Arthur Schnitzler

Arthur Schnitzler, né le à Vienne, où il meurt le , est un écrivain et médecin autrichien.

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Arthur Schnitzler
Arthur Schnitzler en 1912.
Biographie
Naissance
Décès
(à 69 ans)
Vienne
Sépulture
Ancien cimetière juif de Vienne (d)
Nationalités
Autrichienne
Cisleithanie ( - )
Formation
Activité
Période d'activité
À partir de
Père
Johann Schnitzler (en)
Fratrie
Julius Schnitzler (d)
Gisela Hajek (d)
Conjoint
Olga Schnitzler (d) (de à )
Enfants
Heinrich Schnitzler (d)
Lili Schnitzler (d)
Parentèle
Markus Hajek (d) (beau-frère)
Autres informations
Adjectifs dérivés
schnitzlerien, schnitzlérien
Distinctions
Prix Bauernfeld
Prix Franz Grillparzer (en) ()
Archives conservées par
Bibliothèque nationale autrichienne (LIT 372/09: L. und A. Schnitzler / Sammlung Heinrich Schnitzler)[1]
Œuvres principales
La Nouvelle rêvée, La Ronde, Mademoiselle Else, Le Sous-lieutenant Gustel (d), Amourette (d)
Signature

Il est l'un des auteurs les plus importants de la littérature de langue allemande de la première moitié du XXe siècle en Autriche-Hongrie.

Biographie

Lieu de naissance d'Arthur Schnitzler à Vienne, au 16 de la Praterstrasse.

Arthur Schnitzler naît à Leopoldstadt, 2e arrondissement de Vienne, dans une famille juive : sa mère Luise, née Markbreiter (1838–1911), est la fille d’un médecin localement réputé qui dirigeait une revue médicale et son père Johann Schnitzler (de) (1835–1893), d'origine hongroise, est un laryngologue renommé, dont la patientèle, principalement constituée de comédiens et de cantatrices, donne au jeune Arthur le goût du théâtre. À treize ans, il a déjà écrit près de vingt pièces de théâtre dans différents genres mais il poursuit la vocation familiale en devenant médecin à 23 ans puis laryngologue ; son frère Julius devient chirurgien, et sa sœur Gisela épouse un médecin du nom de Markus Hajek. Seul le grand-père paternel, Josef Schnitzler « était un bon menuisier-charpentier, mais ivrogne notoire, quelque part en Hongrie »[2].

Arthur Schnitzler vers 1878.

De 1879 à 1882, il étudie à la Faculté de médecine, tout en accomplissant un travail éditorial (rémunéré 20 gulden par mois) dans la revue médicale de son père[3]. En 1882-1883, il accomplit un « service militaire d'un an comme “volontaire” à Vienne (Hôpital militaire no 1) »[3]. Il obtient son doctorat de médecine en 1885. En 1886, « déclaré tuberculeux, il est envoyé à Meran » où il rencontre Olga Waissnix qui l'encourage dans ses débuts littéraires[3]. Il commence de publier dans des revues des poèmes et de brefs textes en prose[3].

Après plusieurs emplois (1887-1888) dans différents services (neurologie, psychiatrie, dermatologie et maladies vénériennes, chirurgie) et un stage de laryngoscopie à Berlin, il entre « à la Polyclinique générale comme assistant de son père » en . « Il expérimente l'hypnose »[3].

Durant son emploi comme assistant en psychiatrie (service du Professeur Meynert) en , il a rendu compte « des Leçons sur les maladies du système nerveux, de Charcot, ouvrage traduit par Sigmund Freud »[3].

À la mort de son père, qui survient le , à l'âge de cinquante-huit ans, « il quitte la Polyclinique et ouvre un cabinet médical », il achète une bicyclette qui va représenter une nouvelle liberté pour lui. Il voyage (pour des randonnées à pied ou à bicyclette) en Autriche, en Allemagne, en Suisse et Italie du Nord, souvent en compagnie d'amis comme Beer-Hofmann et Hofmannsthal[4].

Les femmes occupent une très grande place dans sa vie. Il a eu plusieurs compagnes : Olga Waissnix (1862-1897), Marie Reinhard (1871-1899), Olga Gussmann (1882-1970) [qu'il épouse en 1903]. En 1928, à la suite d'un mariage malheureux, sa fille Lili se suicide à 18 ans à Venise. Arthur Schnitzler mourra le à Vienne d'une hémorragie cérébrale. Il est enterré au cimetière central de Vienne[5].

Arthur Schnitzler par Aura Hertwig en 1912.

Aspects de l'œuvre

Arthur Schnitzler est l'auteur de pièces de théâtre, de nouvelles, de romans ainsi que d'importants journaux personnels.

Le groupe « Jeune Vienne »

Jacques Le Rider le situe dans « le groupe Jeune Vienne » dont font également partie Hugo von Hofmannsthal et Stefan Zweig. Il estime que « l'œuvre considérable du romancier et dramaturge Arthur Schnitzler », qui « fut aussi l'auteur d'un des journaux personnels les plus considérables du XXe siècle », fut « dans toutes les phases de sa production, un moraliste sans indulgence et analyste pessimiste de la dégradation des valeurs individuelles et culturelles »[6].

Schnitzler et la psychanalyse

Parmi les premiers psychanalystes, Theodor Reik consacra l'un de ses ouvrages à « Arthur Schnitzler psychologue » (Arthur Schnitzler als Psycholog, 1913)[7].

Emil Orlik, Angeklagte (Accusés), lithographie de 1921, lors du procès fait à La Ronde par le ministère public allemand.

En tant que médecin assistant à l'hôpital général et à la policlinique de Vienne à partir de septembre 1885, Schnitzler avait travaillé dans le service du psychiatre Theodor Meynert, qui était un « familier des techniques psychothérapeutiques de l'hypnose et de la suggestion » : son œuvre est ainsi parsemée « d'études de cas qui semblent sorties des annales de la clinique », de sorte qu'il a souvent été considéré comme le « double » de Sigmund Freud[6]. En fait, précise Jacques Le Rider, « c'est le fondateur de la psychanalyse en personne qui rendait hommage à l'auteur Schnitzler en saluant en lui son Doppelgänger » [6],[8],[9]. Sur cette « métaphore du double » qu'il emploie dans la lettre du 14.5.1922 adressée à Schnitzler pour son 60e anniversaire, Susanne Hartung relève que trois ans auparavant, en 1919, Sigmund Freud s'était déjà longuement occupé du motif du double dans son essai L'Inquiétante Étrangeté[9].

De son côté, Arthur Schnitzler a lu attentivement les principaux ouvrages de Freud, mais il porte « sur la psychanalyse le même regard de moraliste que sur la vie psychologique de ses personnages »[6]. Pour Schnitzler en effet, l'inconscient et le « destin des pulsions » sont « une construction théorique susceptible de servir de disculpation » et même de justification à « l'amoralité du désir »[6].

Arthur Schnitzler et la censure

Certaines de ses pièces et de ses nouvelles le firent avoir affaire à la censure en raison de thèmes abordés comme la sexualité, l'antisémitisme ou la critique de l'armée (Le Sous-lieutenant Gustel). Sa pièce La Ronde (Der Reigen), écrite en 1896, déclencha un scandale à sa première représentation en 1921 à Berlin et donna lieu à un procès.

Stèle Arthur Schnitzler à Vienne.

Réception

Selon Isa Schwentner, professeur de germanistique à l'université de Vienne, « Arthur Schnitzler est très populaire en Autriche, car la trame historique de son œuvre s'appuie sur la monarchie des Habsbourgs et la Première République, avec des récits et des drames qui se réfèrent à l'histoire du pays »[10].

En France, l'œuvre théâtrale d'Arthur Schnitzler est moins connue — mis à part La Ronde — que les nouvelles de l'écrivain : « Sur la quarantaine de pièces qu’il a écrites, combien en connaît-on, en France ? Sur son rapport à l’écriture dramatique, à la représentation théâtrale, que sait-on ? », interroge Heinz Schwarzinger en 1989[11].
L'étude de Karl Zieger « centrée sur une première période de la réception de Schnitzler en France, de 1894 à 1938 » montre que la reconnaissance de l'auteur Arthur Schnitzler en France « ne fut pas immédiate ». C'est à partir des années 1980 que Schnitzler commence d'être abondamment traduit, estime Jacques Le Rider dans un compte-rendu de l'ouvrage de Zieger qui, selon lui, est destiné à devenir non seulement « un ouvrage de référence de la Schnitzler-Forschung [la “recherche sur Schnitzler”] », mais également un ouvrage « incontournable pour tous les travaux consacrés à l’histoire interculturelle du voisinage européen France-Autriche ». Le Rider considère que la découverte par le public français de l'importance de l'œuvre d'Arthur Schnitzler depuis les années 1980 coïncide avec celle de la « modernité viennoise », à l'occasion par exemple de l’exposition « L’Apocalypse joyeuse » du Centre Pompidou. Parmi les auteurs autrichiens les plus connus, Arthur Schnitzler ne serait plus à présent « surpassé dans la faveur du public français que par Stefan Zweig »[12].

Œuvres

Arthur Schnitzler 1900 Reigen (La Ronde).
Fräulein Else (Mademoiselle Else).

Théâtre

  • 1893 : Anatol
  • 1896 : Liebelei Amourette »]
  • 1897 : Reigen (La Ronde)
  • 1898 : Der grüne Kakadu Le Cacatoès vert »]
  • 1903 : Der einsame Weg (Le Chemin solitaire)
  • 1911 : Das weite Land (litt.: « Le vaste pays  ». Adaptation française sous le titre : Terre étrangère)
  • 1912 : Professor Bernhardi

Nouvelles

  • 1892 : Sterben (Mourir)
  • 1900 : Frau Bertha Garlan (Berthe Garland)
  • 1900 : Leutnant Gustl (Le Sous-lieutenant Gustel)
  • 1902 : Die Fremde (L'Étrangère)
  • 1913 : Frau Beate und ihr Sohn (Madame Béate et son fils)
  • 1918 : Casanovas Heimfahrt (Le Retour de Casanova)
  • 1924 : Fräulein Else (Mademoiselle Else)
  • 1926 : Traumnovelle (La Nouvelle rêvée, Livre de Poche ou Double rêve, Rivages)
  • 1926 : Spiel im Morgengrauen (Les Dernières Cartes)

Romans

  • 1907 : Der Weg ins Freie (Vienne au crépuscule)
  • 1928 : Therese. Chronik eines Frauenlebens (Thérèse)

Théâtre

  • La Ronde , Stock
  • Le Chemin solitaire, Actes Sud

Nouvelles, romans

  • Romans et nouvelles (2 tomes), Le Livre de poche « La Pochothèque » Collection « Classiques modernes », édition préfacée, établie et annotée par Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent, © 1994, Librairie Générale Française (pour la présentation et les notes du tome I); © 1996, Librairie Générale Française (pour la préface, les notices et les notes du tome II).
    • Tome I. 1885-1908: Traductions de M. Rémon, W. Bauer et S. Clauser, D. Auclères R. Dumont, P. Forget et P. Gallissaires
    • Tome II. 1909-1931: Traductions de D. Auclaires, H. Christophe, P. Forget, P. Gallissaires, A. Hella et O. Bournac, P. Hofer-Butry, M. Rémon, B. Vergne-Cain et G. Rudent
Arthur Schnitzler à Fritz Freund 1905-04-21
  • Les Dernières Cartes, suivi de Rien qu'un rêve (trad. Dominique Auclères), Paris, Calmann-Lévy, , 279 p.
  • Le Sous-Lieutenant Gustel, traduction Maël Renouard, Sillage, 2009
  • Les Dernières Cartes, traduction Brice Germain, Sillage, 2009
  • Gloire tardive (Später Ruhm), traduit de l’allemand par Bernard Kreiss, Albin Michel, inédit, 2016, (ISBN 2226317333)

Carnets, journal, correspondance

  • Relations et Solitudes. Aphorismes (Beziehungen und Einsamkeiten, Fischer, 1987) , « Rivages Poche », traduction Pierre Deshusses, 1991 (ISBN 2-86930-190-1)
  • La Transparence impossible, « Rivages Poche », traduction Pierre Deshusses, 1992
  • Journal (1923-1926), Rivages Poche, traduction Philippe Ivernel, 2012
  • Avec Stefan Zweig, Correspondance, « Rivages Poche », traduction Gisella Hauer et Didier Plassard, 2001
  • Lettres aux amis (1886-1901), « Rivages Poche », traduction Jean-Yves Masson, 1991

Adaptations

Les œuvres de Schnitzler ont fait l'objet de plusieurs adaptations, principalement cinématographiques :

  • Fräulein Else
Costume de Tom Cruise dans le film Eyes Wide Shut d'après La Nouvelle rêvée de Schnitzler.

Mises en scène théâtrales

Divers

« schnitzlérien »

L'adjectif associé à son œuvre et à sa pensée est « schnitzlerien » ou « schnitzlérien ».

Descendance

Arthur Schnitzler est le grand-père de l'écologiste et du violoniste Michael Schnitzler.

Notes et références

Notes

    Références

    1. « https://www.onb.ac.at/de/bibliothek/sammlungen/literatur/bestaende/personen/schnitzler-arthur-1862-1931/ » (consulté le )
    2. Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent, « Pour sortir de la ronde !?... », préface à Arthur Schnitzler, Romans et nouvelles (éd. B. Vergne-Cain et G. Rudent), tome 1, 1994, p. 3-40.
    3. Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent, « Repères biographiques » dans: Arthur Schnitzler, Romans et nouvelles, t. 2, Le Livre de poche « La Pochothèque », coll. « Classiques modernes », édition préfacée, établie et annotée par B. Vergne-Cain et G. Rudent, 1996, LGF (pour la préface, les notices et les notes), p. 1125-1126.
    4. « Repères biographiques » dans : Arthur Schnitzler, Romans et nouvelles, tome 2, p. 1126 et suiv..
    5. « Repères biographiques » dans : Arthur Schnitzler, Romans et nouvelles, tome 2, p.  1125-1134 passim.
    6. Jacques Le Rider, entrée « Jeune Vienne (Bahr, Schnitzler)», dans Dictionnaire du monde germanique, sous la direction de É. Décultot, M. Espagne et J. Le Rider, Paris, Bayard, p. 559-560.
    7. Theodor Reik, Schnitzler psychologue (Arthur Schnitzler als Psycholog, 1913), Éditions Circé (ISBN 284242168X)
    8. Nicole Fabre, « Étrange double, double étranger », Imaginaire & Inconscient, vol. 14, no 2, , p. 15 (ISSN 1628-9676 et 1965-0183, DOI 10.3917/imin.014.0015, lire en ligne, consulté le ) :
      « Une question me tourmente : pourquoi, en vérité, durant toutes ces années, n’ai-je jamais cherché à vous fréquenter et à avoir avec vous une véritable conversation ? [...] La réponse à cette question implique un aveu qui me semble trop intime. Je pense que je vous ai évité par une sorte de crainte de rencontrer mon double »
      .
    9. (de) Susanne Hartung, « Freud und Schnitzler: Doppelgänger? Hat der Psychoanalytiker den Wiener Dichter beeinflusst? », sur www.grin.com (consulté le ) : Dans le cadre d'un séminaire de germanistique, Susanne Hartung se demande de son côté à propos du motif littéraire du « double » (allemand : Doppelgänger), dans quelle mesure le psychanalyste (Sigmund Freud) a influencé « l'écrivain viennois ».
    10. L'Express, « 150 ans d'humanité », publié le 14 mai 2012. Site consulté le 25 septembre 2017 : .
    11. H. Schwarzinger, Arthur Schnitzler, auteur dramatique 1862-1931, 1989, Quatrième de couverture. Site d'Actes Sud consulté le 25 septembre 2017: .
    12. Jacques Le Rider, « Karl Zieger, Enquête sur une réception. Arthur Schnitzler et la France, 1894-1938 », Germanica [En ligne], 52 | 2013, mis en ligne le 24 juin 2013, consulté le 25 septembre 2017. URL : .
    13. « Derniers masques Mise en scène de Gilles Gleizes - Programme »

    Voir aussi

    Ouvrages

    Notices et articles

    • Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent, « Repères biographiques » dans: Arthur Schnitzler, Romans et nouvelles, t. 2, Le Livre de poche « La Pochothèque », coll. « Classiques modernes », édition préfacée, établie et annotée par B. Vergne-Cain et G. Rudent, 1996, LGF (pour la préface, les notices et les notes)
    • Jacques Le Rider, « Jeune Vienne (Bahr, Schnitzler) » dans Dictionnaire du monde germanique, sous la direction de É. Décultot, M. Espagne et J. Le Rider, Paris, Bayard, 2007 (ISBN 9782227476523)
    • Jacques Le Rider, « Arthur Schnitzler (1862-1931) », sur www.universalis.fr (consulté le )
    • Karl Zieger, « Enquête sur une réception. Arthur Schnitzler et la France, 1894-1938 », Germanica, 52 | 2013, p. 161-163.
    • Roseline Bonnellier, « Déplacements meurtriers. Étude sur la nouvelle Le fils d’A. Schnitzler par rapport à l’ouvrage de Theodor Reik Arthur Schnitzler als Psycholog », Topique 2017/1, no 138, p. 109-122, DOI:10.3917/top.138.0109

    Articles connexes

    Liens externes

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