Vudhavi Karangal
Vudhavi Karangal Samuganala Thodar Kalvi Iyakam[1] (en français Aide pour la Cause Sociale et l’Éducation Continue) est une ONG indienne fondée en 1991 par des étudiants pondichériens pour venir en aide aux enfants défavorisés du territoire de Pondichéry.
Vudhavi Karangal est une école de vie humaine qui prépare les enfants à devenir des citoyens honnêtes, autonomes et responsables. C’est aussi une vraie famille dont les membres sont toujours volontaires pour s’entraider. L'association héberge plus de 300 enfants.
L'ONG est tenue par Alice Thomas et son mari Maran Venance.
Histoire
Le contexte de la création
Dans les années 1989 et 1990 le Mouvement pour l’alphabétisation (Arivoliyakkam en tamoul) à Pondichéry développe un projet de forum scientifique subventionné par le gouvernement de Pondichéry.
Le territoire est récompensé pour ses efforts en faveur de l’alphabétisation et obtient une prestigieuse récompense de l’ONU à ce titre.
Constatant néanmoins l’absence d’action soutenue en faveur de l’alphabétisation, des étudiants bénévoles réalisent qu’il est nécessaire d’instruire les habitants de la rue ainsi que les enfants démunis ayant quitté l’école très tôt – ou qui n’ont jamais eu l’occasion d’y aller- pour mendier.
Les débuts
Dans les années 1990 on[Qui ?] estime qu’il y avait entre 300 et 350 enfants des rues à Pondichéry[réf. souhaitée]. Il s’agit d’enfants envoyés à la ville par leurs parents pour qu’ils mendient, ou de fugueurs qui fuyaient souvent un cadre familial violent.
Des jeunes étudiants volontaires, dont Alice Thomas et Maran Venance, prennent conscience des conditions de vie de ces enfants et s’engagent pour tenter de leur offrir un avenir meilleur. Ils fondent l’association Vudhavi Karangal Samuganala Thodar Kalvi Iyyakam (appelée plus communément Vudhavi Karangal) en avec pour objectif principal d’œuvrer pour la réhabilitation totale des enfants des rues.
L’association loue une petite maison et recueille des ramasseurs de chiffons. En deux mois l’institut loge déjà 16 garçons sous son toit. Ils sont encouragés à renoncer au vol et à la mendicité et, pour ceux qui le souhaitent, à aller à l’école.
Malgré l’attention apportées aux enfants et le confort matériel offert certains d’entre eux se sauvent régulièrement.
Néanmoins le nombre de garçons qui vivent à l’auberge de manière permanente a régulièrement augmenté.
En 1999 le foyer déménage dans une nouvelle maison à Pondichéry qui accueille jusqu’à 25 garçons. Puis ils déménagent vers Nonankuppam, à 7 km au sud de Pondichéry, où un oncle d’Alice Thomas met un terrain à la disposition de l'association.
Vu la difficulté de réhabiliter des enfants ayant vécu dans la rue, dans un dénuement total mais complètement libres, Vudhavi Karangal n’accueille plus des enfants des rues mais des enfants confiés par leurs familles qui ne peuvent plus s’en occuper.
Finalement l’action de Vudhavi Karangal se trouve en amont de la rue : les enfants sont confiés à Alice, l'autre alternative est la rue.
Lorsqu’une famille vient la voir pour confier ses enfants Alice Thomas mène une enquête et vérifie que la famille n’a pas d’autre choix que de placer ses enfants. Les responsables légaux signent donc une décharge d’autorité jusqu’aux 18 ans des enfants. Ceux-ci ne retournent jamais dans leurs familles, ni le week-end, ni pendant les vacances car ils seraient confrontés à un contexte violent ou nuisible. En revanche la famille dispose d’un droit de visite et peut venir passer la journée à Vudhavi Karangal.
Fondation du bâtiment des garçons
Un nouveau bâtiment de vie est achevé fin 2008 sur un autre terrain à Nonankuppam. Désormais 150[2] garçons vivent dans des infrastructures parfaitement fonctionnelles.
Un hall polyvalent accueille des classes pour l’aide aux devoirs. Il se transforme en auditorium pour des spectacles et en cantine pour les repas.
La cuisine permet de préparer en tout temps les repas des garçons. À l’étage supérieur une grande salle de musique et une bibliothèque ont été installées.
Création d'un foyer pour filles en 2009
Un foyer pour filles est ouvert en 2009.
90 filles résident dans une maison traditionnelle tamoule située en pleine campagne dans le village de T.N. Palayam. Elles y bénéficient des mêmes méthodes que chez les garçons.
L'Observation Home
A la demande des autorités du territoire de Pondichéry, Vudhavi Karangal a fondé un centre pour abriter des jeunes filles mineures placées par la justice. Dans la majorité des cas ces filles ont été victimes d’adultes[3] (viols, prostitution, trafic de drogue, vols…) Le centre de redressement peut accueillir jusqu’à 25 filles.
L'école AICE intégrant enfants handicapés et slow learners
L’école AICE (Alternative Inclusive Center for Education) est née du partenariat entre Vudhavi Karangal et Satya Special School[4] (une école pour les enfants atteints de tous types de handicaps). Elle propose des méthodes d’éducation alternatives pour 75 enfants de Vudhavi Karangal (filles et garçons) ayant des difficultés d’apprentissage ou des retards scolaires.
Reprise d'APRES SCHOOL
En 2017[5] une nouvelle unité est intégrée à Vudhavi Karangal. Il s’agit d’un pensionnat avec école intégrée fondée en 2009 par des proches du chanteur Yves Duteil pour venir en aide aux enfants issus des tribus du Tamil Nadu.
Le complexe APRES (Apres School), situé dans le Tamil Nadu, est composé d’un pensionnat qui accueille 85 enfants (garçons et filles) et une école qui accueille les enfants de Vudhavi Karangal du jardin d’enfants au 7e standard (l’équivalent de la classe de cinquième dans le système scolaire français).
Le Youth Home
Les enfants qui atteignent leur majorité disposent de deux options : retourner dans leurs familles ou rester à Vudhavi Karangal pour continuer des études supérieures dans des établissements professionnels, à l’université ou pour trouver un emploi.
En 2019 c’est le cas d’une vingtaine de garçons qui ont entre 18 et 25 ans et qui vivent toujours sur place.
Afin de leur offrir plus d’intimité mais surtout pour leur permettre de travailler leurs cours et examens au calme, un bâtiment leur a été dédié. Il se trouve à Nonankuppam à quelques mètres du foyer des garçons.
Projets en cours
De nombreux projets sont en cours :
- le financement d’un nouveau van pour faciliter les transports entre le foyer des filles, celui des garçons et APRES (qui sont distants de plusieurs kilomètres).
- le financement d’un groupe électrogène pour le foyer des filles qui subissent de nombreuses coupures de courant. Le foyer des garçons bénéficie déjà d’un groupe électrogène.
- la construction d’un nouveau bâtiment à APRES pour remplacer une partie des infrastructures actuelles.
- la création d'un atelier de fabrication d'assiettes et de mugs à Nonankuppam
Fonctionnement
Religion
Aucune religion n’est enseignée ni favorisée à Vudhavi Karangal. Les enfants sont issus de différents milieux et n’ont pas la même religion. On célèbre donc les rites hindous comme Diwali et Pongal mais aussi des rites chrétiens et musulmans.
Tâches de la vie quotidienne
Les enfants participent aux tâches de la vie quotidienne : ménage, lessive, cuisine, rangement…
D’ailleurs un enfant peut être accepté à Vudhavi Karangal que s’il sait se laver, s’habiller et manger tout seul. Les enfants sont autonomes dès le plus jeune âge.
De nombreuses familles pondichériennes apportent régulièrement un financement en offrant des repas à l’ensemble des enfants.
Activités
Comme les enfants sont au foyer 365 jours par an de nombreuses activités leur sont proposées afin de les divertir, de développer leur créativité mais aussi pour leur faire acquérir des compétences qui les aideront à trouver un emploi.
Activités culturelles
La pratique des arts traditionnels et folkloriques de l’Inde du Sud est importante chez les garçons comme chez les filles. Ils ont des cours de danse (notamment de Bharata Natyam) et de musique (veena, mridangam, percussions, guitare, violon, flûte, cornemuse indienne…). Des ateliers de peinture et dessins sont également proposés. La bibliothèque et la salle de musique sont toujours accessibles à ceux qui le veulent. Les enfants excellent particulièrement en danse et en musique et se produisent sur scène lors de nombreux évènements.
Ils font également du sport, notamment du yoga trois matins par semaine, et du silamban (art martial de l’Inde du Sud).
Enfin des classes d’aide aux devoirs et des cours d’anglais renforcé ont lieu après l’école ou le week-end.
Plusieurs fois dans l'année, des sorties sont organisées pour l’ensemble des 300 enfants, par exemple une visite ornithologique dans un parc près de Chennai.
Activités manuelles
Les garçons disposent d’un bâtiment abritant des ateliers de menuiserie, de soudure, d’électricité, de plomberie, de reliure de livres et cahiers. Il bénéficient aussi d’une cuisine « européenne » pour faire des confitures et de la pâtisserie.
Les filles font de la poterie et de la céramique, de la broderie, de la couture, du tressage de paniers, des mugs en terre cuite…
Chez APRES, un potager permet de fournir la cuisine en légumes frais (les fruits n’ont pas le temps de mûrir parce que les enfants les mangent directement sur les arbres!) et d’enseigner aux enfants quelques rudiments de jardinage.
Histoires de vie
Voici quelques histoires d’enfants ayant grandi à Vudhavi Karangal
Anandh
Anandh est l’un des plus anciens pensionnaires du foyer. Il est né dans une famille pauvre dont le père décède tôt. La mère vit sur le trottoir avec ses enfants. Anandh et son frère entrent chez Vudhavi Karangal en 1995 : il a 9 ans lors de son arrivée au foyer. Etudiant brillant, il poursuit des études supérieures, obtient une licence en sciences, un master en microbiologie, un diplôme d’analyses en laboratoire et une licence en éducation.
Il quitte l’orphelinat à 27 ans pour se marier avec Lema Rose, la femme qu’il aime.
Depuis 2017 il est directeur de l’école APRES SCHOOL qui accueille les enfants de Vudhavi Karangal jusqu’au 7e standard (l’équivalent de la cinquième en France).
Loganathan
A l’âge de 9 ans Loganathan est gravement blessé à l’œil par un petit camarade. Il habitait alors un village à 45 km au nord de Pondichéry. Non scolarisé, il travaillait, comme son jeune frère, en tant que gardien de vaches.
Sa mère, veuve d’un charpentier décédé d’une crise cardiaque, est pauvre. Elle ne bénéficie d’aucune aide. Pour tenter de soigner sa blessure, sa mère l’emmène à Pondichéry. Vainement, il perdra son œil. Mais il aura la chance de rencontrer Alice.
C’est lui qui parle le mieux de son histoire :
« Je suis né en 1985, j’ai un petit frère, Roukou Madavane, né en 1988. Tous les deux nous devions travailler pour aider notre mère. Nous n’avons jamais été scolarisés. A cause de ma blessure, ma mère m’a emmené à Pondichéry pour me faire soigner. Comme le traitement devait être long, mon jeune frère nous a rejoints. Tous les trois nous faisions la plonge pour une gargote installée sur le trottoir, en face de la gare. Nous dormions dans la rue.
Un jour, une femme qui avait remarqué notre situation misérable, a signalé à ma mère qu’une jeune fille nommée Alice, pourrait peut-être s’occuper de nous pour nous enseigner à lire et écrire.
Le lendemain ma mère rencontrait Alice, alors âgée de 21 ans, qui se débrouilla pour nous faire inscrire à l’école primaire toute proche. Pour ce faire, Alice changea ma date de naissance : j’avais 9 ans et j’étais avec des garçons et des filles qui n’en avaient que cinq!
Je fus grandement aidé par mon professeur qui me prit en charge et m’aida à apprendre à lire et écrire en tamoul et à me guider dans mes études.
Après l’école primaire, j’ai été à l’école élémentaire. Mon principal problème était bien entendu mon âge. Alice décida alors de me retirer de l’enseignement public, de me faire suivre des cours particuliers, ceci pour me permettre de passer à titre individuel l’examen d’accès en 8ème année. Pendant toute cette période j’ai travaillé énormément pour réussir mais surtout pour récompenser Alice par mes résultats. Je me rendais bien compte combien il lui était difficile d’arriver à payer des cours particuliers sans aide aucune. Plusieurs années scolaires passèrent ainsi. En 2001 j’ai réussi les examens avec de très bonnes notes. J’ai pu alors intégrer l’enseignement secondaire, ayant ainsi surmonté toutes les difficultés que vous pouvez imaginer. J’ai réussi mon « public exam » (l’équivalent du baccalauréat), mais comme mes notes n’étaient pas assez bonnes pour entrer à l’Université publique, j’ai rejoint le St. Joseph’s College de l’université catholique. J’y ai obtenu la licence de biochimie en 2008 (Bac +2).
Alice a alors pu me faire inscrire à temps partiel (en alternance) dans un laboratoire médical en tant que laborantin, avec une rémunération servie par le gouvernement du Territoire.
En 2009 j’ai été admis en Maitrise à l’Université de Pondichéry. J’ai choisi la filière de « Social Works », spécialité de psychiatrie, pour aider à mon tour les gens défavorisés et ainsi payer ma dette envers la Société. »
Loganathan travaille aujourd’hui pour Vudhavi Karangal, c’est le bras droit d’Alice dans le foyer des garçons.
Notes et références
- (en) « Vudhavi Karangal Thodar Kalvi Iyyakkam Noonakuppam, Puducherry. | SRIRAM CHARITABLE TRUST » (consulté le )
- (en) « Vudhavi Karangal Thodar Kalvi Iyyakkam Noonakuppam, Puducherry. | SRIRAM CHARITABLE TRUST » (consulté le )
- (en) Staff Reporter, « Girl in observation home allowed to attend uncle’s wedding », The Hindu, (ISSN 0971-751X, lire en ligne, consulté le )
- « Satya Special School | We will not change you for the world, but the world for you… », sur www.satyaspecialschool.org (consulté le )
- « Une ecole du Tamil Nadu - Apres School - Apres School », sur www.apresschool.org (consulté le )
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