Tarente

Tarente (Taranto en italien, Tarde en tarentin, Τάρας / Táras en grec ancien, Tarentum en latin) est une ville italienne d'environ 195 000 habitants, chef-lieu de la province du même nom dans les Pouilles[2].

Pour les articles homonymes, voir Tarente (homonymie).

Tarente
'Taranto'

Armoiries

Castello Aragonese, Tarente.
Administration
Pays Italie
Région Pouilles 
Province Tarente 
Maire
Mandat
Rinaldo Melucci (PD)
2017-2022
Code postal 74100
Code ISTAT 073027
Code cadastral L049
Préfixe tel. 099
Démographie
Gentilé Tarentin
Population 195 024 hab. (30-11-2019[1])
Densité 899 hab./km2
Géographie
Coordonnées 40° 28′ 00″ nord, 17° 14′ 00″ est
Altitude Min. 15 m
Max. 15 m
Superficie 21 700 ha = 217 km2
Divers
Saint patron San Cataldo vescovo
Fête patronale 10 mai
Localisation

Localisation dans la province de Tarente.
Géolocalisation sur la carte : Italie
Tarente
Géolocalisation sur la carte : Italie
Tarente
Géolocalisation sur la carte : Pouilles
Tarente
Liens
Site web www.comune.taranto.it

    Colonie grecque fondée par des exilés spartiates dans l'Antiquité, elle était l’une des cités les plus riches de la Grande-Grèce grâce à sa position stratégique dans le commerce méditerranéen tout le long de la période classique. Tarente abrite aujourd'hui un grand port, un arsenal militaire et un imposant complexe industriel, l'ILVA.

    Géographie

    Représentations cartographiques de la commune
    Carte OpenStreetMap
    Carte topographique
    1 : carte dynamique ; 2 : carte OpenStreetMap ; 3 : carte topographique
    Ponte Girevole.

    Tarente est un port du Sud de l'Italie construit sur le golfe de Tarente. La vieille ville, la Città Vecchia, ou encore Borgo Antico, héritière de la colonie spartiate, a été établie sur une île rectangulaire qui commande le chenal d'accès à la rade, appelée Mare Piccolo.

    Un pont tournant métallique à deux volées, appelé Ponte Girevole[3], inauguré en 1887, livre passage à la navigation entre le golfe de Tarente et la rade. Ce pont est très semblable à l'ancien pont tournant nommé pont National construit en 1861[4] de Brest, ville avec laquelle Tarente se trouve jumelée.

    Histoire

    Nomos de la cité de Tarente à l'effigie d'un Taras et d'un cavalier. Description revers : Taras nu, chevauchant un dauphin à gauche, tenant une petite Niké stéphanophoros de la main droite et une corne d’abondance de la main gauche ; derrière à droite, un foudre (fulmen). Description avers : cavalier nu, coiffé d’un casque attique à triple aigrette, galopant à droite, tenant une javeline transversale de la main droite, un bouclier et deux autres javelines de la main gauche.
    Nomos incus de Tarente : Phalanthos chevauchant le dauphin, inscription ΤΑΡΑΣ (Taras), env. 500 av. J.-C.
    Tarente au XVIe siècle, gravure (1761).
    Vue du port, 1930.
    Photo de Ernesto Burzagli.

    La ville est fondée par les Parthénies[5], des exilés spartiates[6], en menés par Phalantos choisi comme œciste par l'oracle de Delphes. Néanmoins, il est assez probable qu'à Tarente une colonie grecque mycénienne ait été fondée dès la fin du XVe siècle av. J.-C.[7] Le site est avantageux, et ce pour deux raisons : sa position stratégique sur la mer avec un port naturel déjà réputé depuis une Antiquité plus lointaine et sa position dominante sur les plaines de l'arrière-pays. Par contre, celui-ci est peuplé par des communautés denses et hostiles, empêchant l'extension du domaine agricole[8].

    La colonie élève des destriers réputés. La cavalerie légère tarentine devient célèbre à l'époque classique. Sa vitesse et son adresse se combinent avec la phalange hoplitique en permettant de défendre ses flancs. Les besoins croissants en mercenaires dans les armées du monde hellénistique rendent les Tarentins très recherchés. Ils font par exemple partie de l'armée d'Antigone le Borgne durant les guerres des diadoques. Au IIIe siècle av. J.-C., notamment chez les Séleucides, « Tarentin » devient un terme générique désignant des cavaliers légers.

    Des luttes incessantes l’opposent aux populations d’Apulie. Tarente atteint son apogée au IVe siècle av. J.-C. et exerce alors une véritable hégémonie sur la Grande-Grèce, aussi bien sur le plan politique, qu'économique et culturel. Sa situation maritime favorable contribue à faire de la cité un centre important de commerce maritime et de pêche. Plusieurs auteurs anciens comme Polybe ou Dion Cassius vantèrent l'exceptionnelle disposition de son port.

    Au IVe siècle av. J.-C., Tarente voit les plus grands pythagoriciens : Philolaos très probablement (vers -400), Lysis, Eurytos et Archytas. Ce dernier dirigea la cité entre -367 et -361. Cette période correspond à un véritable âge d'or pour la cité.

    Malgré l'intervention de Pyrrhus, Rome impose sa protection à Tarente et aux cités grecques voisines en En 212 av. J.-C., Tarente passe sous l’autorité d’Hannibal, ce qui lui vaut, une fois reprise, d’être mise à sac par les troupes de Fabius Cunctator. Les Romains en font la conquête définitive en , mais la paix avec la ville n'est faite qu'à partir de Après la conquête romaine, son importance décroît, les Romains lui préférant Brindisi.

    À la suite des guerres avec les Goths, l'Empire byzantin la reconquiert en 540. Elle est successivement conquise en 661 par les Lombards, les Sarrasins, et enfin par le Normand Robert Guiscard, en 1063. Plus tard, elle partage le sort du royaume de Naples.

    De 1806 à 1815, Tarente, dont les travaux de fortifications ont été confiés au maréchal Soult, est une base navale française très importante dans la guerre contre les Anglais et les Russes. Le titre de duc de Tarente est donné par Napoléon au maréchal Macdonald (1765-1840).

    En 1940, lors de la Seconde Guerre mondiale, la flotte de la Regia Marina italienne, mouillée dans le port de Tarente, subit de grosses pertes à la suite d'un bombardement massif de la flotte aérienne de la Royal Navy britannique (bataille de Tarente).

    Archéologie

    Temple dorique

    Les deux colonnes du temple dorique.

    Le « temple de Poséidon » ou temple dorique de Tarente est l'un des plus anciens temples de la Grande-Grèce. Il est le seul lieu de culte grec encore visitable du quartier ancien (Borgo Antico). Les ruines du temple, situé sur la piazza Castello, se trouvent incluses à la fois dans l'église de la Sainte-Trinité, la cour de l'Oratorio dei Trinitari, la maison Mastronuzzi et le couvent des Célestins. En 1700, on pouvait encore voir les vestiges de dix colonnes, mais celles-ci furent enlevées, et finalement disparurent lors de la reconstruction du couvent, en 1729.

    À la fin du XIXe siècle, l'archéologue Luigi Viola (it) étudia les restes et attribua le temple au culte de Poséidon, mais on considère aujourd'hui comme plus probable de l'attribuer à une divinité féminine : Artémis, Perséphone ou encore Héra. D'autres éléments du temple ont été dispersés avec les démolitions du couvent en 1926 et de l'église en 1973.

    Les deux colonnes doriques subsistantes ont 8,47 m de hauteur, avec un diamètre de 2,05 m et un empattement de 3,72 m : on peut supposer que le temple faisait face au chenal navigable, et qu'il présentait 6 colonnes en façade et 13 sur les côtés. Le profil de chapiteaux fait remonter la construction du temple au début du Ve siècle av. J.-C.[9]

    L'artisanat

    Dans ce domaine, il semble que les liens de philia entre cité-mère et colonie soient particulièrement visibles. Que ce soit dans la statuaire ou dans la vaisselle d'époque archaïque, le répertoire des productions locales s'inspire très fortement du style laconien ; parfois et même longtemps considéré comme un « art provincial ». La déesse de Tarente et d'autres éléments artistiques témoignent de ce lien, non seulement par l'export d'un culte très lié à la cité-mère grecque, mais également par l'arrivée d'artisans de la métropole au début de la période classique.

    C'est à Tarente qu'apparaît la plus ancienne production coroplastique de type dédalique. Elle se compose généralement de fragments issus du grand sanctuaire de Perséphone au Pizzone. Il s'agit la plupart du temps de statuettes de divinités féminines ou de femmes dédicantes. Elles sont représentées avec un corps tubulaire et un visage encadré de tresses qui rappellent le style dédalique développé dans le Péloponnèse[10]. Cette relation et cette proximité entre styles laconien et tarentin pose par ailleurs des soucis dans la caractérisation et l'attribution des productions de vaisselles ou de statuaire en bronze à l'époque archaïque. La provenance de certains bronzes très célèbres tels que le vase de Vix sont encore parfois le fruit de débats entre spécialistes[11].

    Moyen Âge

    Castello Aragonese, Tarente.

    Castello Aragonese

    Le Castello Aragonese, qui commande le chenal d'accès à la rade, a des fondations byzantines du Xe siècle, mais il doit son état actuel aux travaux menés à la fin du XVe siècle par le roi Ferdinand II d'Aragon[12].

    Maria Torati, épouse de Pompeio Fraula, seigneur de Resina, de Trimonti et Nosera, conseiller de la grande chancellerie de Naples, y est enterrée dans l'église Saint-Léonard[13].

    Palazzo del Governo

    Ce beau palais d'allure médiévale, en front de mer près du chenal, côté Borgo Nuovo, est en réalité une création de l'architecture de l'époque fasciste, inaugurée en 1934[14].

    Selon la mythologie, des araignées géantes vivaient à Tarente, c'est ce qui a donné le nom « tarentule » aux grosses araignées. Les habitants ont souvent essayé de lutter contre. Lorsque quelqu'un souffrait d'une morsure, une danse mythologique très rythmée permettait de lutter contre la douleur et guérissait la personne.

    Économie

    Tarente possède une importante base navale militaire dotée d'un arsenal, des chantiers de constructions navales, des industries chimiques, un complexe sidérurgique et des industries alimentaires, ainsi qu'une cimenterie du groupe français Vicat.

    Pollution

    Tarente est la ville la plus polluée d'Europe[15] à cause des poisons des industries qui se répandent sur son territoire. La pollution de Tarente provient seulement à 7 % des citoyens, le reste, soit 93 %, est d'origine industrielle. À Tarente chacun des 200 000 habitants respire chaque année 2,7 tonnes de monoxyde de carbone et 57,7 tonnes de dioxyde de carbone.

    L'industrie sidérurgique de Tarente a vu le jour vers 1965 et est aujourd'hui une des plus importantes d'Europe grâce au complexe sidérurgique ILVA et à la raffinerie de la société Shell. Toutefois, cette industrie est très polluante et très peu de mesures ont été prises par le gouvernement tant national que local pour combattre la pollution. Celle-ci a des conséquences très néfastes sur la population. Dès 1997, des cas de néoplasie ont été mis en évidence. En 1999, un parlementaire italien a demandé par une question écrite[16] à la Commission européenne si elle était au courant de cette situation et si elle avait l'attention de prendre des mesures en la matière. Celle-ci a répondu qu'elle n'était pas au courant et que la directive 84/360/CEE du Conseil du 28 juin 1984 relative à la lutte contre la pollution atmosphérique en provenance des installations industrielles ne fixant aucune valeur limite d’émission pour les substances polluantes, il n’était pas possible de conclure qu’il y a eu infraction à la législation communautaire.

    Dix ans plus tard, en octobre 2008, des résultats publiés par INES, l'Inventaire national des émissions et de leur augmentation (Inventario nazionale delle emissioni e loro sorgentioni) a estimé que Tarente est comparable à la chinoise Linfen, appelé « Toxic Linfen » et la roumaine Copşa Mică, les villes les plus polluées au monde pour les émissions industrielles.

    La présence de dioxine est particulièrement problématique à Tarente. On y produit 92 % de la dioxine italienne et 8,8 % des émissions totales européennes. En dix ans leucémies, lymphomes et myélomes ont augmenté du 30-40 %. La dioxine va s'accumuler dans le temps et à Tarente on estime la quantité répandue à kg, trois fois la quantité présente à la catastrophe de Seveso (la ville contaminée par une fuite de dioxine en 1976).

    Le 21 octobre 2008, un article[17] paru dans le journal italien Corriere della Sera a dénoncé publiquement la situation catastrophique de Tarente et le manque de mesures prises pour combattre cette pollution. L'association italienne contre la leucémie a mis en ligne une pétition[18] pour protester contre le manque d'action.

    Administration

    Les maires successifs
    Période Identité Étiquette Qualité
    1993 1996 Giancarlo Cito LAM Entrepreneur
    1996 1999 Gaetano De Cosmo LAM  
    2000 2006 Rossana Di Bello FI Laborantine, entrepreneuse
    2006 2007 Tommaso Blonda   Commissaire extraordinaire
    2007 2017 Ippazio Stefano PRC puis SEL Médecin, pédiatre
    2017 En cours Rinaldo Melucci PD Entrepreneur
    Les données manquantes sont à compléter.

    La faillite

    La commune de Tarente est en état de faillite à cause de l'accumulation de passif, au 31 décembre 2005, de 637 millions d'euros, évalué par Francesco Boccia, chef de la commission de liquidation. Il s'agit d'une des plus lourdes faillites jamais subies par une collectivité locale.

    L'état de faillite a été déclaré le 18 octobre 2006 par le commissaire extraordinaire Tommaso Blonda élu après la démission du maire Rossana Di Bello (it), condamnée à 1 an et 4 mois de prison avec sursis[19] pour abus de pouvoir et faux idéologique dans l'enquête sur la fiducie de la gestion de l'incinérateur municipal à la société Termomeccanica (it).

    Frazione

    Talsano, Lido Azzurro, Lama, San Vito.

    Communes limitrophes

    Carosino, Faggiano, Fragagnano, Grottaglie, Leporano, Lizzano, Massafra, Monteiasi, Montemesola, Monteparano, Pulsano, Roccaforzata, San Giorgio Ionico, San Marzano di San Giuseppe, Statte, Villa Castelli (BR).

    Tourisme

    Musée archéologique national de Tarente

    Boucle d'oreille en or, fin du IVe siècle av. J.-C.

    Objets et mobilier des sites et nécropoles de l'époque grecque (VIe – IVe siècles av. J.-C.).

    La cathédrale de San Cataldo

    Le Duomo de San Cataldo a été construit vers 1071. L'élégante façade baroque date de 1713. La basilique est à trois nefs, avec transept, et crypte. Des vestiges de fresques du XIIe siècle sont visibles. Cataldo est le saint patron de la ville.

    Événements

    Personnalités liées à la commune

    Citations

    Septimi, Gadis aditure mecum et
    Cantabrum indoctum iuga ferre nostra et
    Barbaras Syrtis, ubi Maura semper
    Æstuat unda :

    Tibur Argeo positum colono
    Sit meæ sedes utinam senectæ,
    Sit modus lasso maris et viarum
    Militiæque.

    Unde si Parcæ prohibent iniquæ,
    Dulce pellitis ovibus Galæsi
    Flumen et regnata petam Laconi
    Rura Phalantho.

    Ille terrarum mihi præter omnis
    Angulus ridet, ubi non Hymetto
    Mella decedunt viridique certat
    Baca Venafro ;

    Ver ubi longum tepidasque præbet
    Iuppiter brumas, et amicus Aulon
    Fertili Baccho minimum Falernis
    Invidet uvis.

    Ille te mecum locus et beatæ
    Postulant arces ; ibi tu calentem
    Debita sparges lacrima favillam
    Vatis amici.

    « […] Rien n'égale pour moi cette aimable retraite :
    Là des verts oliviers les tiens seraient jaloux,
    Ô fertile Vénafre, et le miel de l’Hymette
    Est moins pur et moins doux ;
    Là règne un long printemps que Baïa même envie ;
    Là jamais n’ont sévi les hivers rigoureux ;
    Là de Falerne, Aulon, cher à Bacchus,
    Défie les raisins savoureux. […] »

     Horace, Odes [détail des éditions] [lire en ligne], II, 6 (« À Septime »).

    Sports

    Jumelages

    Tarente est jumelée avec :

    Notes et références

    1. (it) Popolazione residente e bilancio demografico sur le site de l'ISTAT.
    2. Carte de situation de Tarente dans les Pouilles Carto-mondo.fr.
    3. Ponte Girevole, Structurae.
    4. Pont National à Brest, Structurae.
    5. Simon Pembroke, Christian Le Roy (traducteur), « Femmes et enfants dans les fondations de Locres et de Tarente », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, volume 25, no 5, 1970, pp. 1240-1270.
    6. Bernard Sergent, Les troupes de jeunes gens et l'expansion indo-européenne, Dialogues d'histoire ancienne, 29-2, 2003, p. 9-27.
    7. Marcel Le Glay, Rome, I. Grandeur et déclin de la République, collection Tempus, éditions Perrin, 2005 (ISBN 978-2-262-01897-9).
    8. Pierre-Yves Biollet, Claire Barat, Michela Costanzi, Les Diasporas grecques du VIIIe s. au IIIe s. avant J.-C., Paris, Dunod, 2012, p. 106.
    9. Source : it:Tempio di Poseidone (Taranto).
    10. Greco, La Grande-Grèce…, p. 93-94.
    11. Rolley, La sculpture de…, p. 369-370.
    12. Source : it:Castello Aragonese (Taranto).
    13. François Alexandre de La Chenaye-Debois, Dictionnaire de la noblesse, t. VI, Paris, chez Antoine Boudet, 1773, p. 665.
    14. Source : it:Palazzo del Governo (Taranto).
    15. « Comment on meurt dans la ville la plus polluée d'Europe », sur Basta ! (consulté le ).
    16. Question écrite.
    17. Article.
    18. Pétition en ligne.
    19. (it) « Dopo condanna, sindaco Taranto si dimette » [archive], La Gazzetta del Mezzogiorno, 25 febbraio 2006 (consulté le )

    Voir aussi

    Bibliographie

    • Pierre Wuilleumier, Tarente des origines à la conquête romaine, Paris, 1939 ; 2e éd., 1970.
    • Emanuele Greco, La Grande-Grèce, Paris, Hachette Livre, 1996.
    • Claude Rolley, La sculpture de Grande-Grèce, 1996.

    Articles connexes

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