Translocase ATP/ADP

La translocase ATP/ADP, ou ATP-ADP translocase, ou encore translocateur de nucléotides à adénine est un transporteur membranaire permettant à l'ATP et à l'ADP de traverser la membrane mitochondriale interne. Il s'agit d'une protéine membranaire intégrale qui intervient dans la respiration cellulaire en permettant à l'ATP produit dans la matrice mitochondriale de gagner le cytoplasme, tandis que l'ADP prend le chemin inverse, afin de pouvoir être phosphorylé en ATP par l'ATP synthase dans la matrice mitochondriale à l'issue du processus de phosphorylation oxydative. Plus de 10 % des protéines de la membrane interne des mitochondries sont des translocases ATP/ADP, ce qui en fait la protéine la plus nombreuse abondante dans ce milieu[2],[3].

(en) Représentation d'une translocase ATP/ADP dans la membrane mitochondriale interne (PDB 1OKC[4]).

Translocase ATP/ADP 1
Caractéristiques générales
Nom approuvé Solute Carrier Family 25 Member 4
Symbole SLC25A4
Homo sapiens
Locus 4q35.1
Masse moléculaire 33 064 Da[1]
Nombre de résidus 298 acides aminés[1]
Liens accessibles depuis GeneCards et HUGO.
Translocase ATP/ADP 2
Caractéristiques générales
Nom approuvé Solute Carrier Family 25 Member 5
Symbole SLC25A5
Homo sapiens
Locus Xq24
Masse moléculaire 32 852 Da[1]
Nombre de résidus 298 acides aminés[1]
Liens accessibles depuis GeneCards et HUGO.

On a longtemps pensé qu'elle fonctionnait de manière asymétrique comme un dimère de sous-unités identiques procédant à l'échange de l'ADP contre l'ATP à travers la membrane mitochondriale interne. L'étude de la structure tridimensionnelle de cette protéine a cependant révélé qu'il s'agit d'un monomère[4], et ce aussi bien dans les détergents[5] que dans les membranes elles-mêmes[6],[7].

Structure et fonctionnement

Chez l'homme, l'ATP-ADP translocase est une protéine de 297 résidus d'acides aminés pour une masse d'environ 30 kDa[8]. Elle contient six hélices α transmembranaires formant un tonneau à cavité conique accessible depuis l'extérieur, où se lie le substrat. Le site de liaison, conservé dans la plupart des isoformes, est constitué essentiellement de résidus basiques qui se lient fortement à l'ATP ou à l'ADP et a un diamètre de 2 nm et une profondeur de 3 nm[4]. En particulier, on a pu montrer que les résidus de lysine 38 et d'arginine 96, 204, 252, 253 et 294 sont essentiels à l'activité de transport de cette protéine[9].

L'ATP et l'ADP sont des molécules électriquement chargées qui ne peuvent normalement pas franchir la bicouche lipidique de la membrane mitochondriale interne, mais la translocase ATP/ADP fonctionne comme un antiport qui permet d'échanger une molécule d'ADP de l'espace intermembranaire mitochondrial contre une molécule d'ATP de la matrice mitochondriale. La cavité de cette protéine fait alternativement face au côté cytoplasmique et au côté matriciel de la membrane interne de la mitochondrie. L'ADP de l'espace intermembranaire se lie à la translocase et induit dans cette protéine un changement conformationnel qui libère l'ADP côté matriciel ; l'ATP de la matrice mitochondriale peut alors se lier à cette cavité, ce qui induit un changement conformationnel réciproque, plaçant l'ouverture de la cavité vers l'espace intermembranaire, dans lequel l'ATP peut librement diffuser et gagner le cytoplasme, ce qui a pour effet de rétablir l'état d'origine de la translocase, prête pour un nouveau cycle de translocations.

L'ATP et l'ADP sont les seuls nucléotides naturels reconnus par cette translocase[4].

Le processus net peut être représenté par l'équation :

ADP3−cytoplasme + ATP4−matriceADP3−matrice + ATP4−cytoplasme.

Ce processus d'échange d'ATP et d'ADP par la translocase est coûteux en énergie : on estime qu'environ le quart de l'énergie libérée par la chaîne respiratoire de la respiration aérobie est utilisé pour régénérer le potentiel de membrane dissipé par la translocase ATP/ADP.

Rôle dans la cellule

L'ATP est utilisé dans le cytoplasme, où il est hydrolysé en ADP et phosphate, pour rendre thermodynamiquement favorables divers processus consommateurs d'énergie tels que les biosynthèses, la locomotion, ou encore le transport actif d'espèces chimiques à travers des membranes. L'ADP, quant à lui, est phosphorylé en ATP dans les mitochondries dans le cadre de la phosphorylation oxydative.

L'ATP est donc converti en ADP dans le cytoplasme mais est régénéré dans les mitochondries : il est donc nécessaire de permettre à l'ADP cytoplasmique d'entrer dans la matrice mitochondriale pour y redonner de l'ATP, et à l'ATP de sortir de la matrice mitochondriale pour rejoindre le cytoplasme où il sera utilisé en redonnant de l'ADP. Ainsi, l'homme régénère ainsi quotidiennement une masse d'ATP équivalente à son propre poids, qui transite donc intégralement par la translocase ATP/ADP de ses cellules pour permettre au métabolisme cellulaire de se poursuivre[4].

Notes et références

  1. Les valeurs de la masse et du nombre de résidus indiquées ici sont celles du précurseur protéique issu de la traduction du gène, avant modifications post-traductionnelles, et peuvent différer significativement des valeurs correspondantes pour la protéine fonctionnelle.
  2. (en) Jyrki Kaukonen, Jukka K. Juselius, Valeria Tiranti, Aija Kyttälä, Massimo Zeviani, Giacomo P. Comi, Sirkka Keränen, Leena Peltonen et Anu Suomalainen, « Role of adenine nucleotide translocator 1 in mtDNA maintenance », Science, vol. 289, no 5480, , p. 782-785 (PMID 10926541, DOI 10.1126/science.289.5480.782, lire en ligne)
  3. (en) Gerard Brandolin, Yves Dupont et Pierre V. Vignais, « Substrate-induced modifications of the intrinsic fluorescence of the isolated adenine nucleotide carrier protein: demonstration of distinct conformational states », Biochemistry, vol. 24, no 8, , p. 1991-1997 (PMID 2990548, DOI 10.1021/bi00329a029, lire en ligne)
  4. (en) Eva Pebay-Peyroula, Cécile Dahout-Gonzalez, Richard Kahn, Véronique Trézéguet, Guy J.-M. Lauquin et Gérard Brandolin, « Structure of mitochondrial ADP/ATP carrier in complex with carboxyatractyloside », Nature, vol. 426, no 6962, , p. 39-44 (PMID 14603310, DOI 10.1038/nature02056, Bibcode 2003Natur.426...39P, lire en ligne)
  5. (en) Lisa Bamber, Dirk-Jan Slotboom et Edmund R.S. Kunji, « Yeast Mitochondrial ADP/ATP Carriers Are Monomeric in Detergents as Demonstrated by Differential Affinity Purification », Journal of Molecular Biology, vol. 371, no 2, , p. 388-395 (PMID 17572439, DOI 10.1016/j.jmb.2007.05.072, lire en ligne)
  6. (en) Lisa Bamber, Marilyn Harding, Magnus Monné, Dirk-Jan Slotboom et Edmund R. S. Kunji, « The yeast mitochondrial ADP/ATP carrier functions as a monomer in mitochondrial membranes », Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America, vol. 104, no 26, , p. 10830-10834 (PMID 17566106, PMCID 1891095, DOI 10.1073/pnas.0703969104, lire en ligne)
  7. (en) Edmund R.S. Kunji et Paul G. Crichton, « Mitochondrial carriers function as monomers », Biochimica et Biophysica Acta (BBA) - Bioenergetics, vol. 1797, nos 6-7, , p. 817-831 (PMID 20362544, DOI 10.1016/j.bbabio.2010.03.023, lire en ligne)
  8. (en) R. Battini, S. Ferrari, L. Kaczmarek, B. Calabretta, S. T. Chen et R. Baserga, « Molecular cloning of a cDNA for a human ADP/ATP carrier which is growth-regulated », Journal of Biological Chemistry, vol. 262, no 9, , p. 4355-4359 (PMID 3031073, www.jbc.org/content/262/9/4355.full.pdf)
  9. (en) David R. Nelson, Janet E. Lawson, Martin Klingenberg et Michael G. Douglas, « Site-directed Mutagenesis of the Yeast Mitochondrial ADP/ATP Translocator: Six Arginines and One Lysine are Essential », Journal of Molecular Biology, vol. 230, no 4, , p. 1159-1170 (PMID 8487299, DOI 10.1006/jmbi.1993.1233, lire en ligne)

Voir aussi

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