Franco-Manitobains

Les Franco-Manitobains sont les francophones de la province canadienne du Manitoba.

Drapeau franco-manitobain. Adopté en 1980, la bande rouge représente la rivière rouge où s'établirent les premiers franco-canadiens, la bande or, la zone fertile couverte de champs de blé qui entoure, longe la rivière et la grande zone blanche l'immensité des plaines du Manitoba. Une plante représente un F stylisé, symbole de la Francophonie

Il y a 51 000 francophones au Manitoba[1].

Géographie

90 % des Franco-Manitobains habitent dans la région de Winnipeg, en majorité dans les quartiers traditionnellement francophones : Saint-Boniface, Saint-Vital et Saint-Norbert, la région de la rivière Rouge ainsi que dans un certain nombre de villages situés au sud-ouest du Manitoba.

Il existe par ailleurs des communautés bilingues réparties dans le reste de la province. Elles se sont réunies au sein de l'Association des municipalités bilingues du Manitoba (AMBM).

Histoire

Le site de Winnipeg est exploré par Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye en 1738[2]. Les premiers Blancs à s'établir par la suite dans le territoire sont des francophones originaires du Canada, qui fondent des postes de traites et nomment plusieurs des lieux existant toujours[2]. Ces colons épousent des femmes amérindiennes, donnant naissance au peuple métis[2]. La colonie de la rivière Rouge est fondée au confluent de la rivière Rouge et de la rivière Assiniboine. L'implantation du clergé catholique à cet endroit en fait le principal foyer de population[2]. Les abbés Norbert Provencher et Sévère Dumoulin s'y établissent en 1818 avec des colons canadiens[2]. Saint-Boniface devient la capitale de la colonie[2]. Au milieu du XIXe siècle, les Métis résistent au monopole de Compagnie de la Baie d'Hudson et ensuite au gouvernement du Canada[2]. Une partie de la population se disperse ensuite dans l'Ouest canadien[2]. Un grand nombre de francophones s'établissent dans la colonie durant la seconde moitié du XIXe siècle, principalement des Canadiens français du Québec et des Acadiens, ainsi que des Belges, des Français et des Suisses[2]. La colonie devient le Manitoba à la suite d'un mouvement populaire mené par Louis Riel[2]. L'Acte du Manitoba, la constitution, reconnaît la dualité linguistique de la province nouvellement créée, mettant le français et l'anglais sur un pied d'égalité[2].

L'immigration massive de Britanniques et d'Ontariens anglophones entre 1870 et 1885 relègue les franco-manitobains au rang de minorité, ces derniers ne comptant plus que pour 10 % de la population[2]. En 1890, une loi abolit la dualité confessionnelle[2], et l'Assemblée législative du Manitoba déclare la province officiellement anglophone[2]. Cette décision est portée en appel par les Métis et les Canadiens français jusqu'au Conseil privé de Londres, qui est alors la plus haute instance judiciaire du pays, la Cour suprême n'ayant pas encore été instituée. En 1892, le Comité judiciaire juge la loi de 1890 inconstitutionnelle, car l'article 23 de la loi constitutive du Manitoba donne un statut officiel aux deux langues[3]. L'enseignement dans une langue autre que l'anglais est toutefois toléré après de nombreuses démarches, jusqu'à son abolition en 1916 par la Loi Thornton[2]. Elle devient la Société franco-manitobaine en 1968[2].

La loi de 1890 abolissant le français comme langue officielle est jugée anticonstitutionnelle par la Cour suprême du Canada en 1978[4]. Le drapeau franco-manitobain est adopté en 1980[4]. Le gouvernement provincial crée le Secrétariat des services en langue française en 1981[4]. Toutes les lois de la province sont déclarées inconstitutionnelles par la Cour suprême du Canada en 1985 car elles ont été adoptées en anglais uniquement[4]. L'Association des juristes d'expression française est créée en 1988[4]. Le Centre de ressources éducatives à l'enfance (CREE) est fondé en 1990[4]. Envol 91 FM, la première radio communautaire francophone de l'Ouest canadien, entre en ondes en 1991[4]. En 1992, la partie III de la Loi sur la ville de Winnipeg y instaure les services en français, alors que la Chambre des communes du Canada reconnaît Louis Riel comme fondateur de la province du Manitoba[4]. Le droit des franco-manitobains à la gestion scolaire, en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés, est reconnu par la Cour suprême en 1994[4]. La division scolaire numéro 49, comptant vingt écoles, est mise sur pied l'année même[4]. Le Conseil de développement économique des municipalités bilingues du Manitoba (CDEM) est créé en 1996[4]. Le Centre des services bilingues est fondé en 2002[4]. La Franco-manitobaine Maria Chaput est nommée au Sénat du Canada la même année[4]. L'Accueil francophone de la Société franco-manitobaine est fondé en 2003[4]. Le Directorat de l'activité sportive du Manitoba voit le jour en 2006[4]. L'Agence nationale et internationale du Manitoba est fondée en 2007[4].

Population et société

Lorsque les villes ou villages possèdent un établissement scolaire francophone, la vitalité de la langue française sort renforcée dans ces communautés urbaines. C'est le cas pour les villes suivantes[5] :

Évolution linguistique des francophones entre 1991 et 1996
CommunePart des francophones en 1991Part des francophones en 1996
Notre-Dame-de-Lourdes75 %96 %
Saint-Pierre-Jolys76 %83 %
Saint-Lazare75 %78 %
Ste. Anne58 %62 %
Somerset58 %77 %

Par contre, si une communauté francophone ne possède pas d'école francophone, la langue française aura tendance à diminuer, comme à Saint-Claude (78 % de francophones en 1991 et 69 % en 1996).

Liste des municipalités bilingues du Manitoba

Carte des principales communautés francophones du Manitoba.

Culture

Culture franco-manitobaine

Patrimoine historique franco-manitobain

La langue française manitobaine

Les Franco-Manitobains ont (à l’image de leurs cousins des provinces de l’Ouest), pour la plupart, leurs racines au Québec. Mais les origines de l’autre partie des locuteurs francophones ont deux souches : les Européens francophones, ce qui rend cette situation sociolinguistique unique au Canada.

En effet, lorsqu’on examine le répertoire linguistique de cette communauté, on remarque un contraste entre l’utilisation d’une langue plus formelle apprise à l’école et le maintien de trois variétés de français (le français des Métis (et le mitchif[6]), le québécois et les dialectes francophones d’Europe) encore parlées dans les zones rurales et dans des situations informelles, dans le but d’exprimer différents sentiments d’identité. Lors d'une enquête sur le terrain, en 1994, il a été noté que la minorité franco-manitobaine n’est regroupée qu’au niveau politique pour la sauvegarde de ses droits. Sur le plan sociolinguistique, en revanche, elle forme une mosaïque linguistique et identitaire, véritable microcosme de la situation nationale, ce qui nous autorise d’emblée à « mettre la francophonie manitobaine au pluriel », distincte d’autres parlers français canadiens (comme le français québécois).

Personnalités franco-manitobaines

Notes et références

  1. Données statistiques de 1991
  2. Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada 2009, p. 1
  3. Serge Dupuis, Deux poids deux langues, Québec, Septentrion, 2019, pp. 43-44.
  4. Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada 2009, p. 20
  5. Données du gouvernement canadien
  6. Le mitchif est cette autre langue unique aux Métis de l’Ouest. C’est une langue mixte (ou « entrelacée ») constituée en partie de cri (verbes) et en partie de français (noms, adjectifs, déterminatifs).

Voir aussi

Bibliographie

  • Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, Profil de la communauté francophone du Manitoba, Ottawa, , 17 p. (ISBN 978-2-922742-35-0, lire en ligne)
  • Giraud, Marcel (1945), Le Métis canadien : son rôle dans l’histoire des provinces de l’Ouest, Paris, Institut d’Ethnologie, 1 245 p.
  • Raymond-M. Hébert, La révolution tranquille au Manitoba français, essai, Saint-Boniface, Éditions du Blé, 2012, 384 pages,
  • Papen, Robert A. (1998), « French : Canadian varieties », dans J. EDWARDS (dir.), Languages in Canada, Cambridge University Press, p. 160-176.
  • Marchand, Anne-Sophie (1998), « La survivance du français au Manitoba (Canada) : facteurs de maintien et facteurs de régression linguistiques », thèse de doctorat, Université de Franche-Comté, 462 p.
  • Marchand, Anne-Sophie (1993), « Identité culturelle et conscience linguistique des francophones d'Amérique du Nord : la survivance du français au Manitoba (Canada) », mémoire de D.E.A., Université de Franche-Comté, 90 p.
  • Louis Riel bande dessinée historique.

Liens externes

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