Méthodisme

Le méthodisme est un courant du protestantisme issu d'un schisme d'avec l'Église anglicane regroupant de nombreuses Églises d'orientations diverses, mais trouvant leur inspiration dans la prédication de John Wesley au XVIIIe siècle. En 2018, 40 millions de personnes se réclament du méthodisme[1]. Historiquement, le méthodisme est le principal propagateur du Grand Réveil[2].

Pour l'école de médecine grecque antique, voir École méthodique (médecine).

Méthodisme

Siège du World Methodist Council à Lake Junaluska (Caroline du nord).

Repères historiques
Fondation 1784, Angleterre
Fondateur(s) John Wesley
Fiche d'identité
Courant religieux Protestantisme
Membres 40,5 millions en 2018
Localisation Monde

Histoire

John Wesley
George Whitefield

En tant que mouvement religieux, le méthodisme a été lancé au XVIIIe siècle par le prédicateur anglais George Whitefield, mais c'est John Wesley qui fut l'organisateur du méthodisme, rejeté par l’Église d'Angleterre qui n'appréciait ni son insistance sur l'expérience religieuse personnelle ni sa préoccupation sociale. Les élites anglicanes étaient d'ailleurs très influencées par la philosophie religieuse répandue en Angleterre à l'époque et caractérisée par une hostilité à tout dogmatisme, teintée de rationalisme et de moralisme[3].

Alors que George Whitefield avait eu très jeune une foi très vive, Wesley avait en effet connu une expérience religieuse marquante : partir aux États-Unis pour prêcher sans avoir la conviction de son propre salut, il fut très impressionné lors du voyage de retour, par la foi des missionnaires moraves au cours d'une violente tempête. Ses contacts approfondis avec les frères moraves l'auraient conduit, en 1738, à « une rencontre personnelle avec Dieu », et il se mit, à l'instar de Whitefield, à parcourir le pays à cheval en prêchant l'Évangile, rassemblant des foules en plein air, puisque l'Église anglicane établie n'offrait pas d'accueil à ces activités.

Gwennap Pit, non loin de Falmouth (Cornouailles), dépression d'origine minière utilisée à de multiples reprises par John Wesley entre 1762 et 1789 pour ses prédications en plein air[4].

Sur le plan social, le méthodisme se développe surtout au sein des populations ouvrières dont l’Église institutionnelle est le plus souvent absente, malgré le développement rapide des nouvelles cités ouvrières, avec leurs taudis et leur misère, du fait de la Révolution industrielle. Le souci social de John Wesley est très vif et il organise des services sociaux et des écoles dans les quartiers pauvres qu'il visite. Il est aussi l'un des premiers et éloquents défenseurs de l'abolition de l'esclavage. Son frère Charles Wesley le seconde et devient l'un des auteurs de cantiques les plus prolifiques. Le chant d'assemblée jouera un rôle majeur dans les assemblées méthodistes. Ces assemblées sont à l'époque souvent de style charismatique, ponctuées de phénomènes collectifs de larmes, de cris de douleur ou de joie, voire d’hystérie[5]. Cet aspect émotionnel de la prédication de Wesley est très critiqué par les anglicans.

Statue de John Wesley devant la chapelle Wesley établie par John Wesley en 1778 pour être sa première base à Londres. Un musée du méthodisme se trouve dans sa crypte.

Le nom de « méthodiste » vient du fait que Wesley avait dès sa jeunesse participé à un cercle d'étudiants évangéliques où il avait développé un système ou une « méthode » de prière et d'étude pour faire grandir chrétiens et nouveaux convertis dans leur foi. C'est seulement sur la fin de son ministère, en 1784, que John Wesley fait du méthodisme, en ordonnant de lui-même des diacres et des anciens, non plus un mouvement au sein de l’Église d'Angleterre, mais une église indépendante.

Rituels et sacrements

Le « Livre du Culte », officialisé par l’Église méthodiste unie, contient les rituels, les sacrements et l’ordre du culte utilisés dans cette église[6].

Comme les autres églises protestantes (luthériennes, calvinistes, évangéliques...), le méthodisme pratique deux sacrements, le baptême et la communion[6]. Le pédobaptisme, soit le baptême des nouveau-nés et des jeunes enfants est également pratiqué[7]. La confirmation, l'ordination, le mariage, l'onction des malades sont également pratiqués sans toutefois être reconnus comme des sacrements[8].

Théologie

La théologie méthodiste établie par John Wesley appartient au courant arminien de la théologie protestante et s'oppose donc à la doctrine calviniste de la prédestination, bien que, selon John Wesley, la grâce divine doive toujours précéder la décision libre de l'Homme. Whitefield étant quant à lui fidèle à la tradition calvinienne, il y eut un schisme qui donna lieu à la création d'églises méthodistes calvinistes (en) ; elles sont notamment présentes au Pays de Galles.

Un autre point marquant de la théologie de Wesley — comme de Whitefield — est son insistance sur la sanctification au plus profond des actes quotidiens de la vie du chrétien. Cette doctrine de la perfection chrétienne donnera lieu, en Grande-Bretagne et aux États-Unis, à plusieurs mouvements religieux issus du méthodisme tels que celui du mouvement de sanctification (Holiness movement), avec en particulier le mouvement évangélique dit « Mouvement pour une vie supérieure » (Higher Life movement). Leur idée maîtresse découle en grande partie de la conviction mise en exergue par le méthodisme : la sanctification personnelle est la manifestation concrète de la grâce de Dieu au travers du Saint-Esprit agissant directement dans les vies des chrétiens et dans le monde.

Le méthodisme s'est répandu rapidement dans les classes populaires des pays anglophones en partie grâce aux nombreux cantiques écrits par Charles Wesley, le frère de John Wesley. Si le chant d'assemblée entraînant ou émouvant a été important dès l'origine de la réforme protestante, il a été l'un des facteurs importants dans l'enracinement des croyances méthodistes[9],[10], en particulier dans la communauté afro-américaine, encore en partie constituée d'esclaves lors du développement du méthodisme aux États-Unis[11].

Au XXIe siècle, la confession méthodiste continue une tradition sociale active et insiste sur une morale personnelle de la modération.

Dans le monde

États-Unis

Le méthodisme s'est développé surtout dans les pays anglophones ou dans leurs anciennes colonies. Les Églises anglaises et américaines sont les plus importantes, et elles restent autonomes.

À la mort de John Wesley en 1791, les « sociétés » méthodistes comptaient 540 prédicateurs et 134 600 membres[12]. Les églises méthodistes comptent en 2018, 40 millions d'adhérents répartis dans 138 pays et 80 organisations ecclésiales[13].

Certaines églises méthodistes telles que l'Église méthodiste unie (United Methodist Church), qui compte plus de 12 millions d'adhérents dans le monde, dont 7 aux États-Unis, sont restées fidèles à l'organisation de type épiscopalien hérité de l'anglicanisme, alors que d'autres, telles que l’Église méthodiste britannique, sont de type presbytéro-synodal.

Il est à noter que le méthodisme est une dénomination importante pour la communauté afro-américaine. En 1816 est fondée l'Église épiscopale méthodiste africaine (African Methodist Episcopal Church ou AME Church), première dénomination afro-américaine créée aux États-Unis, née en protestation contre l'esclavage et les discriminations envers les Noirs. Elle s'est réunie à l'Église méthodiste unie en 2012.

À partir de 1840 aux États-Unis, le méthodisme a donné lieu au développement du mouvement de sanctification, dont la frange radicale se sépare du méthodisme en 1894. Insistant sur l'expérience religieuse du baptême de l'Esprit, et sur ses manifestations physiques et émotionnelles, ce mouvement qui rencontre un grand succès aux États-Unis donne à son tour naissance à partir du tout début du XXe siècle au pentecôtisme et aux différents mouvements charismatiques inspirés du Pentecôtisme. Ces derniers se sont aujourd’hui répandus dans le monde entier, où l’on compte environ 78 millions de pentecôtistes et 510 millions d’adhérents des différents mouvements charismatiques[14].

Afrique

La plupart des confessions méthodistes en Afrique suivent la tradition méthodiste britannique et considèrent l'Église méthodiste de Grande-Bretagne comme leur église mère. À l'origine modelées sur la structure britannique, ces églises ont souvent adopté un modèle épiscopal spécifique depuis l'indépendance. Parmi ces églises, l'Église méthodiste nigériane est l'une des plus grandes confessions méthodistes du monde et l'une des plus grandes églises chrétiennes du Nigeria, avec environ deux millions de membres en 2000 congrégations. Mais la communauté chrétienne au Nigeria s'émiette en de nombreuses Églises et sectes[15]. Les églises méthodistes ont également une implantation au Ghana (ancienne colonie de la Côte-de-l'Or[16], et en Afrique australe. Dans la deuxième partie du XXe siècle, avant la décolonisation, sont apparus également des mouvements religieux associant méthodisme et croyances traditionnelles africaines, comme la secte Mai Chaza[17].

France

Chapelle wesleyenne à Saint-Martin, Jersey. L'église méthodiste a été forte dans les îles de la Manche.

Le méthodisme est introduit en France dès le début du XIXe siècle par des pasteurs et prédicateurs anglais, notamment en Normandie puis dans le sud de la France et particulièrement en Vaunage (entre Nîmes et Montpellier), par Charles Cook. D'abord pasteur missionnaire à Jersey, Charles Cook s'installe dans la localité vaunageole de Congénies, région marquée par le développement, à la fin du siècle précédent, d'une communauté quaker entièrement locale dont certains éléments se rallient au méthodisme[18]. En 1852, les méthodistes sont implantés dans huit départements : Calvados, Meuse, Pas-de-Calais, Seine, Gard, Hérault, Drôme et Hautes-Alpes. Charles Cook est clairement à l’origine du méthodisme dans les 4 derniers[19].

Par ailleurs, un deuxième foyer d’évangélisation méthodiste en France sera lancé avec l’arrivée, en 1868 à Strasbourg d’un missionnaire américain germanophone, le pasteur Johann Schnatz, suivi de plusieurs autres missionnaires germanophones. Neuf communautés en Alsace-Moselle sont les héritières de leurs efforts[20].

À part quelques groupes, la majorité de l'Église méthodiste a rejoint en 1938 l'Église réformée de France.

Il existe cependant toujours aujourd'hui en France diverses dénominations méthodistes. La plus connue est celle de l'UEEM, l'Union de l'Église Évangélique Méthodiste. Elle est le fruit d'une fusion intervenue en 2005 entre l'Église Méthodiste de France et l'Union des Églises Méthodistes. L'UEEM a par la suite rejoint l'Église méthodiste unie[21].

Une Société d'étude du méthodisme (SEMF)[22],[23] a été fondé à l'Institut Protestant de Théologie de Montpellier en 2011. Elle a pour but d'étudier et de faire connaitre les différentes facettes du méthodisme francophone, mais aussi international.

Affiliations

La plupart des églises méthodistes sont affiliées au Conseil méthodiste mondial et au Conseil œcuménique des Églises, ainsi que, pour l'Europe, à la Conférence des Églises européennes.

Méthodistes célèbres

Au XIXe siècle, William Wilberforce, homme politique anglais éveillé à la foi évangélique par le méthodisme whitefieldien, fut l'artisan d'une campagne parlementaire de 47 ans qui conduisit à la loi abolissant l'esclavage (en 1833) dans l'Empire britannique ; il mourut trois jours après le vote de cette loi. Bien qu'évangélique, William Wilberforce resta rattaché à l’Église d'Angleterre.

Au XXe siècle et XXIe siècle, George W. Bush, John Edwards, Hillary Rodham Clinton et sa fille Chelsea Clinton, le président philippin Fidel V. Ramos ou l'écrivain Stephen King sont des méthodistes pratiquants, au même titre que le furent Margaret Thatcher, Nelson Mandela et Abel Muzorewa, évêque méthodiste et Premier ministre du Zimbabwe en 1979.

Parmi les Afro-Américains : Mary McLeod Bethune, éducatrice et militante des droits civiques, Daniel Payne fondateur de l'Université de Wilberforce, Harold Washington, premier maire noir de Chicago, les chanteuses Nina Simone et Dionne Warwick.

Dans le monde religieux, citons :

Notes et références

Notes

    Références

    1. http://worldmethodistcouncil.org/about/member-churches/.
    2. "Wesley fut sans doute l’une des figures les plus marquantes du protestantisme. Éminent par son éloquence et sa piété, voire son martyre, il est à l’origine du méthodisme, et bien des wesleyanismes se réclament de ce grand nom ; plus largement, c’est grâce à lui que le mouvement “évangélique” moderne a pris son essor." Simon Scharf, La doctrine de la sanctification selon John Wesley, une approche calviniste de la question de la perfection chrétienne, La Revue réformée (2002 – 2).
    3. Page dédiée au méthodisme sur le site "Musée virtuel du Protestantisme".
    4. Site aménagé en amphithéâtre en 1806 qui comporte aujourd'hui un petit musée du méthodisme.
    5. Notice sur le méthodisme dans le site du Musée protestant virtuel.
    6. « Glossaire de quelques termes de l’Église Méthodiste Unie », sur le site de l’Église méthodiste unie.
    7. Rupert E. Davies, Gordon Rupp, A History of the Methodist Church in Great Britain, Volume One, Wipf and Stock Publishers, USA, 2017, p. 160
    8. Église méthodiste unie, United Methodist sacraments, rites and rituals, umc.org, États-Unis, consulté le 31 décembre 2018.
    9. Préface du recueil de cantiques méthodistes The Methodist Hymn Book, décembre 1933.
    10. Préface de John Wesley à son recueil de cantiques (A collection of Hymns for use of the People called Methodists), 20 octobre 1779.
    11. Jean Baubérot, Le protestantisme, dans "Le fait religieux", sous la direction de Jean Delumeau, Fayard, 1993 - 782 pages.
    12. Émile G. Léonard dans l'Histoire générale du protestantisme, Presses Universitaires de France, Paris, 1964, tome 3, p. 220.
    13. Églises membres, consulté le 31 décembre 2018.
    14. Pentecostal churches, accès le 31 mai 2015.
    15. Nicolas Guy, « Géopolitique et religions au Nigeria », Hérodote, vol. 3, no 106, 2002/, p. 81-122 (DOI 10.3917/her.106.0081., lire en ligne).
    16. Anne Hugon, Un protestantisme africain au XIXe siècle. L'implantation du méthodisme en Gold Coast (Ghana)1835-1874, Éditions Karthala, .
    17. Frederick Cooper (trad. Christian Jeanmought), L'Afrique depuis 1940, Payot-Rivages, , p. 122.
    18. Par exemple, "Elisabeth Fourmaud, quaker, puis méthodiste, épouse en 1818 Louis Jaulmes, membre de l’Église réformée de Congénies. (...) [ce] père Réformé et [cette] mère quaker convertie méthodiste, [ont] trois fils pasteurs méthodistes [et] quatre fils dans l'‟église réformée.", Actes du 2e Colloque sur les relations entre Quakers et Réformés francophones à travers les siècles (16-18 octobre 2009), intervention de Mme Christine Jaulmes, p. 3-4, Éditeur : centre quaker de Congénies..
    19. Maury 1892, p. 415-434.
    20. « Union de l’Église Évangélique Méthodiste de France (UEEMF) », sur Site du Conseil National des églises évangéliques de France (consulté le ).
    21. Église méthodiste unie, Le méthodisme francophone en Europe, ueem.umc-europe.org, France, consulté le 31 décembre 2018.
    22. « Société d’études du méthodisme français », sur Musée protestant (consulté le ).
    23. « Société d'Etudes du Méthodisme Français », sur Société d'Etudes du Méthodisme Français (consulté le ).

    Annexes

    Bibliographie

    • Claude-Jean Bertrand, Le Méthodisme, Librairie Armand Colin, 1971.
    • Léon Maury, Le Réveil religieux dans l’Église réformée à Genève et en France, vol. 2, Paris, .

    Articles connexes

    Liens externes

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