Nama (peuple)

Les Nama (anciennement appelés Namaqua) forment une population de pasteurs d'Afrique australe qui vivent principalement en Namibie, également en Afrique du Sud et à un moindre degré au Botswana ; c'est une des principales branches khoïkhoï.

Pour les articles homonymes, voir Nama.

Nama
Femme namaqua dans le désert du Kalahari, en Namibie
Populations importantes par région
Namibie 246 000
Afrique du Sud 76 000
Botswana 1 600
Population totale 324 000
Autres
Langues nama
Ethnies liées Khoïkhoïs

Ethnonymie

Selon les sources et le contexte, on recense différentes formes : Nama, Naman, Namaqa, Namaqua, Namaquois, Namaquas, Namas, Nawakwa, Rooi Nasie[1]. Le terme Nama est la transcription du khoïkhoï ǀawa, qui signifie rouge [2]. Le terme qwa est un suffixe qui désigne un peuple, comme dans Griquas.

L'utilisation d'un ethnonyme commun a été introduite par les missionnaires et date du XIXe siècle, quand les Namas, sous la pression de la colonisation, se sont répandus, grâce au cheval, sur les territoires de la Namibie et de la Colonie du Cap[2]. Rouges les désignent comme ni Noirs ni Blancs.

Appelés autrefois Hottentots, terme désormais chargé du racisme dont l'histoire les a accablés, les Namas forment aujourd'hui quatorze chefferies traditionnelles, dont les endonymes, parfois similaires nonobstant des variations dialectales, font l'objet de transcriptions approximatives et variables. Leurs exonymes ont parfois des connotations insultantes. Ces quatorze sous groupes ethniques sont représentés par autant de « Kaptein (de) » qui sont reconnus par la constitution. Ils se sont constitués à l'époque des explorateurs, avant la colonisation, par migrations.

Chefferies namas[3]
EndonymeAliasExonyme habituelTraduction de l'exonymeSiège
Gai-ǁkhaunǁKhaubenRooi NasieNation rouge (Namas) (en)Hoachanas
‡AoninNaranin, Hurinin ou Topnaar (de) méridionaux« Haut de page » méridionauxRooibank au sud est de Walvis Bay
!GomenTopnaar septentrionaux« Haut de page » septentrionauxSesfontein
!Gami-‡nûnBondelswarts (Cf. révolte des Bondelswarts)« Ballots noirs »Warmbad (en)
!Khara-khoin!Khara-gai-khom« Fransmanne » ou gens de Simon Koper (de)Hottentots françaisGochas (de) et Lokgwabe
ǁHabobenVeldschoendrager (de)Porte brodequinsKoës (de)
ǁÕ-gainGroot DodenGrands tueursSchlip (en)
ǁKhau-|gõan‡Khari-ǁkhaunSwartbooisGens de Petrus Swartbooi i.e. Pierre Boy noirRehoboth puis Salem, Ameib et Franzfontein, au nord ouest de Windhoek.
Kharo-!oanTsainKeetmanshoopersHabitants de KeetmanshoopKeetmanshoop (installation en février 1850)
!Aman!AmainBethanierHabitants de BethanieBethanie (installation au XVIIIe siècle)
Hõa-|aranǁAixa-ǁain ou Toroxa-ǁainAfrikaner (en)AfrikanerophonesFort ǁKhauxaǃnas (en) puis en 1840 Windhoek
Gai–ǀkhauanLamberts (en)Gens d'Amraal Lambert (en)Léonardville (en) (installation vers 1840)
ǀHai-|khauan‡Khan-|khauanBersebaersHabitants de Berseba (en)Berseba (en) (installation en 1812)
ǀKhobesin!Uri-gamnWitbooi (de)Gens de Hendrik Wittboy i.e. Henri Boy blancGibeon (installation en 1863)

Le premier est l'origine des huit suivants, qui s'en sont séparés pour fonder de nouvelles implantations depuis le Namaqualand vers un Damaraland aux contours alors imprécis. Les cinq derniers sont originaires de la Colonie du Cap. Précocement acculturés, ils sont regroupés sous le terme d'Oorlam, qui est également utilisé pour distinguer les Métis. Les Namadaman de Vaalgras (en) et des environs de Keetmanshoop sont des descendants de prisonniers de guerre Héréros acculturés[2].

Langues

Leur langue traditionnelle est le nama, une langue khoïsan[4], mais la plupart parlent maintenant l'afrikaans.

Histoire

Le Kaptein Hendrik Witbooi (au centre) et ses compagnons namas (avant 1905).
Famille Nama (1906)

Originaire du sud[réf. nécessaire], le peuple Nama (appelé à tort « Hottentot » par les colons) réparti par clans, pratique pendant plusieurs siècles une vie pastorale à l'arrière du pays, loin des côtes froides et arides, élevant et gardant des troupeaux de chèvres et de moutons, rassemblant du bois pour le feu et récoltant du miel ; ils possèdent des chiens sourciers capables de détecter les points d'eau : quand un chien en repère un, ils arrêtent leur transhumance et établissent leur campement. Les Namas sont christianisés depuis le XVIIIe siècle sous l'influence de missionnaires et portent des prénoms bibliques[5].

Après le partage unilatéral de l'Afrique entre les nations européennes lors de la conférence de Berlin (1884-1885), l'Empire allemand se voit accorder le territoire allant du sud de Lüderitz, à la pointe nord de la côte des Squelettes, en passant par Etosha, Waterberg, Omaruru, Rehoboth et, bien entendu, tout le territoire pastoral nama. Les échauffourées ne tardent pas d'éclater entre les forces coloniales allemandes et les clans namas dirigés par leur chef, Hendrik Witbooi. Ce dernier est qualifié d'« insurgé » et ne reconnaît pas l'autorité des colons.

En 1905, de nombreux Namas sont massivement déportés vers Shark Island, rejoignant les Héréros : un rapport de 1917-1918 rédigé par Thomas O'Reilly parle de près de 20 000 Namas morts des suites de mauvais traitements, disette, et exécutions[6].

En 1915, le Territoire du Sud-Ouest africain, future Namibie, passe sous protectorat britannique.

En 1918, le jeune juge britannique Thomas O'Reilly rédige un rapport accablant, le Blue Book Union of South Africa – Report On The Natives Of South-West Africa And Their Treatment By Germany »), réédité en 2015.

À la suite de la découverte de diamants à l'embouchure du fleuve Orange dans les années 1920, des prospecteurs se sont installés dans la région, construisant des villes comme Alexander Bay et Port Nolloth, processus qui s'est accéléré avec l'appropriation des terres traditionnelles qui avait commencé dès le début de l'ère coloniale. Sous le régime d'apartheid, les derniers pasteurs furent encouragés à se fixer dans les villages d'un territoire appelé « Namaland » situé au sud.

Le , les Herreros et les Namas reçoivent vingt crânes de leurs ancêtres lors d'une cérémonie à l'hôpital universitaire de la Charité de Berlin[7] ; malheureusement, l'identité des victimes à qui appartenaient ces crânes n'a pas été déterminée[8], mais les scientifiques de l'hôpital de la Charité sont certains qu'ils proviennent de Namibie.

En , une motion est déposée au Bundestag par le député Niema Movassat, pour le parti de gauche Die Linke :

« Le parlement allemand se souvient des atrocités commises par les troupes coloniales de l’empire allemand dans son ancienne colonie du Sud-Ouest africain, et entend honorer la mémoire des victimes de massacres, d’expulsions, d’expropriations, de travail forcé, de viols, d’expérimentations médicales, de déportations et d’enfermements inhumains dans des camps de concentration. La guerre d’extermination menée par les troupes coloniales allemandes entre les années 1904 et 1908 a entraîné la mort de 80 % du peuple herero, de plus de la moitié du peuple nama et d’une large partie des groupes ethniques Damara et San. »

Population et génétique

Nama jouant de la guitare près de Bethany (Namibie).

Les pasteurs Namaqua parlant le khoekhoe d'aujourd'hui présentent des proportions élevées de mélange est-africain, liant l'ascendance est-africaine aux bergers khoïkhoïs[9] : ils ont beaucoup en commun avec les San, partageant les mêmes racines et caractéristiques linguistiques. C'est pour cela qu'on les regroupe sous le nom de Khoïsan.

Les Namaquas vivaient sur le fleuve Orange au Sud de la Namibie et au Nord de l'Afrique du Sud. Les premiers colons les appelaient les Hottentots.

Économie et culture

Tentes Nama en Afrique du Sud

Notes et références

  1. Source BnF
  2. Johan S. Malan, trad. Kuno Franz Robert Heinrich Budack, Die Völker Namibias, p. 120, Éditions Klaus Hess, Göttingen, 1998 (ISBN 3-933117-10-0).
    Cité in « Menschen in Namibia », Musée de Swakopmund (de), Swakopmund, novembre 2002 (brochure de présentation de l'exposition permanente).
  3. Johan S. Malan, trad. Kuno Franz Robert Heinrich Budack, Die Völker Namibias, p. 122, Éditions Klaus Hess, Göttingen, 1998 (ISBN 3-933117-10-0).
  4. (en) Fiche langue[naq]dans la base de données linguistique Ethnologue.
  5. (en) Klaus Dierks, Chronology of Namibian History, Windhoek, Namibia Scientific Society, 2002 (cité par E. Fontenaille-N'Diaye, in Blue Book, Calmann-Lévy, 2015, p. 29 et suiv.).
  6. (en) Jan-Bart Gewald & Jeremy Silvester, Words Cannot be Found, German Colonial Rule in Namibia: an Annotated Reprint of the 1918 Blue Book, Leiden & Boston, Brill, 2003.
  7. sur le site Deutsche Welle
  8. Anne Poiret, Namibie génocide du IIe Reich. DVD, 2012, Zed Production, 52 min
  9. (en) Mário Vicente et al., Male-biased migration from East Africa introduced pastoralism into southern Africa, BMC Biol., 7 décembre 2021 ; 19(1):259. doi: 10.1186/s12915-021-01193-z.

Voir aussi

Bibliographie

  • Kuno Franz Robert Heinrich Budack Budack, Die traditionelle politische Struktur der Khoe-khoen in Südwestafrika (Stamm und Stammesregierung, auf historischer Grundlage). Unveröffentlichte Dissertation., Faculté de philosophie de l'université de Pretoria, Pretoria, 1972.
  • K.F.R. Budack « The 4=Aonin or Topnaar of the lower !Kuiseb valley and the sea. », in A. Traill, A.S.I. Communications, no 6 "Khoisan Linguistic Studies", no 3, p. 1-41, Institut d'études africaines de l'Université du Witwatersrand, Johannesbourg, 1977.
  • K.F.R. Budack, « The Khoe-khoen of South West Africa », in SWA Annual, p. 111-115, South West Africa Publications, Windhoek, 1979.
  • K.F.R. Budack, « A harvesting people on the South Atlantic coast », in S.A. Journal of Ethnology, vol. 6, no 2, Association of Afrikaans Ethnologists, Johannesburg, 1983.
  • (de) Andreas Heinrich Bühler, Der Namaaufstand gegen die deutsche Kolonialherrschaft in Namibia von 1904-1913, IKO-Verlag für Interkulturelle Kommunikation, Francfort, Londres, 2003, 435 p. (ISBN 3-88939-676-3)
  • (de) Sabine Klocke-Daffa, « Wenn du hast, musst du geben » : soziale Sicherung im Ritus und im Alltag bei den Nama von Berseba/Namibia, Lit, Münster, 2001, 410 p. (ISBN 3-8258-5260-1) (version remaniée d’une thèse soutenue à l’Université de Münster en 1998)
  • (de) Sigrid Schmidt, Als die Tiere noch Menschen waren : Urzeit- und Trickstergeschichten der Damara und Nama in Namibia, Rüdiger Köppe Verlag, Cologne, 1995, 256 p. (ISBN 3-927620-88-2)
  • (de) Sigrid Schmidt, Sagen und Schwänke in Afrika : Erzählungen der Damara und Nama, R. Köppe, Cologne, 1997, 245 p. (ISBN 3-927620-69-6)
  • (en) James Edward Alexander (Sir), An expedition of discovery into the interior of Africa : through the hitherto undescribed countries of the Great Namaquas, Boschmans, and Hill Damaras, H. Colburn, Londres, 1838, 2 vol.
  • (en) John Campbell (Rev.), The life of Africaner, a Namacqua chief of South Africa, American Sunday School Union, Philadelphia, 1831, 35 p.
  • (en) P. Carstens, « The Socio-Economic Context of Initiation Ceremonies Among Two Southern African Peoples », in Canadian Journal of African Studies / Revue Canadienne des Études Africaines (Québec), 1982, vol. 16, no 3, p. 505-522
  • (en) P. Carstens, « The Inheritance of Private Property among the Nama of Southern Africa Reconsidered », in Africa (Londres), 1983, vol. 53, no 2, p. 58-70
  • Horst Drechsler, Le Sud-Ouest africain sous la domination coloniale allemande : la lutte des Hereros et des Namas contre l'impérialisme allemand, 1884-1915, Akademie-Verlag, Berlin RDA, 1986, 283 p.
  • (en) Carl Hugo Linsingen Hahn, The native tribes of South-West Africa : The Ovambo - The Berg Damara - The bushmen of South West Africa - The Nama - The Herero, Cape Times Ltd., Le Cap, 1928, 211 p.
  • (en) Winifred Hoernlé, The social organization of the Nama and other essays, Witwatersrand University Press, Johannesburg, 154 p. (ISBN 0-85494-867-8)
  • (en) Reinhart Kössler, In search of survival and dignity : two traditional communities in southern Namibia under south African rule, Gamsberg Macmillan, Windhoek, 2005, 374 p. (ISBN 978-99916-0-598-2)
  • (en) Benjamin Ridsdale (Rev.), Scenes and adventures in Great Namaqualand, T. Woolmer, Londres, 1883, 293 p.
  • (en) Sigrid Schmidt, « Observations on the Acculturation of the Nama in South West Africa/Namibia », in African Studies Johannesburg, 1984, vol. 43, no 1, p. 31-42
  • (en) Ursula Trüper, The invisible woman : Zara Schmelen ; African mission assistant at the Cape and in Namaland, Basler Afrika Bibliographien, Bâle (Suisse), 2006, 118 p. (ISBN 978-3-905141-91-7)

Articles connexes

Liens externes

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