Xénoglossie
La xénoglossie ou xénolalie[1] désigne la faculté de parler une langue étrangère sans l’avoir apprise[2].
C'est une sorte de glossolalie[n 1] par laquelle une personne étant en état modifié de conscience (par exemple un médium) s'exprime dans une langue existante, parfois plusieurs, qu'elle semble ignorer à ce moment-là.
Ce terme inventé par le professeur Charles Richet (1850-1935) qualifie une médiumnité par laquelle les médiums parlent ou écrivent en langues étrangères existantes ou ayant existé, mais ignorées d'eux-mêmes et parfois des assistants à la séance. Ces communications étant cohérentes et justes grammaticalement (après traduction et vérification) et sont également capables de répondre à des questions impromptues, posées en temps réel, par des témoins assistant à la séance[3],[4].On recense surtout deux catégories de xénoglossie :
- Les cas obtenus par l'automatisme parlant et la médiumnité auditive.
- Les cas obtenus par l'écriture automatique ou psychographie.
Les langues et dialectes ainsi obtenus sont nombreux et certains très rares, appartenant aux langues d'aujourd'hui, mais aussi à des langues mortes depuis des milliers d'années pour certaines.[5]
Manifestations
En 1859, Melle Laura Edmonds, fille du juge Edmonds, qui fut président du sénat et membre de la cour suprême de justice de New-York, se mit à parler en grec moderne avec un invité Mr Evangélidès lors d'une réception. Elle disait être Mr Botzaris, ami intime décédé de Mr Evangélidès, et lui apprit la mort imminente de son fils en Grèce (ce qui était exact)[6]. Le juge Edmonds écrit :
« Ma fille ne connaît que l'anglais et un peu de français et pourtant elle a parlé en français, grec, latin, italien, portugais, polonais, hongrois, ainsi que plusieurs dialectes amérindiens. Quelquefois, elle ne comprend pas ce qu'elle dit, mais celui qui parle avec elle comprend toujours ses paroles[7],[8]. »
Dans les années 1920, le célèbre violoniste Florizel Von Reuter ainsi que sa mère Grace Von Reuter, tous deux médiums, utilisant un appareil nommé "additor" (sorte de ouija en forme de règle plate) reçurent des communications en une quinzaine de langues. Outre l'anglais, l'allemand, le français, l'espagnol, l'italien et un peu de suédois et de latin qu'ils connaissaient, ils reçurent des messages en russe, maggyar, norvégien, polonais, hollandais, lituanien, irlandais, persan, arabe et turc[9].
Mme Grace Von Reuter avait les yeux bandés, deux doigts sur le curseur de l'additor qui se déplaçait à toute vitesse, pendant que son fils Florizel notait les lettres qu'il pointait. Les phrases étaient en langue inversée, la dernière lettre de la phrase étant donnée en premier et ainsi de suite, il fallait ensuite un miroir pour lire l'ensemble. ces communications réagissaient en temps réel aux questions qu'on leur posait[10],[11],[12].
Des cas avérés d'écriture automatique en hiératique égyptien[13],[14], en dialecte hindo-persan[15],[16],[17], turco-persan[18],[19], chinois de l'antiquité[20],[21], fut également recensés et attestés par des archéologues et des orientalistes. Certaines de ces langues, vieilles de plusieurs milliers d'années, n'étaient connues que par une dizaine de personnes au monde à l'époque des faits. De plus ces communications concernaient le présent et réagissaient en temps réel aux demandes des témoins.[22]
Plusieurs personnes connues auraient eu cette faculté parmi lesquelles S. Yvonne-Aimée de Malestroit, et Thérèse Neumann qui eu des visions, des stigmates et s'exprimait en araméen revivant la passion du Christ[23].
Le terme « xénoglossie » peut aussi être utilisé pour les apôtres du Christ se mettant à annoncer leur message évangélique dans toutes les autres langues que la/les leur(s), sous l'emprise de l'Esprit-Saint qui vient de se manifester à eux, le jour de la Pentecôte, cinquante jours après la mort et la résurrection de Jésus[24].
De plus en plus de cas de xénoglossie sont médiatisés, tels que celui du jeune Américain de 16 ans, Rueben Nsemoh, qui aurait « changé » de langue maternelle après son réveil de trois jours de coma causé par un violent coup sur la tète en jouant au football. Il parle alors quelque temps l'espagnol au lieu de l'anglais, sa langue maternelle[25]. Avant cela, il ne maîtrisait pas cette langue, soulignent plusieurs médias. Toutefois, il avait dans son entourage des personnes qui parlent cette langue ; le choc qu'il a reçu lui a donné accès à une zone cérébrale qui stockait inconsciemment des données linguistiques entendues. Ce phénomène est ainsi expliqué scientifiquement, « il ne s'agit ni d'un miracle ni d'une réminiscence d'une vie antérieure, mais d'une erreur commise par le cerveau » comme le rappelle Angela de Bruin de l'institut basque de recherche neurolinguistique BCBL[26].
Réincarnation
Le psychiatre Ian Stevenson a étudié quelques cas de xénoglossie[27], qu'il interprétait comme une possible preuve de la réincarnation. Mais ses travaux ont été critiqués par des linguistes car manquant de preuves suffisamment solides : les sujets étudiés (en état d'hypnose) n'ont qu'un faible vocabulaire (une centaine de mots) et ne font pas de phrases complexes en guise de réponse aux questions qu'on leur pose, se limitant à quelques mots[28],[29]. Selon le chercheur en sciences religieuses J. Gordon Melton, les recherches de Stevenson sur la xénoglossie apportent des preuves substantielles en faveur de la réincarnation et selon lui personne jusqu'ici (en 2007) n'a produit une réfutation convaincante de son travail[30].
L'historien bouddhiste Dominique Lormier décrit un cas : « Un célèbre médecin de New York, le docteur Marshall Duffie, mort dans les années 1930, raconte comment ses deux fils jumeaux parlaient entre eux une langue étrangère inconnue. Les deux enfants furent emmenés au département de langues étrangères de l’université Columbia, mais aucun des professeurs s’y trouvant ne put identifier leur idiome. On fit venir par la suite un professeur de langues anciennes qui, à son grand étonnement, découvrit que les deux bambins parlaient l’araméen, langue courante à l’époque du Christ[31]. »
Dans la culture populaire
L'épisode 7, saison 7 de la série télévisée Médium s'intitule Xénoglossie : Allison DuBois se retrouve capable de comprendre la langue navajo.
Harry Potter a appris à parler fourchelangue à la suite de sa première rencontre avec Voldemort, et l'utilise avec les serpents (spontanément, sans s'en rendre compte).
Dans la BD Les Démons d'Alexia, l'héroïne est capable de comprendre spontanément le latin.
Dans le film québécois Mémoires affectives le personnage principal émerge du coma. Dans l’une des scènes il parle sous hypnose une langue étrangère qu’il n’a jamais apprise.
Bibliographie
- Charles Richet, Traité de Métapsychique, 1922 [lire en ligne]
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, 1934.
- Ian Stevenson, Xenoglossy: A Review and Report of A Case. University of Virginia Press. 1974.
- Ian Stevenson, Unlearned Language: New Studies in Xenoglossy. 1984.
Notes et références
Notes
- La glossolalie consiste à parler une langue inventée de toutes pièces, souvent inconsciemment par son locuteur, tandis que la xénoglossie concerne le parler, sans apprentissage préalable apparent, d'une langue ou d'un dialecte qui existe bien, ou a existé à un moment ou l'autre de l'histoire de l'humanité.
Références
- Alessandra Pozzo, « Un langage inspiré « efficace ». La xénolalie dans les récits hagiographiques du Moyen Âge » (consulté le )
- Xénoglossie, sur Larousse.fr
- Professeur Charles Richet, Traité de Métapsychique, Paris, p 280 de la première édition
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Monts, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), introduction
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Monts, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 40 à 45
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Monts, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 14
- Professeur Charles Richet, Traité de Métapsychique, Paris, , p 272
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Monts, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 13 à 16
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Monts, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 81 et 82
- Florizel Von Reuter, Psychical expériences of a musician, années 1920
- Florizel Von Reuter, The Consoling Angel, années 1920
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), du 16ème au 24ième cas, p 80 à 122
- journal, Le Times,
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 58 à 61
- Charles Richet, Annales des sciences Psychique, , p 317 à 353
- Vincent Turvey, The Beginnings of Seership, p 127
- Journal of the American, Society of Psychical Research, , p 490 à516
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 61 à 64
- Magazine, le Light, p 429
- Revue, Psychic Research, , p 496 à 502
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Les éditions philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 142 à 160
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, Les éditions Philman, (ISBN 979-10-97346-05-8), p 43 à 129
- Ernest Bozzano, La médiumnité polyglotte, 8ième cas, Les éditions Philman, , 210 p. (ISBN 979-10-97346-05-8), p 37 à 42
- Le secret professionnel des langues imaginaires
- Lise Loumé, « Un footballeur américain sort du coma en ayant "changé" de langue maternelle », sur Sciences et Avenir, (consulté le ).
- Le Vif, « Comment peut-on se réveiller et parler subitement une autre langue? », sur www.levif.be, (consulté le )
- « Ils parlent des langues qu’ils n’ont pas apprises par André Dumas | 3e millénaire - Spiritualité - Connaissance de soi - Non-dualité - Méditation », sur www.revue3emillenaire.com (consulté le )
- Sarah Thomason, Xenoglossy in Gordon Stein, The Encyclopedia of the Paranormal, Prometheus Books, 1996, lire en ligne.
- William J. Samarin (1976). Review of Ian Stevenson Xenoglossy: A Review and Report of a Case, Language 52: 270-274.
- J. Gordon Melton, The Encyclopedia of Religious Phenomena, Visible Ink Press, (lire en ligne), p. 359-360.
- Dominique Lormier, Les vies antérieures, Editions du Félin, 2004, p. 102
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- « Ils parlent des langues qu’ils n’ont pas apprises », sur www.revue3emillenaire.com
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