L'uranium est le combustible utilisé dans les réacteurs nucléaires des centrales. Il a été utilisé la première fois pour fabriquer la première bombe atomique de l'Histoire qui a été larguée au-dessus de la ville japonaise d'Hiroshima en aout 1945 [1] . Le minerai d'uranium est appelé uraninite ou pechblende [2] . Ce minerai contient plusieurs isotopes de l'uranium (dont les poids atomiques et la radioactivité diffèrent). Au naturel, la proportion d'isotopes fissiles (235U) dans l'uranium est insuffisante pour déclencher la réaction nucléaire ou l'explosion (bombe). C'est pourquoi il faut l'enrichir et il y a alors plusieurs façons de procéder. C'est ce que nous allons voir en détail.

Méthode 1
Méthode 1 sur 7:

Généralités sur l'enrichissement de l'uranium

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    L'uranium doit être enrichi. L'uranium naturel ne contient que 0,7 % d'uranium 235 (235U), le reste étant composé d'un isotope stable, l'uranium 238 (238U) [3] . Dans les réacteurs, on utilise aujourd'hui la fission des atomes d'uranium 235 pour produire un grand dégagement de chaleur. Selon le type de réacteur, il faut des concentrations en 235U différentes.
    • L'uranium utilisé dans les réacteurs modernes doit avoir une concentration en 235U située entre 3 et 5 % [4] . D'anciens réacteurs fonctionnent avec de l'uranium naturel, non enrichi donc (filière française dite « graphite-gaz »). C'est le cas des centrales de Chinon, de Saint-Laurent ou du Bugey en France, de Candu au Canada, de Magnox au Royaume-Uni et de nombre de centrales en Russie [5] .
    • Quant au nucléaire militaire (têtes nucléaires, missiles…), on doit avoir de l'uranium enrichi à plus de 90 % [6] .
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    Il faut d'abord transformer le minerai en gaz. La plupart des procédés d'enrichissement sont basés sur l'utilisation d'un gaz à basse température. Cette transformation du minerai en gaz exploitable s'appelle la « conversion ». Elle se fait en 2 étapes : le minerai devient du tétrafluorure d'uranium (UF4) dans l'usine COMURHEX-Malvési à Narbonne, puis par fluoration, ce dernier est transformé en hexafluorure d'uranium (UF6) dans l'usine COMURHEX du Tricastin, dans la Drôme. Avec ce dernier, il est alors plus facile de séparer les différents isotopes, dont les 235U qui intéressent les centrales.
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    L'étape suivante est l'enrichissement de l'uranium. Le reste de l'article est consacré aux différentes méthodes pour enrichir l'uranium. La diffusion gazeuse (en perte de vitesse) et la centrifugation sont les deux plus connues, mais le procédé de séparation par laser est en passe de devenir la norme [7] .
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    Il faut ensuite convertir l'hexafluorure UF6 en oxyde d'uranium (UO2). En effet, on a besoin pour les réacteurs d'un combustible solide et stable, mais fissile.
    • L'oxyde d'uranium, qui sert de combustible dans les centrales, se présente sous forme de petites pastilles qu'on introduit dans de longs tubes (les « crayons ») de 4 m de long, tous liés et qu'on glisse dans le cœur du réacteur [8] .
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Méthode 2
Méthode 2 sur 7:

Le procédé par diffusion gazeuse

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    Le gaz UF6 est poussé par un compresseur à travers des tuyaux.
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    On force le gaz à passer à travers des parois (membranes) poreuses. La séparation des isotopes se fait sur la base de la différence de masse. Comme l'uranium 235 est plus léger que l'uranium 238, le gaz UF6 emmène avec lui les isotopes légers à travers les membranes (ou diffuseurs), les plus lourdes restant en deçà.
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    Cette opération se répète des centaines de fois (1 400 passages) jusqu'à obtenir la concentration suffisante en 235U. On parle de cascade de diffuseurs [9] .
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    L'hexafluorure d'uranium (UF6) est alors condensé pour prendre une forme liquide. Une fois qu'il est suffisamment enrichi, le gaz est condensé pour avoir une forme liquide. Il est alors stocké, refroidi et solidifié. Réduit à l'état d'oxyde, il est comprimé sous forme de pastilles (combustible de la filière) qui iront ensuite dans des tubes (ou « crayons ») en plein cœur du réacteur.
    • Ce procédé, extrêmement gourmand en électricité, est plus ou moins abandonné aujourd'hui au profit d'autres méthodes plus rentables. L'usine EURODIF du Tricastin en France, qui a fonctionné pendant 33 ans et a été fermée en mai 2012, fonctionnait selon ce procédé [10] .
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Méthode 3
Méthode 3 sur 7:

Le procédé par centrifugation gazeuse

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    Le gaz UF6 est introduit dans des cylindres tournant à très grande vitesse, sous vide, dans une enveloppe étanche.
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    L'UF6 est amené jusqu'à la centrifugeuse par des tuyaux. Les molécules les plus lourdes (238U), sous l'effet de la force centrifuge, sont envoyées à la périphérie du tube tandis que les plus légères (235U) migrent vers le centre.
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    Les gaz sont alors séparés. Le gaz enrichi en uranium 235, au centre du tube, monte. Le gaz enrichi en uranium 238, plus lourd, descend.
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    Les deux gaz sont alors dirigés vers d'autres centrifugeuses. Celui déjà riche en 235U est à nouveau centrifugé, de même que celui ayant moins de 235U. Ce procédé permet de mieux enrichir l'uranium et à moindre cout, comparativement à la diffusion gazeuse [11] .
    • Ce procédé a été mis au point dans les années 1940, mais n'a été utilisé industriellement que dans les années 1960. C'est son moindre cout qui a été l'élément déclencheur [12] . Aujourd'hui, en France, la seule usine d'enrichissement par ultracentrifugation est l'usine Georges Besse II dans le Tricastin [13] . La Russie en a quatre, le Japon et la Chine, deux chacun. Les États-Unis, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l'Allemagne en ont une chacun [14] .
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Méthode 4
Méthode 4 sur 7:

Le procédé par séparation aérodynamique par tuyère

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    Il faut disposer d'un équipement assez similaire à celui de la centrifugation gazeuse, sauf que les cylindres doivent être plus étroits.
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    On injecte alors de l'UF6 dans les cylindres à grande vitesse et selon une trajectoire courbe. Les différents isotopes d'uranium du gaz sont alors séparés : les molécules les plus lourdes (U-238) sont poussées contre la paroi extérieure, tandis que les molécules plus légères (U-235) restent plus près de la piste intérieure.
    • Cette méthode, née en Allemagne, a été développée à des fins militaires dans l'Afrique du Sud de l'apartheid. Le gaz était injecté de façon tangentielle. Actuellement, cette méthode est utilisée pour extraire des isotopes légers de certaines matières [15] .
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Méthode 5
Méthode 5 sur 7:

Le procédé par diffusion thermique

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    On doit liquéfier, à haute pression, l'UF6.
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    On construit une série de tuyaux emboités les uns dans les autres. Ils doivent avoir un certain diamètre pour permettre une bonne séparation des isotopes 235U et 238U.
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    Le tuyau externe est refroidi par de l'eau ou du gaz, tandis que le tuyau interne est chauffé.
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    On injecte ensuite de l'hexafluorure d'uranium liquéfié entre les deux tuyaux ayant des températures différentes.
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    On chauffe donc le tuyau interne en faisant circuler un courant de vapeur. Se créent alors à l'intérieur de l'hexafluorure d'uranium liquéfié des courants de convection (générés par les différences de températures) qui poussent les isotopes légers (235U) contre la paroi du tube chaud et poussent les isotopes lourds (238U) contre le tube froid.
    • Ce procédé a été envisagé en 1940 lors du projet Manhattan (bombe nucléaire américaine). Le procédé a été assez rapidement abandonné au profit de la diffusion gazeuse [16] .
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Méthode 6
Méthode 6 sur 7:

La séparation isotopique électromagnétique (EMIS)

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    L'UF6 doit être ionisé.
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    Ensuite, ce gaz passe à travers un puissant champ magnétique.
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    Après avoir franchi un demi-cercle, le faisceau des atomes d'uranium ionisés est divisé entre une zone plus proche de la paroi extérieure, qui recueille du gaz appauvri et une zone plus proche de la paroi intérieure, qui est enrichie en U-235.
    • C'est cette méthode qui avait été utilisée lors du projet Manhattan qui aboutit à la première bombe atomique larguée sur Hiroshima en 1945. C'est cette même méthode que Saddam Hussein a utilisée pour tenter de créer sa propre bombe en 1992. Demandant 10 fois d'énergie que la diffusion gazeuse, on comprend qu'elle ne peut être utilisée que pour une très petite production d'uranium enrichi [17] .
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Méthode 7
Méthode 7 sur 7:

La séparation isotopique par laser

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    On commence par régler un laser sur une longueur d'onde (monochrome) précise. Cette dernière ne devra dévier que les isotopes de 235U, les atomes de 238U ne seront par contre pas affectés dans leurs trajectoires.
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    On vaporise l'uranium et on éclaire cette vapeur avec le laser. Il n'est pas nécessaire d'avoir de l'hexafluorure d'uranium au départ, même si c'est ce qui se pratique le plus souvent. On peut aussi partir d'un alliage d'uranium et de fer qu'on vaporise. Ce procédé s'appelle la « séparation isotopique par laser sur vapeur atomique de l'uranium » (SILVA).
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    Les atomes de 235U sont alors déviés électriquement vers une zone préétablie. On joue sur la légère différence de spectre électromagnétique entre les atomes 235U et 238U.
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Conseils

  • Certains pays récupèrent les déchets de la fission pour obtenir de l'uranium appauvri et du plutonium. Il faut dans un premier temps éliminer le plus possible d'atomes de 232U et de 236U qui se sont formés durant la réaction nucléaire, mais il en reste toujours. Si ces déchets « nettoyés » sont ensuite enrichis à nouveau, il faut qu'ils le soient à des taux plus importants, car les atomes de 236U résiduels absorbent naturellement les neutrons, lesquels sont à l'origine de la réaction en chaine dans les réacteurs. C'est pour cette raison qu'on ne mélange pas l'uranium traité pour la première fois avec celui qui a été retraité [18] .
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Avertissements

  • L'uranium naturel est faiblement radioactif. Par contre, transformé en UF6, il devient un produit hautement toxique qui réagit au contact de l'eau, de l'humidité pour former de l'acide fluorhydrique extrêmement corrosif, puisqu'il est capable de dissoudre le verre [19] . Parce qu'elles utilisent du fluor, les usines d'enrichissement de l'uranium ont donc le statut d'usines chimiques à risques (sites classés « Seveso ») et doivent respecter les normes de sécurité légales. Ainsi, l'hexafluorure d'uranium doit être stocké à basse pression et quand il est utilisé à pression normale ou supérieure, il doit circuler dans des enceintes de confinement spécifiques [20] .
  • L'uranium retraité est extrêmement radioactif. C'est dû à la présence de l'isotope artificiel 232U, créé lors de la fission. Sa dangerosité provient de ses émissions de rayons gamma extrêmement pénétrants [21] .
  • L'uranium de retraitement, concentré sous forme liquide, peut être reconverti en gaz UF6 en vue de son réenrichissement pour une nouvelle et seule utilisation [22] .
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Catégories: Chimie
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