Tomasz Mackiewicz

Tomasz Mackiewicz, dit « Tomek[n 1] », né le à Działoszyn, est un alpiniste polonais. Sept fois il tente d'escalader le Nanga Parbat (8 125 m) qui l’obsède, avant d'y trouver la mort après avoir réussi à atteindre le sommet avec Élisabeth Revol. Il est porté disparu le sur cette montagne, surnommée la « montagne tueuse », lors d'une descente dans des conditions extrêmes.

Tomasz Mackiewicz

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Biographie
Nationalité Pologne
Naissance 13 janvier 1975,
Działoszyn
Décès c. 26 janvier 2018 (43 ans),
Nanga Parbat
Carrière
Disciplines alpinisme, himalayisme
Compagnons de cordée Marek Klonowski, Élisabeth Revol
Ascensions notables traversée du mont Logan, ascension du Khan Tengri en solitaire, première ascension du Nanga Parbat en style alpin en hiver

Biographie

Il passe son enfance dans la banlieue de Czestochowa[2]. C'est à l'université qu'il découvre l'alpinisme. Un temps drogué à l'héroïne, il se désintoxique après plusieurs cures et divers voyages[2] : après être passé pas loin de l'overdose, c'est à ce moment qu'il découvre l'Himalaya[3] durant un voyage en Inde[1].

Il découvre l'escalade avec Marek Klonowski. Sa carrière, et sa petite notoriété[2], débute réellement en 2008. Tomasz Mackiewicz reçoit alors le prix Colossi de l'exploit de l'année avec Marek Klonowski pour une traversée étendue du mont Logan[3] durant une quarantaine de jours. L'année suivante, il gravit le Khan Tengri (7 010 m) au Kazakhstan, en solo[3]. Il vit un temps en Irlande. Atypique, il s'entraîne peu, se soucie sommairement des préparatifs des expéditions, fume durant des années, s'occupe peu de la météo pour ses ascensions et reste solitaire durant celles-ci, ne donnant jamais de nouvelles à ses proches[4].

Il découvre le Nanga Parbat, neuvième plus haut sommet du monde, en 2010 et décide de monter une expédition l'année suivante[3]. Après plusieurs tentatives avec Marek Klonowski[n 2] d'atteindre le sommet du Nanga Parbat en hiver, il essaye de nouveau en avec la Française Élisabeth Revol par la voie Messner 2000. Ils se sont rencontrés à Chilas au Pakistan, pays où il a un statut de « vedette »[5]. « On formait un vrai binôme. En termes d'endurance, il était plus lent que moi, mais comme il était plus costaud, il pouvait porter des sacs plus lourds », c'est « un tracteur, un diesel » qui « aime marcher seul » ou en retrait explique t-elle[2],[6]. Bien que robuste, il grimpe au mental plus qu'avec une grande préparation physique[7]. Dès leur première rencontre, il se créé une « alchimie », et bien que tous deux très différents en tous points, au cours des années ils établissent « un lien très fort » : « notre cordée est fusionnelle » ou « compagnon de cordée idéal » précise Revol[8].

Il faut théoriquement « 3000 » de corde pour faire ce sommet mais eux montent en « style alpin », donc sans corde fixe[2] ni porteur. Tomek frôle la mort, tombant dans une crevasse sur 40 à 50 m[9]. Le , ils atteignent l'altitude de 7 800 mètres mais la météo les contraint[10] : ils doivent renoncer et retourner au camp de base[11]. Mais la descente est compliquée, sans rien à boire ni manger ; ils rejoignent finalement la tente de Daniele Nardi (it) montée au camp 1, avant de repartir[12]. Tomek rentre avec des gelures aux pieds[13]. L'année suivante en février, le sommet est vaincu par l'équipe de Simone Moro[n 3], mais si cela ne décourage pas Tomasz Mackiewicz[2], ça le rend « amer, aigri » depuis, voir parfois dépressif[14]. Le duo y retourne cette année là, mais doit de nouveau faire demi-tour à 7 500 m par des températures de - 50°[10].

Élisabeth Revol et Tomasz Mackiewicz tentent de nouveau d'atteindre le sommet du Nanga Parbat en . C'est la septième tentative du Polonais sur ce sommet et la quatrième pour la Française après trois échecs[5].

Élisabeth Revol dit de lui qu'il « croquait la vie à pleine dent […], était toujours dans une espèce de rêve, […] habité par la spiritualité, qui l'emmenait très loin », nourri de culture hindouiste[5] qu'il a découvert lors d'un voyage en Inde. Tomasz Mackiewicz, sans grand palmarès mais considéré comme un puriste de l'escalade[2], a une « fascination mystique » pour ce sommet : il croit qu'une divinité, Fairy, habite sur le Nanga et qu'elle lui parle dans ses rêves[3], mais aussi qu'elle guide les éléments sur cette montagne[5],[15]. « Quand il avait un doute, il s'isolait en me disant « Je vais parler à Fairy » explique Revol[2]. Il précise que cette relation avec la divinité est fréquente, lors l'ascension de 2015 comme celle de 2016 où il trouve une échappatoire lors d'un passage difficile[16].

La presse parle de « communion » avec le Nanga Parbat[5] ou d'une obsession[3],[2]. « Cette montagne ne me laissera jamais tranquille », dit-il avant sa septième tentative, mais il explique s'y sentir « un peu comme à la maison » souligne Revol[17],[3]. Au-delà de l'exploit sportif, cette expédition reste de l'ordre du développement spirituel à tel point que Revol écrit : « Tom marchait et montait vers Fairy »[18]. « Bien sûr que c'est une légende, et vous pouvez penser que je suis folle, mais je crois que cet esprit était quelque part amoureuse de lui et voulait le garder à jamais. La créature a fait beaucoup de mal à Élisabeth, qui a failli mourir, mais elle a survécu car ce n'est pas elle qu'elle voulait mais lui », confia Anna[19].

Dernière tentative

À 8 036 m alors que la nuit va tomber, tout va bien et ils décident de continuer même s'il fait froid[20]. Le 25 janvier vers 18 h, après avoir réussi la seconde ascension hivernale du Nanga Parbat[3],[n 4], ils se retrouvent en difficulté au sommet, Tomasz Mackiewicz voyant flou[21] : « Éli, je ne vois plus ta frontale, je te voie floue[22] ! »

Du sommet (8 125 m), Tomasz Mackiewicz aidé par Revol parvient à descendre, difficilement. Il a le visage totalement givré[23]. Il présente des symptômes d'œdème pulmonaire, avec du sang qui coule de la bouche, et d'œdème cérébral. À 7 282 mètres, ils passent une partie de la nuit abrité du vent dans une crevasse. « Son nez devenait blanc et puis après les mains, les pieds » décrit Revol[2], et il saigne toujours[24]. Le lendemain, l'équipe de secours lui donne l’ordre de descendre afin d’avoir une chance de récupérer Tomasz en hélicoptère. Elle doit se résoudre à laisser son compagnon et atteindre l’altitude plus basse demandée par les secours[21]. Elle est secourue bien plus bas par deux alpinistes polonais, Denis Urubko et Adam Bielecki, qui réalisaient une tentative sur le K2[25] et qui ont été déposés par hélicoptère sous le camp 1 du Nanga Parbat avant de réaliser une ascension afin de la retrouver[21]. Les « conditions météorologiques et l’altitude mettraient la vie des sauveteurs dans un danger extrême » et l'équipe de sauveteurs ne peut tenter le sauvetage de Tomasz Mackiewicz[26] et redescend au camp de base[21].

Vie privée

Tomasz Mackiewic est marié à Joana avec qui il a deux enfants Tonia et Max[1]. Il divorce et vit avec Anna Solska, sa nouvelle compagne, qu'il a rencontrée en Pologne[17] et a un enfant, Zoïa[27]. Ils sont âgés de 7, 8 et 9 ans au moment de sa mort. Le surplus des fonds récoltés pour le sauvetage leur est reversé[28],[29].

Notes et références

Notes

  1. Il est également surnommé « Czapkins Life », Czapkins en polonais se traduisant par « Casquette », accessoire qu'il a toujours sur lui[1].
  2. Il fera quatre tentatives avec Marek Klonowski.
  3. Il se fâche d'ailleurs publiquement avec Simone Moro au camp de base du Nanga Parbat en 2016.
  4. La première est avec l'Italien Simone Moro, le Pakistanais Muhammad Ali Sadpara et l'Espagnol Alex Txikon en février 2016.

Références

  1. Revol, p. 74.
  2. « Himalaya : Tomasz Mackiewicz, ou l'obsession du Nanga Parbat », sur lepoint.fr,
  3. « Le Nanga Parbat, Tomasz Mackiewicz en était obsédé », sur lequipe.fr,
  4. Revol, p. 77 à 79.
  5. Émilie Brouze et Bérénice Rocfort-Giovanni, « Élisabeth Revol : Naufragée des cimes », L'Obs, no 2815, , p. 48 à 52 (ISSN 0029-4713)
  6. Revol, p. 19 puis 23.
  7. Revol, p. 76.
  8. Revol, p. 75 à 76 puis 83.
  9. Revol, p. 41 puis 81.
  10. Revol, p. 35.
  11. (en) « Nanga Parbat in winter, Tomasz Mackiewicz and Elisabeth Revol return to Base Camp after reaching 7800m », sur planetmountain.com, .
  12. Revol, p. 163.
  13. Revol, p. 17.
  14. Revol, p. 29 à 30.
  15. Revol, p. 80.
  16. Revol, p. 81.
  17. Revol, p. 75.
  18. Revol, p. 75 puis 81 à 82.
  19. Brouze et Rocfort-Giovanni, L'hiver en himalaya., Paris, Glénat, , 165 p. (ISBN 978-2-344-03832-1), p. 29
  20. Revol, p. 30 à 32.
  21. François Carrel, « Himalaya : le terrible sauvetage d’Elisabeth Revol », sur liberation.fr, .
  22. Revol, p. 39.
  23. Revol, p. 42.
  24. Revol, p. 69.
  25. « Elisabeth Revol retrouvée sur un sommet de l’Himalaya par des alpinistes polonais », sur lemonde.fr, .
  26. « Pourquoi Mackiewicz n'a-t-il pas été sauvé? Il y a un rapport officiel », sur dorzeczy.pl,
  27. (en) Marcin Goettig, « Polish team rescues French climber from Pakistan's 'Killer Mountain' », sur reuters.com, .
  28. Sauvetage dans l'Himalaya: La Pologne et la France couvrent les frais des secours, les fonds récoltés iront aux enfants de l'alpiniste décédé, 20 Minutes, 3 février 2018.
  29. Romain Baheux, Himalaya : appel aux dons pour l’alpiniste polonais disparu avec Elisabeth Revol, Le Parisien, 29 janvier 2018.

Voir aussi

Bibliographie

  • (pl) Mariusz Sepiolo, Nanga Dream, 2018, éditions Znak, 300 p. (ISBN 978-8324055432)
  • Élisabeth Revol, Vivre : Ma tragédie au Nanga Parbat, Paris, Arthaud, , 232 p. (ISBN 978-2-08-147909-8). 

Article connexe

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