Bombardier TVR
Le TVR, abréviation de Transport sur voie réservée, aussi connu sous son appellation anglophone GLT pour Guided light transit, est le nom d'un concept de trolleybus bi-articulé à guidage mécanique par rail central, et de l'infrastructure associée, présentés en 1985 par le constructeur belge La Brugeoise et Nivelles, alors filiale à 97 % de Bombardier Transport. La production du TVR a été stoppée de facto en 2002, faute de commandes.
Pour les articles homonymes, voir TVR.
Transport sur voie réservée | |
TVR du réseau de Nancy. | |
Appelé aussi | Guided light transit |
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Marque | La Brugeoise et Nivelles ANF Industrie Bombardier Transport |
Années de production | 1985 - 2002 |
Production | 49 exemplaire(s) |
Classe | Trolleybus guidé |
Usine(s) d’assemblage | Bruges Crespin |
Moteur et transmission | |
Énergie | Électricité Diesel |
Moteur(s) | Asynchrones Alstom à convertisseurs triphasés à IGBT |
Puissance maximale | 300 kW |
Poids et performances | |
Poids à vide | 25 500 kg |
Châssis - Carrosserie | |
Carrosserie(s) | Trolleybus bi-articulé |
Dimensions | |
Longueur | 24 480 mm |
Largeur | 2 500 mm |
Hauteur | 3 220 mm |
Seules deux villes s'en sont dotées : Caen (de 2002 à 2017) et Nancy (depuis 2000), désigné comme tramway sur pneus.
Histoire
La Brugeoise et Nivelles souhaitait proposer aux villes de taille moyenne un véhicule intermédiaire entre le bus et le tramway, moins coûteux (-40 % annoncés alors) que ce dernier mais offrant une grande capacité. Les deux premiers prototypes ont été présentés en 1985, sur une voie d'essais spécialement construite à proximité du Parc des expositions de Bruxelles[1].
Deux autres prototypes sont essayés à compter de 1987 et durant une dizaine d'années entre Jemelle et Han-sur-Lesse[2]. Le parcours inclut une piste d'essais construite sur l'ancienne ligne 150 de la SNCB entre Jemelle et Rochefort[3], et une section non guidée et non électrifiée sur chaussée banalisée entre Rochefort et Han-sur-Lesse.
Le 24 juillet 1994, Caen devient le premier réseau à choisir le TVR, en attribuant le marché de son TCSP à la Société concessionnaire du Transport sur voie réservée (STVR)[4], un groupement détenu à 68 % par Spie-Batignolles et à 32 % par Bombardier Transport et ANF Industrie[5],[6]. Le Syndicat mixte des transports en commun de l'agglomération caennaise espérait une mise en service en 1998.
Fin 1996, ANF Industrie sort un prototype reprenant les spécifications du réseau de Caen, qui sera essayé à Jemelle.
En 1997, les pouvoirs publics, les principaux opérateurs de transport dont la RATP et les industriels fondent le GIE du site d'expérimentation du Trans-Val-de-Marne[7]. Le but de ce GIE est d'essayer les nouveaux modes de transport « intermédiaires » sur le site propre du Trans-Val-de-Marne[8], opéré par la RATP au sud de Paris. Dans ce cadre, ANF Industrie construira et essaiera en 1998 un TVR aux couleurs de la RATP[9]. Dans le cadre du GIE du Trans-Val-de-Marne seront également essayés un Translohr et un Civis.
Le 6 février 1998, le Grand Nancy choisit à son tour le TVR pour son TCSP[10]. Il sera inauguré en 2000, deux ans avant celui de Caen.
Caractéristiques
Guidage
Le TVR est guidé par un rail central encastré dans la chaussée, sur lequel reposent deux galets de guidage par essieu. La principale caractéristique réside dans le fait que les galets sont escamotables, permettant au TVR de quitter son rail de guidage pour se conduire comme un (trolley)bus. Cette opération, appelée « dédropage », peut se faire à n'importe quel endroit : il suffit au conducteur de relever les galets pour libérer le véhicule du rail et reprendre la main sur la direction. La manœuvre inverse n'est possible que moyennant la présence d'un équipement spécial dans la chaussée : une zone de « dropage » qui se présente comme une sorte d'entonnoir qui replace un à un les galets sur le rail de guidage.
Les galets de guidage du TVR ne doivent pas être confondus avec ceux de Translohr. Le Translohr ne peut ni quitter son rail de guidage, ni circuler en mode routier.
- Schéma d'un galet de guidage de TVR
- Schéma d'un galet de guidage de Translohr
Ces galets exercent une pression de 750 kilogrammes sur le rail, ce qui engendre plusieurs conséquences :
- les rails et les galets sont très sollicités, et montrent des signes d'usure,
- la forte pression exercée sur le rail par les galets produit un délestage du poids du TVR (2 250 kg) qui peut avoir une influence négative sur la motricité en cas de mauvaise adhérence (chaussée mouillée par exemple) ; c’est pour cette raison que le guidage n’a pas été adopté dans la montée de Brabois à Nancy (13 %),
- un objet inséré dans la goulotte du rail, tel un boulon, un caillou, entraîne une sortie du rail de guidage, la roue avant du guide montant sur l’objet, même s’il est écrasé. Les détritus, cailloux, boulons, etc sont un problème majeur des systèmes guidés à rail unique TVR et Translohr qui ont une voie réservée mais avec des sections partagées avec les piétons, les voitures de service.
A l’inverse, cette pression est insuffisante pour éviter l’échappement du premier galet si un virage est abordé trop vite. A la suite de plusieurs sorties de voie, la vitesse en virage a dû être limitée au pas.
Les deux lignes de TVR du réseau de Caen étaient entièrement exploitées en mode guidé (à l'exception des trajets entre le dépôt et les terminus). A Nancy, face à des contraintes techniques (requalification de la place du Vélodrome), financières et politiques (refus de la commune de Saint-Max de voir des rails dans sa rue principale), seulement 60 % de la ligne est guidée. Les deux terminus, qui nécessitent un retournement du TVR car celui-ci est unidirectionnel, sont équipés de rails, ce qui permet également un ajustement parfait par rapport au quai dans des stations très fréquentées. Le terminus de Vandœuvre, qui dessert conjointement la faculté de médecine, l'INPL et le CHU, n'a été équipé que très tardivement, à la demande des conducteurs.
- Zone de « dropage » à Nancy, avec à l'arrière plan un TVR en mode non-guidé.
- TVR en mode non-guidé à Nancy
Motorisation
Les TVR sont des véhicules bimodes embarquant une motorisation électrique et une motorisation thermique. Dans le premier cas, le moteur développe une puissance de 300 kW, alors que dans le second cas la puissance est limitée à 200 kW. Cela permet à un véhicule de quitter la voie en cas d'incident (en mode non guidé/diesel). L'accès au dépôt est également facilité, puisque le TVR peut y accéder de façon autonome. Enfin, en cas d'affluence massive, il est possible d'envoyer des rames supplémentaires du dépôt vers les terminus, où elles peuvent s'insérer sans problèmes dans le flux pour répondre à la demande.
La propulsion électrique peut être alimentée par deux systèmes qui ne sont pas compatibles : un pantographe ou des perches. Caen a opté pour l'alimentation par pantographe (comme un tramway sur fer). Ce choix est possible car le retour du courant des moteurs est assuré par le rail central (le TVR étant guidé sur la totalité de son parcours). Nancy utilise quant à elle des perches (qui nécessitent deux câbles d'alimentation). Ici, le retour de courant est assuré par le deuxième fil comme pour un trolleybus. Ce système a été utilisé par Nancy car la ligne comprend une partie de son parcours sans rail de guidage central donc sans possibilité de renvoyer. De plus, la Communauté Urbaine souhaitait réutiliser dans la mesure du possible les anciennes installations électriques construites moins de 20 ans plus tôt pour les trolleybus.
- Captage par perches sur la dernière caisse et installations de type trolleybus à Nancy.
- TVR de Caen, équipé d'un pantographe sur la caisse centrale.
Dimensions
Principales caractéristiques techniques[11] :
- Longueur : 24,5 m
- Largeur : 2,5 m
- Hauteur : 3,22 m
- Masse à vide : 26,9 t
- Vitesse maximale : 70 km/h
- Chaîne de traction électrique : Alstom ; moteurs asynchrones + convertisseurs triphasés à IGBT
- Puissance continue aux arbres des moteurs : 300 kW
- Puissance du groupe diésel-électrique : 200 kW
- Capacité de transport : 40 places assises, 103 à 138 places debout[alpha 1]
Le TVR présente une grande flexibilité d'utilisation commerciale : il peut circuler en mode guidé ou en mode conduit, comme un bus[alpha 2], aussi bien en traction électrique qu'en autonomie (mode diésel-électrique).
La désignation « TVR »
La marque commerciale « TVR » a été déposée en France à l'INPI par ANF Industrie le 15 juillet 1994[12].
Cependant, la Direction de Bombardier, qui a acquis ANF Industrie en 1989, indique, le 20 juin 2007[réf. souhaitée] : « Après quelque rapides investigations, voici les réponses à vos questions : ni “TVR”, ni TLG, ni “Transport sur voie Réservée” ne sont des marques déposées de Bombardier. TVR est une marque automobile britannique. Le nom TVR a été utilisé par la ville de Caen pour faire la promotion pour son projet, mais jamais par Bombardier. ANF-Industrie est une entreprise française qui a été rachetée par Bombardier en 1988. Son nom n’est plus utilisé aujourd’hui. L’entité juridique en France a pour nom “Bombardier Transport France - SAS “. »
Nancy désignait initialement son projet avec le signe TPGN, pour Tramway sur pneus du Grand Nancy[13]. Caen utilisait le signe « TVR » pour désigner son projet.
Les certificats d’immatriculation désignaient « TVR » comme type commercial des véhicules caennais, tandis que les véhicules nancéiens sont désignés comme « TPGN ».
Avenir
La production du TVR s'est arrêtée de facto en 2002 après la livraison du dernier véhicule destiné à Caen. Bombardier a retiré le TVR de son catalogue en 2006[14]. Entre 1985 et 1995, le TVR a coûté 100 millions de francs en recherche et développement[15].
En novembre 2010, un rapport du Conseil général de l'environnement et du développement durable réalisé en juillet de la même année[16] est rendu public. Il porte un regard critique sur le choix du TVR, encouragé à l'époque par l'État, et préconise le remplacement du système de transport actuel à partir de 2019-2020[17]. À Caen, Viacités, le syndicat mixte des transports de l'agglomération, a officiellement voté le 14 décembre 2011 le remplacement du TVR par un tramway ferré[18]. Ce choix a été confirmé en 2014 puis début 2016[19]. Le TVR a définitivement cessé de circuler à Caen le 31 décembre 2017, la moitié des rames étant transférées à Nancy pour servir de pièces détachées[20].
À Nancy, la rénovation des rames a été décidée en 2013. Un marché de sept millions d'euros (comprenant aussi la prolongation de leur durée de vie) est attribué à la société Arterail afin de rénover l'intérieur et l'extérieur des rames en circulation, pour leur permettre de circuler une dizaine d'années supplémentaires[21].
Aucun des deux réseaux n'aura fait circuler le TVR pendant 30 ans, contrairement aux promesses du constructeur.
Incidents
Les TVR de Caen et Nancy ont subi plusieurs incidents.
Au cours des dix premières années d'exploitation, le journal Ouest France avait dénombré 22 « déguidages » pour le seul réseau de Caen[22]. En 2010, un rapport faisait état d'un taux de panne 32 fois supérieur à la normale.
Les TVR de Nancy sont mis en exploitation commerciale le 12 février 2001 avec plus de deux mois de retard, notamment à cause de courts-circuits[23]. Deux déguidages en mars 2001 conduisent la Préfecture à suspendre l'exploitation du TVR durant un an[24]. Les TVR nancéiens déguideront à nouveau deux fois en novembre 2002, puis en 2004, en 2005, en 2008, en 2009, en 2011 et en 2019. Ces incidents sont dus à la fois à l'usure prématurée des galets de guidage (qui subissent notamment des chocs anormaux en raison de la faible garde au sol des véhicules)[25], à l'usure du rail, à la chaleur ayant fait fondre le bitume autour du rail de guidage[26], à des obstacles sur la voie[27], mais à aussi une erreur de conduite[28]. Trois véhicules subiront des incendies : un en 2015[29] et deux en 2017[30],[31].
Dans la matinée du 28 septembre 2021 à hauteur de la station Exelmans située avenue du Général Leclerc en direction de Vandœuvre CHU Brabois, un véhicule est victime d’une rupture inter-caisse conduisant à un détachement de la caisse centrale du véhicule [32].
Moins de 2 mois suivant cet accident, le 3 novembre 2021, après qu’un départ de feu endommage une rame en début de matinée, en début de soirée une seconde subit elle aussi une rupture inter-caisse conduisant au détachement de la dernière caisse au niveau de la station Saint-Andrée en direction d’Essey-les-Nancy [33].
Ces incidents successifs ont conduit à un arrêt de service immédiat le 3 novembre 2021 au soir. Les rames sont renvoyées au dépôt pour un contrôle technique. Depuis le 4 novembre seules quelques rames circulent, les autres nécessitant un contrôle approfondi. De plus, seule une portion réduite de la ligne est desservie par le TVR (entre Essey Mouzimpré et Vélodrome ou Montet-Octroi selon la direction). La desserte de la section restante étant assurée par la ligne « T1 bus » entre vélodrome et Vandœuvre CHU Brabois. La situation devrait rentrer dans l’ordre courant 2022 avant l’arrêt définitif du TVR en 2023 et de son remplacement par une ligne de trolleybus avec pour objectif une mise en service des nouveaux véhicules en avril 2024 [34].
Législation et usage du terme « tramway »
Réglementairement, le TVR est un autobus à traction électrique. Les véhicules sont donc immatriculés dans le régime général des immatriculations dans la catégorie Transport en commun de personnes et soumis à la réglementation routière. Contrairement aux tramways, ils ont une longueur limitée à 24,50 mètres, sont obligatoirement équipés de clignotants et de rétroviseurs extérieurs et doivent passer un contrôle technique automobile tous les six mois. Le poste de conduite est également équipé d'un volant de direction pour la circulation hors rail de guidage, équipement absent dans les tramways. Néanmoins, les voies de circulation des TVR tant à Nancy qu'à Caen sont ou étaient signalées par des panneaux réservés aux tramways.
Les trois lignes de TVR (deux à Caen et une à Nancy) sont également exploitées sous l'appellation « tramway » auprès du grand public par les autorités organisatrices et les opérateurs, bien que l'usage de ce terme soit techniquement inapproprié.
Notes et sources
Notes
- Le nombre de places exact est variable en fonction de l'aménagement intérieur ; les chiffres sont donnés pour les TVR du réseau de Nancy dans leur configuration d'origine.
- certains utilisent le terme de Mégabus, en référence au nom commercial des autobus bi-articulés Heuliez GX237
Références
- Michel REPS, GLT, (lire en ligne)
- « GLT - Guided Light Transit », sur rail.lu (consulté le )
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- « S.T.V.R.-SOCIETE CONCESSIONNAIRE DU TRANSPORT SUR VOIE RESERVEE DE L'AGGLOMERATION CAENNAISE (COURBEVOIE) Chiffre d'affaires, résultat, bilans sur SOCIETE.COM - 397857251 », sur www.societe.com (consulté le )
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- « Le tramway sur pneus fera ses armes en Ile-de-France », sur Les Echos, (consulté le )
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- Matthieu Écoiffier, « Qui est pour le tram sur pneus à Caen?Les habitants votent dimanche mais les rames sont déjà commandées. », sur Libération.fr, (consulté le )
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- Cyberpresse - Tramways : Bombardier égratigné en France, article du 23 novembre 2010
- Ouest-France, édition de Caen du 15 septembre 2011 [lire en ligne]
- Caen dévoile son nouveau tramway transporturbain.canalblog.com, le 5 février 2016
- Marie Mangane, « Les rames de l’ancien tramway quittent Caen pour rejoindre Nancy », Liberté. Bonhomme libre, (lire en ligne)
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Voir aussi
Articles connexes
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