs sont actifs[6]. De Forest envisagea que Zonta devienne une organisation internationale. En 1923, elle présida le comité national d'organisation des clubs Zonta[21] et la même année, elle leva des fonds pour venir en aide aux femmes et enfants des zones turques ravagées par la guerre[6]. Peu après plusieurs clubs sont créés hors des USA, à Toronto (Canada) ou encore à Vienne (Autriche)[6]. Selon ses propres mots,

« C'est le temps des femmes et dans des pays lointains et des climats étrangers, les femmes de toutes les nations se rallient à l'appel … Zonta a l'opportunité de les unir en un seul grand et glorieux ensemble[22]. »

. Elle sera la présidente de Zonta International de 1924 à 1925[21].

En 1933, elle cessa d'être membre actif de Zonta et fut nommée membre honoraire[6].

Femme influente des droits civiques

Marian de Forest était une femme très impliquée dans de multiples domaines de la société américaine. Elle fut membre du conseil des directeurs de la Bibliothèque Publique de Buffalo de 1920 à 1934[23], mais aussi de la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA) et de la Humane Society (une autre société de protection des animaux)[2],[24].

Elle était aussi membre de l'association des diplômés du Buffalo Seminary (Buffalo Seminary Graduates Association) comme ancienne étudiante de ce lycée. Au niveau artistique, elle était membre du Lyceum Club of London qui était un club réservé aux écrivains, du Buffalo Players (dont elle fut présidente)[25], de l'Author’s League of America, du Scribblers (une organisation de femmes écrivains de Buffalo), du Dramatists' Club, du Buffalo Athletic Club, du Town Club et enfin membre honoraire du Twentieth Century Club of Buffalo, un club créé par des femmes pour des femmes et dont le principal sujet était l'éduction.. Marian de Forest était listée parmi les femmes notoires du théâtre américain et dans le Who's Who américain[2].

Vie privée

Marian de Forest a partagé sa vie durant 25 ans avec Mai Davis Smith, la première femme impresario de Buffalo. Smith commença à diriger des concerts en 1905. Leur domicile d'Irving Place servit fréquemment de salon où furent reçus de artistes et amis. Smith permis de faire venir à Buffalo de nombreux musiciens célèbres tels que Mahler, Paderewski, Rachmaninoff et Toscanini[6]. Mai Davis Smith décède en mars 1924 d'une pneumonie.

Marian de Forest meurt le 17 février 1935 d'un cancer au Buffalo General Hospital[26]. Elle est inhumée au Forest Lawn Cemetery de Buffalo dans un caveau familial dans la section n°1 (lot 6) à quelques mètres de sa compagne[6],[26].

Héritage

Après son décès, un prix Marian de Forest fut créé par le Zonta International pour récompenser des femmes partageant ses valeurs et exercent dans les mêmes professions que Marian de Forest, qu'elles soient membres du Zonta ou non[27].

En 1961, le sculpteur Larry Griffis Jr prit Marian de Forest comme modèle pour son œuvre intitulée The spirit of womanhood. Cette scultpure est installée le long de la route 198 à Buffalo. Une plaque y détaille la carrière de la fondatrice du Zonta club[27].

En octobre 2001, Marian de Forest devint la première femme de Buffalo à intégrer le National Women's Hall of Fame[26],[27].

Publications

  • (en) Louisa May Alcott et Marian De Forest, Little Women : The Broadway Play of 1912, CreateSpace Independent Publishing Platform, , 66 p. (ISBN 9781508447894)
  • (en) Marian De Forest, The Zonta Zoo, Or, The Vision of Noah, Zonta International, , 56 p.
  • (en) Marian De Forest, Mister Man, , 266 p.
  • (en) Jessie Bonstelle et Marian De Forest, Little Women Letters from the House of Alcott, Little, Brown and Company, , 197 p.
  • (en-US) Marian de Forest, « Establishing a Little Theater and Making It Pay », The Billboard's Little Theater Handbook, , p. 25-27
  • (en) Marian De Forest, Little Women, Adapted from the Story by Louisa M. Alcott,
  • (en) Marian De Forest, Erstwhile Susan : A Play in Three Acts, , 258 p.
  • (en) Marian De Forest, Friendship Village : A Character Comedy, Buffalo (N.Y.) . Founded on Zona Gale's Friendship village stories. (Just an evening with the folks)., Marian De Forest, , 322 p. (OCLC 36478430)
  • (en) Marian De Forest et John D. Wells, Mary 39 : a play in three acts and four scenes (Manuscrit), Buffalo (N.Y.), Marian De Forest (OCLC 51283844)

Références

  1. (en) « Marian de Forest » [archive du ], National Women's Hall of Fame (consulté le ). 
  2. (en) « Marian de Forest » [archive du ] [PDF], sur zonta.org, Zonta International (consulté le )
  3. « Mr. De Forest funeral », Buffalo Evening News, , p. 2
  4. (en-US) « de Forest, Marian », sur National Women’s Hall of Fame (consulté le )
  5. Kanes 1997, p. 154.
  6. (en-US) Susan Cutrona, « "Work, Work, Work!": The Eventful Life of Marian de Forest », sur Western New York Heritage, (consulté le ). 
  7. (en) « Prizes for the stories of the Exhibition », Buffalo Evening News, , p. 25. Marian De Forest résidait alors au 144 Mariner Street
  8. (en) Susan Cutrona, « "Work, Work, Work!": The Eventful Life of Marian de Forest - WNY Heritage », sur www.wnyheritage.org, (consulté le )
  9. (en) Beverly Lyon Clark, The Afterlife of "Little Women", Johns Hopkins University Press, , 288 p. (ISBN 9781421415598)
  10. (en) « Little Women », sur Internet Broadway Database (consulté le )
  11. (en) Katharine Cornell, « I Wanted to Be an Actress », Stage, New York City, Stage Magazine Company, Inc., , p. 13 (lire en ligne, consulté le )
  12. (en) « Erstwhile Susan », sur Internet Broadway Database (consulté le )
  13. (en) « Marian De Forest Drama Papers, 1910-1961 » [archive du ] (consulté le )
  14. (en-US) « What Buffalo women are doing », Buffalo Evening News, , p. 2
  15. Nantka 2020, p. 12.
  16. Kanes 1997, p. 150.
  17. Kanes 1997, p. 123.
  18. (en-US) « County League of Woman Voters », Buffalo Evening News, , p. 12
  19. Kanes 1997.
  20. Kanes 1997, p. 152.
  21. Kanes 1997, p. 155.
  22. (en) « Pan American Exposition Buffalo 1901: Marian deForest », Panam1901.org (consulté le )
  23. (en-US) Buffalo (N.Y.) Public Library, Annual Report,
  24. (en-US) « Humane Society Officiers Report », Buffalo Evening News, (lire en ligne, consulté le ). Elle s'occupait du comité de presse depuis au moins le mois d'octobre 1899
  25. Marian de Forest 1924, p. 25.
  26. (en) Patrick Kavanagh, « Marian deForest », sur History of Buffalo (consulté le ). 
  27. Nantka 2020, p. 13.

Bibliographie

  • (en-US) Candace A. Kanes, American business women, 1890-1930: Creating an identity (Doctoral Dissertation), Durham, University of New Hampshire, , 390 p. (lire en ligne). 
  • (en-US) Jessica E. Nantka, Zonta International: Unveiling 100 Years of History Membership (Thesis project for degree of Master of Arts), Buffalo (NY), State University of New York College at Buffalo State, , 87 p. (lire en ligne), chap. 15. 

Liens externes

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