Énergie en Égypte
Le secteur de l'énergie en Égypte est marqué notamment par le gaz naturel et le pétrole, mais aussi par la production hydroélectrique du Haut barrage d'Assouan, par le projet de centrale nucléaire d'El-Dabaa et par le développement récent des énergies éolienne et solaire.
Extraction de combustibles fossiles
L'Égypte est un producteur significatif d'hydrocarbures, représentant 0,7 % de la production mondiale de pétrole et 1,5 % de celle de gaz naturel en 2018[1]. Le pays ne produit pas de charbon, et n'en importe qu'une petite quantité destinée à la sidérurgie.
Pétrole
Le pétrole Égyptien est principalement extrait dans le golfe de Suez et le long de ses rives. Ce bassin pétrolier, exploré dès la fin XIXe pour sa partie onshore, a révélé son principal gisement en 1965. Les roches sources sont des calcaires du Campanien[2]. L'exploration et la production dans cette région sont dominés par Gulf of Suez Petroleum (GUPCO), une compagnie conjointe de l'Egyptian General Petroleum Company et de BP (Amoco avant leur fusion). C'est une région mature, dont la production a fortement diminué, néanmoins de petites découvertes y sont encore effectuées et le potentiel semble intéressant pour la récupération assistée du pétrole.
L'autre région productrice de pétrole se situe dans le désert Libyque.
En , la compagnie italienne ENI annonce la découverte de réserves de pétrole dans le bassin de Faghur situé dans le désert occidental égyptien. L'exploitation de ce gisement produit 2 300 barils/jour de pétrole d'huile légère. ENI associé à Egyptian General Petroleum Corporation (EGPC) produisent au total 55 000 barils/jour dans le désert occidental égyptien[3].
Gaz naturel
Les réserves de gaz naturel de l'Égypte sont estimées par BP à 2 100 milliards de mètres cubes fin 2018, au 16e rang mondial avec 1,1 % du total mondial ; elles représentent 36,5 années de production au rythme de 2018. Elles ont progressé de 110 % en dix ans. La production de gaz naturel a bondi de 20 % en 2018, atteignant 58,6 millions de mètres cubes[1].
Outre le gaz associé des bassins pétrolier, l'Égypte possède une importante province gazière dans le Delta du Nil et son extension offshore. La région possède plusieurs séquences de roches-sources, le gaz serait en partie biogénique[4].
Le groupe italien Eni a annoncé le la découverte du gisement offshore de gaz naturel Zohr, qualifié « champ de gaz super-géant », en Méditerranée, dans les eaux territoriales de l’Égypte. Selon Eni, « il s’agit de la plus grande découverte de gaz jamais faite en Égypte et en mer Méditerranée ; elle pourrait devenir l’une des plus grandes réserves de gaz naturel au monde ». Le gisement a été découvert à une profondeur de 1 450 mètres, à environ 190 kilomètres de Port Saïd. Il pourrait représenter un potentiel de 850 milliards de mètres cubes, soit l’équivalent de 5,5 milliards de barils équivalents pétrole. Les opérations de développement du gisement devraient durer quatre ans[5].
Commerce, transformation et consommation de combustibles fossiles
Commerce et transit du pétrole
Longtemps exportateur (fournissant plusieurs pays d'Europe), l'Égypte est devenu un importateur net de pétrole vers 2010, les courbes de production et de consommation se croisant. L'Arabie Saoudite est son principal fournisseur, mais en , à la suite de désaccords géopolitiques entre Riyadh et le Caire concernant la Syrie et le Yémen, l'Arabie Saoudite a suspendu ses livraisons[6].
L'Égypte a une importance en tant que point de transit de pétrole. De nombreux pétroliers (ainsi que des méthaniers) transitent par le canal de Suez, typiquement sur la route du golfe persique vers l'Europe ou l'Amérique du Nord. En outre, l'oléoduc sumed transporte du pétrole de Ain Soukhna sur la mer Rouge à Alexandrie. Les plus grands pétroliers, qui ont un tirant d'eau trop important pour le Canal quand ils sont à pleine charge, se débarrassent d'une partie de leur cargaison à Ain Soukhna et se remplissent à nouveau à Alexandrie. En 2013, 3,2 millions de barils/jours ont ainsi transité vers la Méditerranée par le canal, et 1.4 via le Sumed. Un flux plus petit, notamment de produits raffinés, emprunte le canal dans l'autre sens[7].
Raffinage
L'Égypte possède selon BP une capacité de raffinage de 840 000 barils/jours. Les neuf raffineries sont réparties comme suit[8].
Situation approximative | Capacité kb/j | Compagnie |
---|---|---|
Alexandrie | 78 | Amiriyah Petroleum Refining Company |
Alexandrie | 117 | Alexandria Petroleum Company |
Alexandrie | 100 | Middle East Oil Refinery |
Suez | 146 | El-Nasr Petroleum Company |
Suez | 66 | Suez Petroleum Processing Company |
Ras Abu Rudeis | 9 | El-Nasr Petroleum Company |
Assiout | 47 | Asyut Petroleum Refining Company |
Tanta | 35 | Cairo Petroleum Refining Company |
Mostorod, Le Caire | 145 | Cairo Petroleum Refining Company |
La raffinerie de Mostorod est en cours d'agrandissement.
Consommation de carburants
La consommation de pétrole s'établit en 2018 à 760 000 bl/j, elle a augmenté de 11 % depuis 2008[1]. Cette hausse suit pour l'essentiel celle de la population, qui a augmenté de 40 % dans la même période[9]. Le pays exporte du naphta et du kérosène, mais importe de l'essence, du fioul lourd et surtout du gasoil[10].
Exportations et importations de gaz
L'Égypte a commencé à exporter du gaz vers la Jordanie en 2003, avec la construction du premier segment du gazoduc arabe d'Arish à Aqaba[11]. D'une capacité annuelle de 10 milliards de mètres cubes, il a ensuite été prolongé par étapes jusqu'en Syrie. Il tend néanmoins à fonctionner de manière intermittante, étant visé par de multiples attaques.
L'autre gazoduc international part également d'Arish et se termine à Ashkelon en Israël. Inauguré en 2008, il a permis pendant quelques années d'exporter du gaz vers ce pays. Cependant, à la suite de la découverte d'importantes réserves de gaz en Israël (Tamar 2, Léviathan notamment), et au déclin de la production égyptienne, le flux du pipeline a été récemment renversé, Israël exportant désormais vers l'Égypte[12].
S'agissant du gaz naturel liquéfié, deux terminaux d'exportations ont été construits :
- SEGAS LNG, à Damiette, a expédié sa première cargaison en 2005[13].
- Egyptian LNG, à Idku, a ouvert son premier train en 2005 et le deuxième en 2009[14].
Néanmoins, ces terminaux ont eu une durée de vie brève : face au manque de gaz dans le pays, la priorité a été donnée au marché interne, et SEGAS LNG a été fermé en 2013[15]. Le terminal d'Idku a de son côté été converti en terminal d'importation, et l'Égypte approvisionne maintenant d'importantes quantité de gaz sur le marché du GNL[16].
Néanmoins, en 2018, une fois le vaste gisement Zohr mis en service, le pays devrait cesser ses importations de gaz[16].
Secteur électrique
Selon les estimations de BP[1], la production d'électricité de l'Égypte atteint 200 TWh en 2018, en progression de 55 % par rapport à 2008. Environ 90 % de la production est assurée par des centrales thermiques utilisant du gaz naturel (80 %) ou pour quelques-unes du pétrole (11 %), le reste étant assuré essentiellement par les barrages hydroélectriques (7 %). Éolien et solaire subviennent à une part encore marginale, mais rapidement croissante, de la demande.
Le réseau électrique égyptien est relativement clos, il existe des connexions de capacité limité avec la Jordanie et la Libye. Mais le projet d'une connexion HVDC de forte capacité (3 000 MW) avec l'Arabie saoudite a été annoncé fin 2017[17].
Centrales thermiques
Le gros de la consommation électrique du pays est fourni par des centrales thermiques. En 2014, les centrales au gaz ont absorbé environ 26 milliards de m³ de gaz (1,08 EJ) et produit 135 TWh, auxquels s'ajoutent 21 Twh produits à partir de fioul lourd. Il n'existe aucune centrale à charbon dans le pays[18], mais une, gigantesque (6 000 MW), est en projet sur la Mer Rouge[19]. En outre, une immense centrale à cycle combiné de 4 800 MW (ce qui la placera parmi les plus grandes du monde) est, en 2016, en construction à Beni Suef[20].
Production
La production hydroélectrique de l'Égypte a atteint 13,1 TWh en 2018, au 4e rang en Afrique avec 9,5 % de la production africaine, derrière le Mozambique : 14,4 TWh, la Zambie : 13,65 TWh et l'Angola : 13,5 TWh. La puissance installée des centrales hydroélectriques égyptiennes totalisait 2 876 MW fin 2018, soit 7,9 % du total africain[21].
Barrages d'Assouan
Un premier barrage d'une capacité de près de 600 MW fut construit sur le Nil de 1899 à 1902. Un barrage beaucoup plus grand, le Haut barrage d'Assouan, fut achevé en 1973 et produit 2 100 MW. Bien que construit principalement pour les besoins de l'irrigation, ces deux barrages assurèrent aussi une partie de la production d'électricité du pays. Néanmoins la part de l'hydraulique dans la production du pays a chuté au fil du temps, le total augmentant rapidement.
Éolien
L'Égypte se place au second rang en Afrique avec 1 465 MW fin 2020 ; les nouvelles installations ont été de 13 MW en 2020 contre 262 MW en 2019[22].
L'Égypte se place au second rang en Afrique avec 1 190 MW fin 2018 avec 380 MW de nouvelles installations[23].
L'Égypte possède en 2016 une capacité éolienne de 810 MW ; c'est la 2e du continent après l'Afrique du Sud et devant le Maroc ; l'année 2016 n'a vu aucune nouvelle mise en service[24].
Ce parc devrait s'étendre considérablement, car des contrats pour de nouveaux projets ont été signés, notamment un contrat avec Siemens partant sur 2 000 MW dans douze nouveaux parcs[25].
Solaire
L'énergie solaire est exploitée à Kuraymat depuis 2011 par une centrale hybride : il s'agit d'une centrale au gaz naturel à cycle combiné à laquelle un parc de concentrateurs solaires a été adjoint, relié au cycle vapeur. Cette centrale produit 140 MW dont la part solaire est de 20 MW[26].
L'Égypte a lancé près d'Assouan un méga-projet solaire, le complexe de Benban, qui comprendra 32 centrales solaires d'une puissance totale de 1 800 MW. Le gouvernement a signé le avec la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale, un accord de financement de 653 millions de dollars pour la construction de 13 centrales solaires d'une puissance totale de 590 MW et d'un coût global de 823 millions de dollars. L'Égypte avait auparavant assuré le financement d'une première tranche de six centrales de 50 MW chacune, pour laquelle la BERD avait débloqué 355 millions de dollars. Le gouvernement a fixé comme objectif de produire 20 % de l'électricité du pays à partir d'énergies renouvelables en 2020 et 42 % en 2035[27].
EDF Énergies Nouvelles a annoncé le qu’il allait construire et exploiter avec le groupe égyptien Elsewedy Electric deux centrales photovoltaïques en Égypte, d’une puissance totale de 100 MW, dans le complexe de Benban. La société française Voltalia va également construire dans le même complexe une centrale solaire de 25 MW, baptisée Râ Solar. Ces deux projets sont assortis d’un contrat de vente d’électricité d’une durée de 25 ans signé avec la société égyptienne de transport d’électricité (EETC)[28]. Les centrales sont mises en service en [29].
L'Égypte a installé 1,7 GWc de photovoltaïque en 2019[30].
Nucléaire
Si le pays ne possède actuellement aucun réacteur nucléaire de puissance, la centrale nucléaire d'Anshas est une installation de recherche relativement importante, possédant deux réacteurs de recherche d'origine soviétique et argentine, des installations pilotes d'enrichissement d'uranium, une installation de séparation de radioisotopes à usage médical et d'autres équipements.
L'Égypte et la Russie ont signé le un accord pour la construction de la première centrale nucléaire en Égypte, au financement de laquelle la Russie participera par le biais d'un prêt[31]. La cérémonie officielle de signature par les deux chefs d'État s'est tenue le ; la centrale sera construite à El-Dabaa, à l’ouest d’Alexandrie ; l’accord prévoit la construction de quatre réacteurs ainsi qu’un transfert de technologie et de savoir-faire dans le domaine nucléaire pacifique, pour un coût estimé à 25 milliards de dollars. Le projet avait été conçu en 1981 et un appel d'offres avait été lancé en 1983, mais la catastrophe de Tchernobyl avait sonné le glas de ce projet, qui n'a été réactivé qu'en 2015 par le président Abdel Fattah al-Sissi. Le groupe public Rosatom construira la centrale, livrera le combustible nucléaire, formera les employés, assurera la maintenance et la réparation des unités de production. La centrale devrait être achevée en 2022, pour produire de l'électricité en 2024[32].
Le coût total du contrat est de 30 milliards de dollars, dont 85 % prêtés par la Russie. Les quatre réacteurs seront de type VVER-1200 ; une part importante de la puissance des réacteurs sera directement dédiée au dessalement de l’eau, si bien que la puissance électrique par unité sera réduite à 927 MWe ; la première unité est prévue pour entrer en service en 2026[33]. La construction du premier réacteur de la centrale a débuté officiellement le 20 juillet 2022[34].
Quant aux ressources minières en uranium, des travaux de prospection ont été menés avec succès, révélant plusieurs gisements potentiellement exploitables dans le désert oriental et le Sinaï[35].
Émission de CO2
Les émissions de CO2 liées à l'énergie s'établissent en 2016 à 204,8 Mt (millions de tonnes). Le niveau par habitant reste assez bas, à 2,14 t/an : 49 % de la moyenne mondiale[36]. Mais il progresse rapidement : +57 % depuis 1990 contre +12 % en moyenne mondiale[37].
Articles connexes
Notes et références
- (en) [PDF] BP Statistical Review of World Energy 2019 - 68th edition, BP, 11 juin 2019.
- S.J. Lindquist, « Document de l'USGS » (consulté le )
- (en) Jean-Guy Debord, « Eni announces an oil discovery in the Faghur Basin in Egyptian Western Desert », sur www.euro-petrole.com (consulté le )
- « Evaluation de l'USGS » (consulté le )
- Un gisement géant de gaz découvert en Méditerranée, Les Échos du 31 août 2015.
- Reuters Editorial, « Saudi oil shipments to Egypt halted indefinitely, Egyptian officials say », sur Reuters, (consulté le )
- « World Oil Transit Chokepoints - International - Analysis - U.S. Energy Information Administration (EIA) » (consulté le )
- « Overview of Egypt’s Oil Refineries », sur Egypt Oil & Gas (consulté le )
- (en) « Statistical Yearbook - Population »,
- Tableaux de données de l'Agence internationale de l'énrgie
- (en) « Arab gas pipeline agreement », Gulf Oil & Gas, (lire en ligne, consulté le )
- « Egypt to import gas from Israel via EMG pipeline », sur مدى مصر (consulté le )
- (en) « Egypt's SEGAS LNG Startup », EGAS, (consulté le )
- « Idku » (consulté le )
- (en) « Egypt Overview », EIA, (lire en ligne, consulté le )
- « Egypt to Import $2.4b in LNG during 2017 - EGYPT PETROLEUM SHOW » (consulté le )
- « Egypt Plans Power Link to Saudis in $1.6 Billion Project », sur Bloomberg.com (consulté le )
- « IEA - Report » (consulté le )
- Agence Ecofin, « Egypte : des banques investiront 1,5 milliard $ dans la centrale à charbon d’Hamrawein (6 000 MW) », sur Agence Ecofin (consulté le )
- « Beni Suef Combined Cycle Power Plant », sur Power Technology (consulté le )
- (en) [PDF] 2019 Hydropower Status Report (page 100), Association internationale de l'hydroélectricité (IHA), 13 mai 2019.
- (en) « Global Wind Report 2021 » [PDF], Global Wind Energy Council (GWEC), , p. 53
- (en) « Global Wind Report 2018 » [PDF], Global Wind Energy Council (GWEC),
- [PDF] (en) « Global Wind Statistics 2016 », Global Wind Energy Council (GWEC),
- « Siemens secures 2GW turbine deal in Egypt », (consulté le )
- « NREL », (consulté le )
- L'Égypte va réaliser le plus grand complexe solaire d'Afrique à Benban, Le 360 - média digital marocain, 30 octobre 2017.
- EDF va construire deux centrales solaires en Égypte, Libération, 26 octobre 2017.
- « ÉGYPTE : EDF et Elsewedy Electric connectent deux parcs solaires de 130 MW à Benban », sur Afrik 21, (consulté le )
- (en) 2020 Snapshot of Global PV Markets, Agence internationale de l'énergie-PVPS, 29 avril 2020.
- Egypte:accord pour la 1ere centrale nucléaire, Le Figaro, 19 novembre 2017.
- Poutine et al-Sissi signent un accord pour la 1ère centrale nucléaire égyptienne, RFI, 11 décembre 2017.
- La Russie construira la première centrale nucléaire égyptienne, Société française d'énergie nucléaire, 2 janvier 2018.
- Eldabaa-1 Under Construction, Pris AIEA, 19 août 2022
- « Présentation devant l'AIEA » (consulté le )
- (en) [PDF] Agence internationale de l'énergie (AIE - en anglais : International Energy Agency - IEA), Key World Energy Statistics 2018, 19 septembre 2018.
- (en) CO2 Emissions from Fuel Combustion 2018 Highlights - excel file, Agence internationale de l'énergie, 8 novembre 2018.
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