Docétaxel
Le docétaxel, substance active aux propriétés anticancéreuses, est un alcaloïde obtenu par hémisynthèse à partir d'une molécule extraite des feuilles de l'if européen (Taxus baccata).
Docétaxel | |
structure | |
Identification | |
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Synonymes |
taxotère |
No CAS | |
No ECHA | 100.129.246 |
Code ATC | L01 |
SMILES | |
InChI | |
Propriétés chimiques | |
Formule | C43H53NO14 [Isomères] |
Masse molaire[1] | 807,879 2 ± 0,042 5 g/mol C 63,93 %, H 6,61 %, N 1,73 %, O 27,73 %, |
Propriétés physiques | |
T° fusion | 232 °C[réf. souhaitée] |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |
Histoire
Une équipe américaine avait démontré dans les années 1990 les propriétés anticancéreuses d’un diterpène extrait de l’écorce de l’if du Pacifique (Taxus brevifolia), le paclitaxel commercialisé sous la marque Taxol, mais il fallait abattre l'arbre pour en retirer l’écorce[2].
Le docétaxel est un diterpène obtenu par hémisynthèse en 1989 à partir d'une molécule extraite des feuilles de l'if européen (Taxus baccata) à l'Institut de chimie des substances naturelles de Gif-sur-Yvette, alors dirigé par Pierre Potier, à qui sera décerné la médaille d'or du CNRS en 1998[2]. Le médicament produit à partir des feuilles est nommé Taxotère en 1988 et mis sur le marché en 1995 par Rhône-Poulenc Rorer. Il est aujourd’hui commercialisé par Sanofi[2].
Le suffixe du nom du produit a été choisi pour rappeler l’importance d'un groupement tert-butyle qui différencie le Taxotère du Taxol, et le rend plus actif[2].
À partir de 1999, les royalties perçues sur les ventes de ce médicament ont rapporté environ 50 millions d'euros par an au CNRS[3],[4], soit 1,5 % de son budget de 3,5 milliards[5], et 85 % du total de l'ensemble des revenus de ses licences[6],[7]. Le brevet a expiré en 2011, privant le CNRS de cette ressource complémentaire[6].
Principe d'action
Le docétaxel est un analogue du paclitaxel, de structure voisine mais avec une activité doublée. Il en diffère surtout par sa toxicité et son efficacité antitumorale. Comme lui, il stabilise les microtubules en inhibant leur dépolymérisation par liaison stable à la tubuline et entraîne un blocage de la mitose. Il est utilisé à la dose de 100 mg/m2 toutes les trois semaines par voie intra-veineuse, en perfusion d’une heure.
Il existe une toxicité pour la moëlle osseuse (baisse des leucocytes et des thrombocytes) avec de possibles réactions d’hypersensibilité. On peut également constater des œdèmes et épanchements par rétention d'eau et des troubles neurologiques. Il est efficace pour d'assez nombreuses tumeurs. Il a surtout été employé à ses débuts pour traiter les cancers du sein métastatiques[8] ou non[9], résistants aux anthracyclines ou en rechute, puis plus tard dans les cancers du poumon et de la prostate.
Formes commerciales
Docétaxel | |
Informations générales | |
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Princeps |
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Identification | |
No CAS | |
No ECHA | 100.129.246 |
Code ATC | L01CD02 |
DrugBank | 01248 |
Il est commercialisé sous le nom de Taxotère en Belgique, France et Suisse. En Belgique et France, il est réservé au seul usage hospitalier.
Controverse
Le , après une révélation du Figaro[10], l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) annonce[11] que six cas d'entérocolites mortelles lui ont été signalés chez des patientes traitées par l'un des génériques du docétaxel (fabriqué par le laboratoire indien Accord) pour un cancer du sein[12],[10],[13]. Le docétaxel fait partie d'un groupe générique[14] contenant deux médicaments seulement (le princeps et son générique), mais cette molécule se retrouve dans seize spécialités commercialisées en France[15]. Une recommandation à titre de précaution est alors émise par l'ANSM[16] de ne pas utiliser le docétaxel dans le traitement des cancers du sein localisés, opérables, et de le substituer par le paclitaxel en attendant les conclusions de l'enquête sanitaire. Cette recommandation est levée le [17] par l'ANSM et l'Institut national du cancer (INCa) qui déclarent que les investigations « ne montrent pas d’augmentation de la fréquence des effets indésirables graves et des décès liés à cette molécule ».
Divers
Le docétaxel fait partie de la liste des médicaments essentiels de l'Organisation mondiale de la santé (liste mise à jour en )[18].
Bibliographie
- Muriel Le Roux, Navelbine® and Taxotère® : histories of sciences, (ISBN 978-0-08-101137-9 et 0-08-101137-7, OCLC 964620092, lire en ligne)
Notes et références
- Masse molaire calculée d’après « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- Pierre Avenas, « A propos du TAXOTERE », L'actualité chimique, no 459, (lire en ligne)
- « Les brevets, « trésor de guerre » du CNRS », Le Monde.fr, (lire en ligne, consulté le )
- « Médicaments : la France tente d'innover », sur Les Echos, (consulté le )
- « La recherche française reste au meilleur niveau mondial », sur L'Opinion, (consulté le )
- (en) « French research revamps its relationships with business », sur Science|Business (consulté le )
- Marc Mennessier, « Brevets : le CNRS bien placé aux États-Unis », sur LEFIGARO, (consulté le )
- (en) M. Martin, T. Pienkowski, J. Mackey et al., « Adjuvant docetaxel for node-positive breast cancer », N. Engl. J. Med., vol. 352, , p. 2302-13 (lire en ligne)
- (en) M. Martín, M.A. Seguí, A. Antón et al., « Adjuvant docetaxel for high-risk, node-negative breast cancer », N. Engl. J. Med., vol. 363, , p. 2200-10 (lire en ligne)
- franceinfo, « Le générique d'un traitement du cancer du sein mis en cause dans 5 décès », sur francetvinfo.fr, (consulté le ).
- « Docetaxel - Cas d’entérocolites d’issue fatale - Lettre aux professionnels de santé », sur ANSM.fr,
- Anne Jouan, « Générique anticancéreux: au moins sept morts en France », Le Figaro.fr, (lire en ligne)
- Paul Benkimoun, Juliette Garnier et Pascale Santi, « Traitement du cancer du sein : enquête sur le docétaxel après plusieurs décès », Le Monde, (lire en ligne)
- http://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/afficheGroupeGene.php?idGrp=1335
- http://base-donnees-publique.medicaments.gouv.fr/index.php#result
- « Docétaxel - cas d’entérocolites d’issue fatale : l’INCa en lien avec l’ANSM recommande à titre de précaution d’éviter temporairement l’utilisation du docetaxel dans les cancers du sein localisés, opérables - Point d'Information - ANSM : Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé », sur ansm.sante.fr (consulté le )
- « Cancers du sein : le docétaxel à nouveau autorisé », Le Monde.fr, (ISSN 1950-6244, lire en ligne, consulté le )
- WHO Model List of Essential Medicines, 18th list, avril 2013
Liens externes
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