Moluques

Les Moluques, en indonésien Maluku, sont un archipel situé dans l'Est de l'Indonésie et formant un territoire de 74 500 km2 pour plus de 2 millions d'habitants.

Pour les articles homonymes, voir Maluku.

Moluques
Meloluque 

Carte des Moluques.
Géographie
Pays Indonésie
Localisation Mer d'Halmahera, mer des Moluques, mer de Céram, mer de Banda (océan Pacifique) et mer d'Arafura (océan Indien)
Coordonnées 2° S, 128° E
Superficie 74 500 km2
Nombre d'îles 632
Île(s) principale(s) Halmahera, Céram, Buru, Yamdena et Wetar
Point culminant Gunung Binaiya (3 027 m sur Céram)
Administration
Provinces Moluques et Moluques du Nord
Démographie
Population 2 100 000 hab. (2006)
Densité 28,19 hab./km2
Plus grande ville Ambon
Autres informations
Découverte Préhistoire
Fuseau horaire UTC+9
Géolocalisation sur la carte : Indonésie
Moluques
Archipels en Indonésie

Ces îles productrices d'épices ont attiré les Européens principalement Portugais dans l'archipel indonésien au début du XVIe siècle.

Divisions administratives

L'archipel est divisé depuis 1999 en deux provinces distinctes :

Origine du nom

Le nom des Moluques, en indonésien Maluku, vient de Jazirat al Muluk, « l'île des rois », que leur donnaient les marchands arabes[1].

Histoire

Situation des Moluques en Indonésie.

Les noms d'Ambon, des îles Gorong, de Maluku et de Céram sont attestés dès le XIVe siècle. Le Nagarakertagama, poème épique écrit en 1365 sous le règne (1350-1389) du roi Hayam Wuruk de Majapahit dans l'Est de l'île de Java, mentionne « Ambwan », « Gurun », « Maloko » et « Seran » parmi les quelque cent « contrées tributaires » du royaume. En réalité, le territoire contrôlé par Majapahit ne s'étendait que sur une partie de l'Est et du Centre de Java. Les « contrées tributaires » étaient en fait des comptoirs formant un réseau commercial dont Majapahit était le centre. Majapahit y envoyait des dignitaires dont le rôle était de s'assurer que ces comptoirs ne s'adonnaient pas à un commerce privé qui échapperait au royaume.

Vers 1460, sous l'influence de la principauté musulmane de Gresik à Java, l'île de Ternate est la première contrée des Moluques à s'islamiser.

En 1511, une flotte portugaise, partie de Goa en Inde sous le commandement du vice-roi Afonso de Albuquerque, s'empare de Malacca, qui était devenu le plus grand port d'Asie du Sud-Est. Immédiatement, les Portugais s'installent ensuite aux Moluques. Ils notent une tradition de « quatre piliers », constitués par les quatre royaumes de Bacan, Jailolo (dans l'île de Halmahera), Ternate et Tidore, qui symbolisent l'unité et la complétude des Moluques. Ce monde est dominé par Ternate et Tidore, dont le réseau maritime et commerçant s'étend de Célèbes à la péninsule de Doberai à l'extrémité occidentale de la Nouvelle-Guinée[2].

La destruction de la flotte javanaise lors de la prise de Malacca par les Portugais s'est traduite par un déclin du commerce javanais et malais. Les petits royaumes rivaux de Ternate et Tidore s'efforcent donc chacun d'attirer l'intérêt des Portugais. Ces derniers s'allient à Ternate, où ils construisent un fort en 1522. Le roi leur cède Ambon. Mais ils sont expulsés de Ternate en 1575. Ils se réinstallent à Tidore, où ils construisent de nouveau un fort en 1578.

Dans son Historia das Molucas perdue[3], le Portugais António Galvão écrit pour sa part vers 1544 que c'est avec la Chine que les Moluques ont dû avoir leurs premières relations maritimes.

Saint François Xavier, cofondateur de l'ordre des Jésuites avec Ignace de Loyola, jette les bases d'une mission à Ambon, Morotai et Ternate en 1546 et 1547, marquant le début de l'implantation du catholicisme en Indonésie.

En 1562, des dominicains entreprennent la christianisation de Solor.

L'essor du royaume de Demak à Java, durant le XVe siècle, favorise l'islamisation de l'archipel. La principauté de Giri dans l'Est de Java mène une politique indépendante. Hitu notamment, sur la côte nord de l'île d'Ambon, est sous son influence.

Carte des Moluques par Willem Blaeu (1630).
Carte particulière des Isles Moluques par Jacques-Nicolas Bellin (1760).

En 1602, les Néerlandais fondent la Vereenigde Oostindische Compagnie (Compagnie néerlandaise des Indes orientales) ou VOC. Celle-ci s'empare d'Ambon en 1605, qui devient son siège. Les Portugais sont définitivement expulsés des Moluques en 1636. Les Néerlandais accordent un comptoir aux Anglais à Ambon, puis les en expulsent aussi.

En 1619 Jan Pieterszoon Coen, le nouveau gouverneur-général de la VOC, attaque le fort de Jayakarta dans l'ouest de Java et en expulse la garnison de Banten. Sur les ruines, il rebâtit Batavia, où la VOC déménage son siège.

La VOC a du mal à imposer son monopole sur la production et le commerce des épices comme le clou de girofle (les Moluques en étant la source exclusive à l'époque), le poivre, la muscade, que le marché européen demande alors que le marché asiatique stagne. Ayant pris Malacca aux Portugais en 1641, les Néerlandais peuvent maintenant concentrer leurs forces sur l'est de l'archipel. La résistance de la principauté de Hitu dans le nord d'Ambon est définitivement brisée en 1646. À cette époque, Ambon produit plus de girofle que le monde ne peut en consommer. La VOC entreprend donc de détruire la production des autres îles.

Avec la soumission du royaume de Gowa dans le sud de Sulawesi, la position de la VOC dans l'est de l'archipel est désormais assurée. Jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, ses activités économiques restent néanmoins limitées aux Moluques et à la côte nord de Java, qu'elle contrôle totalement avec la fin des guerres de successions javanaises en 1755.

Le déclin de la VOC et sa faillite en 1799 font passer les Moluques au second plan.

J. Tideman, gouverneur des Moluques, en 1929.

Une part importante du recrutement de l'armée coloniale néerlandaise, la Koninklijk Nederlandsch-Indisch Leger (KNIL), se fera chez les Amboinais. Pendant la période de confrontation militaire et diplomatique, de 1945 à 1949, ce sont des soldats amboinais qui combattent les troupes républicaines. En 1946, un accord est signé, par lequel les Néerlandais reconnaissent la souveraineté de facto de la République d'Indonésie sur Java, Madura et Sumatra. L'accord prévoit la création d'un État fédéral dont la République serait une composante. Les Néerlandais créent des États fantoches[réf. souhaitée], dont le Negara Indonesia Timur ou NIT (« État de l'Indonésie orientale »). En 1949, le Royaume des Pays-Bas accepte finalement le transfert de la souveraineté à la République d'Indonésie. Les Amboinais sont dans leur majorité hostiles à l'intégration à l'Indonésie.

En avril 1950, à l'arrivée des troupes indonésiennes, des affrontements éclatent à Makassar (Sulawesi du Sud) entre des soldats amboinais de la KNIL et l'armée indonésienne. Un Amboinais, le Dr. Soumokil, ministre de la Justice du NIT, proclame l'indépendance de la République des Moluques du Sud (RMS). Les troupes républicaines débarquent en juillet aux Moluques. En novembre, la rébellion est écrasée et le gouvernement de la RMS part en exil aux Pays-Bas.

L'île de Ternate vue d'Almahera.

Dans les années 1970, le régime Soeharto encourage la transmigrasi, une politique de départ volontaire de Java et Bali, surpeuplées, vers les autres îles de l'Indonésie, commencée en 1905 par le gouvernement colonial. Les Moluques voient l'arrivée d'immigrants musulmans en provenance de Sulawesi, qui prennent progressivement le contrôle de l'économie locale[réf. souhaitée]. Cette situation crée des tensions entre la population locale et les immigrants.

En , un incident provoque des affrontements entre les deux communautés, qui se transforment rapidement en violences entre musulmans et chrétiens qui en quatre ans font plus de 12 000 morts et causent le déplacement de plusieurs centaines de milliers de personnes. Le conflit prend fin progressivement à partir de 2002, à la suite des accords de Malino, mais l'archipel connaît encore de brefs regains de violence[4].

Habitants des Moluques

Les Moluquois ne constituent pas une ethnie spécifique, mais désignent l’ensemble des habitants de l’archipel des Moluques. Ils sont très métissés. Des gènes provenant des Indiens, Arabes, Chinois et Portugais se mélangent aux peuples d’origine malaise et papoue, auxquels on peut ajouter les marins bugis de Célèbes et récemment des Javanais.

Cette diversité n’empêche pas les Moluquois d’être parmi les populations les plus occidentalisées de la région. Ceci est dû à la colonisation néerlandaise, à leur petit nombre (2,1 millions) et à l’enjeu stratégique qu’ils représentaient pour entretenir le commerce des épices. Il était important d’avoir une paix sociale.

Les îles du Nord sont majoritairement musulmanes et comptèrent, autour du XVe siècle, une profusion de sultanats indépendants souvent en conflit. Le Sud des Moluques est plutôt catholique, religion diffusée par les missionnaires néerlandais après les portugais.

Quelques ethnies autochtones vivent encore au centre de certaines îles, où ils furent repoussés par l’arrivée de migrants en provenance de Célèbes et de Java.

Après le déclin de la Compagnie de Indes orientales néerlandaise, nombre de Moluquois intégrèrent les rangs de l’armée néerlandaise. Ce ne fut pas sans conséquence après l’indépendance de l’Indonésie dans les années 1950 quand ils tentèrent de créer une république autonome violemment combattue par l’Indonésie, alors qu’ils étaient abandonnés[réf. souhaitée] par les Néerlandais. Une importante communauté moluquoise s’enfuit aux Pays-Bas où leur situation est assez comparable à celle des harkis en France[réf. souhaitée]

Langues

On parle différentes langues aux Moluques.

La plupart appartiennent au sous-groupe oriental du groupe central-oriental de la branche malayo-polynésienne des langues austronésiennes. On parle aussi un dialecte malais, le bahasa Melayu Ambon malais d'Ambon »).

On trouve aussi des langues de la famille du papou occidentale des langues papoues, notamment dans le nord de Halmahera, à Ternate et à Tidore.

De la présence portugaise aux Moluques, il reste d'abord une influence linguistique sur le vocabulaire malais : bendera drapeau », de bandeira), meja table », de mesa), pesta fête ») etc.

Le catholicisme à Florès et Timor est un autre héritage de la présence portugaise.

Les violences interreligieuses

Depuis des siècles, l'islam, venu de Java au XVe siècle, et le protestantisme apporté par les Néerlandais au XVIIe siècle, cohabitent aux Moluques. Selon les statistiques officielles, les musulmans représentaient 49,9 % de la population de l'archipel en 1971.

À partir des années 1970 se produit une immigration en provenance du sud de l'île de Célèbes et de l'île voisine de Buton. Ces Bugis, Buton et Makassar (qu'on désignera par le sigle de BBM) sont majoritairement musulmans. Actifs et entreprenants, ils dominent bientôt le commerce, la petite entreprise et contribuent également à modifier l'équilibre religieux[réf. souhaitée]. Toujours d'après les statistiques officielles, les musulmans représentent 55 % de la population des Moluques en 1980[réf. souhaitée], 56,8 % en 2000[réf. souhaitée].

Ce déséquilibre démographique va être aggravé par une politique de « préférence musulmane » mis en œuvre dans les années 1990 par le régime Soeharto, sous la pression de l'Indonesian Association of Muslim Intellectuals (en) (Association des intellectuels musulmans d'Indonésie) ou ICMI créée en 1991[réf. souhaitée].

Divers

On appelait autrefois « crabe des Moluques » la limule (bien que celle-ci ne soit pas un crustacé).

Voir aussi

Bibliographie

  • Andrée Feillard et Rémy Madinier, La fin de l'innocence? L'islam indonésien face à la tentation radicale de 1967 à nos jours, Les Indes Savantes, 2006.
  • Jacques Raymond, Les Moluques : fabuleuses îles aux épices d'Indonésie, éditions de La Flandonnière, 2008.

Liens externes

Notes et références

  1. Merle Calvin Ricklefs, A History of Modern Indonesia Since C. 1300, p. 24.
  2. Barbara Watson Andaya et Leonard Y. Andaya, A History of Early Modern Southeast Asia, 1400–1830, Cambridge University Press, Cambridge (2015), p. 112.
  3. L'ouvrage est cité à la page 57 du tome neuvième de la Bibliothèque curieuse, historique et critique ou catalogue raisonné de livres dificiles à trouver de David Clément, publiée en 1760.
  4. « Le Point – Actualité Politique, Monde, France, Économie, High-Tech, Culture », sur Le Point.fr (consulté le ).
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