Rhoda Erdmann

Rhoda Erdmann ( - ) est une pionnière allemande de la biologie cellulaire et l'une des rares femmes dans ce domaine à l'époque. Son travail est centré sur la reproduction des protozoaires avec un intérêt marqué pour la culture cellulaire et la reproduction in vitro.

Rhoda Anna Maria Erdmann
Biographie
Naissance
Décès
(à 64 ans)
Berlin
Nationalité
Formation
Activités
Autres informations
A travaillé pour
Influencée par
Lorande Loss Woodruff (d)
Signature

Jeunesse et formation

Anna Maria Rhoda Erdmann naît le à Hersfeld[1]. Elle est la fille d'Anna Maria et de Dr Heinrick E. Erdmann, professeur de lycée. Elle fréquente l'école pour filles St. John's à Hambourg, où elle suit une formation d'enseignante pour filles des écoles secondaires et intermédiaires. Après avoir réussi l'examen en 1892, elle déménage en Angleterre, puis en Roumanie pour travailler comme enseignante, pour finalement terminer par un poste dans une Volksschule à Hambourg en 1899.

En 1903, Erdmann quitte son poste d'enseignante pour reprendre ses études. Elle suit des cours de zoologie et de botanique à Berlin, Zurich, Marbourg et Munich. Elle travaille à la station zoologique de Naples et passe l'examen d'entrée à l'université en 1907. En 1908, elle obtient un doctorat en biologie de l'université de Munich, où elle travaille dans le laboratoire du Dr Richard von Hertwig. Sa thèse, Experimentelle Untersuchung der Massenverhältnisse von Plasma, Kern und Chromosomen in dem sich entwickelnden Seeigelei (Enquête expérimentale sur les rapports de masse du plasma, du noyau et des chromosomes dans l'œuf d'oursin en développement) établi sa carrière de protozoologiste[2]. Elle est l'une des premières femmes doctorantes en Allemagne, les femmes n'étant par autorisées à poursuivre des recherches doctorales avant 1900.

Carrière

États-Unis, université Yale

À partir de 1908, Erdmann est assistante de recherche à l'Institut Robert-Koch. Elle travaille avec August von Wassermann et tente de développer un vaccin contre le virus Cyanolophia du poulet[3] (aujourd'hui classé H7 Grippe aviaire hautement pathogène[4]). En 1913, elle reçoit une bourse de la Fondation Rockefeller pour conduire des recherches cytologiques au laboratoire zoologique d'Osborn de l'université Yale. Elle y travaille avec Ross Granville Harrison sur des méthodes de propagation de cellules in vitro.

Après la fin de sa bourse, Harrison lui propose un poste de conférencière à Yale - remarquable, étant donné que la charte de l'université doit être modifiée pour admettre une femme professeur. De 1915 à 1918, elle est la première femme membre de la faculté d'études supérieures de Yale. En 1915, elle est nommée associée de recherche au Rockefeller Institute for Medical Research à Princeton, où elle passé ses étés à étudier les techniques de culture tissulaire. Erdmann parvient à cultiver des cellules de moelle osseuse de poulet dans le cadre de ses tentatives d'atténuer le virus de la cyanolophie[5]. Ces études sont importantes pour les travaux futurs en hématologie et en virologie. De plus, ses travaux sur la survie des cultures de paramécie ont conduit à d'importantes connaissances sur la sénescence cellulaire et les méthodes de transmission génétique[6].

Son travail à Yale et Princeton est interrompu par la Première Guerre mondiale. L'hystérie du temps de guerre jette des soupçons sur les citoyens allemands. En 1918, Erdmann est accusée d'empoisonner l'approvisionnement en eau potable de New Haven et d'introduire le choléra du poulet aux États-Unis[7]. Elle perd son emploi à Yale en , est emprisonnée de mai à septembre puis elle est libérée par Harrison. Elle est expulsée vers l'Allemagne le printemps suivant[8].

Retour en Allemagne, université Friedrich-Wilhelms

Rhoda Erdmann (en haut à gauche, regardant dans le microscope), Laboratoire de Berlin, 1929

Il lui faut un an pour retrouver un poste à l'Institut de recherche sur le cancer de l'hôpital Charité de l'université Friedrich-Wilhelms de Berlin.Elle y créé un département de recherche expérimentale sur les cellules, le premier du genre en Allemagne. Elle obtient le statut de professeure au département de zoologie de l'université en 1920. En 1923, elle est nommée à la faculté de médecine puis promue professeure agrégée avec plein statut de fonctionnaire en 1929. En , son département devient indépendant sous le nom d'Institut de cytologie expérimentale (Institut für Experimentell Zellforschung) et elle en devient la directrice. Elle introduit les méthodes qu'elle avait utilisé aux États-Unis. Parmi ces nombreuses contributions, elle démontre que le cancer peut être propagé par des filtrats acellulaires contenant des virus[9]. Elle est la première femme allemande à diriger un institut universitaire[10]. Erdmann fonde le périodique Archiv für experimentelle Zellforschung en 1925 dont elle demeure rédacteur en chef jusqu'à sa mort et elle conçoit l'idée d'une Association internationale de cytologie expérimentale[11].

L'université Humboldt en 1900

Quand les nazis arrivent au pouvoir en 1933, elle est bannie du laboratoire après avoir été dénoncée comme juive par l'eugéniste Henry Zeiss et le chirurgien orthopédique Hermann Gocht. Quand cela s'avère faux, elle est accusée d'aider ses étudiants juifs à émigrer. Son institut est fermé et elle est obligée à prendre sa retraite[8]. La Gestapo l'emprisonne au printemps 1933 puis la relâche sous la pression internationale. Le gouvernement finit par lui demander de créer un nouvel institut de cytologie expérimentale que sa santé fragile ne lui permettra pas de voir achevé[12].

Erdmann meurt à Berlin, le , d'une attaque cardiaque.

Reconnaissance

En 1992, la section allemande de l'Association européenne de culture tissulaire crée un fonds de recherche en l'honneur du Dr Rhoda Erdmann. En 2016, la Maison Rhoda Erdmann est inaugurée dans le Campus Nord des Sciences de la vie de l'Université Humboldt de Berlin[13].

Publications (sélection)

  • Rhoda Erdmann & Woodruff, Lorande Loss, The periodic reorganization process in Paramaecium caudatum, 1916, DOI:10.1002/jez.1400200203
  • Rhoda Erdmann. Cytological observations on the behavior of chicken bone marrow in plasma medium. 1917, DOI:10.1002/aja.1000220105
  • Rhoda Erdmann, New Facts and Views Concerning the Occurrence of a Sexual Process in the Myxosporidian Life Cycle, The American Naturalist, vol. 51, 1917
  • Rhoda Erdmann, Immunization against cyanolophia, 1917, doi:10.3181/00379727-14-93
  • Rhoda Erdmann, « Endomixis and size variations in pure lines of Paramecium aurelia. » Proceedings of the Society for Experimental Biology and Medicine. 1919 ;16(5):60-65. DOI:10.3181/00379727-16-37
  • Rhoda Erdmann, Die Bedeutung der Gewebezüchtung für die Biologie 1), 1920, DOI:10.1055/s-0029-1193014
  • Rhoda Erdmann, Praktikum der Gewebepflege oder Explantation besonders der Gewebezüchtung, 1922, Berlin : Julius Springer, oclc:1041022697
  • Rhoda Erdmann, Erzeugung des Flexner-Jobling-Tumors durch Filtrate. Z Krebs-forsch 27, 69–82 (1928). DOI:10.1007/BF02184786
  • Rhoda Erdmann, Wirkung von tumorzellfreiem und tumorzellhaltigem Material auf Leber, Milz und Niere von konstitutionell geeigneten und ungeeigneten Tieren. Z Krebs-forsch 33, 189–218, 1931, DOI:10.1007/BF01792277

Références

  1. (de) « Rhoda Erdmann », Humboldt-Universität zu Berlin
  2. Dr Rhoda Erdmann. « University Women's International Networks Database »
  3. Rhoda Erdmann, « Immunization against cyanolophia », Proc. Soc. Exp. Biol. Med., vol. 14, no 8, , p. 156–161 (DOI 10.3181/00379727-14-93, lire en ligne)
  4. Erhard Kaleta et Catherine Rulke, The beginning of the spread of Fowl Plague (H7 High Pathogenicity Avian Influenza Virus) across Europe and Asia (1878-1955), Blackwell, , 145–190 p.
  5. Rhoda Erdmann, « cytological observations on the behavior of chicken bone marrow in plasma medium », American Journal of Anatomy, vol. 22, , p. 73–125 (DOI 10.1002/aja.1000220105, lire en ligne)
  6. Rhoda Erdmann, « Endomixis and size variations in pure lines of Paramecium aurelia », Proc. Soc. Exp. Biol. Med., vol. 16, no 5, , p. 60–65 (DOI 10.3181/00379727-16-37)
  7. Karl Maramorosch, « The 3 Gs », Virologica Sinica, vol. 27, , p. 325
  8. « Erdmann, Rhoda », sur Encyclopedia of Life Sciences
  9. Rhoda Erdmann, « Die Biologischen Eigenschaften der Krebszelle nach Erfanrungen der Explantations und Reimplantation », ZTSCHR. F. Krebsforsch., vol. 27, , p. 69 (DOI 10.1007/BF02184786)
  10. « Anna Maria Rhoda Erdmann », American Journal of Public Health, vol. 25, no 10, , p. 1171 (DOI 10.2105/AJPH.25.10.1169)
  11. « Obituary », The British Medical Journal, vol. 2, no 3899, , p. 605 (PMID 20779386, PMCID 2461453, DOI 10.1136/bmj.2.3899.605-b)
  12. F. h. b, « Prof. Rhoda Erdmann », Nature, vol. 136, no 3443, , p. 672 (DOI 10.1038/136672a0, Bibcode 1935Natur.136..672H)
  13. « Philippstrasse 13, house 22 », sur Humbdolt-Universitat Zu Berlin

Liens externes

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