Optimisme

L’optimisme désigne chez l’être humain un état d’esprit, durable ou passager, caractérisé par une perception positive du monde et de l'univers. Le fondement de l'optimisme moderne remonte à Socrate ; Platon l'a professé, puis Aristote[1].

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Optimiste et Pessimiste,
Tableau de Vladimir Makovski (1893)

Dans l'acception courante du mot, une personne optimiste est décrite comme quelqu'un qui a tendance à voir « le bon côté des choses ». L’optimisme est le contraire du pessimisme. L'optimisme est un sentiment positif en tant que moteur de l'initiative. Toutefois le suroptimisme (ou surconfiance) est un biais cognitif (et émotionnel) pouvant conduire à des prévisions hasardeuses, un excès de confiance et des comportements dangereux.

En psychologie et dans le domaine de la santé

La psyché humaine inclut une appréciation plus ou moins optimiste de soi-même, d'autrui et de l'évolution du monde.

On parle dans ce domaine :

  • d'optimisme dispositionnel[2] ;
  • d'optimisme irréaliste[3], qui est un biais sociopsychologique parfois présenté comme un « non-pessimisme dispositionnel »[4] ;
  • d'optimisme comparatif[5],[6] qui semble très ancré dans la plupart des pays d’Amérique du Nord et d’Europe ; il s'agit d'une croyance individuelle très répandue faisant que la plupart des gens se considèrent moins exposés à la plupart des risques qu'autrui[7],[8].
    Cette croyance peut être mesurée en demandant à des personnes d’évaluer leur propre risque de rencontrer un événement négatif en comparaison à celui d’autrui[8].
    Cette croyance peut avoir des effets négatifs, par exemple en ce qui concerne les risques d'accident automobile où certains conducteurs s'estiment à tort meilleurs que les autres pour éviter les accidents, même quand ils ne respectent pas le code de la route en raison d'une évaluation fausse et irréaliste de leurs capacités (dans le sens d'une surestimation), est un facteur souvent en jeu dans les accidents routiers ou sportifs[9],[10],[11],[12].

Une étude[13] récente (2019) ayant porté sur plusieurs milliers de personnes suivies durant 30 ans a conclu que les optimistes vivent plus longtemps que les pessimistes, et plus chez les femmes que chez les hommes. Les 25% des femmes les plus optimistes ont une espérance de vie jusqu’à 15% plus élevée que les femmes pessimistes, chiffre qui tombe à 10,9% chez les hommes). Elles ont 1,5 fois plus de chances d'atteindre 85 ans que les moins optimistes (et 1,7 fois plus pour les hommes). L’étude suggère qu’être optimiste aide à mieux gérer les stress et encourage des comportements sains (bonne alimentation, exercice physique, moindres tentation à boire ou fumer) [14]. L'optimiste vise plus facilement des objectifs à long terme plutôt que des récompenses immédiates face à une situation difficile[14]. D’autres études ont montré que les pessimistes peuvent aussi apprendre à devenir plus optimistes, sans que l’on sache encore si cela augmente leur espérance de vie[14].
Être optimiste et voir le bon côté des choses, semble, dans une certaine mesure, diminuer le risque d’artériosclérose chez la personne âgée[15] et d’infarctus[16] et améliorer les chances de vivre plus longtemps[17], de même chez les femmes ménoposées cela réduit le risque d’être hypertendu, diabétique et fumeuse[18]. Inversement une hostilité élevée et un tempérament cynique sont associés à un risque accru de mortalité toutes causes confondues[18].

En philosophie

Le philosophe allemand Leibniz expose en 1710 sa Théodicée : il y décrit un système philosophique célèbre fondé sur une harmonie préétablie pour expliquer l’existence du mal sur Terre. Leibniz, pour sa théorie, part du principe de la perfection et de la bonté divine. D'après lui, rien ne peut être aussi parfait que Dieu et comme Dieu est bon, le monde qu'il a créé n'égale pas sa perfection mais est forcément le meilleur possible. Cette théorie a ensuite été simplifiée et critiquée par Voltaire dans Candide[19] : Voltaire y invente un personnage nommé Pangloss, censé représenter la pensée leibnizienne, et qui tout au long du conte philosophique parle de « meilleur des mondes possibles ».

En histoire

Lors du siècle des Lumières, le paradigme de la modernité devient celui de l'optimisme ou d'une croyance en un progrès constamment possible pour l'Homme dans son environnement ou dans la société ; les philosophes de ce temps plaçaient une grande confiance dans les aptitudes de l'être humain à faire son bonheur[20].

En politique aussi le sens du mot progrès est forgé par ceux qui croient qu'une évolution sociale est vraiment possible[21]. Au XIXe siècle, des idéologies comme le fouriérisme et le positivisme affirment que la nature humaine est améliorable en soi, et que l'on peut s'opposer à la décadence[22].

Au XXe siècle, les années 1930, 1940 et 1950 sont marquées par l'antimodernisme, tandis que les années 1960 et 1970 voient revenir un nouveau vent d'optimisme, qui se rapproche de celui du début du siècle, avant qu'une critique du progrès (scientifique et technologique notamment) ne réapparaisse[23].

Sur le plan religieux, l'excès d'optimisme a été combattu par Pie IX lorsque celui-ci proclame le dogme de l'Immaculée Conception, qui donnait un sens bien particulier à la grâce et obligeait les théologiens de se rallier au magistère.

Expressions courantes liées à l’optimisme

  • Prendre la vie du bon côté : garder un moral positif, malgré les difficultés éventuellement rencontrées.
  • Ne voir que le verre à moitié plein : ne tenir compte que des évènements heureux et pas des évènements déplaisants.
  • Optimiste et pessimiste sont également nécessaires à la société : l'optimiste invente l'avion, le pessimiste invente le parachute (anonyme).

Références

  1. Traité de la marche des animaux : II, § 2 et VII, § l
  2. Scheier MF & Carver CS (1985) Optimism, coping, and health: assessment and implications of generalized outcome expectancies. Health psychology, 4(3), 219.
  3. Weinstein, N. D. (1980). Unrealistic optimism about future life events. Journal of Personality and Social Psychology, 39, 806-820
  4. Sultan S & Bureau B (1999) Quel optimisme en psychologie de la santé ?. European review of applied psychology, 49(1), 43-51.
  5. Harris P & Middleton W (1994) The illusion of control and optimism about health : On being less at risk but no more in control than others. British Journal of Social Psychology, 33, 369-386.
  6. Dejoy DM (1989) The optimism bias and traffic accident risk perception ; Accident Analysis and Prevention, 21, 333-340 (http://www.sciencedirect.com/science/article/pii/0001457589900249 résumé])
  7. Delhomm, P & Meyer T (1999) Un instrument d’analyse : l'optimisme comparatif. Risques, 39, 1-6.
  8. Weinstein ND (1980) Unrealistic optimism about future life events. Journal of Personality and Social Psychology, 39, 806-820.
  9. Delhomme, P. (1991). Comparing one’s driving with others’ : Assessment of abilities and frequency of offences. Evidence for a superior conformity of self-bias ? Accident Analysis and Prevention, 23, 493-508.
  10. Delhomme, P. (1994). Liens entre surestimation de ses propres capacités, expérience de la conduite et activité de conduite (Rapport no 187). Arcueil : Institut national de recherche sur les transports et leur sécurité
  11. Delhomme P (2000) Optimisme comparatif chez les usagers de la route : Une protection contre le risque ? Pratiques psychologiques, 1, 99-109.
  12. McCormick IA, Walkey FH & Green DE (1986). Comparative perceptions of driver ability : A confirmation and expansion. Accident Analysis and Prevention, 18, 205-208.
  13. Lewina O. Lee, Peter James, Emily S. Zevon, Eric S. Kim, Claudia Trudel-Fitzgerald, Avron Spiro III, Francine Grodstein, and Laura D. Kubzansky (2019) Optimism is associated with exceptional longevity in 2 epidemiologic cohorts of men and women ; PNAS ; 26 aout 2019 | https://doi.org/10.1073/pnas.1900712116 | Edited by Bruce S. McEwen, The Rockefeller University, New York, NY
  14. Shultz David (2019) Cheer up! Optimists live longer| Science News |26 aout 2019
  15. Matthews K.A, Räikkönen K, Sutton-Tyrrell K & Kuller L.H (2004) « Optimistic attitudes protect against progression of carotid atherosclerosis in healthy middle-aged women ». Psychosom. Med. 66, 640–644 (2004)
  16. Kim E.S, Park N & Peterson C (2011) ‘ « Dispositional optimism protects older adults from stroke »: The Health and Retirement Study. Stroke 42, 2855–2859 (2011).
  17. Kubzansky LD & al. (2001) «  Is the glass half empty or half full? A prospective study of optimism and coronary heart disease in the normative aging study ». Psychosom. Med. 63, 910–916 (2001)
  18. Tindle, H. A., Chang, Y., Kuller, L. H., Manson, J. E., Robinson, J. G., Rosal, M. C., ... & Matthews, K. A. (2008). Optimism, Hostility and Incident Coronary Heart Disease and Mortality in the Women’s Health Initiative (résumé)
  19. dont le titre complet est d’ailleurs Candide ou l’Optimisme
  20. Taguieff PA (2011) Le sens du progrès : une approche historique et philosophique. Éditions Flammarion.
  21. Culig B (1995) Progress and political concepts. Socijalna ekologija, 4, 35-55.
  22. Taguieff PA (1996) Critiques du progrès et pensées de la décadence. Essai de clarification des visions de l'histoire. Mil neuf cent, 14(1), 15-39.
  23. Rasmussen A (1996) Critique du progrès, «crise de la science» : débats et représentations du tournant du siècle. Mil neuf cent, 14(1), 89-113.

Annexes

Bibliographie

  • Adam, C (2015), , Edilivre, Paris (pamphlet très pessimiste contre les optimistes qui croient pouvoir « changer le monde »).
  • Badey-Rodriguez C & Costa-Prades B (2014), Développez votre optimisme et votre joie de vivre, Albin Michel
  • Braconnier A (2014), Optimiste, Odile Jacob
  • Comte E & de Brivezac O () Changer de regard , coll. éthique au quotidien, L'Harmattan.
  • Delhomme, P. (2001). Évaluation d'actions possibles face à un risque: Une approche expérimentale de l'effet du contrôle subjectif sur l'optimisme absolu et comparatif. Revue internationale de psychologie sociale.
  • Gabilliet P () Éloge de l'Optimisme , Quand les enthousiastes font bouger le monde, Les Éditions Saint Simon.
  • Kiefer B (2010) L'optimisme (forcé) de la pensée globale. Médecine du sport, 258(28), 1520-1520.
  • Lorenzi JH & Villemeur A (2004) La religion du progrès au cœur de la croissance (No. 123456789/219). Paris Dauphine University.
  • Nten-Nlate S (1998) Le stoïcisme ou l'optimisme de la liberté (Doctoral dissertation, Lyon 3).
  • Rasmussen A (1996) Le progrès en procès. Mil neuf cent, 14(1), 5-14.
  • de Romilly (1965) L'optimisme de Thucydide et le jugement de l'historien sur Périclès (Thuc. II 65). Revue des Études Grecques, 78(371-373), 557-575 (résumé)
  • Seligman ME & Lecomte J (2008) La force de l'optimisme. InterEditions
  • Sharot T (2012) Tous programmés pour l'optimisme préface de Florence Servan-Schreiber, Éditions Marabout.
  • Testa, Catherine., Osez l'optimisme ! : 10 clés pour réenchanter un peu, beaucoup, à la folie votre quotidien, Michel Lafon poche, dl 2019 (ISBN 979-10-224-0323-8, OCLC 1085381869, lire en ligne)

Articles connexes

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