Sanctuaire héroïque des Touriès
Le sanctuaire héroïque des Touriès est un site archéologique situé près de Saint-Paul-des-Fonts (commune de Saint-Jean-et-Saint-Paul, Aveyron) où a été découvert un ensemble de stèles anthropomorphes stylisées, ainsi qu'un sanctuaire celtique unique en Gaule méridionale par l'absence de réutilisation ultérieure.
Sanctuaire héroïque des Touriès | |
Stèle 3, décapitée : représentation stylisée d'un guerrier en cuirasse, 1,5 à 2 fois plus grand que nature. | |
Localisation | |
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Pays | France |
Commune | Saint-Jean-et-Saint-Paul |
Département | Aveyron |
Région | Midi-Pyrénées |
Coordonnées | 43° 54′ 47″ nord, 3° 02′ 45″ est |
Altitude | 560 m |
Histoire | |
Époque | VIIIe – Ve siècles av. J.-C. |
Description
Lieu et découverte
Les vestiges sont situés au lieu-dit Les Touriès, près du hameau Le Vialaret du village de Saint-Paul-des-Fonts, à 560 m d'altitude sur un petit promontoire au-dessus de falaises abruptes surplombant de 110 m le confluent de deux ruisseaux, l'Annou et le Congonelet, en-dessous et dans l'axe du cirque naturel de Saint-Paul-des-Fonts qui forme le bord du plateau du Larzac[1].
Le site a été découvert par hasard, lors du défonçage de la haie d'un talus artificiel traversant en partie le promontoire. Les fouilles ont commencé en 2008 et sont toujours en cours en 2015[2].
Stèles
Des fosses d'ancrage témoignent de plusieurs alignements de stèles monolithes en grès entre les VIIIe et VIe siècles av. J.-C. (au premier âge du fer), sans dépôt funéraire. Les stèles pourraient être liées à un tertre sous-jacent, probablement à usage funéraire de tumulus avec les représentations des guerriers érigées au sommet comme au Glauberg en Allemagne, car les restes remaniés d'au moins quatre sujets inhumés semblent en provenir[1]. Ces dents et os isolés, non brûlés, pourraient cependant aussi avoir été déposés rituellement, par exemple en tant que reliques, lors de l'édification du podium à portique au Ve siècle av. J.-C.[2]
Les stèles sont faites de brèche et de grès en provenance du confluent de l'Annou et de la Sorgues, 5 à 10 km en aval, avec un dénivelé de 150 m. Elles font partie d'une statuaire celtique de Gaule méridionale à décor stylisé, dont presque 500 exemplaires sont connus, mais avec certaines caractéristiques propres à un groupe de stèles du Sud de l'Aveyron, comme la représentation de cuirasses très stylisées et de ceintures. Sur l'une des stèles figure une épée à antennes dans un fourreau que l'on peut dater de la fin du VIe siècle av. J.-C.[1] Les premières stèles montrent des traces de polychromie. Cet ensemble de stèles représente un important jalon historique entre les statues-menhirs du groupe rouergat (IIIe millénaire av. J.-C.) et les derniers bustes sur socle gaulois des IIe et Ier siècles av. J.-C.[3], posant la question délicate de l'éventuelle continuité de cette statuaire anthropomorphe stylisée[4],[5] et de l'évolution de sa fonction[6].
Quelques stèles sont décapitées[2], et d'autres brisées volontairement en milliers de fragments, peut-être en raison d'une compétition entre lignages de l'aristocratie guerrière locale sur un sanctuaire héroïque situé à la limite entre les territoires bien distincts du causse du Larzac et de l'avant-causse. Certains fragments montrent la représentation d'une roue et d'une caisse de char datant du début du Ve siècle av. J.-C. au plus tard, ce qui est à rapprocher des tombes à char celtiques de la même époque et indique des personnages héroïsés de grande importance[1]. D'autres fragments montrent des coiffes ornées : casque volumineux daté du VIIIe ou VIIe siècle av. J.-C. semblable à celui du buste de Sainte-Anastasie, protubérances en forme de « feuille de gui » datées du Ve siècle av. J.-C. comme sur la tête de la statue de guerrier du Glauberg ou de l'« Hermès » bicéphale de Roquepertuse[2].
Constructions et abandon
Pendant le Ve siècle av. J.-C., il est édifié au-dessus du tertre un podium en pierre de 50 m de long, où n'a été trouvé aucun dépôt funéraire. Il s'agit d'une construction commémorative où sont exposées de nombreuses stèles antérieures, et qui a été bâtie en plusieurs étapes. La partie la plus ancienne a un accès semi-enterré, probablement protégé par un portique. Les aménagements ultérieurs, et la couche de dépôt de la même époque, indiquent des pratiques cultuelles incluant semble-t-il des repas collectifs[1].
L'intérêt du site est qu'il a été abandonné tôt, entre les Ve et IVe siècles av. J.-C., évitant le réemploi symbolique de stèles dans le rempart d'une agglomération ultérieure et laissant ainsi apparaître l'origine et le fonctionnement d'un sanctuaire héroïque archaïque[1], pour la première fois en Méditerranée Nord-occidentale et en domaine celtique[6],[7].
Notes et références
- « Le sanctuaire héroïque à stèles des Touriès à Saint-Jean et Saint-Paul », sur Conseil départemental de l'Aveyron, .
- Philippe Gruat, « Stèles brisées, stèles épargnées : première approche des modalités de réemplois des monolithes du complexe héroïque protohistorique des Touriès… », sur blog Ecole Européenne de Protohistoire de Bibracte, .
- Philippe Gruat, « Conférence « L’apport des stèles et des statues protohistoriques des fouilles du sanctuaire héroïque des Touriès à Saint-Jean et Saint-Paul (Aveyron) à la statuaire celtique » », sur Conseil départemental de l'Aveyron, .
- Philippe Gruat et Dominique Garcia, « Stèles et statues du début de l’âge du Fer dans le Midi de la France (VIIIe-IVe s. av. J.-C.) : chronologies, fonctions et comparaisons — Avant-propos », Documents d’Archéologie Méridionale, vol. 34, , p. 7-10 (lire en ligne).
- Hugues Cayrade, « Le sanctuaire des Touriès n’a pas encore livré tous ses secrets », Midi libre, (lire en ligne).
- Philippe Gruat, « Stèles et statues celtiques en Rouergue (VIIIe-Ier s. av. J.-C.) : l’apport des fouilles archéologiques du sanctuaire héroïque des Touriès. », sur Musée Fenaille, .
- « Saint-Jean-Saint-Paul. Touriès, un gisement historique majeur », La Dépêche du Midi, (lire en ligne).
Voir aussi
Bibliographie
- Philippe Gruat, « Un sanctuaire héroïque au cœur des Causses : Le complexe protohistorique à stèles des Touriès à Saint-Jean et Saint-Paul (Aveyron) », L'Archéologue, no 128, , p. 16-23.
Articles connexes
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