Sarah Goldberg (résistante)

Sarah Goldberg née à Warta (Pologne) le et décédée à Bruxelles, le a été membre du réseau soviétique d’espionnage L’Orchestre rouge (Rote Kapelle), résistante armée, déportée, elle fut également parmi les membres fondateurs d’Amnesty International (Belgique).

Pour les articles homonymes, voir Sarah Goldberg et Goldberg.

Sarah Goldberg
Sarah Goldberg, juste après la guerre.
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Biographie
Naissance
Décès
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Activité
Résistante
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Jacques Goldberg (d)
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Biographie

Origines familiales

Sarah Goldberg est issue d’une famille pauvre et pieuse ; son père, Berek Goldberg, est un Cohen, considéré comme un sage dans la communauté juive : il célèbre les mariages et donne son avis pour régler les différends communautaires. Sa mère, Eve (Jentka) Eisenstein, qui a donné naissance à neuf enfants dont quatre meurent en bas âge, meurt du typhus lorsque Sarah est âgée de neuf mois. Peu de temps après la mort d’Eve, le père émigre à Lodz où il s’installe dans le quartier juif ; il épouse le Gevetka Frenkiel. À la suite de pogroms, Berek Goldberg émigre en Belgique en . Il est colporteur en articles de bonneterie et mercerie[1].

En 1939, la population juive comptait environ 30 000 âmes à Bruxelles, et 50 000 à Anvers ; l’historien Nathan Weinstock écrit : « Parmi les militants ouvriers juifs, l’influence communiste prédominait. Ils étaient bien implantés, tant à Bruxelles qu’à Anvers, animaient un club sportif (Yask, « Yiddishe Arbeter Sport Club ») et publiaient une série de journaux »[2]. En 1936, à l’âge de quinze ans, sous l’influence de sa sœur Esther et de son beau-frère Marcus Lustbader, elle entre au club sportif « Unité » animé par des militants communistes ; elle acquiert une formation politique et participe aux campagnes de solidarité en faveur des Brigades internationales en Espagne créées pour défendre l’Espagne républicaine contre le putsch de Franco[3].

Berek Goldberg et Gevetka Frenkiel seront déportés le par le Convoi n° 11 du 26 septembre 1942 et tués dans les chambres à gaz d’Auschwitz deux jours plus tard.

Pendant la Seconde Guerre mondiale

Après la débâcle et l’exode de 1940, elle se réfugie à Saint-Ferréol, près de Revel dans la Haute-Garonne dans la région de Toulouse où elle est engagée par le commissaire de police comme employée de bureau au commissariat local. Elle recopie des listes de personnes recherchées, le plus souvent des personnes qui ont participé à la guerre d'Espagne aux côtés des forces républicaines et qui se sont évadées des camps de Gurs ou de Saint-Cyprien. Lorsqu’elle rentre en Belgique, elle reprend contact avec des amis engagés dans les Jeunes Gardes socialistes unifiés et participe à la distribution de tracts et de journaux clandestins.

Recrutement par l'Orchestre rouge

En , elle est contactée par Hermann Izbutski, un ancien de la Compagnie juive Botwin dans les Brigades internationales en Espagne, pour travailler clandestinement sous le nom de « Lilly »[4] pour le réseau soviétique de renseignements militaires « L’Orchestre Rouge » dirigé par Leopold Trepper : le nom de Sarah Goldberg figure sur l’organigramme du réseau datant de la fin 1941 ainsi que sur la liste des vingt-huit survivants du réseau publié dans ses mémoires. Hermann Izbutski (« Bob »), né à Anvers en 1914, Polonais d’origine, est juif et communiste ; dans ses mémoires, Leopold Trepper le surnomme le « commis-voyageur de l’Orchestre Rouge ». Il apprend à Sarah Goldberg le fonctionnement d’un émetteur radio[5] ; il dépend directement d’un des proches lieutenants de Leopold Trepper, Victor Sukolow qui dirige la Simexco, une firme sise rue des Atrébates à Etterbeek et qui sert de couverture pour « L’Orchestre Rouge » : après son travail, cet officier de renseignement lui apprend le morse et à transmettre par radio des messages codés et chiffrés[6] ; après l’arrestation de Hermann Izbutski en , Sarah Goldberg perd le contact avec le réseau. Izbutski sera exécuté à la prison de Charlottenburg à Berlin le .

Durant les quelques mois de travail pour L’Orchestre Rouge, Sarah Goldberg continue à être secrétaire pour le magasin de chapeaux bruxellois Modiste de la Reine, et cet emploi lui sert de couverture. Le beau-frère de Sarah Goldberg, Marcus Lustbader, qui ne fait pas partie du réseau, est arrêté et envoyé à Breendonk, où il est torturé par la Gestapo ; il est déporté à Auschwitz puis à Buchenwald et sera rapatrié en 1945. Quelques mois plus tard, Sarah Goldberg, reprend contact avec ses amis du groupe L’Unité ; Leibke Rabinowiz (« Rosa ») la met en rapport avec Jacob Gutfrajnd, (« Albin »), commandant de la 1re compagnie juive du Corps mobile des Partisans Armés - dépendant directement du Front de l'Indépendance (F.I.) - pour Bruxelles. Elle reçoit notamment comme mission de participer à des filatures afin d’essayer d’abattre des traîtres ou des collaborateurs, des officiers allemands ou un délateur d’origine juive, Icek Glogowski, connu sous le nom de « Jacques » et qui travaille pour la Gestapo[7]. Elle participe à l’action armée pour délivrer Jacob Gutfrajnd qui est blessé lors d’un attentat des Partisans Armés à l’hôpital d’Etterbeek le .

Arrestation

À la suite d’une dénonciation, elle est arrêtée — à la veille d’une action de sabotage contre les chemins de fer — par la Gestapo le à son domicile illégal à Forest en même temps que son fiancé Henri Wajnberg (« Jules »), né le , et son amie Laja Bryftreger-Rabinowitch ; d’abord emmenés au siège de la Gestapo avenue Louise à Bruxelles, ils sont tous trois transférés au camp de rassemblement de la caserne Dossin de Saint Georges à Malines. Sarah Goldberg (comme Henri Wajnberg, qui est tué dans une chambre à gaz le ) est inscrite sur la liste de déportation du transport XXI sous le no 525. Ce convoi comprend au départ 1 563 personnes dont 208 enfants, dix déportés s’échappent avant la frontière, mais trois d’entre eux sont abattus : le convoi part de Malines le à destination d’Auschwitz Birkenau et arrive le  ; Sarah Goldberg est immatriculée par un tatouage portant le no 51825[8]. Elle travaille au « Schuh-Kommando ». Elle souffre de nombreuses maladies : typhus, dysenterie, furoncles, scorbut. Elle subira de nombreuses sélections[9].Le , elle participe aux marches de la mort d’Auschwitz-Birkenau et arrive au camp de concentration de Ravensbrück le , le à Malchow, un kommando de Ravensbrück, et ensuite à Leipzig[10].

Après la guerre

Elle est libérée le sur les bords de l’Elbe par l’Armée rouge, ensuite par les services américains. Elle est en mauvaise santé. Dénuée de tout revenu, elle séjourne du au dans un home à Blankenberge dépendant de l’organisation « Solidarité » affiliée au Front de l'Indépendance. De février à la fin du mois de septembre 1946, elle travaille à l’association sans but lucratif Aide aux Israélites victimes de la guerre.

Sarah Goldberg est une des premières membres de la section belge d’Amnesty International : elle porte le no 31.

Reconnaissances

En 2001, le Centre communautaire laïc juif la désigne, en même temps que Maurice Pioro également déporté à Auschwitz, comme Mensch personnalité ») de l’année[11],[12]. Durant les dernières années de sa vie, elle se consacre aux Comités de défense des sans-papiers enfermés dans les centres de détention ; elle témoigne aussi dans plusieurs établissements scolaires sur la déportation dans les camps nazis.

Le , une allée Sarah et Jacques Goldberg a été inaugurée dans la commune bruxelloise de Woluwé-Saint-Lambert. Une crèche de cette commune porte également le nom de Sarah Goldberg[13].

Notes et références

  1. Sandrine Morin, Sarah Goldberg, de l’Orchestre Rouge à Auschwitz Birkenau : une femme en Résistance, La Rochelle, mémoire de maîtrise d’histoire, Université de La Rochelle (2002-2003), 120 p.
  2. N. Weinstock, Le Pain de misère. Histoire du mouvement ouvrier juif en Europe, tome III, p. 145
  3. (en) Judith Tydor Baumel, Tova Cohen, Gender, place, and memory in the modern Jewish experience, Vallentine Mitchell, 2003, p. 72
  4. Leopold Trepper, Le Grand Jeu. Mémoires du chef de l’Orchestre Rouge, Albin Michel, 1975, p. 120
  5. Les Enfants des Partisans juifs de Belgique, Partisans armés juifs (38 témoignages), Bruxelles, édité par Les Enfants des Partisans juifs de Belgique, 1991
  6. Maxime Steinberg, José Gotovitch 2007, p. 102
  7. Maxime Steinberg, L’Étoile et le Fusil. La Traque des Juifs 1942-1944, Bruxelles, Vie ouvrière, 1986, vol. II, p. 137-138.
  8. Le Passage du témoin. Portraits photographiques et témoignages de rescapés des camps de concentration et d’extermination nazis, Bruxelles, Éditions La Lettre volée et la Fondation Auschwitz, 1995, p. 106-107.
  9. Mark, Ber (1985). The scrolls of Auschwitz. Am Oved Publishers Ltd. Tel-Aviv. P77
  10. Sarah Goldberg, « C’est un deuil perpétuel » (entretien avec J.-M. Chaumont et Y. Thanassekos), dans Bulletin de la Fondation Auschwitz, n° 28, 1991, p. 45-49.
  11. R. Baumann, « Sarah Goldberg, une vie de lutte pour tous les siens », dans Regards, n° 490, 30 janvier 2001, p. 14-16.
  12. « Sarah, tu nous manques tellement ! », sur CCLJ - Centre Communautaire Laïc Juif David Susskind, (consulté le ).
  13. « Sarah Goldberg - Crèche | Woluwe-Saint-Lambert », sur Le guide des écoles (consulté le )

Sources

  • Archives familiales.
  • Archives générales du Royaume (dossier de la Sûreté publique)
  • Musée Juif de la Déportation à Malines
  • Centre d'études et de documentation guerre et sociétés contemporaines, Bruxelles
  • Ministère de la Santé publique (Dossiers des victimes de guerre).
  • Centre des Archives communistes de Belgique (CARCOB), à Bruxelles
  • Musée national de la Résistance (Archives Front de l’Indépendance et Partisans Armés)
  • Fondation Auschwitz (Dossier personnel).
  • José Gotovitch, Archives des Partisans armés, Bruxelles, Centre de Recherches et d’Études historiques de la 2e guerre mondiale, 1974.
  • Gert Sudholt, Das Geheimnis der Roten Kapelle. Das US-Dokument 0/7708: Verrat und Verräter gegen Deutschland, Leoni am Starnberger See, Druffel Verlag, 1979, p. 18 & suiv.
  • ... The Rote Kapelle: the CIA’s history of Soviet intelligence and espionage networks in Western Europe, 1936-1945, Washington (DC), University Publications of America, 1979, p. 115 & suiv.
  • Mémorial de la déportation des Juifs de Belgique, présenté par Serge Klarsfeld et Maxime Steinberg, Bruxelles et New York, Union des déportés juifs en Belgique et Filles et Fils de la Déportation, 1982 (sub nomen).
  • Rudi Van Doorslaer, Enfants du Ghetto. Juifs révolutionnaires en Belgique (1925-1940), Bruxelles, Labor, 1996, p. 109-194.
  • Mémoire sans oubli (sous la direction de Bernard Dandois), Anderlecht, Institut Marius Renard, 1998.
  • P. Gut, « Le Devoir de mémoire », dans Regards, n°438, , p. 12-13.
  • Ingrid Strobl, Die Angst kam erst danach. Jüdische Frauen im Widerstand 1939-1945, Frankfurt am M., Fischer, 1998, p. 137-171.
  • Maxime Steinberg, Ward Adriaens et Laurence Schram, Mecheln – Auschwitz : 1942-1944, Malines, Musée Juif de la Déportation et de la Résistance, en collaboration avec V.U.B. Press, (4 volumes).
  • Daniel Blatman, Les marches de la mort. La dernière étape du génocide nazi : été 1944 – printemps 1945, Paris, Arthème Fayard, 2009.
  • Jo Szyster, « Le parcours de quatre résistantes », dans Points critiques, mensuel de l’Union progressiste des Juifs de Belgique, n° 302, , p. 27.
  • Gérard Huber, Mala. Une femme juive héroïque dans le camp d'Auschwitz-Birkenau, Éditions du Rocher, 2006, p. 167-169.
  • Crime contre l'humanité. Résistance et déportation - Programme antisémite et holocauste. Archives de l'Institut National de l'Audiovisuel. 2 CD. Sous la direction de Jean-Marc Turine et Patrick Frémaux. Disque 2: témoignages 1 et 6.

Bibliographie

  • Maxime Steinberg et José Gotovitch, Otages de la terreur nazie : le Bulgare Angheloff et son groupe de Partisans juifs, Bruxelles, 1940-1943, Bruxelles, Asp / Vubpress / Upa, , 114 p. (ISBN 978-90-5487-453-9, lire en ligne)
  • Annette Wieviorka et Claude Mouchard, La Shoah : témoignages, savoirs, œuvres, Cercil ; Press Universitaires de Vincennes, (lire en ligne)
  • Bernard Dandois, Sarah Goldberg, Nouvelle Biographie nationale de Belgique, tome 11, 2012.

Liens externes

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